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Culte de rentrée avec Bernard Reymond auteur de « Le protestantisme et Calvin. Que faire d’un aïeul si encombrant ? » Labor et fides, 2008 Parmi les nombreux livres édités à l’occasion de l’année Calvin, cet ouvrage du professeur honoraire de théologie pratique de l’Université de Lausanne sort du lot et détonne par son propos. L’auteur en effet avoue d’emblée qu’il n’aurait guère aimé vivre dans la Genève de Calvin et qu’il y aurait été certainement taxé de « libertin », c’est-à-dire de quelqu’un de profondément attaché à la liberté en ce qui concerne la foi et le gouvernement de soi-même. J’imagine que Bernard Reymond a été étonné, peut-être choqué même - nous le lui demanderons à l’occasion de sa présence à la journée de rentrée de notre Eglise - par l’ampleur des manifestations organisées à l’occasion du cinq centième anniversaire de la naissance de Calvin, irrité aussi par le fait qu’on attribue tant d’importance à l’héritage laissé par le Réformateur qu’on aime à présenter comme un père de « la modernité » dans de nombreux domaines : théologique et ecclésiastique bien sûr, mais aussi économique, politique, culturel et social. Devant ce risque de « calvinolâtrie », l’auteur tente de remettre Calvin « à sa place », une place certes importante, l’auteur ne le nie pas, mais pas primordiale. Pour ce faire, il ne propose pas une biographie de plus de Calvin, mais il va montrer en des pages alertes, à la plume élégante, la « réception » de Calvin dans le protestantisme, du XVIème siècle à nos jours, à savoir comment les protestants se sont réclamés de l’héritage de Calvin ou s’en sont éloignés. D’abord, il rappelle à juste titre que Calvin n’est pas, contrairement à Luther et Zwingli, un réformateur de la première génération. Il a reçu les idées fondamentales de la Réforme, et a eu un certain don pour les systématiser. Il a surtout créé un régime ecclésiastique très structuré, ce qui était nouveau pour l’époque. De son temps, Calvin était un réformateur parmi d’autres, pas forcément le plus important. Bernard Reymond souligne notamment l’influence souvent méconnue de Bullinger, le successeur de Zwingli à Zurich, dans une grande partie de l’Europe. Notre auteur montre aussi que la plupart des coreligionnaires de Calvin émettaient de sérieuses réserves sur sa manière de présenter la doctrine de la « prédestination », au point même que ses livres et traités étaient interdits dans le canton de Vaud, pourtant lui aussi réformé ! Reymond ne passe pas sous silence l’affaire Servet, dont Calvin a approuvé la mise à mort pour cause d’hérésie, et ne se satisfait pas de l’excuse trop facile qui affirme que c’était l’époque qui était violente et intolérante. Notre auteur de citer des pages magnifiques de Castellion, un contemporain de Calvin, sur la tolérance religieuse. En fait, Calvin se révèle être beaucoup plus « archaïque » que « moderne » dans ces questions. Bernard Reymond montre ensuite, dans un remarquable survol historique, comment le protestantisme s’est peu à peu « décalvinisé ». Et il est vrai que le protestantisme contemporain a des origines plurielles et est influencé tout autant, voire plus, par les « Lumières », le piétisme ou le « libéralisme théologique » que par le Réformateur de Genève. A la fin de cet ouvrage très stimulant, Bernard Reymond donne des pistes pour relire Calvin aujourd’hui, avec un esprit critique, en le resituant dans le contexte de son époque et en n’oubliant pas que depuis Calvin des pages ont été tournées, avec notamment le développement de la science, l’entrée en scène des sciences humaines et le fait que nous vivons dans une société multiculturelle et multireligieuse. Une invitation à relire Calvin… avec intelligence, qui est peut-être le plus bel hommage qu’on puisse rendre à Calvin lui-même ! Nous aurons le plaisir de recevoir Bernard Reymond pour notre journée de rentrée le samedi 5 septembre. L’après-midi, il nous présentera son livre et nous pourrons alors réagir à ces propos et ouvrir la discussion ! Puis, il prêchera lors de notre culte de rentrée à la Stadtkirche d’Aarau. Michel Cornuz