Diagnostic(s) N° 3 - Coe

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Diagnostic(s) N° 3 - Coe
Revue de Coe-Rexecode
Éditorial
• Moins de dette publique
passe par moins de dépense
Conjoncture et prévision
• Perspectives de l’économie mondiale
2007-2008
• Positionnement cyclique des économies
Analyse structurelle
• Quelles perspectives de croissance
pour l’Amérique latine à moyen terme
• Marché européen : compétitivité hors prix
des biens de consommation
Point de vue
• Trend or cycle? On the causes of the improved
economic performance in Germany
AVRIL 2007 • N°3
Sommaire
Coe-Rexecode est un centre d’observation et de recherches économiques tourné vers les entreprises.
Les 80 adhérents correspondants de Coe-Rexecode comptent de grandes entreprises industrielles, des
banques, des organismes de gestion financière, des fédérations professionnelles et des administrations.
Coe-Rexecode assure un suivi conjoncturel permanent de l’économie mondiale et des prévisions économiques à l’attention de ses adhérents, sous la forme de réunions régulières, de publications et d’un
accès à un centre de documentation. La participation au débat public de politique économique, soutenue par des membres associés (institutionnels), la Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris et des
membres partenaires (entreprises) constitue la seconde mission de Coe-Rexecode. Elle prend la forme
de publication de travaux d’études spécifiques.
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DIAGNOSTIC(S) : Publication du Centre d'Observation Economique et de Recherches pour l’Expansion
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Imprimeur : PDI IMPRIMERIE 2-4 rue de Bourgogne - 95310 St-Ouen l'Aumone, N° ISSN : en cours,
Dépôt légal : juillet 2006, Prix : 60 euros TTC (quatre numéros par an)
Éditorial
Michel DIDIER
Moins de dette publique
passe par moins
de dépense
Le rapport Pébereau (« Rompre avec la facilité
de la dette publique », La Documentation
Française, 2005) a ramené le sujet de la dette
publique dans le débat économique. Les résultats de l’année 2006 font apparaître un recul
du poids de la dette publique de 66,2 % du PIB
le 31 décembre 2005 à 63,9 % du PIB à la fin
2006. Comment interpréter ce recul ? S’agit-il
d’un ajustement isolé ou d’un début d’inversion de la tendance ? Pour l’instant, la dette est
endiguée mais le recul de 2006 tient pour l’essentiel à des opérations de bilan. Pour aller audelà, il faudra une action de longue durée sur
l’ensemble des dépenses publiques.
Pour l’année 2006, le déficit de l’ensemble
des administrations publiques notifié par le
gouvernement français à la Commission européenne s’est élevé à 2,5 % du PIB, après
4,1 % en 2003, 3,6 % en 2004 et 3,0 % en
2005. Le besoin de financement public est
donc en réduction pour la troisième année
consécutive. Cette réduction doit plus à la
hausse des recettes qu’à la baisse des dépenses. Le total des recettes publiques (recettes
fiscales, sociales et diverses) a représenté
51,0 % du PIB en 2006. Il a retrouvé son
niveau de 1999 après avoir reculé jusqu’à
49,2 % en 2003. Le mouvement de hausse de
2003 à 2006 résulte de l’augmentation des
prélèvements obligatoires, qui représentent la
plus grande partie des recettes publiques. Le
taux des prélèvements obligatoires de 2006
(44,4 % du PIB) est le plus élevé depuis 2000.
L’année 1999 était à 44,9 % du PIB. Le point
le plus bas de la période récente se situait à
42,9 % du PIB en 2003. Ces fluctuations tiennent en partie aux variations du taux de croissance économique, en partie aux mesures
concernant la fiscalité et les prélèvements
sociaux.
L’amélioration du besoin de financement
public, depuis le creux de 2003 (déficit de
4,1 % du PIB), s’explique donc par la remontée du taux des prélèvements obligatoires.
Aucune réduction du poids de la dépense
publique (en pourcent du PIB) n’est intervenue et l’essentiel de l’augmentation des prélèvements a porté sur les entreprises.
Un point surprenant est le recul de la dette de
l’ensemble des administrations publiques
dans le courant de l’année 2006 alors que le
déficit s’est encore élevé à 2,5 % du PIB. Le
PIB nominal a augmenté de 4,2 %. Le taux
d’intérêt des emprunts publics à long terme a
été en moyenne sur l’année de 3,8 %, à peine
moins élevé que l’accroissement du PIB nominal. Cela ne suffit pas pour diminuer la dette
publique. C’est « au-dessous de la ligne » que
la réduction de la dette a été acquise par une
réduction de la trésorerie de fin d’année d’un
peu moins de 30 milliards (moins de passif et
moins de disponibilités) et par des cessions de
titres (moins de passif et moins d’actifs réels).
1
La compression de trésorerie ne peut être réalisée qu’une seule fois. Quant aux privatisations, les masses restantes pourraient porter
principalement sur les entreprises du secteur
de l’énergie et à plus long terme sur les secteurs de transports mais elles ne sont pas à la
hauteur de la réduction de dette qui paraît
souhaitable. L’un des défis des années à venir
sera de poursuivre la réduction de la dette,
mais cette fois « au-dessus de la ligne ».
A partir d’un niveau particulièrement élevé
des prélèvements obligatoires en 2006 (proche du niveau le plus élevé du passé), la politique économique s’oriente vers des allègements afin de réduire l’écart avec la moyenne
européenne. Dans ce contexte, une plus
grande maîtrise de la dépense publique est
désormais incontournable. La dépense totale
des administrations publiques représentait
(en 2006) 53,7 % du PIB contre 47,5 % en
moyenne dans la zone euro, soit un écart de
2
6,2 points de PIB. La moitié de l’écart est dû
aux dépenses de fonctionnement courant des
administrations dont le coût est en France
supérieur d’environ 20 %à la moyenne de la
zone euro. Une comparaison de l’emploi
public (rapporté à la population totale) donne
un écart du même ordre qui correspond à
environ un million d’emplois publics en plus
en France (à taille de pays comparable). Pour
les autres dépenses courantes, c’est-à-dire
pour les transferts liés à la redistribution (la
plus large part concerne les dépenses à caractère social) l’écart est de 2,5 points de PIB
(28,7 % du PIB pour la France, 26,2 % pour
la zone euro). L’effort d’économie devrait
donc porter à la fois sur l’emploi public et sur
les dépenses de redistribution. Pour ces dernières dépenses, la question de l’organisation
institutionnelle est importante. Les différences d’organisation de la redistribution expliquent en effet en partie l’écart de dépenses
publiques entre pays.
Conjoncture et
prévision
5
Perspectives de l’économie mondiale
2007-2008
Coordonné
par Denis Ferrand et Alain Henriot
27 Positionnement cyclique des économies
Jacques Anas
Conjoncture et prévision
Perspectives de l’économie
mondiale 2007-2008
Coordonné par Denis Ferrand et Alain Henriot1
La croissance de l’économie mondiale devrait un peu ralentir en 2007 et
2008, tout en restant sur un rythme nettement supérieur à la tendance de
long terme. Pour l’essentiel, cette décélération s’expliquerait par une croissance américaine plus modérée, en liaison avec l’ajustement du marché immobilier. La croissance européenne, qui s’est accélérée, reviendrait progressivement vers son potentiel, après une période particulièrement favorable.
os perspectives retiennent un léger
tassement de la croissance mondiale en 2007. Ce tassement, qui ne
s’accentuerait pas en 2008 (4,5 % en
2007 comme en 2008, après 5,3 % en
2006), est déjà assez largement acquis. Il
concernerait l’ensemble des régions du
monde : les Etats-Unis (2,6 % en 2007 après
3,3 % en 2006), la zone euro (2,0 % en 2007
après 2,6 %), ainsi que les pays hors OCDE
(7,0 % en 2007 après 8,1 % en 2006). En termes relatifs, il toucherait plus nettement les
pays développés que les pays émergents. Le
prix du pétrole serait stabilisé au voisinage de
60 dollars le baril. L’inflation resterait faible
et retrouverait un niveau de moins de 2 %
tant aux Etats-Unis qu’en Europe.
N
La France connaîtrait une croissance en retrait
de la moyenne européenne, comme ce fut déjà
le cas en 2006, un décrochage qui reflète
notamment une perte de parts de marché.
1
Modération attendue
de la croissance mondiale
en 2007 et 2008
Poussée d’inquiétude
sur les marchés financiers
Une secousse brutale a touché les marchés de
capitaux à la fin février. En quelques jours, le
yen s’est apprécié de 3 % par rapport à l’euro
et au dollar. Les cours des actions ont reculé
de 4 % en moyenne sur les principales places. Des masses importantes de capitaux se
sont reportées sur les marchés obligataires,
entraînant une baisse des taux d’intérêt à
long terme. La volatilité s’est accrue sur tous
les marchés. Cette subite bouffée d’inquiétude des opérateurs financiers est la seconde
en moins d’un an. La première avait été effacée assez rapidement par la croissance persistante de l’économie mondiale et par le recul
Ont également participé à la rédaction de ce document : J.M. Boussemart, C. Deneuve, S. Duchassaing,
C. Lespagnol, V. Perracino et O. Reymondon.
5
Conjoncture et prévision
du prix du pétrole un peu surprenant dans un
contexte de croissance forte. Il est moins évident que l’hésitation des opérateurs sera
cette fois levée aussi rapidement qu’au printemps dernier. On sent bien, d’une part, que
la période d’expansion générale commence à
rencontrer quelques obstacles, mais d’autre
part, on constate aussi que les facteurs favorables n’ont pas fondamentalement changé.
Une grande inertie
de la croissance mondiale
Les signes de solidité de la croissance mondiale ne manquent pas : fermeté des prix des
matières premières, remontée récente du prix
du pétrole, accélération du rythme de la production mondiale d’acier et d’aluminium à la
fin de l’année dernière, poursuite à un
rythme élevé de la production industrielle
agrégée des pays les plus importants, commerce mondial toujours en forte expansion.
Dans certaines régions du monde, l’expansion se poursuit sans véritable menace identifiable. C’est le cas de l’Europe, du Japon et
de certains pays émergents. Dans d’autres
régions, les signes (ou les risques) de baisse
du régime de croissance se sont un peu renforcés. C’est notamment le cas des Etats-Unis
et dans une certaine mesure de la Chine.
Baisse de régime
de l’économie américaine
Il se confirme que la tendance de la croissance américaine est revenue à environ 2 %
l’an ou un peu plus au second semestre 2006.
Le recul des mises en chantier de logement a
été particulièrement violent. Le risque d’une
récession aux Etats-Unis avant la fin 2007,
évoqué par Monsieur Greenspan, a contribué
à déstabiliser les marchés d’actions. Ce risque existe dans la mesure où le taux d’épargne des ménages étant négatif, ceux-ci peuvent à tout moment réduire drastiquement
leur consommation. Mais la probabilité d’un
tel scénario nous paraît rester faible à horizon visible, les ressorts profonds de l’économie américaine étant plus vigoureux qu’il n’y
paraît même si la purge immobilière n’est pas
finie et si son impact sur le reste de l’économie est loin d’être encore totalement digéré
Les stocks sont bas
Au quatrième trimestre, le ralentissement de la
formation de stocks a amputé la croissance à
hauteur de plus d’un point (taux annuel). Ce
phénomène ne peut être récurrent. Il y a eu
antérieurement hausse involontaire des stocks
mais pas de façon exagérée et ces derniers
Chiffres clés des perspectives
2006 2007 2008
1 - Croissance du volume du PIB (%)
Monde
5,3 4,5
4,5
Etats-Unis
3,3 2,6
2,8
Japon
2,2 2,3
2
Zone euro à 12
2,8 2,1
1,9
Union européenne à 15
2,9 2,2
2,0
Allemagne
2,9 1,9
1,9
Royaume-Uni
2,7 2,5
2,0
Italie
1,9 1,5
1,6
Espagne
3,8 3,4
2,6
Pays hors OCDE
8,1 7,0
6,7
2 - Marchés mondiaux
Commerce mondial (volume)*
9,9 7,3
Prix du pétrole ($/baril, Brent)** 65,2 59,6
Prix des matières premières*** ($) 26,8 13,2
8,1
60,0
0,8
2006 2007 2008
3 - Taux de change
1$
= …yen
116
116
110
1 euro= …dollars
1,26
1,3
1,25
1£
= …$
1,84
1,95
1,79
4 - Taux d'intérêt à 3 mois
Etats-Unis (bons du Trésor)
Japon (euro-yen)
Zone euro (euribor)
5,2
0,3
3,1
5,2
0,7
4,0
4,4
1,0
3,9
5 - Taux d'intérêt à 10 ans
Etats-Unis
Japon
Zone euro
4,8
1,7
3,9
4,7
1,8
4,2
4,8
2,2
4,3
6 - Taux d'inflation***
Etats-Unis
Japon
Zone euro
3,2
0,2
2,2
1,8
0,2
1,7
2,1
0,8
1,6
* taux de variation annuel (%) ** moyenne annuelle *** hors énergie
6
Perspectives de l’économie mondiale 2007-2008
sont plutôt bas. Depuis le début de la reprise,
la variation trimestrielle des stocks est ressortie en moyenne à 0,3 % du PIB (en valeur
comme en volume), soit à un rythme inférieur
à la moyenne historique. Selon les comptables
nationaux, l’encours des inventaires relativement au PIB, stagne à ses plus bas si l’on
considère les volumes et ne s’est que modestement redressé si l’on s réfère aux les valeurs.
Il faut attendre pour le premier semestre 2007
un effet positif des stocks sur l’activité.
La consommation des ménages
et les exportations se portent bien
Etats-Unis :
mises en chantier de logements
2300
Milliers par an
2000
1700
1400
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007
Source : Census
Au quatrième trimestre, la consommation des
ménages en volume s’est fortement accrue (+
4,2 % en rythme annualisé). Certes, le taux
d’épargne demeure négatif, mais la situation
patrimoniale nette des ménages reste excellente, représentant 5,7 années de revenu disponible au 31 décembre dernier. Il est vraisemblable que la consommation va se modérer
sous l’effet d’un redressement du taux d’épargne mais ceci s’opèrerait graduellement et non
brutalement. Elle progresserait de 3,2 % en
2007 et de 2,6 % en 2008. En volume, les
exportations de biens et services, favorisées
par la baisse antérieure du dollar contre la
majorité des devises et notamment l’euro, ont
progressé au rythme de 10 % l’an au quatrième trimestre. Les exportations de marchandises exprimées en valeur ont cessé de reculer
depuis deux ans relativement à celles des 54
principaux pays exportateurs et le taux de couverture des échanges de produits non énergétiques continue de se redresser. Il est probable
cependant que la demande extérieure nette ne
va pas continuer de s’améliorer comme elle l’a
fait au quatrième trimestre avec une contraction du volume des importations non extrapolable qui a amplifié l’effet positif venant du
dynamisme des ventes à l’étranger. Il est vraisemblable néanmoins qu’elle va réserver des
surprises agréables et contribuera à soutenir
l’activité. Déficitaire à concurrence de 6,4 %
du PIB, la balance courante pourrait présenter
un déficit représentant 5,5 % du produit intérieur en 2007 et 5,3 % en 2008. Ceci devrait en
principe soutenir le dollar.
La purge immobilière n’est pas finie,
elle est cependant bien avancée
En volume, la FBCF logement a encore baissé
au rythme de près de 20 % l’an au quatrième
trimestre. Sa part dans le PIB est passée de
5,5 % à 4,6 %, s’affichant désormais 0,2
point en dessous de sa moyenne tendancielle.
Le recul n’est probablement pas fini. Le stock
de logements à vendre dans le neuf comme
dans l’ancien demeure important et l’ajustement doit se poursuivre, mais le nombre de
logements invendus a déjà baissé et le
rythme des mises en chantier est passé sous
sa norme de long terme. La baisse du volume
de la FBCF logement se poursuivrait jusqu’à
l’été prochain, ramenant le taux d’investissement à 4,2 %. Il se stabiliserait ensuite, avant
de connaître une légère amélioration au
second semestre 2008.
L’investissement productif hésite
L’une des surprises des comptes du quatrième
trimestre a été la baisse de l’investissement
des entreprises qui a concerné les biens
d’équipement et aussi la construction non
résidentielle, tandis que le taux de marge fléchissait. Cependant, une érosion des marges
des entreprises dans cette phase du cycle n’est
pas anormale. L’hypothèse d’un redémarrage
de l’investissement des entreprises, certes
modéré, demeure donc probable. Au total,
7
Conjoncture et prévision
nous anticipons une croissance du volume du
PIB de 2,6 % cette année et de 2,8 % l’an prochain, inférieure à la croissance potentielle de
sorte que les pressions sur le marché du travail
se relâcheraient un peu, autorisant à compter
de l’automne prochain un début d’assouplissement de la politique monétaire. Graduellement, la courbe de taux se normaliserait par
le recul de sa partie courte, les taux à dix ans
ne continuant pas de baisser, se redressant un
peu pour osciller autour des 4,8 %. Sous-évalué vis-à-vis de l’euro, le dollar ne devrait plus
se déprécier vis-à-vis de la devise européenne
même si l’écart positif entre les taux d’intérêt
américains et européens est encore appelé à se
réduire.
Des signes
de surchauffe en Chine
Avec une hausse du PIB de 10,7 %, la Chine
a connu en 2006 sa plus forte croissance
depuis dix ans. Si la demande intérieure a
progressé vivement (de l’ordre de 10 %), les
exportations ont augmenté de 18,6 %, soit
plus du double de la hausse de la demande
mondiale adressée à ce pays L’excédent de la
balance commerciale a, pour sa part, atteint
un nouveau record en 2006, en s’établissant
à 177,8 milliards de dollars.
Chine :
encours de crédits domestiques
30
Glissement annuel en %
25
20
15
La Chine se distingue par un poids très élevé
de l’investissement dans le PIB (45,8 % en
2006) D’ailleurs, la contribution à la croissance du PIB de l’investissement a été l’an
dernier environ deux fois supérieure à celle
de la consommation (+6,6 % contre +3,5 %
en 2006). Conscientes des risques de surchauffe inhérents à cette progression très
rapide de l’investissement, les autorités chinoises ont décidé de la ralentir. Différentes
mesures administratives ont ainsi été instaurées courant 2006 : un contrôle plus rigoureux des projets d’investissement, une limitation de ces derniers dans les secteurs jugés en
surchauffe comme l’immobilier ou, enfin,
une possibilité accrue d’investissement à
l’étranger. Parallèlement, la Banque centrale
chinoise a resserré ses conditions monétaires,
tandis que le taux des réserves obligatoires a
également été relevé. Ces mesures ont semblé
porter leurs fruits puisque, selon les chiffres
officiels des autorités chinoises, la progression des investissements en actifs fixes est
passée d’un glissement annuel de 30 % avant
l’été à 24,5 % fin 2006. Ce rythme est néanmoins encore très soutenu, l’accroissement
de la quantité de monnaie reste d’ailleurs
toujours très important.
Le processus de durcissement des conditions
monétaires se poursuivrait, ce qui se traduirait par une croissance du PIB un peu plus
faible, qui reviendrait à hauteur de 9 % pour
2007 et 8,5 % en 2008, en liaison avec une
modération de l’investissement. Cependant,
la consommation ne décélèrerait pas à l’horizon 2008. Les exportations pourraient pâtir
du ralentissement prévu de l’économie mondiale. Par ailleurs, les pressions, notamment
américaines, pour une appréciation plus
rapide du renminbi (+2,7 % en 2006) pourraient se concrétiser cette année, ce qui pèserait aussi sur les ventes chinoises.
Japon : maintien
d’une croissance autour de 2 % l’an
10
5
2001
2002
Source : FMI
8
2003
2004
2005
2006
2007
La croissance japonaise est ressortie à 2,2 %
en 2006. Elle a été soutenue par des exportations toujours très bien orientées et un inves-
Perspectives de l’économie mondiale 2007-2008
tissement productif en légère accélération. En
revanche, la consommation privée peine toujours à se redresser. Pour les deux années à
venir, le PIB en volume progresserait de
2,3 % en 2007 et 2 % en 2008.
Un peu moins d’investissement
productif et d’exportations…
Un ralentissement de l’investissement productif interviendrait au premier trimestre
2007, mais il ne devrait pas s’accentuer par la
suite. Certes, l’excédent brut d’exploitation
des sociétés (EBE) non financières a reculé
au quatrième trimestre mais cette baisse fait
suite à une envolée au printemps et à l’été.
Quatre années de hausse consécutive de
l’EBE ont conduit le taux de marge à un point
haut au troisième trimestre 2006. Les entreprises disposent donc d’abondants « cash
flows » pour financer leurs dépenses en capital. Elles ont par ailleurs besoin d’investir, le
taux d’utilisation des capacités de production
étant au plus haut, renouant avec les niveaux
qu’il avait connu fin 1991. Cependant, l’efficacité marginale du capital productif ayant
cessé de progresser pour s’infléchir légèrement, les risques d’une situation de « surinvestissement » resurgissent. L’investissement
productif ne progresserait que de 6 % en
2007 puis 5 % en 2008 contre 7 % par an en
2005 et 2006.
Depuis la reprise de 2002, les exportations de
biens et services en volume ont progressé de
10 % par an en moyenne. Elles ont bénéficié
d’une forte dépréciation du taux de change
effectif réel du yen en 2005 et 2006 (près de
20 % en deux ans). Cette dépréciation est
d’autant plus remarquable que l’excédent
courant japonais s’est de nouveau accru en
2006 pour ressortir en moyenne annuelle à
170 milliards de dollars.
Même si l’’indice des prix à la consommation
ne montre pas de signes de redressement
notable, la Banque du Japon devrait poursuivre son processus de normalisation monétaire. L’hypothèse retenue est une hausse
supplémentaire de 50 points de base sur la
période 2007-2008 en ligne avec une crois-
sance au-dessus de son rythme tendanciel
mais n’allant pas en accélérant. L’écart de
taux d’intérêt entre, d’une part, le Japon et,
d’autre part, les Etats-Unis et la zone euro se
réduirait donc. Le taux de change du yen
contre le dollar reviendrait aux alentours de
110 yen pour un dollar et de 138 yen pour un
euro dès début 2008. Par conséquent, si le
rythme de progression des exportations resterait supérieur à celui de la demande mondiale
s’adressant au Japon en 2007, l’écart s’annulerait en 2008. En outre, elles pâtiraient du
ralentissement de l’investissement en Chine.
… et un peu plus de consommation
privée
Sur l’ensemble de l’année écoulée, la progression de la consommation privée sera restée
modeste et cela malgré une hausse de l’emploi. Il est vrai que les salaires mensuels
réels, après un début d’année plutôt prometteur, ont de nouveau stagné tout au long du
second semestre 2006. En 2007, le partage de
la valeur ajoutée serait plus favorable aux
salariés, ce qui conduirait la consommation
privée à progresser à un rythme un peu plus
soutenu à partir du printemps.
Une croissance encore forte
dans les pays émergents
Globalement, bien que devant se modérer un
peu, la croissance resterait soutenue dans les
pays émergents.
Solidité des économies asiatiques
En 2007, la croissance des pays émergents
d’Asie se modérerait à 7,8 %, en raison du
ralentissement attendu chez les deux géants
asiatiques. Outre des perspectives de croissance un peu en retrait déjà évoquées pour la
Chine, le taux de croissance de l’économie
indienne reviendrait à 8 % en 2007 et 7,8 %
en 2008. Contrairement à la Chine, l’Inde est
confrontée à un déficit commercial important
(54 milliards de dollars en 2006). La pour9
Conjoncture et prévision
suite d’une telle dérive comporte un risque
de sanction sur la monnaie, comme ce fut le
cas en 1990. Les autorités s’efforceront d’éviter un tel ajustement en prenant des mesures
restrictives.
Pour les autres pays asiatiques, la croissance
globale pourrait s’élever à 4,6 % en 2007 et
2008. Les pays dont la demande interne est
dynamique pourraient continuer d’observer
une croissance solide. Surtout, dans un
contexte de prix du pétrole stabilisé, l’inflation de ces pays refluerait légèrement, ce qui
pourrait permettre davantage d’assouplissements monétaires. En revanche, les pays dont
la croissance est avant tout tirée par le commerce extérieur seraient pénalisés par le
ralentissement chinois. L’appréciation quasi
généralisée des devises asiatiques face au
dollar et au yuan qui s’est opérée en 2006
pèse également sur leur compétitivité.
Atterrissage en douceur
en Amérique latine
En Amérique latine, région qui tend traditionnellement à amplifier à la baisse les phases de ralentissement du cycle mondial, un
atterrissage en douceur semble se profiler. Le
ralentissement de la croissance mondiale et
la modération du cours des matières premières devraient certes peser sur la croissance
régionale, qui passerait de 4,9 % en 2006 à
4,3 % en 2007 et 3,9 % en 2008. Mais ils
n’ont toutefois pas une intensité suffisante
pour mettre un terme brutal au cycle de
croissance soutenu qui a été amorcé à la mi2003.
La région semble de surcroît mieux armée
que précédemment pour résister aux chocs
externes. Tous les pays de la zone auraient
continué à dégager des excédents courants en
2006, à l’exception de la Colombie et du
Mexique, où les déficits restent cependant
modérés. Les gouvernements ont mis à profit
l’accroissement des réserves de change
depuis deux ans pour réduire et améliorer la
structure de leur dette externe, et sont même
parfois devenus créditeurs nets en devises
(Brésil, Mexique et Venezuela). D’une
10
manière générale, les finances publiques
montrent presque partout des signes d’assainissement et la discipline budgétaire a été
globalement maintenue. Les autorités monétaires sont également parvenues dans l’ensemble à garder l’inflation sous contrôle.
Seuls l’Argentine et le Venezuela semblent
engagés sur des trajectoires difficilement soutenables. L’ampleur des surplus budgétaires
(Argentine) ou des actifs détenus par le gouvernement (Venezuela) et de confortables
excédents courants limitent les risques de
crise majeure à court terme. Toutefois, les
stratégies hétérodoxes mises en place par les
gouvernements pour contenir l’inflation
(encouragement des importations via des
subventions gouvernementales, assouplissement du système de contrôle des changes,
baisse de la TVA en 2007 et changement
d’unité monétaire à partir de 2008 au
Venezuela ; gel des prix et plafonnement des
salaires en Argentine) risquent de montrer
leur limite d’ici à fin 2008 dans un contexte
où les tensions sur les capacités sont fortes et
où les politiques budgétaires restent très
expansionnistes.
Une croissance un peu moins forte
en Europe de l’Est
A l’exception de la Hongrie où le PIB en
volume n’aurait progressé « que de 4 % », les
pays d’Europe de l’Est ont connu une progression de leur activité en 2006 proche de
6,5 %, voire supérieure pour certains. En
2007 et 2008, le PIB en volume de la zone
agrégée devrait se modérer un peu en ligne
avec une croissance mondiale et européenne
moins dynamique. Le moindre dynamisme
des exportations n’obérerait toutefois pas la
croissance, la demande intérieure restant
bien orientée. Pour l’ensemble de la zone,
l’activité progresserait de 5,7 % en 2007 puis
de 5,4 % en 2008. Seul le PIB en volume hongrois connaîtrait un ralentissement marqué
en raison du plan d’austérité budgétaire mis
en place à l’automne dernier.
La demande intérieure continuerait à bien se
tenir même si les rythmes de progression
Perspectives de l’économie mondiale 2007-2008
dans les pays se modéreraient en ligne avec
un marché du travail un peu moins porteur
et un rythme d’investissement plus modéré.
Si l’inflation est restée contenue en Pologne
et en République tchèque l’an passé, elle a
en revanche accéléré en Slovaquie et surtout
en Hongrie, suite à un relèvement de la TVA
et des prix administrés du fuel en septembre.
En 2007, l’inflation continuerait à accélérer
en Hongrie et plus modérément en
République Tchèque en raison d’une hausse
des prix administrés (gaz et électricité) et
des droits d’accise. Par conséquent, le resserrement monétaire pourrait se poursuivre en
2007.
Si les déficits courants se sont creusés en
2006 dans la majorité des pays d’Europe de
l’Est, ces derniers n’ont pas rencontré de difficultés de financement. Quant à la Russie,
son excédent courant s’est de nouveau accru
de plus de 12 milliards de dollars. Cet excédent devrait toutefois se replier un peu en
2007 puis en 2008 sous l’effet de la stabilisation du prix du pétrole.
Des cours des produits
de base encore tendus
En 2007, la croissance des capacités d’offre
de pétrole brut devrait rester soutenue et le
marché correctement approvisionné, notamment grâce aux pays non membres de l’OPEP,
comme la Russie. Ceux-ci devraient voir leur
production s’accroître de 1,2 mb/j d’après
l’AIE, chiffre certainement largement surestimé. Mais au regard d’une croissance de la
demande que nous estimons proche cette
année de 1,3 mb/j et d’une hausse des capacités de production de l’OPEP supérieure à
0,6 mb/j, le cartel pourrait être amené à réviser une nouvelle fois sa politique des quotas
courant 2007. Les capacités inutilisées de
production (excluant les pays à risque) se
sont d’ailleurs accrues, atteignant 2,5 mb/j.
Ces capacités disponibles n’ont pas été aussi
élevées depuis novembre 2002 et pourraient
rassurer les marchés. Les prix devraient ainsi
se stabiliser autour de 60 dollars le baril en
2007 et 2008.
Si, mesurée sur un an, la progression des cours
en dollar des autres matières premières n’accélère plus, elle reste rapide. C’est surtout le nickel,
dopé par la forte demande d’acier inoxydable
chinoise, qui ne cesse de battre de nouveaux
records. Les marchés des produits agricoles
pourraient bien surprendre à nouveau en 2007,
du fait d’une demande mondiale soutenue.
L’Europe installée
dans la croissance
L’année 2006 restera un bon cru pour la zone
euro, avec une croissance du PIB de 2,8 %, un
niveau inconnu depuis 2000 et qui excède de
1,5 point la moyenne des cinq dernières
années.
Retour vers la croissance
potentielle en zone euro
Le léger passage à vide observé au troisième
trimestre se sera ainsi révélé temporaire, la
croissance redevenant très soutenue au quatrième trimestre. Les enquêtes de conjoncture
donnent l’image d’une croissance de la zone
euro qui devrait rester proche, voire légèrement supérieure à son potentiel courant
2007, excepté au premier trimestre où le PIB
allemand sera affecté par un contrecoup des
achats effectués en 2006 par anticipation.
Zone euro :
croissance du PIB et climat de confiance
En %
Points d'écart-type
3
PIB (glissement annuel)
(échelle de gauche)
Climat de confiance
(échelle de droite)
2
1
0
-1
-2
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007
Source : Eurostat et Commission européenne
11
Conjoncture et prévision
Les tensions sur l’appareil productif
vont-elles générer un surcroît d’inflation ?
Grâce au redressement de l’activité observé
l’an dernier, la zone euro a réduit l’output
gap négatif qui avait été généré par cinq
années de croissance molle. Le taux d’utilisation des capacités de production dans l’industrie manufacturière donne même une
image d’un appareil productif encore plus
tendu, en s’approchant de son pic précédent
qui datait de l’année 2000. Le bon côté de
cette phase de relative tension sur l’appareil
productif est qu’elle génère de l’investissement, et plus spécifiquement des investissements destinés à accroître les capacités de
production, comme en témoigne la bonne
tenue de l’investissement en construction
non résidentielle. En revanche, ce contexte de
capacités de production pleinement utilisées
peut laisser craindre l’apparition de tensions
inflationnistes, et ce d’autant que, de son
côté, le marché du travail est également plus
tendu.
Les prix à la production du marché intérieur
sont bien sur une pente ascendante pour les
biens d’équipement et les biens de consommation durables. Mais, autour de 2 % sur un
an, leur rythme de progression reste modeste
au regard des pics observés dans les années
1990. Les prix des biens intermédiaires sont
sur une pente plus prononcée (de l’ordre de
6 % l’an), une hausse qui reflète en partie
celle des prix des produits de base. Dans le
même temps, l’inflation, au niveau des prix
de détail, est restée remarquablement maîtrisée. Depuis le début de l’année 2007, elle est
demeurée sous la barre des 2 %. Cela s’explique par une modération des prix de l’énergie, mais aussi par une stabilisation de l’inflation sous-jacente à un niveau très faible
(1,5 % sur un an fin 2006). La pression baissière exercée sur les prix par la concurrence
internationale et le caractère structurel de
l’érosion des prix dans le secteur des nouvelles technologies concourent à ce phénomène.
Du côté salarial, il est probable qu’un marché
du travail plus tendu suscite une légère accélération des rémunérations, notamment
outre-Rhin. Mais jusqu’ici les salaires ont
12
progressé à un rythme extrêmement modéré.
La stabilisation des prix du pétrole, qui
devrait permettre à l’inflation de rester durablement sous le seuil des 2 %, qui constitue
le niveau de vigilance de la Banque centrale
européenne, constituerait aussi un rempart
contre l’enclenchement d’une boucle prixsalaire. Il reste que, dans ce contexte, la BCE
devrait continuer à faire preuve d’une
extrême prudence. Après un nouveau relèvement de son taux directeur attendu au début
de l’été 2007 (à 4 %), elle le maintiendrait
inchangé jusqu’à la mi-2008. Un mouvement
baissier n’interviendrait qu’à la fin de l’année
prochaine.
Une croissance proche de son potentiel
en 2007 et 2008
Après la forte progression du PIB au quatrième trimestre 2006, la croissance de la
zone euro se modérerait sensiblement au premier trimestre 2007, essentiellement sous
l’effet de deux facteurs techniques. D’une
part, la consommation des ménages allemands inclura une correction afin de gommer
les achats anticipés, notamment d’automobiles, effectués au cours de la seconde partie de
l’année 2006. D’autre part, l’envolée des
exportations au quatrième trimestre 2006, dû
également en grande partie à un aléa sur les
données allemandes, ne peut être extrapolée.
Au-delà de ces aspects techniques, la croissance de la zone euro devrait revenir autour
de son potentiel qui est encore évalué à environ 2 % l’an. Le raffermissement de la croissance de la zone euro en 2006 est largement
imputable à une forte accélération des exportations, dont le rythme de croissance a pratiquement doublé (+8,1 % en 2006 contre
4,4 % en 2005 pour les biens et services en
volume), et ce en dépit de la fermeté de
l’euro. Courant 2007, le moteur extérieur
devrait perdre un peu de sa vigueur, d’une
part en raison d’une moindre progression de
la demande mondiale et, d’autre part, suite
aux effets décalés de l’appréciation de l’euro,
notamment contre le yen.
De ce point de vue, en dépit des tensions sur
les capacités évoquées plus haut, l’investisse-
Perspectives de l’économie mondiale 2007-2008
ment devrait s’adapter à une activité un peu
moins soutenue. Un ajustement interviendrait notamment du côté de la construction
résidentielle, comme le reflète une érosion du
climat des affaires dans ce secteur depuis
l’automne dernier. Le tassement des crédits à
l’habitat et l’inflexion des permis de
construire militent également pour une perte
de dynamisme des mises en chantier de logements.
La consommation des ménages, qui n’a pas
été la composante la plus vigoureuse de la
croissance l’an dernier, devrait connaître une
progression autour d’un rythme de 2 % l’an
en 2007 et 2008. Certes, les ménages bénéficieraient cette année d’une modération de l’inflation, grâce à une évolution moins pénalisante
des prix des produits pétroliers. Mais la croissance de l’emploi, qui a gagné en intensité
courant 2006, décélérerait progressivement.
Le taux de chômage au plus bas
depuis vingt ans
Cela n’empêcherait pas le chômage de continuer à baisser, bien que plus lentement qu’en
2005 et 2006. Passé sous la barre des 7,5 %
début 2007, le taux de chômage est ainsi au
plus bas depuis vingt ans. Au total, le PIB
progresserait de 2,1 % en 2007 et de 1,9 % en
2008. Après le creux temporaire du premier
trimestre, la croissance s’installerait sur une
pente proche de 2 % l’an pendant une grande
partie de l’exercice de prévision. Une accélération progressive pourrait intervenir sur la
seconde partie de 2008, dans le sillage d’un
environnement extérieur plus favorable, lié
notamment à un léger affaiblissement de
l’euro.
Renouveau allemand
La croissance allemande a atteint 2,9 % en
2006 (données corrigées des jours ouvrables), un rythme qui n’avait plus été observé
depuis 2000. Outre des exportations très sou-
tenues, l’activité a bénéficié d’une accélération de l’investissement des entreprises tant
en biens d’équipement que, fait nouveau, en
produits de la construction. En revanche, la
consommation privée n’a progressé que très
modestement. Le taux de marge des entreprises s’étant fortement redressé au cours des
dernières années, le partage de la valeur
ajoutée serait plus en faveur des salariés en
2007 et en 2008, ce qui permettrait à la
consommation privée de retrouver des couleurs. Certes, la hausse de la TVA a provoqué
un vif recul des ventes au détail et tout particulièrement des achats de véhicules. Si le
rebond attendu de la consommation privée
en fin d’année dernière en raison d’achats
anticipés avant le relèvement du taux de TVA
n’a pas eu lieu, le recul des dépenses des
ménages en ce début d’année est donc en
revanche déjà observable dans les indicateurs
conjoncturels disponibles. Pour autant, la
consommation privée ne devrait pas être
durablement plombée par la hausse de la
TVA. D’une part, la situation sur le marché
du travail s’est nettement améliorée au cours
des derniers mois. Début 2007, l’emploi intérieur total a de nouveau progressé et a
dépassé son point haut de mai 2001. Le taux
de chômage est tombé à 9,3 % en février
2007, contre 11,4 % en février 2006. D’autre
part, l’accélération de l’inflation a été nettement moindre que celle anticipée. Par conséquent, les ménages bénéficieraient d’une
véritable hausse de leur pouvoir d’achat en
2007 d’autant que les entreprises pourraient
enfin accorder des hausses salariales après
trois années de recul du salaire horaire réel.
Au total, la croissance avoisinerait 2 % en
2007 et 2008, soutenue également par l’investissement des entreprises et des exportations
qui continueraient à bien se tenir. Autre
bonne nouvelle pour l’économie allemande,
le déficit des administrations publiques a été
nettement révisé à la baisse pour l’année
2006 : - 1,7 % du PIB contre une estimation
précédente à 2,3 % suite à une hausse des
taxes de 7,5 % (contre 2,4 % en 2005). Une
légère réduction devrait encore intervenir en
2007 et 2008.
13
Conjoncture et prévision
L’Italie rebondit
Sur l’ensemble de l’année 2006, la croissance
est ressortie à 1,9 % selon les comptes
annuels. C’est de loin la meilleure performance qu’ait connue l’Italie depuis six ans.
Le rebond de la croissance est imputable tant
à la demande interne qu’externe. Le rythme
de croissance de la consommation des ménages a plus que doublé entre 2005 et 2006 tandis que l’investissement a renoué avec des
variations positives. En effet, après un recul
en 2005, la FBCF totale a crû de 2,4 % en
2006, ce redémarrage procédant d’une accélération conjointe des dépenses en construction, en équipements et en matériel de transport. Les exportations ont, elles aussi, nettement progressé en 2006 après le repli de 2005.
Conséquence directe de cette embellie, le
taux d’utilisation des capacités de production
s’est sensiblement redressé courant 2006,
dépassant de trois points sa moyenne de longue période au second semestre. Ce point
constitue d’ailleurs un facteur encourageant
pour la dynamique des dépenses d’équipement qui pourraient continuer de soutenir la
demande cette année et en 2008.
De son côté, la consommation a été stimulée
par une baisse du taux d’épargne et un
recours plus marqué au crédit. Pour autant,
l’année 2007 serait marquée par un freinage
de la consommation. En effet, les ménages
pâtiront d’une fiscalité alourdie, ce qui les
inciterait à relever leur taux d’épargne. La
mise en place du nouveau barème de l’impôt
sur le revenu ponctionnera davantage les
ménages les plus aisés, tandis que de nouveaux prélèvements taxeront les biens immobiliers hérités et certains produits d’épargne.
Au total, la ponction fiscale supplémentaire
atteindrait 8 milliards d’euros, si l’on inclut
l’augmentation des cotisations sociales des
travailleurs indépendants. Certes, d’autres
facteurs soutiendront la demande, à commencer par la poursuite de la désinflation.
Les ménages continueraient aussi de bénéficier d’un marché du travail porteur. Le taux
de chômage poursuit son recul, même si les
créations d’emploi ont ralenti sur la seconde
14
partie de 2006. La réduction de la fiscalité sur
le travail permettrait toutefois que le freinage
de la dynamique des embauches ne soit trop
marqué en 2007.
Le raffermissement de l’euro, conjugué au
freinage attendu de l’économie allemande
pourrait peser sur les exportations italiennes.
La récente stabilisation des parts de marché
des industriels transalpins liée à une restauration encore timide de leur compétitivité
intervient au moment où la demande mondiale tend à ralentir. Enfin, les mesures d’austérité budgétaire destinées à ramener le ratio
du déficit public sous la barre des 3 % en
2007 (contre 4,8 % en 2006) amputeraient la
croissance de 0,3 point cette année. Au total,
le PIB croîtrait de 1,5 % cette année et 1,6 %
l’an prochain.
Vers un rééquilibrage
de la croissance espagnole
Nous privilégions un scénario de ralentissement et de rééquilibrage graduel de la croissance espagnole à horizon 2008. Certes, la
nouvelle accélération de l’activité dont ont
fait état les comptes du quatrième trimestre
2006 conduit à réviser à la hausse les prévisions de croissance pour 2007, du fait d’un
acquis plus important. Toutefois, les données
d’enquête suggèrent que l’entrée dans l’exercice en cours se fait sur un rythme un peu
moins soutenu, notamment dans le secteur
des services.
Surtout, le durcissement des conditions
monétaires dans la zone euro s’est à présent
quasiment entièrement répercuté sur les taux
des nouveaux prêts aux ménages et aux
entreprises. Si ce renchérissement des conditions de financement n’a pas encore entraîné
de modération des crédits à la consommation
et des crédits aux entreprises, il commence à
mordre de plus en plus nettement sur la progression des encours de crédits hypothécaire
et des prix du logement, favorisant la poursuite de l’atterrissage sur le marché de l’immobilier résidentiel. Il devrait de surcroît
encore alourdir la charge d’intérêt supportée
Perspectives de l’économie mondiale 2007-2008
par les ménages, majoritairement endettés à
taux variables. Cette contrainte risque de
peser d’autant plus fortement sur le budget
des ménages que leur épargne financière est
à présent négative (-2,9 % du PIB en 2006
selon nos estimations).
contribution des échanges extérieurs nets à la
croissance serait donc moins négative. Au
final, la croissance espagnole passerait de
3,8 % du PIB en 2006 à 3,4 % en 2007 et
2,6 % en 2008.
Consommation et investissement en logement retrouveraient dès lors une croissance
plus en ligne avec celle du pouvoir d’achat
du revenu disponible brut. Celui-ci verrait sa
progression accélérer légèrement en 2007, du
fait de la désinflation lié au reflux des prix de
l’énergie, et des allègements d’impôts qui
dériveront de la réforme fiscale qui doit
entrer en vigueur en 2007. En revanche, en
2008, ces facteurs favorables ne joueront plus
et l’évolution du pouvoir d’achat du revenu
disponible brut sera impactée par le ralentissement de la croissance de l’emploi, qui passerait de 3 % en 2007 à 2,2 % en 2008. Au
final, la progression de la consommation des
ménages atteindrait encore 3,5 % en 2007
mais ne dépasserait pas 2,5 % en 2008.
L’investissement en logement ralentirait
encore plus nettement (+3,6 % en 2007 et
+1,8 % en 2008 après +6,4 % en 2006), la
modération de la hausse des prix du logement ne suffisant pas à empêcher une dégradation croissante de l’accessibilité.
Décélération
de l’économie britannique
Les marges de manouvre existant au niveau
des finances publiques devraient toutefois
permettre une poursuite de la croissance des
investissements en infrastructures en dépit
de la réduction des montants reçus au titre
des fonds structurels. Les administrations
publiques ont en effet enregistré un surplus
budgétaire de 1,8 % en 2006, ce qui confère
de confortables marges de manouvre pour
faire face à un ralentissement de la croissance. Sur le front externe, l’Espagne devrait
être affectée début 2007, comme les autres
pays de la zone euro, par le « choc TVA » allemand, le marché allemand absorbant 11,4 %
de ses exportations. En dépit d’une médiocre
compétitivité, le secteur exportateur devrait
bénéficier d’une évolution un peu plus favorable de l’euro à partir de la mi-2007 et, surtout, début 2008. Dans un contexte où le
ralentissement de la demande intérieure
modérerait la croissance des importations, la
Après une année 2005 atone, la croissance
britannique est ressortie à 2,7 % en 2006 en
moyenne annuelle sous l’effet conjoint, d’une
part, du rebond de la dépense des ménages,
et d’autre part, du dynamisme de l’investissement des entreprises.
La consommation des ménages montre une
évolution en phase avec l’embellie du marché
immobilier qui n’aura finalement connu
qu’une pause au cours de l’année 2005.
L’investissement des ménages ressort en
hausse de 8,7 % en 2006 et l’indice Halifax
du prix des maisons a atteint début 2007 des
taux de progression à deux chiffres.
Néanmoins, les trois relèvements successifs
du taux repo de la banque d’Angleterre entre
août 2006 et début janvier 2007 paraissent
avoir depuis peu quelques effets perceptibles
sur l’économie britannique. D’une part, le
rythme de croissance de la masse monétaire
a légèrement ralenti. D’autre part, l’inflation
qui, malgré le reflux des prix de l’énergie,
avait semblé déraper jusqu’à atteindre 3 %
en décembre sur un an, paraît enfin quelque
peu s’assagir début 2007.
Pour 2007, les risques d’un net ralentissement de l’activité ne peuvent être totalement
exclus mais paraissent néanmoins peu probables. La bonne santé des entreprises britanniques de services justifie la poursuite d’un
rythme d’investissement satisfaisant. Dès
lors, celles-ci devraient être en mesure de
résister à la tendance à l’appréciation de la
livre déjà clairement observable début 2007
(tendance que nous ne prolongeons pas
jusqu’à la fin de l’année), mais également
aux premiers signes perceptibles de ralentissement des exportations à destination de
l’économie américaine. De plus, le scénario
15
Conjoncture et prévision
d’un atterrissage en douceur du marché
immobilier est privilégié. La capacité d’endettement des ménages reste en effet élevée,
malgré un fort effet d’éviction des primo
accédants et des ménages les plus modestes.
Dès lors, l’effet d’entraînement du marché
immobilier sur la consommation domestique
(effet de richesse) jouera plutôt négativement
cette année. La banque d’Angleterre arriverait
à contenir l’inflation qui reviendrait à la fin
de 2007 sur la cible fixée à 2% en rythme
annuel. Un nouveau relèvement de son taux
repo avant l’été 2007 serait nécessaire. Les
évolutions de change que nous envisageons
seraient moins défavorables au commerce
extérieur à partir de la fin de l’exercice 2007
et tout au long de 2008. Mais la dépréciation
de la livre vis-à-vis de l’euro et du dollar
devrait être à peine suffisante pour empêcher
un creusement du déficit de la balance commerciale britannique, favorisé en outre par
une balance énergétique désormais déficitaire. Au total, la croissance du PIB pourrait
atteindre 2,5 % en 2007 et 2 % en 2008.
France : croissance modérée
Le diagnostic conjoncturel de l’économie française qui suit a été réalisé en mars 2007.
Depuis lors, les indicateurs qui ont été publiés
soulignent la solidité de la croissance européenne, laquelle soutient la croissance française. Compte tenu des développements
conjoncturels récents, une révision à la hausse
de nos hypothèses de croissance pour l’économie française (1,8 % en 2007 et 2008) est probable. Par ailleurs, la prévision qui est associée à ce diagnostic ne prend pas en compte
les éléments de politique économique qui ont
été avancés lors de la campagne pour l’élection présidentielle.
Une croissance française
en retrait des performances
européennes
Pour la seconde année consécutive, la croissance française est restée inférieure en 2006 à
16
celle observée dans l’ensemble de la zone
euro. Elle ne paraît pas à même de combler ce
retard en 2007. L’acquis de croissance en
début d’exercice se situe déjà en retrait de
quatre dixièmes de point de PIB en France par
rapport à celui obtenu pour la zone euro du
fait d’une croissance plus faible en fin d’année
que celle observée dans l’Union monétaire.
Plus encore, le plafonnement, sinon le tassement des enquêtes de conjoncture perceptible
dans l’ensemble de la zone euro, paraît plus
accusé dans le cas de la France. Cette observation est particulièrement aigue dans le cas de
l’industrie, secteur pour lequel l’indice synthétique de l’enquête réalisée auprès des directeurs d’achat reste au voisinage de sa
moyenne de longue période dans le cas de la
France quand il continue à la dépasser largement dans l’ensemble de l’Europe. Perceptible
dans les données qualitatives, le décrochage
de l’activité industrielle est encore plus marqué dans les indices d’activité. Entre 2004 et
2006, l’indice de la production industrielle en
France a progressé de 1 % quand il avançait
de 5,2 % dans l’ensemble de la zone euro.
Recul persistant
des parts de marché
Ce décrochage de la croissance reflète pour
l’essentiel le handicap de compétitivité dont
pâtit l’économie française et qui ne s’est toujours pas inversé. Il s’est même plutôt accentué au cours des derniers mois, la part des
exportations françaises dans celles de la zone
euro ne ressortant plus qu’à hauteur de
13,5 % au quatrième trimestre 2006 quand
elles s’inscrivaient à hauteur de 17 % en
moyenne en 1998. Ce décrochage de la compétitivité n’est pas propre à l’industrie. Il s’étend
aux activités de services dont les exportations,
exprimées en valeur, restent en 2006 à un
niveau inférieur à celui observé en 2002.
Outre que l’environnement mondial et européen pourrait s’avérer moins porteur début
2007 qu’au cours de l’exercice passé, ce handicap de compétitivité paraît devoir rester le
principal frein à une franche reprise de l’activité en France. Qui plus est, les exportations
Perspectives de l’économie mondiale 2007-2008
françaises ont été soutenues de manière quasiexclusive par les ventes à destination de
l’Allemagne pendant la seconde partie de l’année écoulée. Or celles-ci ont marqué le pas au
cours des derniers mois en ligne probablement
avec l’arrêt des achats effectués en anticipation de la hausse de la TVA intervenue outreRhin début 2007. En conséquence, et dans un
contexte où l’appréciation présente de l’euro
viendrait peser sur la compétitivité prix des
exportations françaises, la croissance de ces
dernières en volume resterait encore sensiblement inférieure à celle de la demande mondiale en 2007 et à nouveau, mais dans une
moindre ampleur en 2008. L’écart négatif qui
s’observe entre progression des exportations
et de la demande mondiale de biens et services adressée à la France depuis 2001 se prolongerait ainsi, occasionnant de nouvelles pertes
de parts de marché. Du reste, les industriels
ont fait état récemment d’une nouvelle dégradation de leur position compétitive sur quelque marché que ce soit (marché mondial, de
l’Union européenne ou marché intérieur).
Vers un atterrissage
du secteur de la construction
Un second moteur d’activité et de l’emploi
pourrait progressivement faire défaut au cours
de l’exercice 2007, voire 2008. Les signes de
ralentissement dans le secteur immobilier et
de la construction résidentielle se sont multipliés au cours des derniers mois : tassement
des permis de construire et recul des mises en
chantier de logements depuis un an, plafonnement du chiffre d’affaires dans les activités
immobilières comme des flux de nouveaux
crédits à l’habitat et allongement des délais
d’écoulement des stocks. Si une baisse générale des prix dans l’immobilier résidentiel ne
semble pas encore d’actualité, les conditions
d’un atterrissage sont désormais réunies. Le
recours à certains expédients comme un nouvel allongement de la durée des prêts immobiliers ne viendrait qu’atténuer l’ampleur de
cet atterrissage dans un contexte de remontée
graduelle des taux d’intérêt (+ 46 points de
base pour les taux moyens sur les crédits nouveaux à l’habitat d’une échéance supérieure à
un an en janvier 2007 par rapport à l’année
précédente).
Enfin, l’entrée dans un cycle électoral prolongé du fait de la succession d’élections
nationales puis municipales en 2007 et 2008
risque d’exercer un effet sédatif sur les dépenses d’investissement effectuées par les administrations publiques. Or, au cours des quatre
derniers exercices, ces dépenses ont exercé
une contribution positive à la croissance à
hauteur d’un dixième de point de PIB chaque
année, contribution qui ne s’observera probablement plus au cours de ces deux années. Les
dépenses d’investissement public se modéreraient ainsi significativement, sans pour
autant se retourner à la baisse en 2007, avant
de rebondir quelque peu fin 2008.
Une progression
de la consommation en ligne
avec celle du pouvoir d’achat
Handicapée sur le plan extérieur, la (faible)
croissance française continuerait de trouver
ses ressorts au sein de sa demande interne. A
l’inverse du tassement très progressif de leurs
dépenses d’investissement qui s’est observé
tout au long de l’exercice passé et que nous
prolongeons sur l’horizon de la prévision, les
ménages n’ont pas entamé le dynamisme de
leurs dépenses de consommation. En début
d’année, les achats de produits manufacturés, exprimés en moyenne mobile sur trois
mois ont même à nouveau rebondi à 11,3 %
l’an en février. De fait, le pouvoir d’achat du
revenu disponible des ménages serait soutenu par le paquet fiscal 2007 (versé en début
d’année pour ce qui concerne la baisse attendue de l’impôt sur les revenus) qui portera
sur un montant total équivalent à 0,5 point
de RDB, d’une part, et par la modération
attendue de l’inflation en ligne avec le recul
des prix des produits énergétiques, d’autre
part. Toutefois, le contexte de remontée de
taux aidant, l’incitation à la réduction de l’effort d’épargne comme au recours à l’endettement paraît fléchir. En conséquence, le
rythme de progression de la consommation
des ménages se rapprocherait de celui de
17
Conjoncture et prévision
l’avance du pouvoir d’achat de leur revenu
après l’avoir systématiquement dépassé au
cours des trois derniers exercices. La progression du pouvoir d’achat du revenu disponible
resterait à nouveau légèrement supérieure à
celle du PIB prolongeant ainsi la situation qui
s’observe en moyenne depuis 2001 (à l’exception de l’exercice 2003). Il serait soutenu
notamment par une progression encore forte
de l’emploi, forte relativement à la croissance
somme toute modérée que nous attendons
pour les deux exercices, mais également par
une progression un peu plus vive des salaires
sous l’effet d’une « redilatation » progressive
de l’échelle des salaires. L’écrasement de cette
dernière observée depuis dix ans à la suite des
relèvements successifs du SMIC opérés au
cours des dernières années s’inverserait ainsi
très lentement.
Le taux d’investissement
productif vers un niveau record
La progression des dépenses d’investissement des sociétés resterait pour sa part comprise dans la bande étroite qu’elle connaît
depuis 2004. En l’état des informations disponibles, les comptes des sociétés non financières se seraient à nouveau dégradés en 2006,
les profits bruts des sociétés non financières
(avant distribution de dividendes) reculant
de 3,8 % en moyenne annuelle en 2006 après
déjà -5 % en 2004 et -0,5 % en 2005. Les
principaux ratios de résultats dégagés par les
sociétés non financières restent pour leur
part au voisinage d’un niveau plancher. Cette
situation relève du registre d’une quasiexception française dans le concert européen.
En effet, seules les sociétés non financières
18
françaises et italiennes ont vu leur taux de
marge reculer au cours de la période de basses eaux conjoncturelles qui a été observée
de 2000 à 2005 (dernier point connu pour la
zone euro). Outre que le repli de l’investissement productif a été bien moins prononcé en
France que celui observé dans l’ensemble de
la zone euro au cours de cette même période,
c’est probablement dans cette situation que
doivent être recherchées les explications à la
progression certes régulière mais lente des
dépenses d’investissement productif. Pour
autant, la progression de 3,8 puis 3,1 % de
ces dépenses que nous attendons respectivement pour 2007 et 2008 conduira à positionner fin 2008 le taux d’investissement
(exprimé en valeur) des sociétés au voisinage
de ses niveaux records touchés en 1980 et
1990. Par ailleurs, les variations de stocks ne
pèseraient plus sur la croissance ainsi que
cela a été le cas en 2006.
Dans un contexte de croissance molle ouvrant
peu de marges de manœuvre pour la politique
budgétaire, et sous réserve de l’introduction
d’une nouvelle soulte non anticipée pour
l’heure sans parler du résultat des élections
présidentielles, le solde des administrations
publiques afficherait en 2007 un déficit à hauteur de 2,7 % du PIB (après 2,5 % en 2006)
avant qu’il ne revienne à 2,5 % en 2008. Après
avoir atteint un point haut à 44,4 % en 2006,
le taux de prélèvements obligatoires se stabiliserait à hauteur de 44 % du PIB.
Achevé de rédiger le 1er avril 2007
Denis Ferrand - [email protected]
Alain Henriot - [email protected]
Cet article est basé
sur les données connues au 13 mars 2007
Perspectives de l’économie mondiale 2007-2008
Un bilan provisoire de l’emploi en France
Amorcée à l’été 2003, la progression de l’emploi s’est sensiblement accélérée en France durant
l’année 2006. Selon les premières estimations issues des comptes nationaux, 226 000 emplois
ont été créés durant l’exercice écoulé, soit une progression de 0,9 % pour une croissance du PIB
de 2 %. D’autres estimations fournies par la DARES et l’INSEE, dans sa note de conjoncture du
mois de mars, évaluent à 252 000 le nombre de postes créés en 2006. Cette progression est la
plus vive observée depuis 2001 quand 293 000 emplois avaient été créés durant ce seul exercice. A lui seul, le secteur marchand non agricole a créé 186 000 emplois en 2006, 60 000 l’ont
été dans le secteur principalement non marchand et 20 000 postes auraient été perdus dans le
secteur agricole (chiffre provisoire).
Au sein du premier ensemble, les activités industrielles ont à nouveau perdu 62 000 emplois en
2006. A l’inverse, le secteur du bâtiment et des travaux publics en a créé 73 000 et celui des services marchands 175 000. Depuis le précédent creux des effectifs totaux observé à l’été 2003,
446 000 emplois nets ont été créés, tous secteurs confondus. Parmi ceux-ci 175 000 postes nets
l’ont été dans le secteur de la construction, soit un accroissement de 11,4 % des effectifs de ce
secteur. A l’inverse, depuis le creux de l’été 2003, l’industrie manufacturière (y compris agro-alimentaire) a perdu un peu moins de 300 000 emplois nets, soit une contraction de 8,3 % de ses
effectifs. Qui plus est, cette baisse avait été amorcée bien avant l’été 2003. Depuis son précédent point haut touché au printemps 2001, l’industrie a perdu 481 000 emplois directs, soit 13 %
de ses effectifs d’alors. Le secteur des services marchands a créé pour sa part 442 000 emplois
nets depuis l’été 2003, soit un gonflement de ses effectifs à hauteur de 3,8 %.
Une des originalités de la période récente est la forte reprise des créations d’emplois non salariés (10 % des effectifs totaux environ). Alors que ce type d’emploi reculait d’environ 60 000 postes par an en moyenne de 1990 à 2002, principalement sous l’effet du recul de l’emploi non salarié agricole, 16 000 postes non salariés auraient été créés en 2006 après déjà 32 000 en 2005.
Depuis l’été 2003, les créations nettes d’emploi non salariés ont été de l’ordre de 77 000, contribuant ainsi à un peu moins d’un cinquième des créations nettes totales d’emploi. Un tiers de ces
créations nettes d’emplois non salariés ont été effectuées dans le bâtiment et les travaux publics
(+27 000 emplois non salariés, soit +12 %).
Cette tendance n’est pas sans lien avec la bonne tenue des créations d’entreprises. Elle trouve
également pour écho un nombre croissant de chômeurs bénéficiaires de l'ACCRE. Cette aide
aux chômeurs créateurs ou repreneurs d’entreprises a concerné 80 300 personnes sur l'ensemble de l'année 2006 après 71 100 en 2005 et 66 500 en 2004.
Le nombre d’emplois aidés (y compris formation en alternance) s’est accru pour sa part de
35 000 durant l’année écoulée après 11 000 courant 2005. Au total, nous estimons à 1 161 600
le nombre de contrats d’emplois aidés, définis au sens large, fin 2006, soit 4,5 % de l’emploi
total. 294 000 d’entre eux sont dans le secteur principalement non marchand. Ces derniers ont
été en progression de 25 000 postes courant 2006 après -20 000 en 2005. L’emploi aidé dans le
secteur marchand aurait pour sa part progressé de 9 000 postes courant 2006.
Cette création de 226 000 postes en 2006 doit être mise en parallèle avec le recul du nombre
de chômeurs (au sens du BIT). Entre les quatrièmes trimestres de 2005 et de 2006, le nombre de
chômeurs a baissé de 269 000 occasionnant un recul de 1 point du taux de chômage. Le nombre de demandeurs d’emploi en fin de mois (catégories 1 et 6) a reculé pour sa part de 260 000.
En conséquence, la somme des effectifs employés supplémentaires en 2006 et du nombre de
chômeurs (au sens du BIT) en moins aboutit à un recul de la population active de 40 000 personnes en 2006. Cette observation est à comparer avec les projections de population active diffusées par l’INSEE l’été dernier, projections qui retenait une hypothèse de population active tendancielle de 188 000 personnes en plus pour 2006 (+123 000 pour 2007). Pour leur part, les précédentes projections de population active, bien qu’ajustées par l’INSEE et sur la base desquelles est encore assuré le bouclage de la population active, suggéraient une progression de la
population active tendancielle de l’ordre de 29 000 personnes en 2006. Le défaut de bouclage
19
Conjoncture et prévision
En glissement annuel
Moyenne
1991-2003 2004
2005
2006
67
19
-60
24
50
29
41
-40
0
30
(1)
(2)
(3)
(3b)
(4)=(1)+(2)+(3)
Population active tendancielle
Effet "Flexion du chômage"
Effet "Retrait anticipée d'activité"
Effet stages et préretraites
Offre de travail potentielle
200
108
2
-85
14
39
(5)
(6)
(7)=(5)+(6)
Emploi total
Chômeurs au sens du BIT
Population active observée
157
36
200
51
-10
41
167
-102
65
226
-269
-43
(8)=(7)-(4)
Défaut de bouclage
0
2
15
-73
de la population active (avant prise en compte des effets de flexion du chômage et du nombre
de départs anticipés à la retraite) s’étage ainsi de 73 000 personnes à 232 000 selon les projections que l’on privilégie. En 2005, en s’appuyant sur la progression tendancielle de la population
active issue des anciennes projections, le défaut de bouclage était de 8 000 personnes selon la
note de conjoncture de l’INSEE publiée en décembre dernier.
Comment résorber l’écart entre l’évolution de la population active projetée (+188 000 ou
+ 29 000) et celle implicitement observée (-43 000) en 2006 ?
Plusieurs explications ont été avancées :
– le nombre de radiations administratives du nombre de chômeurs aurait accéléré,
– de nombreux chômeurs auraient été reclassés dans des catégories de chômage qui ne
sont pas retenus par l’indicateur habituellement suivi,
– la réforme des retraites se traduirait par d’importantes sorties anticipées du marché du
travail pour les personnes disposant du nombre d’annuités nécessaires pour l’obtention
d’une retraite à taux plein,
– l’effet sur l’emploi du contrat nouvelle embauche (CNE) serait mal pris en compte.
Les éléments précédents apportent certes quelques réponses mais ne permettent pas d’assurer
un bouclage complet entre l’évolution de la population active observée et la population active
tendancielle
1. Le nombre de radiations des listes du chômage n’a pas augmenté significativement en 2006
selon l’enquête « sortants », un peu plus selon les motifs de sortie du chômage pour les chômeurs de catégorie 1.
Selon l’enquête « sortants », enquête réalisée chaque trimestre auprès des demandeurs d'emploi
sortis des listes de l'ANPE le dernier mois du trimestre précédent et dont la dernière livraison porte
sur septembre 2006, au cours des trois premiers trimestres 2006, les sorties des listes du chômage
au titre des radiations administratives auraient concerné 37 400 personnes (en rythme annuel). Au
cours de la même période en 2005, ce nombre était de 37 700 personnes et de 28 200 personnes
durant les trois premiers trimestres de 2004 (25 400 en 2002 et 18 3000 en 2003).
En revanche, la proportion de sortie du chômage pour les chômeurs de la catégorie 1 pour cause
de radiations administratives a été de 10,4 % sur l’ensemble de l’année après 9,6 % en 2005 et
9,9 % en 2004. Les radiations administratives auraient été au nombre de 462 000 sur l’ensemble
de l’année après 418 000 en 2005. Plus que l’effet « radiations », c’est surtout du côté des sorties pour cause d’absence au contrôle que la dérive a été soutenue, du moins par rapport à 2002.
2. Les changements de catégories des chômeurs ne paraissent pas non plus exercer une
influence déterminante. En 2006, le nombre de demandeurs d’emploi en fin de mois a baissé
dans toutes les catégories de chômeurs pour lesquels des indications précises sont disponibles.
20
Perspectives de l’économie mondiale 2007-2008
A notre connaissance, les catégories 4 (chômeurs en formation) et 5 (personnes ayant un emploi
et déclarant en chercher un nouveau) ne font pas l’objet d’estimations précises pour l’exercice
2006. Concernant le nombre d’entrées en formation, on peut toutefois relever que la proportion
de sortie du chômage au motif d’entrée en stage pour les chômeurs de catégorie 1 a fortement
baissé en 2006 (7,4 % des sorties après 8,3 % en 2005, soit 329 000 sorties en année pleine en
2006 contre 364 000 en 2005).
3. Les effets de retraits anticipés d’activité sont a priori compensés par les effets positifs de
flexion du chômage
L’une des orientations de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites est la prise en
compte des très longues carrières. L’article 23 vise à permettre aux assurés qui ont commencé
très jeunes leur activité et qui ont effectué une très longue carrière de prendre leur retraite avant
60 ans. Dans sa note de conjoncture de mars dernier, l’INSEE estime à 40 000 personnes l’impact baissier du nombre de départs anticipés à la retraite sur la population active tendancielle en
2006. Ce nombre est toutefois intégralement compensé par ce que les économistes nomment
l’effet de flexion du chômage. Celui-ci retient que lorsque la conjoncture est mal orientée, et
notamment lorsque le chômage est élevé, une partie de la population renonce à entrer sur le
marché du travail ou préfère en sortir. À l’opposé, lorsque la conjoncture devient favorable, un
plus grand nombre d’individus choisissent de chercher un emploi. Cet effet du taux de chômage
sur la décision d’entrer ou de sortir du marché du travail est appelé « effet de flexion ». En 2006,
cet effet de flexion du chômage aurait occasionné un accroissement de la population active tendancielle de l’ordre de 40 000 personnes selon nos estimations.
4. Le CNE aurait permis la création d’environ 40 000 postes depuis sa mise en œuvre
Le CNE concerne au premier chef les entreprises d’une taille inférieure à 20 salariés, soit une
catégorie d’entreprise traditionnellement mal mesurée par les statistiques infra-annuelles d’emploi. En outre, au cours des dernières années, c’est au sein des entreprises de moins de dix salariés que l’emploi s’est révélé être le plus dynamique. L’emploi serait ainsi sous-estimé car prenant mal en compte les créations d’emplois associées au CNE.
Deux éléments de réponse peuvent désormais être opposés. Les données sur l’emploi dans le
secteur concurrentiel s’appuient depuis l’automne de manière privilégiée sur les statistiques
fournies par l’URSSAF, statistique qui concerne toutes les catégories d’entreprises et non les seules entreprises de plus de dix salariés comme c’est le cas avec l’enquête ACEMO qui a longtemps servi de référence pour l’évaluation de l’emploi dans le secteur marchand.
Par ailleurs, « En 2005 et 2006, respectivement 280 000 et 510 000 intentions d’embauche en
CNE ont été déclarées. Les résultats de deux enquêtes menées conjointement par la Dares et
l’Acoss ne permettent pas d’estimer précisément le nombre d’emplois créés par le dispositif instauré en août 2006, mais fournissent des informations utiles sur certains des mécanismes en jeu.
D’une part, les taux de rupture des embauches en CNE sont évalués entre 30 % à 40 % au cours
des six premiers mois, et de 50 % au bout d’un an (à comparer à environ 20 % au bout de 6 mois
pour les CDI et 35 % à 60 % pour les CDD selon la même enquête de la Dares). Compte tenu de
ces taux de rupture estimés, le nombre de salariés en CNE aurait été d’environ 200 000 fin 2005
et d’environ 400 000 fin 2006. D’autre part, la part de ces emplois qui n’auraient pas été créés
si le CNE n’avait pas existé serait comprise entre 8 % et 9 % selon les opinions déclarées par les
employeurs et la part de ses emplois qui auraient été créés, mais plus tard, serait de 17 %. Si l’on
tient compte de l’ensemble des informations disponibles, l’effet net correspondant serait estimé
entre 5 000 et 15 000 emplois par trimestre en 2005 et 2006 » , soit entre 20 000 et 60 000 sur
l’ensemble de l’année écoulée.
L’ensemble des éléments d’explication précédents ne permettent pas de combler le défaut de
bouclage de la population active. Il est probable que cette situation persistera au moins jusqu’à
la parution de l’enquête emplois réalisée par l’INSEE dont la publication a été repoussée à l’automne prochain dans l’attente de vérifications complémentaires après des premiers résultats
jugés peu satisfaisant par l’institut de statistiques.
21
Conjoncture et prévision
Annexe statistique
22
Perspectives de l’économie mondiale 2007-2008
Principaux indicateurs mondiaux
Part (%)1
2005
2006
Monde
Etats-Unis
Canada
Japon
Prix à la consommation3
2008 2006
2007
2008
Balance courante4
2006
2007
2008
100
20,7
1,8
6,5
5,3
3,3
2,7
2,2
4,5
2,6
2,4
2,3
4,5
2,8
2,8
2,0
3,2
2,0
0,2
1,8
1,5
0,2
-1
2,1
2,0
0,8
7,0
-850
21,4
170
16,0
-764
14,3
182
-769
12,1
194
Zone euro
15,6
Allemagne
4,1
France
3,2
Italie
2,9
Espagne
1,9
Pays-Bas
0,9
Belgique
0,6
Autriche
0,5
Grèce
0,5
Portugal
0,4
Finlande
0,3
Irlande
0,3
Luxembourg 0,0
2,8
2,9
2,0
1,9
3,8
2,9
3,0
3,2
4,1
1,3
5,8
5,3
5,2
2,1
1,9
1,8
1,5
3,4
2,7
2,1
2,3
3,4
1,5
3,0
4,5
4,6
1,9
1,9
1,8
1,6
2,6
2,4
2,1
2,2
3,2
1,7
2,7
4,2
4,4
2,2
1,7
1,7
2,1
3,5
1,2
1,8
-
1,7
1,7
1,3
1,6
2,6
1,3
1,6
-
1,6
1,5
1,4
1,9
3,0
1,6
1,7
-
-14,8
127
-34,8
-41,7
-110,3
59,9
6,2
-
-10,3
156
-45,8
-40,8
-129,3
61,1
6
-
-27,5
151
-50,5
-40,3
-139,5
58,2
6,6
-
3,3
0,5
0,3
0,4
0,3
1,0
2,7
4,4
3,0
3,0
2,9
4,7
2,5
3,0
2,5
2,0
2,5
4,0
2,0
2,7
2,4
1,8
2,5
5,0
2,3
-
2,6
-
2,1
-
-68,0
-
-77,6
-
-83,8
-
5,1
0,9
0,3
0,1
0,4
0,1
0,0
2,6
0,6
6,6
5,8
3,9
8,3
6,1
6,0
7,7
6,7
6,8
6,1
5,0
2,5
7,8
5,2
5,7
6,4
6,1
6,2
5,8
4,8
3,0
6,2
4,9
5,4
5,8
5,8
5,9
1,1
3,9
4,5
2,6
7,4
6,6
9,8
9,1
2,5
6,8
2,7
3,0
6,0
5,7
7,2
11,0
2,8
3,7
2,4
3,0
5,0
5,0
6,3
8,5
-7,1
-6,3
4,3
-5,9
95,6
-
-8,0
-5,2
3,0
-6,5
80,0
-
-8,5
-5,6
2,2
-6,8
70,0
-
Asie émergente 31,4
hors Chine et Inde 7,3
Chine
16,0
Inde
6,3
Corée du Sud 1,8
Indonésie
1,7
Taiwan
1,1
Thaïlande
0,9
Philipines
0,7
Malaisie
0,5
Hong-Kong 0,4
Singapour
0,2
9,2
5,8
10,7
9,2
5,0
5,5
4,6
5,0
5,4
5,9
6,8
7,9
7,9
5,2
9,0
8,0
4,3
5,8
3,5
3,5
5,1
5
5,3
5,4
7,6
5,1
8,5
7,8
4,2
5,2
3,3
4,2
5,2
5,2
5,1
5,7
1,5
5,8
2,3
13,1
0,6
4,7
6,3
3,6
2,0
1,0
1,8
6,6
1,7
4,1
0,4
1,8
2,9
1,5
1,8
1,0
1,8
6,2
2,3
4,9
1,1
2,3
3,4
1,1
2
1,3
236,6
-16,6
6,0
8,4
25,2
3,2
5,0
23,2
18,2
36,7
279,8
-20,7
9,2
12,6
32
5,2
5,3
24,4
15,4
40,6
320,2
-21,6
8,1
15,8
36,1
5,3
5,4
25,7
14,1
45,3
Amérique latine
Brésil
Mexique
Argentine
Colombie
Chili
Pérou
Venezuela
7,2
2,6
1,9
0,9
0,6
0,3
0,3
0,3
5,0
2,9
4,8
8,6
6,9
4,3
7,8
10,3
4,4
3,6
3,3
7,1
5,6
4,7
6,2
4,5
4,0
3,9
3,7
4,1
4,7
5,3
5,4
2,0
4,2
3,6
10,9
4,3
3,4
-
3,4
4,2
10,5
4,8
2,4
-
4
3,2
13,7
3,1
3,1
-
13,5
-1,5
6,9
-2,2
4,8
11,0
-6,
5
-2,4
2,4
10,0
-5,5
2
-2,6
1,2
27,2
18,0
16,0
2,6
1,9
5,4
5,1
4,7
4,4
5,0
4,2
-
-
-
Royaume-Uni
Suède
Danemark
Suisse
Norvège
Turquie
Europe de l’Est
Pologne
Hongrie
Slovaquie
Rép. tchèque
Bulgarie
Roumanie
Russie
Ukraine
Afrique
Moyen-Orient
1
PIB2
2007
-
-
-
-
-
-
A parité de pouvoir d’achat - 2 Taux de variation annuel, en % - 3 Milliards de dollars
23
Conjoncture et prévision
Taux de change et taux d'intérêt
2006 2007 2008 1e tr. 2e tr.
Taux de change
1 dollar US = ...yen
"
= ...euro
1 euro
= ...$
"
= ...yen
"
= ...£
1£
= ...$
2007
3e tr. 4e tr.
1e tr.
2008
2e tr. 3e tr. 4e tr.
116
0,8
1,25
146
0,68
1,84
116
0,77
1,3
151
0,66
1,95
110
0,8
1,25
138
0,70
1,79
120
0,76
1,31
157
0,67
1,96
118
0,77
1,3
153
0,66
1,97
115
0,78
1,29
148
0,66
1,95
113
0,78
1,28
145
0,67
1,91
110
0,80
1,25
138
0,68
1,84
110
0,80
1,25
138
0,69
1,81
110
0,80
1,25
138
0,7
1,79
110
0,80
1,25
138
0,72
1,74
Taux d'intérêt à 3 mois (%)
Etats-Unis (euro-dollar)5,2
Japon (euro-yen)
0,3
Royaume-Uni (Libor) 4,8
Zone euro (euribor)
3,1
5,2
0,7
5,5
4,0
4,4
1,0
5,3
3,9
5,3
0,6
5,5
3,8
5,3
0,7
5,6
4,0
5,3
0,8
5,5
4,1
5
0,9
5,5
4,1
4,7
0,9
5,5
4,0
4,5
1,0
5,5
4,0
4,3
1,0
5,3
3,9
4,1
1,1
5,0
3,8
Taux d'intérêt à 10 ans (%)
Etats-Unis
4,8
Japon
1,7
Royaume-Uni
4,5
Allemagne
3,8
France
3,8
Italie
4,0
Espagne
3,8
Zone euro
3,9
4,7
1,8
4,9
4,1
4,1
4,4
4,1
4,2
4,8
2,2
5,0
4,2
4,2
4,5
4,2
4,3
4,7
1,7
4,9
4,0
4,1
4,2
4,1
4,1
4,6
1,7
4,9
4,1
4,1
4,4
4,1
4,2
4,8
1,9
5,0
4,2
4,2
4,5
4,2
4,3
4,8
2
5,0
4,2
4,2
4,5
4,2
4,3
4,8
2,1
5,0
4,2
4,2
4,5
4,2
4,3
4,8
2,2
5,0
4,2
4,2
4,5
4,2
4,3
4,8
2,2
5,0
4,2
4,2
4,5
4,2
4,3
4,8
2,2
5,0
4,2
4,2
4,5
4,2
4,3
Prix des matières premières
2005 2006 2007 2008
2007
2008
1e tr. 2e tr. 3e tr. 4e tr. 1e tr. 2e tr. 3e tr. 4e tr.
Pétrole : $/baril de Brent
54,5 65,2
59,6 60,0
58,5
60,0 60,0 60,0 60,0 60,0 60,0 60,0
Matières premières hors énergie
en $ (indice Coe-Rexecode)
en euro (indice Coe-Rexecode)
4,4 26,8
4,1 25,6
13,2 0,8
9,8 4,2
5,5
-3,9
14,0
18,4
* Taux de variation par rapport à la période précédente, en %.
24
0,0
3,1
0,0 0,0 0,0
3,2 10,0 0,0
0,0
0,0
0,0
0,0
Perspectives de l’économie mondiale 2007-2008
Prévisions annuelles
des principaux indicateurs macro-économiques de la France
Variations annuelles en %
2005 2006 2007 2008
1. Compte emplois-ressources (en volume)
PIB
Demande interne stocks compris
Demande interne hors stocks
Consommation privée
Consommation publique
Investissement total
ménages
productif
administrations publiques
Exportations de biens et services
Importations de biens et services
1,2
2,1
2,2
2,1
1,1
3,7
4,1
3,8
3,9
3,3
6,4
2,0
2,4
2,7
2,6
1,9
4,0
2,5
4,6
2,9
6,2
7,1
1,8
2,1
2,2
2,1
1,6
3,0
1,0
3,8
2,5
3,1
3,9
1,8
1,9
1,8
1,9
1,4
2,1
-0,2
3,1
1,7
5,3
5,5
2. Evolutions nominales
PIB en valeur
Prix de détail
3,1
1,8
4,2
1,7
3,7
1,3
3,2
1,4
3. Marché du travail
Emlois salarié marchand
Taux de chômage au sens du BIT (en %)
Salaire mensuel de base
0,5
9,9
2,8
0,9
9
2,8
0,6
8,4
2,7
0,4
8,2
2,8
4. Comptes d'agents
Pouvoir d'achat du revenu disponible brut des ménages
Taux d'épargne des ménages (en % du RDB)
Taux de marge des sociétés non financières (en % de la VA)
Solde du compte des admnistrations publiques (en % du PIB)
Dette publique (en % du PIB)
1,3
15
30
-3
66,6
2,3
15,1
30
-2,5
63,9
2,1 1,9
15,3 15,2
30,2 30,3
-2,7 -2,5
64,5 65,1
5. Commerce extérieur
Balance commerciale (en milliards d'euros)
Balance courante (en milliards d'euros)
Balance courante (en % du PIB)
-22,1 -28,5
-26,9 -34,8
-1,6 -1,6
-30,7 -35,6
-45,8 -50,5
-1,9 -2,1
Profil trimestriel de la croissance et des principaux indicateurs macro-économiques de la France
Variations trimestrielles au taux annuel
2007
(en % l'an)
1e tr. 2e tr. 3e tr.
4e tr. 1e tr.
2008
2e tr. 3e tr. 4e tr.
PIB en volume
Consommation privée
Investissement total
Exportations de biens et services
Importations de biens et services
1,8
2,3
2,6
3,2
4,8
1,8
2,4
2,3
3,8
5,0
1,6
1,8
2,1
4,9
5,4
1,6
1,8
2
5,2
5,6
1,7
1,9
1,9
5,4
5,6
1,8
2,0
2,0
5,5
5,6
2,0
2,2
2,2
5,7
5,6
2,2
2,3
2,3
5,9
5,6
Prix de détail (glissement sur un an
en fin de période)
1,3
1,1
1,1
1,5
1,6
1,4
1,4
1,3
25
Conjoncture et prévision
Positionnement cyclique
des économies
par Jacques Anas
Cet article récurrent de la revue Diagnostic(s) vise à fournir chaque trimestre
une évaluation actualisée du positionnement cyclique des grandes économies,
c’est-à-dire une première datation des points de retournements récents et
une détection rapide des points de retournement en cours ou imminents.
L’article se clôt sur un « focus » sur la quasi-récession de la zone euro en
2001-2003.
a question de la relation cyclique
entre les Etats-Unis et l’Europe nous
interpelle. Historiquement, tout
ralentissement américain s’est traduit avec un délai de moins d’un an
par un ralentissement en Europe à travers le
canal du commerce international et aussi
par contagion financière. Certes, la récession
de 1991 avait eu un impact décalé sur
l’Europe du fait du choc de la réunification
allemande. Avec la création de la zone euro,
certains pensaient que l’Europe gagnerait en
indépendance et serait plus protégée des
« éternuements » américains. Pourtant, en
2001, il y a eu contagion économique du renversement de conjoncture aux Etats-Unis.
Mais la récession outre-Atlantique ne s’est
traduite qu’en quasi-récession en Europe
(voir focus en fin d’article) et de manière dispersée (faible diffusion et non synchronisation au sein de la zone euro). Cela aurait pu
être pire et il est probable que l’euro a servi à
l’époque de bouclier. Sans lui, des dévaluations différenciées entre pays auraient amplifié le ralentissement conjoncturel.
L
Qu’en est-il aujourd’hui ? Le ralentissement
de l’économie américaine est en route (croissance de 2 à 2,5%, soit en dessous de la
croissance tendancielle de l’ordre de 3,1%)
mais il est mesuré et ne devrait pas s’aggraver car, cette fois, la croissance mondiale sert
de support à la croissance américaine, et la
faiblesse du dollar aide les exportateurs américains.
La croissance européenne sera sans doute
supérieure cette année à celle des Etats-Unis,
ce qui s’est produit rarement depuis dix ans.
Cela signifie-t-il une déconnection de
l’Europe ? Il est encore trop tôt pour l’affirmer.
En fait, les dangers potentiels viennent maintenantd’ailleurs, notamment de la surchauffe
chinoise qui, non maîtrisée, pourrait dégénérer en un atterrissage brutal avec des implications fortes pour l’économie mondiale. Pas
forcément totalement négatives d’ailleurs car,
à l’instar de la crise asiatique, elle s’accompagnerait d’une baisse des cours internationaux
des produits de base, apportant du pouvoir
d’achat aux ménages.
Dans ce monde incertain, il est utile de surveiller le cheminement des indicateurs cycliques, avancés et coïncidents. En effet, alors
que les chiffres économiques publiés quotidiennement sont parfois contradictoires et en
tout cas souvent révisés, ces indicateurs peuvent servir de garde-fous. Encore faut-il qu’ils
gardent leur pertinence au cours du temps par
une adaptation aux nouvelles réalités économiques. Ainsi peut-on se demander si l’écart
de taux d’intérêt, actuellement composante
des indicateurs avancés, ne devrait pas être
substitué par un autre facteur. De même, peuton encore considérer que toute inflexion aux
Etats-Unis est porteuse d’inflexion pour
l’Europe, comme c’est le cas actuellement
dans les indicateurs ? Périodiquement, une
remise à plat des indicateurs est nécessaire.
Aux Etats-Unis, qui ont une longue tradition
27
Conjoncture et prévision
Les fluctuations de la production
Cyc le d e s affair es
. .
B
A
. ..
β
C D
.
α
niveau
tendance
Cycle des
affaires ou cycle
classique
(business cycle ),
représenté par
le niveau de la
production.
Cyc le d e c roissan c e
.
A
0
.
écart à tendance
D
phase de ralentissem ent
phase de récession
Cyc le d u t aux d e c r oissan c e
.
α
.
0
B
taux de croissance instantané
.
β
Source : Coe-Rexecode
28
Cycle de
croissance
(growth cycle
ou deviation
cycle ),
représenté par
l'écart du
niveau de la
production à sa
tendance.
.
C
Cycle du taux
de croissance
ou cycle
d'accélération
(accelation
cycle ),
représenté par
le taux de
croissance
instantané de la
production.
Positionnement cyclique des économies
d’utilisation de ce type d’indicateurs, la dernière révision importante a eu lieu en 1998 par
le Conference Board. A cette époque, par
exemple, l’indicateur de prix des matières premières internationales a été abandonné. Mais
cette révision a pris du temps et s’est faite
avec un comité de conseillers prestigieux.
Il est prévu cette année de faire un bilan des
indicateurs avancés et coïncidents de CoeRexecode. Cela pourrait déboucher sur des
aménagements et des améliorations si cela
s’avérait nécessaire.
Approche ABCD
Le cycle économique peut être défini de plusieurs façons avec, pour chacune de ces définitions, une chronologie forcément différente
des « points de retournement ». Dans le suivi
empirique des cycles, on retient généralement trois définitions : le cycle classique, le
cycle de croissance et le cycle d’accélération.
Coe-Rexecode se concentre sur le suivi
conjoncturel des pics et creux des deux premiers types de cycles, dans le cadre d’une
approche intégrée dite ABCD. Depuis 1995,
Coe-Rexecode a développé un système d’indicateurs mensuels probabilistes permettant de
détecter en temps réel les pics et les creux
des cycles classique et de croissance. Ainsi,
les indicateurs avancés de retournement
conjoncturel (IARC) permettent d’anticiper
les points A et D du cycle de croissance. Ils
sont calculés pour la France, l’Allemagne,
l’Italie, la zone euro et les Etats-Unis. D’autre
part, les indicateurs d’entrée et sortie de
récession (IESR) fournissent une probabilité
d’occurrence des points B et D, délimitant les
phases de récession économique pour les
Etats-Unis et la zone euro. Enfin, plus récemment, Coe-Rexecode a mis au point un indicateur statistique du rythme de croissance
(IRC), qui fournit tous les mois une estimation instantanée de la vitesse de croissance
de la France et de la zone euro.
Nous rappelons rapidement la définition des
trois types de cycles, représentés sur la figure
de la page 30.
Le cycle des affaires
Le cycle des affaires (business cycle) ou cycle
classique reproduit le cycle du niveau d’activité global d’une économie. C’est la définition la plus répandue dans la littérature. Les
points de retournement (nommés B et C dans
la figure 1) de ce cycle délimitent les périodes
de croissance négative, ou récessions, des
périodes de croissance positive. Bien
entendu, dans la réalité, une période de croissance négative sera reconnue comme une
récession si elle obéit aussi à des critères
minimum de durée et/ou d’intensité ainsi
qu’à une diffusion suffisante au sein de l’économie. Par exemple, bien que la croissance
en zone euro soit devenue négative en 2001
et 2003 dans plusieurs grands pays dans le
sillage de la récession américaine de 2001, cet
épisode n’a pas été suffisamment diffusé
pour que l’on puisse parler de récession globale (cf. focus). Les pics et creux de ce cycle
classique étant les moments où la croissance
s’annule pour devenir négative ou positive,
on les appellera respectivement entrées et
sorties de récession.
Le cycle de croissance
Le deuxième cycle, très largement évoqué
notamment en Europe, est le cycle de croissance (growth cycle). Ce cycle est défini
comme l’écart de la série utilisée (généralement le PIB) à sa tendance de long terme. Ce
cycle de croissance possède des points de
retournement (nommés A et D sur la figure 1)
qui peuvent s’interpréter assez facilement. En
effet, le pic A du cycle de croissance est le
moment où le taux de croissance repasse audessous du taux de croissance tendanciel. De
même, le creux C représente le moment où il
repasse au-dessus. En effet, le pic est atteint
lorsque la dérivée de l’écart à la tendance s’annule, donc lorsque la dérivée de la série (assimilable au taux de croissance instantané) égale
la dérivée de la tendance (soit la pente de la
tendance si celle-ci est linéaire). Comme il faut
donner un nom aux phases baissières et haussières, nous parlerons respectivement de ralen29
Conjoncture et prévision
Zone euro
Etats-Unis
12000
Produit intérieur brut
en milliards de dollars 2000, CVS
1900
Produit intérieur brut
en milliards d'euros 2000, CVS
1700
10000
1500
8000
1300
6000
1100
900
4000
3000
700
1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005
2500
FBCF totale
en milliards de dollars 2000, CVS
1970
400
2000
350
1500
300
1975
1980
1985
1990
1995
2000
2005
2000
2005
2000
2005
FBCF totale
en milliards d'euros 2000, CVS
250
1000
200
500
150
1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005
140
Emploi salarié non agricole
en millions de personne, CVS
1970
140
1975
1980
1985
1990
1995
Emploi total
en millions de personne, CVS
135
120
130
100
125
120
80
115
60
110
1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005
Source : Coe-Rexecode
30
1970
1975
1980
1985
1990
1995
Positionnement cyclique des économies
tissement conjoncturel et de reprise (ou
rebond) conjoncturelle. De même, nous
dénommerons les pics A et les creux D, les
points de retournement conjoncturels.
Le cycle du taux de croissance
Le troisième cycle est le cycle du taux de croissance ou cycle d’accélération. Le pic du cycle
d’accélération (point ? sur la figure 1) représente le maximum atteint par le taux de croissance, et le creux (point ? sur la figure 1) indique que le taux de croissance est passé par son
point bas. Il est difficile de donner un nom aux
phases de ce cycle. Il est en tout cas périlleux
de parler de ralentissement lorsque le taux de
croissance franchit un pic. Par exemple, lorsque
la croissance trimestrielle du PIB de la France,
passe de 4 % l’an à 3 %, on ne peut parler de
ralentissement conjoncturel car le PIB continue
de croître à un rythme se situant au-dessus de
sa croissance tendancielle. Il est aussi contestable de parler de reprise conjoncturelle lorsque
la croissance passe de – 2 % l’an à – 1 %.
Même si le taux augmente, il reste négatif, ce
qui correspond à une baisse d’activité, donc à
une période récessive. Paradoxalement, le cycle
d’accélération est le plus populaire auprès des
praticiens. Il est approché par le glissement
annuel ou le taux de croissance trimestriel (du
PIB en général).
Datation des cycles
La mise au point d’une chronologie officielle
des points de retournement des cycles économiques d’un pays représente un outil d’une
grande utilité pour les analystes économiques. Une telle chronologie permet par exemple de comparer des pays ou des zones dans
une optique cyclique, ou bien de classifier
des indicateurs conjoncturels en fonction de
leur avance ou de leur retard par rapport au
cycle de référence. A ce jour, peu de pays
possèdent une chronologie officielle des
cycles. La plus populaire est sans nul doute la
datation du cycle classique des Etats-Unis,
établie depuis 1854 et maintenue à jour par le
comité de datation du NBER composé de sept
experts. Leurs conclusions sur les dates d’entrée et de sortie des récessions américaines
ont un impact fort sur les agents économiques, en particulier les marchés financiers, la
Federal Reserve ou les décideurs politiques.
D’autres instituts américains s’intéressent
également à la datation des cycles, tels que
par exemple l’ECRI (Economic Cycle
Research Institute) ou The Conference Board.
Au Japon, le ESRI (Economic and Social
Datation des cycles
Zone euro
Roy.-Uni
Etats-Unis
Japon
1997:01
1997:02
1997:03
1997:04
1998:01
1998:02
1998:03
1998:04
1999:01
1999:02
1999:03
1999:04
2000:01
2000:02
2000:03
2000:04
2001:01
2001:02
2001:03
2001:04
2002:01
2002:02
2002:03
2002:04
2003:01
2003:02
2003:03
2003:04
2004:01
2004:02
2004:03
2004:04
2005:01
2005:02
2005:03
2005:04
2006:01
2006:02
2006:03
Trou d’air
Ralentissement conjoncturel
Récession
Source : Coe-Rexecode
31
Conjoncture et prévision
Research Institute), organe du gouvernement,
a également effectué une datation du cycle
classique japonais.
En Europe, où il n’existe pas encore de datation officielle des cycles, le CEPR (Center for
Economic Policy Research) s’est inspiré de
l’expérience du NBER et a formé en 2003 un
comité de huit experts pour déterminer les
dates du cycle classique de la zone euro.
L’office européen de statistiques, Eurostat,
s’est également penché sur la question et a
engagé de nombreux travaux de recherche
sur le sujet, mais sans encore publier de datation officielle. Enfin, un nombre croissant de
travaux académiques ont également contribué à la mise au point de méthodologies
adaptées à la datation des cycles passés au
sein de plusieurs pays et/ou zones économiques. S’agissant du cycle de croissance,
l’OCDE propose également une chronologie
des cycles de croissance pour ses ressortissants.
Coe-Rexecode propose de son coté ses propres datations des cycles classiques et de
croissance pour différents pays ou zone. Pour
effectuer ces datations, nous avons travaillé
sur l’indice de la production industrielle (IPI)
manufacturière et le PIB trimestriel, en se
basant sur un algorithme simple de Bry et
Boschan (1971), modifié par Harding et
Pagan (1999). Par la suite, des mesures de
sévérité du cycle, définie comme le produit
de l’amplitude par la durée, ont permis d’éliminer certains faux cycles. De plus, pour la
zone euro dans son ensemble, nous avons
assuré la cohérence entre les cycles des pays
et le cycle commun agrégé. S’agissant du
cycle de croissance, il a été estimé à l’aide
d’un double filtre de Hodrick-Prescott pour
ne recueillir que les fluctuations de moyenterme comprises entre 1,5 an et 8 ans.
Principaux résultats
Nous présentons les principaux résultats relatifs aux datations des cycles classiques et de
32
croissance, issus des calculs de CoeRexecode, pour les Etats-Unis et la zone euro,
depuis 1970 jusqu’au quatrième trimestre
2006 (voir graphique page suivante).
Depuis le début des années 1970, les récessions sont bien heureusement des phénomènes rares. Jusqu’à ce jour, les Etats-Unis ont
connu cinq périodes de récessions : le premier choc pétrolier (1973-75), le second choc
pétrolier ayant entraîné deux récessions
consécutives (1980 et 1981-82), la récession
de 1990-91 et enfin en 2001, liée en partie à
l’éclatement de la bulle boursière et au surinvestissement technologique. La zone euro
dans son ensemble en a connu seulement
quatre, retardées de quelques mois par rapport aux Etats-Unis, la dernière récession
américaine ne s’étant pas propagée à la zone
monétaire européenne.
S’agissant du cycle de croissance, les EtatsUnis ont connu de 1970 à 2000 six cycles de
croissance, seuls les cycles de 1984 et 1994 ne
s’étant pas transformés en récession. Le délai
moyen entre un pic A et un pic B est d’environ
sept mois, alors que ce délai est beaucoup plus
court pour les sorties de cycle. On l’estime à
environ un mois, sauf pour les deux dernières
sorties de récession qui ont été marquées par
une phase de croissance sans emploi. Sur cette
même période, la zone euro a connu sept
cycles de croissance, seuls les pics A de 1977,
1986, 1995 et 1998 n’ont pas été suivis par un
pic B. En comparaison avec les Etats-Unis, la
zone euro est ainsi davantage marquée par des
ralentissements persistants que par des récessions de courte durée. Ceci explique la moindre amplitude des cycles en zone euro.
Positionnement cyclique
Il s’agit dans cette partie d’évaluer, dans le
cadre de l’approche ABCD, le positionnement
cyclique des Etats-Unis et de la zone euro.
Dans un premier temps, nous rappelons la
méthodologie utilisée pour mener à bien
cette évaluation et notamment les indicateurs
cycliques de Coe-Rexecode.
Positionnement cyclique des économies
Méthodologie
La datation récente des points de retournement ne peut être que provisoire, comme cela
a été souligné précédemment. Il est difficile a
priori d’affirmer combien de temps il faut
pour valider de manière définitive en « datation finale » ces points de retournement provisoires. En tout cas, si l’incertitude sur leur
existence peut être levée assez rapidement, il
n’en est pas de même pour la fixation de la
date car les données sont souvent révisées et
les effets de bord des filtres, lorsqu’ils sont
utilisés, ajoutent une imprécision supplémentaire.
nous utilisons l’indicateur d’entrée-sortie de
récession (IESR) créé par le COE en 2000, à
partir d’un modèle à changements de régimes
markoviens.
Pour la zone euro, une mesure du degré de
diffusion et de synchronisation des mouvements cycliques peut expliquer pourquoi au
niveau global on identifie ou non un changement de phase du cycle classique ou de croissance. Il est possible que des sous-ensembles
cycliques persistants empêchent l’européanisation du cycle (voir par exemple Bovi, 2005)
A un niveau international, il est intéressant
d’examiner la diffusion et la synchronisation
cyclique (voir Harding et Pagan, 2005, ou
Chauvet et Yu, 2006).
Evaluation du passé récent
Position cyclique des Etats-Unis
La méthode non paramétrique de Bry et
Boschan, complétée par une mesure de la
sévérité (degré combiné de durée et d’intensité), est utilisée pour identifier les points de
retournement provisoires sur le passé récent.
Concernant le cycle de croissance, nous utiliserons en supplément d’appréciation, l’indicateur de rythme de croissance IRC (voir
encadré) qui permet d’apprécier si la pente
de croissance a croisé ou non la pente tendancielle, ce qui est le signe d’un changement de phase. Notons dès à présent la difficulté à identifier les « trous d’air » qui ne sont
que des pauses dans la croissance et qui se
caractérisent par le caractère « transitoire »
du croisement de la pente tendancielle.
Evaluation en temps réel
La détection en temps réel s’appuie sur des
indicateurs élaborés sur la base d’une modélisation non-linéaire à changement de régimes (pour plus d’information, voir Anas et
Ferrara, 2004). Pour anticiper les points A et
D du cycle de croissance, nous utilisons l’indicateur avancé de retournement conjoncturel (IARC) créé par le COE en 1996.
Pour détecter en temps réel les points B et C
du cycle d’affaires (il est difficile de trouver
un indicateur avancé pour les récessions),
L’hypothèse d’une nouvelle phase baissière
du cycle de croissance aux Etats-Unis ne peut
encore être écartée après quatre trimestres de
croissance à moins de 2,5% en termes annualisés (1,2 % au premier trimestre 2007,
d’après les premières estimations). Cela ressemble à la phase baissière du milieu des
années 1990 qui, consécutive alors, comme
c’est le cas aujourd’hui, à un relèvement progressif des taux d’intérêt, avait pu empêcher
la surchauffe et les tensions inflationnistes
mais n’avait pu freiner toutefois l’ardeur
boursière qui allait mener à une bulle spéculative et son éclatement en 2000.
L’indicateur avancé de retournement
conjoncturel IARC nous indiquera si l’on sort
bientôt de cette phase de ralentissement, ce
qui impliquerait un rebond de la croissance
américaine au-delà de son taux de croissance
tendanciel estimé à 3,1%.
Rappelons que l’indicateur avait émis un signal
de ralentissement en mars 2006 lorsque le seuil
de 80 avait été largement franchi, impliquant
alors un retour de la croissance en-dessous du
rythme tendanciel estimé à 3,1%.
Depuis lors, l’indicateur IARC est utilisé pour
détecter la sortie de la phase actuelle de
33
Conjoncture et prévision
Présentation de l’IRC
L’indicateur de rythme de croissance (IRC) est un indicateur mensuel permettant d’évaluer, en
temps réel, le « rythme de croissance » d’une économie. Il est calculé sur la base des enquêtes
de conjoncture. Il a été calculé pour l’instant pour la France et la zone euro. Le « rythme de
croissance » correspond à la croissance sous-jacente de l’économie. En effet, il apparaît que le
taux de croissance trimestriel du Produit intérieur brut (PIB) publié par les différents instituts
de statistiques officiels est bruité. De plus, celui-ci n’est disponible que trimestriellement avec
un délai d’un à trois mois et parfois avec des révisions non négligeables. Il ne permet donc pas
un suivi optimal, en temps réel, de la conjoncture. L’indicateur mensuel proposé a pour objectif de cerner chaque mois la pente « réelle » de la croissance et d’en repérer les inflexions. Il
constitue donc un outil précieux pour valider les signaux des indicateurs avancés IARC. De
plus, il permet de calculer chaque mois un acquis de croissance.
Le rythme de croissance s’obtient par lissage de la variation trimestrielle glissante d’une estimation du PIB mensuel. Il est exprimé en rythme annualisé. Contrairement aux indicateurs de
croissance publiés par d’autres organismes, l’’indicateur IRC ne vise pas à estimer la variation
trimestrielle du PIB telle qu’elle est publiée par l’INSEE ou Eurostat, mais à évaluer le rythme
de croissance sous-jacent qui, par définition, est moins volatil. Cependant, d’une année à l’autre, le bruit se compense, si bien que les taux de croissance annuels de l’indicateur de CoeRexecode et celui du PIB officiel sont proches.
Présentation de l’IESR
L’indicateur probabiliste d’entrée et de sortie de récession construit par le COE est basé sur un
modèle à changements de régimes markoviens. Il fournit en sortie une probabilité instantanée
d’appartenance à un régime de récession de l’économie, connue comme étant la probabilité
filtrée. C’est cette probabilité estimée que nous récupérons en sortie pour construire notre indicateur probabiliste.
Le modèle de Hamilton est appliqué sur un nombre fini K de séries coïncidentes avec le cycle
d’affaires de référence. Pour les Etats-Unis par exemple, les séries sélectionnées sont le taux de
chômage, la production industrielle, l’indice des annonces d’offres d’emploi parues dans la
presse et les dépenses de construction du secteur privé. A chaque temps t, on obtient ainsi en
sortie K probabilités conditionnelles d’appartenance au régime de récession. Ces probabilités
conditionnelles sont alors agrégées en tenant compte des risques de première et de seconde
espèce estimés empiriquement par le nombre de faux signaux et de signaux manqués. A chaque temps t, l’indicateur instantané d’entrée et de sortie de récession est alors défini comme
étant l’agrégation des ces probabilités. Le signal de changement de régime est donné lorsque
l’indicateur franchit le seuil de 0,5.
Présentation du IARC
L'indicateur avancé IARC combine l'information fournie par des séries qui ont une avance sur le
cycle (elles se retournent avant que l'économie globale ne passe par son point de retournement).
Pour la zone euro par exemple, les cinq séries qui composent l'indicateur sont un indicateur synthétique des principales bourses en zone euro, l'écart de taux d'intérêt (taux de rendement des
obligations d’Etat à dix ans moins EURIBOR à trois mois), l'indicateur avancé du cycle économique
aux Etats-Unis, un indicateur des prix de vente prévus dans le commerce de gros (biens intermédiaires industriels) et une variable synthétique des enquêtes d’opinion mensuelles en zone euro
dans l'industrie des biens intermédiaires (résumé des réponses sur la production passée et prévue,
les carnets de commandes global et étranger et le niveau des stocks).
Les séries ont été sélectionnées parmi un inventaire de séries qui se sont révélées avoir une
capacité prévisionnelle des points de retournement. Les propriétés suivantes ont été prises en
considération : avance, pertinence économique, obtention rapide des données, faiblesse des
révisions et de la volatilité. Chaque mois est calculé la probabilité que chacune des six séries
soit passée par un point de retournement, suivant la formule des probabilités séquentielles de
Neftçi. L'hypothèse est faite que la probabilité d'occurrence d'un point de retournement est
indépendante de la durée de la phase en cours qui s'est déjà écoulée. Ces probabilités sont
ensuite agrégées avec une pondération qui tient compte, pour chaque série, du risque de faux
signal ou de celui de rater le cycle économique.
34
Positionnement cyclique des économies
ralentissement économique Au mois de mars
2007, le IARC des Etats-Unis se situait à 48,7 contre - 47,9 en février, soit encore très
loin du seuil de - 80 qui signalerait un retournement à la hausse dans les trois mois. Des
signes positifs récents ne se sont pas confirmés : la confiance des ménages a reculé, les
permis de construire n’ont peut-être pas
encore touché leur point bas, l’ISM manufacturier (et même non manufacturier) rechute
légèrement en mars et l’écart de taux baisse à
nouveau en mars (à - 0,5%). Par contre, la
Bourse repart à la hausse après le choc baissier de fin février.
Indicateur avancé de retournement
conjoncturel aux Etats-Unis (IARC)
100
80
60
40
20
0
-20
-40
-60
-80
-100
2004
2005
2006
Possibilité de retournement
Forte probabilité de retournement
Source : Coe-Rexecode
Il n’est pas encore certain que le ralentissement sera léger et non durable puisqu’aucun
signal de reprise n’est en vue dans l’indicateur. Cela semble contredire un certain nombre de statistiques outre--Atlantique pointant
vers un rebond de l’activité. Mais un indicateur avancé sert justement de garde-fou dans
les moments d’incertitude où les signaux
sont contradictoires. La décision de la Fed
d’abaisser ses taux pourra jouer un rôle positif dans la sortie du ralentissement à moins
que les craintes de tensions inflationnistes
l’en empêche.
Par contre, la perspective d’un approfondissement du ralentissement en récession s’éloigne. Ce scénario, envisagé par certains économistes il y a quelques mois, est devenu
peu probable. L’indicateur d’entrée et sortie
de récession (IESR) de l’économie américaine
valait 0,22 en février après 0,23 (révisé) en
janvier 2007, alors qu’en novembre 2006
l’IESR s’était approché du seuil de 0,50, audelà duquel un signal d’entrée en récession
est émis. Une seule des quatre composantes
s’est retournée : les dépenses de construction
du secteur privé. La baisse en volume a
atteint en février un nouveau record de
- 8,8% sur un an. Toutefois, le volume s’est
stabilisé en février après dix mois consécutifs
de baisses. Au contraire, les annonces d’offres d’emplois publiées dans les journaux se
sont redressées après le creux de l’automne
2006, le taux de chômage baisse à nouveau
en février (et même à 5,4% en mars) et la
production industrielle manufacturière est
plutôt stable depuis six mois.
Cycle de croissance aux Etats-Unis
2.0
En % de la tendance du PIB
Etats-Unis
Indicateur d'entrée-sortie en récession
1.0
IESR
1.5
1.0
Récession
0.5
0.5
0
Non-récession
-0.5
-1.0
0
-1.5
90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06
Source : Coe-Rexecode
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
Source : Coe-Rexecode
35
Conjoncture et prévision
Etats-Unis
Cycle des affaires (milliards $ 2000, CVS)
12000
11000
A B
10000
D
C
9000
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2005
2006
Cycle de croissance en %
2
A
1
0
-1
D
-2
1999
2000
2001
2002
2003
2004
Cycle du taux de croissance en %
6
α
α
4
α
2
β
0
β
Taux de croissance tendanciel
Taux de croissance du PIB (mm3)
-2
1999
2000
2001
Source : Coe-Rexecode
36
2002
2003
2004
2005
2006
Positionnement cyclique des économies
La politique de la Federal Reserve en matière
de taux d’intérêt sera décisive pour l’issue de
la phase en cours. Elle dépendra moins du
risque de récession (qui est bas semble-t-il)
que des craintes d’une résurgence de l’inflation qui peut venir des pressions salariales,
du prix élevé du pétrole, des tensions sur
l’utilisation des capacités de production et
éventuellement d’une inflation importée par
l’affaiblissement marqué du dollar. Mais la
forte demande extérieure adressée aux EtatsUnis du fait d’une croissance mondiale solide
ainsi que la bonne compétitivité-prix des
exportations restent aussi un élément de soutien pour un rebond prochain de l’économie
américaine.
Position cyclique
de la zone euro
Trois indicateurs permettent de suivre et évaluer le positionnement cyclique de la zone
euro : les indicateurs IARC, IESR et IRC. Une
question préalable reste celle de la convergence des cycles en zone euro. Si la convergence avait eu tendance à s’accroitre à la fin
des années 1990, en vue notamment de l’application des critères de Maastricht, il est probable qu’elle a diminué depuis 2001 avec des
performances cycliques différenciées suivant
les pays, notamment parmi les plus grands
pays de la zone. Ainsi, par exemple, certains
pays ont connu des épisodes récessifs au
cours des années 2001-2003 sans que l’on
Cycle de croissance
Zone euro
France
Italie
En % de la tendance du PAllemagne
IB
1.5
1.0
0.5
0
-0.5
-1.0
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
Source : Coe-Rexecode
puisse diagnostiquer une récession au niveau
global de la zone euro. Par ailleurs, le point
bas du cycle de croissance actuel est difficile
à localiser (voir partie sur la datation pour
plus de détails).
Ce qui est clair aujourd’hui, c’est que la
zone euro et tous les pays dans leur ensemble se trouvent simultanément dans la phase
ascendante du cycle de croissance. La question posée est de savoir quel sera le prochain
pic de ce cycle de croissance.
L’indicateur avancé de retournement
conjoncturel IARC de la zone euro est utilisé
depuis fin 2005 pour anticiper le prochain pic
du cycle de croissance. En mars 2007, l’indicateur avancé IARC pour la zone euro atteint
Zone euro
Indicateur du rythme de croissance
6
Indicateur d'entrée-sortie en récession
1.0
rythme annuel, en %
IESR
IRC
taux de croissance tendanciel
4
Récession
0.5
2
Non-récession
0
-2
2000
2001
2002
Source : Coe-Rexecode
2003
2004
2005
2006
0
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
Source : Coe-Rexecode
37
Conjoncture et prévision
Zone euro
Cycle des affaires (milliards d'euros 2000, CVS)
1900
1800
A
D
1700
1600
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2005
2006
Cycle de croissance en %
2
A
1
0
D
-1
1999
2000
2001
2002
2003
2004
Cycle du taux de croissance en %
6
α
Taux de croissance tendanciel
Taux de croissance du PIB (mm3)
4
α
α
2
β
0
β
β
-2
1999
2000
2001
Source : Coe-Rexecode
38
2002
2003
2004
2005
2006
Positionnement cyclique des économies
77,4 contre 77,9 (révisé) en février, dépassant
le premier seuil de 60 et se rapprochant du
seuil significatif de 80 qui, une fois dépassé,
indiquerait avec une forte probabilité un
ralentissement conjoncturel dans les trois
mois. Rappelons qu’un tel ralentissement
signifie que la croissance repasserait en-dessous de la croissance tendancielle estimée
aujourd’hui à 1,8 % l’an. On en est encore
loin puisque la croissance sous-jacente (voir
indicateur IRC) est redescendue de 2,8% en
décembre 2006 à 2,4% en mars 2007.
Zone euro
Indicateur avancé de retournement conjoncturel
100
80
60
40
20
0
-20
-40
-60
-80
-100
creux du cycle de croissance
2004
2005
2006
Possibilité de retournement
Forte probabilité de retournement
En effet, la Bourse, en écart à la tendance, est
toujours orientée à la hausse, malgré l’ajustement baissier de fin février. L’opinion des
industriels du secteur des biens intermédiaires plafonne sur les derniers mois mais s’est
amélioré en mars. Il est vrai que, par ailleurs,
les opinions sur les prix de gros industriels
intermédiaires se sont retournées à la baisse.
Enfin, depuis un certain temps déjà, deux
composantes anticipent un ralentissement :
l’indicateur IARC pour les Etats-Unis et
l’écart de taux d’intérêt, dont la baisse est
continue depuis plus de deux ans et qui
converge vers 0.
autour de 0,5, seuil d’entrée en récession,
pendant
quelques
mois
fin
2001.
Actuellement, l’indicateur d’entrée et sortie
de récession (IESR) de la zone euro se situe
à son seuil minimal de zéro depuis déjà trois
ans, impliquant ainsi une probabilité nulle
d’une entrée en récession. La logique est respectée, avant de diagnostiquer une récession, l’économie doit d’abord ralentir, c’està-dire passer par un pic de son cycle de
croissance.
Depuis la fin de l’année 2000, l’économie de
la zone euro a frôlé, mais évité, une récession à deux reprises, fin 2001 et début 2003.
D’ailleurs, l’indicateur IESR s’est stabilisé
Achevé de rédiger le 25 avril 2007
Jacques Anas
[email protected]
Source : Coe-Rexecode
39
Conjoncture et prévision
Focus sur la quasi-récession
de la zone euro en 2001-2003
A-t-on le recul nécessaire pour caractériser la
dernière phase baissière qu’a connue la zone
euro entre fin 2000 et la mi-2003, c’est-à-dire
durant 2 ans et demi ? Alors que les Etats-Unis
ont connu une récession en 2001, datée par le
NBER, la zone euro a-t-elle aussi, par un effet
de contagion, subi une récession ?
FBCF totale
12
en glissement sur un an (%)
8
4
0
Pas de récession d’un point
de vue formel
-4
Etats-Unis
Zone euro
-8
De façon formelle, et nous en tenant aux caractéristiques habituelles des récessions (durée et
intensité), il n’est pas possible de retenir l’idée
d’une récession globale pour la zone euro
lorsqu’on examine uniquement l’évolution du
PIB dans la zone euro car il n’existe pas de
baisse globale suffisante d’un point-de-vue de
l’intensité et de la durée. D’ailleurs, ce qui
conforte ce jugement, c’est le fait que l’emploi
n’a pas baissé (contrairement aux Etats-Unis
lors de la dernière récession).
Emploi salarié
140
en millions de personne, CVS
130
120
110
Etats-Unis
Zone euro
100
1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006
Source : Coe-Rexecode
40
1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006
Source : Coe-Rexecode
Par contre, il est vrai que l’investissement a
connu un véritable cycle baissier qui ferait penser à une récession. En effet, les cycles d’affaires sont à rapprocher des cycles de moyen
terme type Juglar (qui durent huit ans en
moyenne) qui s’expliquent principalement par
les fluctuations de l’investissement, alors que
les cycles courts de type Kitchin (qui durent
environ trois ans en moyenne) sont souvent liés
aux cycles des stocks, qui résultent eux-mêmes
de chocs endogènes ou exogènes. Mais alors, si
on perçoit une réelle baisse des investissements
durant cette période, pourquoi le PIB a-t-il
résisté ? Cela tient au fait que l’autre composante de la demande finale, la consommation
des ménages, a été particulièrement résistante
à ce renversement de conjoncture. Pourtant,
l’éclatement de la bulle boursière fin 2000 et
courant 2001 aurait pu laisser envisager, par un
effet de richesse négatif, une baisse de la
consommation des ménages. Cela ne s’est pas
produit pour diverses raisons qui tiennent à
l’absence persistante d’inflation et à la baisse
rapide des taux d’intérêt. Durant la crise asiatique de 1997, le même phénomène a eu lieu, la
Positionnement cyclique des économies
baisse des prix internationaux venant soutenir
le pouvoir d’achat des ménages européens et
leur consommation.
l’Italie et les Pays-Bas. Mais le manque de diffusion et de synchronisation explique finalement qu’à un niveau global, il n’y a pas eu
récession.
Manque de diffusion
et de synchronisation
Cependant nous pensons que cet épisode fut
une quasi-récession. D’ailleurs, en comparant
l’évolution du PIB réel aux Etats-Unis et en zone
euro (voir graphique ci-contre), on ne remarque
pas une très grande différence si bien que parler de récession dans un cas et de non récession
dans l’autre semble artificiel, surtout si l’on
pense que les mesures du PIB sont approximatives et révisables, que ce soit en valeur ou en
volume.
S’il n’y a pas eu récession globale, il y a eu une
récession industrielle dans la zone euro et c’est
la première fois qu’une récession industrielle
globale ne se transforme pas en récession globale. Plusieurs pays de la zone ont connu des
épisodes récessifs, en particulier l’Allemagne,
Croissance du PIB
120
4 trimestre 2001 = 100
110
Etats-Unis
Zone euro
100
90
80
70
90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07
Source : Coe-Rexecode
Désaccords sur la datation ?
Le débat est ouvert puisque l’OCDE a acté
récemment une récession en zone euro (Cotis,
2005) et que, d’après l’INSEE (Bardaji, 2006), le
CEPR serait en voie de publier une datation de
cette récession. Cette question est importante
car la datation des phases cycliques est utile à
diverses études concernant par exemple l’asymétrie des comportements au cours du cycle ou
l’examen des contagions d’un pays à un autre
(indicateurs de concordance).
Références :
Artis and alii (2003), Business Cycle Dating Committee of the Centre for Economic Policy
Research, 22 sept, 2003. http://www.cepr.org/press/dating.pdf
Bardaji J. et alii (2006), « Investissement des entreprises en France et en zone euro : analogies et
différences avec le cycle précédent », La croissance française à l’épreuve du ralentissement international, Note de conjoncture de l’INSEE, décembre.
Cotis J-P., Coppel J. (2005), « Business cycle dynamics in OECD countries : evidence, causes and
policy implications», Reserve Bank of Australia Economic Conference.
41
Conjoncture et prévision
Références
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business cycle phases », International Journal of Forecasting, vol. 22, n° 4, pp. 735-749.
Bovi M., (2005), « Economic clubs and European commitments. A business cycles race », Working
Paper, ISAE.
Bry G. et Boschan C., (1971), « Cyclical analysis of time series: Selected procedures and computer programs », Technical Paper, n° 20, NBER.
Burns A.-F. et Mitchell W.-C., (1946), Measuring Business Cycles, Columbia University Press, NBER.
Chauvet M. et Yu, (2006), International Business Cycles: G7 and OECD countries, Economic Review,
Federal Reserve Bank of Atlanta.
Clements M.-P. et Krolzig H.-M., (2003), « Business cycle asymmetries: characterization and testing
based on Markov-Switching autoregressions », Journal of Business and Economic Statistics, Vol. 21, n°.
1, pp. 196-211.
Diebold F.-X. et Rudebusch G.-D., (1999), Business Cycles: Durations, Dynamics and Forecasting,
Princeton University Press, Princeton.
Giannone D. et Reichlin L. (2006), « Trends and cycles in the Euro area. How much heterogeneity and
should we worry about it ? », Working Paper, n°. 595, BCE.
Hamilton J.-D., (1989), « A new approach to the economic analysis of non stationary time series and
the business cycle », Econometrica, vol. 57, n° 2, pp. 357-384.
Harding D. et A. Pagan, (2006), Journal of Econometrics, « Synchronisation of cycles », à paraître vol.
132, n° 1, pp. 59-79.
Harding D. et Pagan A., (2002), « Dissecting the Cycle: A Methodological Investigation », Journal of
Monetary Economics, vol. 49, n° 2, pp. 365-381.
Romer C., (1999), « Changes in business cycles: Evidence and explanations », Journal of Economic
Perspectives, vol. 13, n° 2.
42
Analyse structurelle
45
Quelles perspectives de croissance
pour l’Amérique latine à moyen terme
Mourad Ayouz et Valérie Perracino
67
Marché européen :
compétitivité hors prix des biens
de consommation
Laurent Ferrara
43
Analyse structurelle
Quelles perspectives de
croissance pour l’Amérique
latine à moyen terme ?
par Mourad Ayouz et Valérie Perracino
Cet article fait le point sur les perspectives de croissance à moyen terme de
trois pays d’Amérique latine : l’Argentine, le Brésil et le Mexique. Il s’efforce
notamment de déterminer dans quelle mesure l’accélération de la croissance
observée entre 2003 et 2006 pourrait être l’indice d’une ébauche de décollage
économique dans des pays dont la trajectoire a été particulièrement heurtée et
décevante au court du dernier quart de siècle. Une analyse statistique de la
position dans le cycle et une analyse comptable des sources de la croissance de
ces trois économies sont utilisées pour définir plusieurs scénarios de moyen
terme dont la probabilité est ensuite discutée de manière qualitative. Dans le
cas du Brésil et du Mexique, un maintien des rythmes de croissance soutenus
observés depuis 2003 paraît possible. Dans le cas de l’Argentine, où l’output
gap est fortement positif, le diagnostic est moins optimiste.
L
a trajectoire des principales économies d’Amérique latine au cours
du dernier quart de siècle peut
apparaître décevante à bien des
égards. La croissance régionale mesurée
par l’agrégation du PIB en parité de pouvoir d’achat des six principales économies de
la zone (Argentine, Brésil, Mexique, Chili,
Colombie, Venezuela) a en effet nettement
ralenti à partir du début des années 1980.
Alors qu’elle atteignait 5,8 % par an en
moyenne sur la période 1960-1980, elle n’ a
pas dépassé 2,4 % par an sur la période
1980-2006 (cf tableau page suivante).
Ce freinage a concerné la plupart des pays de
la zone, à l’exception notable du Chili. Il s’est
traduit par une divergence aussi bien vis-àvis des Etats-Unis que de l’ensemble du
monde. L’Amérique latine offre de ce point de
vue un contraste saisissant avec l’Asie (cf.
page suivante).
Les deux régions ont connu au cours du dernier quart de siècle des trajectoires opposées.
Le PIB par habitant agrégé des dix principaux
pays d’Asie émergente (Corée du Sud, Inde,
Indonésie, Taiwan, Thailande, Philippines,
Malaisie, Hong Kong, Singapour, Chine) équivalait à 15,5 %, en parité de pouvoir d’achat,
du PIB par habitant des Etats-Unis en 2006,
contre à peine 5,8 % en 1980. Cette évolution
ne reflète pas seulement l’émergence spectaculaire de la Chine. A l’exception des
Philippines, toutes les grandes économies de
la zone ont vu leur revenu par tête progresser
à un rythme supérieur, en parité de pouvoir
d’achat, à celui observé aux Etats-Unis. A
l’inverse, l’écart relatif entre le revenu par
tête des six principaux pays d’Amérique
latine pris dans leur ensemble et le revenu
par tête des Etats-Unis, mesuré en parité de
pouvoir d’achat, s’est nettement accru entre
1980 et 2006. Le PIB par habitant agrégé des
six principales économies d’Amérique latine
45
Analyse structurelle
Taux de croissance annuel moyen du PIB (%)
19602006
19601980
19802006
19801990
19901998
19982003
20032006
Monde
3,9
4,5
3,4
3,1
3,1
3,6
5,0
Etats-Unis
3,4
3,7
3,1
3,3
3,1
2,6
3,5
Amérique latine*
dont :
Mexique
Argentine
Brésil
Chili
Colombie
Venezuela
Asie émergente*
dont :
Corée du Sud
Inde
Indonésie
Taiwan
Thailande
Philippines
Malaisie
Hong Kong
Singapour
Chine
3,9
5,8
2,4
1,4
3,5
1,3
5,2
4,3
2,5
4,4
4,3
4,2
2,8
6,4
6,5
3,4
7,3
3,5
5,4
3,9
5,0
2,6
1,8
2,3
4,9
3,3
2,0
7,5
1,9
-1,5
1,5
3,8
3,6
0,8
7,2
3,0
6,3
2,7
7,6
3,3
2,9
7,8
2,5
-2,3
2,0
2,6
1,2
-3,3
6,9
3,9
8,9
4,1
5,6
5,5
12,9
8,7
7,2
4,9
5,5
7,8
6,5
4,0
6,6
7,2
7,8
7,7
7,8
3,4
6,0
9,8
7,2
5,4
7,2
9,4
9,0
5,0
6,7
6,0
5,2
6,3
5,9
2,9
6,1
5,4
6,8
9,8
8,7
5,6
6,4
8,0
7,8
1,7
6,0
6,6
7,4
9,3
5,4
5,7
4,6
6,7
4,4
2,6
7,0
4,0
7,3
11,0
6,3
5,7
3,8
3,4
4,8
4,1
5,0
4,2
4,3
8,7
4,6
8,6
5,4
4,9
5,2
5,5
6,1
7,6
7,8
10,4
Source : Données officielles, calculs COE-Rexecode
* Les agrégats régionaux sont construits en agrégeant les PIB en parité de pouvoir d'achat des principaux
pays de chaque zone (Mexique, Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Venezuela dans le cas de l'Amérique latine
et Corée du Sud, Inde, Indonésie, Taiwan, Thailande, Philippines, Malaisie, Hong Kong, Singapour, Chine
dans le cas de l'Asie émergente).
n’était plus équivalent qu’à 23,2 % du PIB
par habitant des Etats-Unis en 2006, contre
32,6 % en 1980. Seul le Chili a vu son revenu
par tête progresser à un rythme supérieur à
celui des Etats-Unis entre 1980 et 2006.
Ces médiocres performances sont à mettre en
relation avec une forte instabilité macroéconomique. Sur la période 1980-2006, la croissance des principaux pays d’Amérique latine
a été non seulement plus faible mais aussi
plus volatile que celle des principaux pays
d’Asie émergente. Berg, Leiter, Ostry et
Zettelmeyer (2006) ont notamment montré
que la durée des « épisodes de croissance
soutenue » où la progression du PIB par tête
s’est écartée de sa tendance antérieure pour
progresser à un rythme au moins égal à 2 %
l’an, a été nettement plus faible dans les pays
émergents d’Amérique latine que dans les
pays émergents d’Asie au cours des dernières
46
décennies. Ils mettent en relation cette moindre durée des « épisodes de croissance soutenue » en Amérique latine avec des inégalités
très fortes et avec une forte instabilité
macroéconomique.
Amérique latine
De médiocres performances
relatives depuis le début des années 1980
34
En % du PIB PPA par h des Etats Unis
17
Amérique latine (6 pays) (G)
Asie émergente (10 pays) (D)
30
13
26
9
22
5
80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08
Source : Coe-Rexecode
Quelles perspectives de croissance pour l’Amérique latine à moyen terme ?
Taux de croissance annuel moyen du PIB par habitant en PPA (%)
19602006
19601980
19802006
19801990
19901998
19982003
20032006
Monde
2,2
2,5
1,9
1,4
1,6
2,3
3,8
Etats-Unis
2,2
2,5
2,0
2,3
1,8
1,5
2,5
Amérique Latine
dont :
Mexique
Argentine
Brésil
Chili
Colombie
Venezuela
Asie émergente*
dont :
Corée du Sud
Inde
Indonésie
Taiwan
Thailande
Philippines
Malaisie
Hong Kong
Singapour
Chine
1,7
3,1
0,7
-0,7
1,8
-0,2
3,8
1,9
1,1
2,3
2,6
1,9
0,0
4,6
3,3
1,8
4,6
1,5
2,7
0,4
2,8
0,8
0,5
0,5
3,4
1,3
-0,3
5,9
-0,3
-3,0
-0,6
2,1
1,5
-1,9
5,4
1,2
4,9
1,1
5,8
1,4
0,7
6,2
1,0
-3,3
0,6
1,4
-0,5
-5,1
5,7
2,6
7,9
2,7
4,4
3,9
10,9
7,6
5,7
2,8
3,6
6,0
4,4
1,4
3,9
5,2
5,5
6,1
5,6
1,1
3,6
6,9
4,3
2,4
4,4
6,8
6,9
2,9
5,8
4,0
3,6
5,3
4,5
0,7
3,6
4,0
4,4
8,6
7,5
3,4
4,4
6,5
6,1
-0,7
3,3
5,2
5,1
7,7
4,4
3,8
3,1
5,7
3,2
0,4
4,3
2,4
4,2
9,9
5,8
4,0
2,5
2,7
3,8
2,1
2,8
2,9
2,3
7,9
4,2
7,0
4,1
4,5
4,4
3,7
4,2
6,4
6,4
9,7
Source : Données officielles, calculs COE-Rexecode
* Les agrégats régionaux sont construits en agrégeant les PIB en parité de pouvoir d'achat des principaux
pays de chaque zone (Mexique, Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Venezuela dans le cas de l'Amérique latine
et Corée du Sud, Inde, Indonésie, Taiwan, Thailande, Philippines, Malaisie, Hong Kong, Singapour, Chine
dans le cas de l'Asie émergente).
De fait, la trajectoire des principaux pays
d’Amérique latine depuis le début des années
1980 a été jalonnée d’épisodes hyperinflationnistes, le Chili et la Colombie faisant
figure d’exception de ce point de vue avec
des taux d’inflation qui n’ont jamais dépassé
les 40 %. En Argentine notamment, le glissement annuel de l’indice des prix à la consommation a ponctuellement dépassé 20000 %
en mars 1990. Au Brésil, il a culminé à
6832 % en avril 1990. Le Mexique et le
Venezuela ont également connu ponctuellement des taux d’inflation supérieurs à 100 %.
1
Les principaux pays d’Amérique latine ont également été affectés par un nombre de crises nettement plus élevé que les principaux pays d’Asie
émergente entre 1980 et 2006 (cf. tableau ciaprès). Sur la période 1980-2006, les six principaux pays d’Amérique latine ont connu vingtquatre épisodes assimilables en première approche, selon la méthode définie par Frankel et
Rose (1996) et Van Rikhjekem (2000)1, à des crises de change, soit quatre en moyenne par pays.
Seuls quatorze épisodes de ce type peuvent être
mis en évidence au cours de la même période
dans les dix principaux pays d’Asie émergente,
Suivant la méthode définie par Frankel et Rose (1996) et Van Rikhjekem (2000), une crise de change est ici définie
comme une dépréciation de 10 % du taux de change au cours d’un mois donné. Seules sont de surcroît prises en
compte les variations supérieures (de plus de deux fois l'écart type de la variation du taux de change observée au
cours des deux années précédentes) à la variation mensuelle moyenne du taux de change au cours des trois à quatorze mois précédents. Pour éviter de comptabiliser deux fois une même crise, chacun des épisodes satisfaisant à
ces critères doit être éloigné de douze mois au moins du précédent. D’autres auteurs, comme Kaminsky et Reinhart
(1999), prennent également en compte la variation des réserves de change, ce qui permet d’inclure les attaques
spéculatives auxquelles la Banque centrale a résisté victorieusement et d’exclure certains épisodes de dévaluations.
47
Analyse structurelle
Nombre de crises bancaires et crises
de changes entre 1980 et 2006
Amérique latine six pays
Mexique
Argentine
Brésil
Chili
Colombie
Venezuela
Asie émergente 10 pays
Chine
Corée du Sud
Inde
Indonésie
Thailande
Taiwan
Philippines
Malaisie
Hong Kong
Singapour
change
bancaires
25
4
5
7
2
0
7
14
4
1
1
3
2
0
2
1
0
0
12
2
4
2
2
1
1
8
1
0
0
1
2
1
2
1
0
0
1
Suivant la méthode définie notamment par
Frankel et Rose (1996) et par V a n R i k h j e k e m
(2000), une crise de change est ici définie comme
une dépréciation de 10 % du taux de change au
cours d'un mois donné. Seules sont de surcroît
prises en compte les variations supérieures (de
plus de deux fois l'écart type de la variation du
taux de change observée au cours des deux
années précédentes) à la variation mensuelle
moyenne du taux de change au cours des trois à
quatorze mois précédents. Pour éviter de comptabiliser deux fois une même crise, chacun des
épisodes satisfaisant à ces critères doit être éloigné de douze mois au moins du précédent.
2
World Bank (2003). Caprio et Klingebiel (1999).
soit 1,4 en moyenne par pays. De même, la base
de données établie par la Banque mondiale en
2003, sur la base des travaux de Caprio et
Klingelbiel (1999), et les données disponibles
pour la période la plus récente, permettent de
recenser douze épisodes distincts de crise bancaire2 dans les six principaux pays d’Amérique
latine, contre huit seulement dans les dix principaux pays d’Asie émergente3.
La plupart de ces crises se sont traduites par
une violente décélération de la croissance
2
3
Seules les crises caractérisées de systémique ont été
comptabilisées ici.
Il existe souvent des liens étroits entre crise de
change et crise bancaire. Voir à ce sujet Kaminsky et
Reinhart 1999.
48
suivie d’une période de récupération, souvent interrompue elle-même par une nouvelle
crise. Ainsi les multiples crises (crise de la
dette, crises bancaires et crises de change)
qui ont ponctué le début des années 1980
ont-elle valu à la décennie 1980-1990 le surnom de « décennie perdue ». Entre 1980 et
1990 la croissance régionale a de fait été inférieure à 1,5 % par an en moyenne et le PIB
par habitant a reculé. La région a ensuite
renoué avec des rythmes de croissance supérieurs à 3,5 % par an en moyenne à partir du
début des années 1990 avec une chronologie
toutefois un peu décalée selon les pays. Mais
la crise mexicaine de 1994 et surtout la crise
brésilienne de 1998 ont marqué le début
d’une nouvelle « demi-décennie perdue »
dont le point d’orgue a été la crise argentine
de 2001-2002.
Depuis 2003, la croissance de la zone s’est
notablement accélérée, retrouvant même un
rythme proche de ceux observés entre 1960 et
1980 (+5,2 % par an en moyenne sur la
période 2003-2006 contre +5,8 % par an en
moyenne sur la période 1960-1980). Aucun
des six principaux pays de la zone n’est resté
à l’écart de ce mouvement. Par ailleurs, si l’on
fait abstraction de la dévaluation du bolivar
vénézuélien en avril 2005 dont la caractérisation comme « crise de change » est discutable, les principaux pays de la zone n’ont pas
subi de crise financière majeure. Fait remarquable, même le cycle de hausse des taux d’intérêt amorcé en 2004 aux Etats-Unis ne s’est
pas traduit, comme à l’accoutumée, par des
tensions sur les marchés monétaires et financiers ou par une interruption brutale des flux
de capitaux à destination des principaux pays
de la zone. Les places financières de la zone
ont certes été affectées, comme les autres places émergentes, par une série de turbulences
en mai 2006. Mais ces turbulences n’ont eu,
semble-t-il, qu’un impact limité et la situation
s’est normalisée rapidement. Les indices boursiers et les devises des principaux pays de la
région ont effacé au cours des mois suivants la
correction baissière qu’ils avaient subie alors
et les spreads obligataires ont continué à
s’écraser jusqu’à des niveaux planchers. La
nouvelle correction qui a affecté fin février les
places boursières des pays de la zone comme
Quelles perspectives de croissance pour l’Amérique latine à moyen terme ?
celles des pays industrialisés s’est pour l’instant également avérée sans lendemain.
Le profil de croissance heurté qu’exhibent les
principaux pays d’Amérique latine depuis un
demi-siècle rend néanmoins difficile l’interprétation de ces évolutions favorables dans une
perspective de moyen terme. L’accélération de
la croissance et la relative stabilité macroéconomique observée depuis quatre ans signifient-elles que les principaux pays d’Amérique
latine ont rompu avec leurs vieux démons et
sont enfin engagés sur un sentier de croissance
soutenue ? Les évolutions observées depuis
quatre ans peuvent-elles être mises en parallèle, à certains égards, avec celles observées
entre 1960 et 1980, période au cours de
laquelle les pays d’Amérique latine voyaient
leur PIB par habitant progresser à un rythme
supérieur à celui des Etats-Unis, ou correspondent-elles à une trajectoire très différente ?
S’agit-il d’un éphémère épisode de récupération après les crises qui ont jalonné la « demidécennie perdue » ? Cette hypothèse mérite un
examen d’autant plus attentif qu’il y a des raisons de penser que la vive croissance qu’ont
enregistré les principaux pays d’Amérique
latine depuis quatre ans est en partie imputable à des facteurs conjoncturels. De fait, les
pays d’Amérique latine ont bénéficié depuis
quatre ans d’un environnement extrêmement
favorable caractérisé par :
– une abondance des liquidités mondiales
et une faible aversion au risque de la part
des investisseurs internationaux favorisant la recherche de rendements sur les
marchés émergents ;
– une croissance mondiale vive ;
– une forte hausse du cours des matières
premières qui a permis une amélioration
des termes de l’échange des principaux
pays de la zone et a dopé la croissance de
leurs recettes fiscales.
Aussi un diagnostic précis sur les perspectives de croissance à moyen terme des principaux pays d’Amérique latine passe-t-il en premier lieu par une analyse des ressorts de la
croissance des principaux pays de la zone au
cours du dernier demi siècle. La pertinence
des différents scénarios de moyen terme qui
pourront être esquissés sur cette base sera
ensuite discutée pour chacun des principaux
pays de la zone. L’analyse sera ici limitée aux
trois principaux pays de la zone : Argentine,
Mexique et Brésil.
Position dans le cycle
et sources de la croissance
Pour tenter de préciser les ressorts de la
croissance des trois principaux pays
d’Amérique latine que sont le Brésil,
l’Argentine et le Mexique au cours du dernier
demi-siècle, deux types d’analyses peuvent
être menées successivement :
– une analyse statistique, qui permettra
d’identifier les composantes cycliques,
tendancielle (assimilée à la production
potentielle) et saisonnière du PIB des
principaux pays d’Amérique latine afin de
préciser leur position dans le cycle sur la
période récente,
– une analyse comptable, qui permettra de
préciser les sources de la croissance dans
une perspective d’offre.
Position dans le cycle
Pour préciser la position dans le cycle d’un
pays, il importe d’identifier les différentes
composantes de son PIB réel : cyclique, tendancielle (assimilée à la production potentielle), saisonnière et aléatoire. Il est alors
possible de calculer un « output gap », défini
comme l’écart entre le PIB observé et sa composante tendancielle (ou potentielle) 4.
Différentes méthodes, qui présentent l’avantage de ne pas requérir d’autres données que
des séries longues de PIB réel, peuvent être
utilisées : filtres de Hodrick Prescott, de
Baxter King et modèles à composante
inobservables proposés initialement par
Harvey (1989). Dans la mesure où nous nous
intéressons plus particulièrement à la période
récente, nous privilégierons un modèle à
composantes inobservables qui présente
l’avantage de comporter des effets de bords
4
Output gap = (série observée–composante cyclique)*100/composante cyclique.
49
Analyse structurelle
plus limités qu’un filtre de Hodrick-Prescott.
Ce type de modèle permet également de ne
pas faire d’hypothèses préalables sur la
nature des séries.
Dans le cas de l’Argentine, du Brésil et du
Mexique, l’exercice est toutefois rendu particulièrement difficile par l’ampleur des chocs
et des changements structurels qui ont marqué l’histoire récente des trois pays. Les
résultats doivent donc être interprétés avec
précaution et devront être, au cours de travaux ultérieurs, affinés et confrontés à ceux
obtenus à partir d’autres méthodes.
S’agissant des données, nous nous fondons
sur les données trimestrielles de comptabilité
nationale disponibles, quitte à disposer d’un
historique limité à la période 1980-2006. Dans
le cas de l’Argentine, nous utilisons la série
trimestrielle de PIB aux prix constants de
1993 élaborée par l’INDEC sur la période
1980-2006 à partir des données du système de
comptabilité nationale en base 1986 et du système de comptabilité nationale en base 1993.
Dans le cas du Mexique, l’INEGI fournit également une série de PIB trimestriel en millions
de pesos de 1993 sur la période 1980 2006.
S’agissant du Brésil, nous utilisons la série trimestrielle de PIB reconstruite par l’IBGE sur
la période 1980-2006 à partir des données de
comptabilité nationale aux prix de 1980 et de
la série en prix chainés de la base 1990, tout
en intégrant les révisions liées au passage au
nouveau système de comptabilité nationale
en base 2000. Le modèle est présenté dans
l’annexe 1 et l’on se contente ici d’exposer
brièvement les résultats.
S’agissant de la nature des séries5, une observation à « l’œil nu » suggère que seul le PIB
argentin présente les caractéristiques typiques
des processus avec tendance stochastique. Le
trend du PIB argentin apparaît être marqué
par deux périodes extrêmes, fin 1980 et début
2000. La série de PIB brésilien apparaît beaucoup plus « lisse » et la non stationnarité
apparaît davantage du fait d’un trend déterministe. On peut avoir quelques doutes quant à
la série du Mexique, qui présente une cassure
sur la période 1995-1996. Afin de vérifier la
nature des processus sous-jacents à chaque
composante, nous présentons dans le tableau
suivant les estimations des paramètres libres
que sont les variances des composantes irrégulières, du trend, de la saisonnalité, et du
cycle. L’état final de la fin de la période d’estimation est également présenté ci-dessous
afin de tester la significativité des composantes non observées de nature déterministe.
Résultats d’estimation du modèle à composantes inobservables
Estimation finale des paramètres libres
Composante
Mexique
Estimation
Erreur std
approchée
Irrégulière1
Niveau1
Pente1
Saisonnalité1
Cycle (damping factor)
Cycle (période)
Cycle1
0,00
0,00
0,00
0,00
0,91
32,52
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00**
0,03***
10,65***
0,00**
Argentine
Estimation
Erreur std
approchée
0,00
0,00
0,00
0,00
1,00
25,88
0,00
0,00
0,00***
0,00
0,00*
0,00***
1,21***
0,00
Brésil
Estimation Erreur std
approchée
0,00
0,00
0,00
0,00
0,89
45,26
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00***
0,04***
13,04***
0,00***
Note : (***) significatif à 1%, (**) significatif à 5 %, (*) significatif à 10 %.
Variance du terme d’erreur.
1
5
Identifier la nature de la tendance des trois séries de PIB est un préalable important. Pour simplifier, lorsque la
tendance est déterministe, la chronique retrouve toujours son mouvement de long terme. Lorsque la tendance
est stochastique, l’effet d’un choc à un moment donné du temps est permanent (phénomène de persistance
ou d’hystérésis), c’est-à-dire que le choc se répercute à l’infini sur les valeurs futures de la série. Lorsque l’on
traite un processus déterministe comme un processus stochastique, on introduit artificiellement dans la série
un mouvement cyclique de court terme. A l’inverse, lorsqu’un processus stochastique est supposé être un processus déterministe, on introduit dans la série un mouvement cyclique de long terme. Pour plus de précisions,
on se reportera à l’annexe II.
50
Quelles perspectives de croissance pour l’Amérique latine à moyen terme ?
Analyse de signification des composantes
Argentine
(basée sur l’état final)
Dans le cas de l’Argentine, les résultats sont
dans l’ensemble cohérents avec les faits stylisés connus même si l’interprétation de certains points est parfois difficile et exigerait
d’autres analyses complémentaires. Quatre
périodes peuvent être distinguées : 19801990, 1991-1997, 1998-2002, 2003-2006. Sur
la période 1980-1990, qui est une période
caractérisée par une forte instabilité économique et par des crises récurrentes, tant le
PIB tendanciel que le PIB observé présentent
un profil heurté et des rythmes de croissance
en moyenne faibles. L’output gap est négatif
jusqu’au quatrième trimestre 1984. Entre le
premier trimestre 1985 et le deuxième trimestre 1988, le niveau du PIB est ensuite supérieur à sa tendance. L’instauration de la
« Convertibilité » (1991) coïncide avec le
début d’une période d’accélération de la
croissance du PIB tendanciel. L’output gap
est positif entre le quatrième trimestre 1991 et
le quatrième trimestre 1994 et négatif entre le
premier trimestre 1995 et le deuxième trimestre 1998. A partir du deuxième trimestre
1998, l’économie argentine entre dans une
phase de décroissance du PIB tendanciel qui
s’accélère au moment de la crise de 2001
2002. Sur la période récente (2003-2006), qui
nous intéresse plus particulièrement ici, le
modèle fait apparaître un redressement de la
croissance tendancielle et l’output gap fortement négatif apparu après la crise se réduit.
Depuis la fin 2004, l’output gap est positif. La
Composante
DF
Mexique
Khi 2
Irrégulière
Niveau
Pente
Cycle
Saisonnalité
0.00
0.00
0.00
109606*** 8846.47*** 136646***
17.73*** 279.33***
3.88**
0.09
2.88
8.25**
32.10*** 12.92***
74.54***
1
1
1
2
3
Brésil
Khi 2
Argentine
Khi 2
Note : (***) significatif à 1%, (**) significatif à 5%,
(*) significatif à 10%.
Pour les trois pays, la partie irrégulière des
séries n’a pas de grande importance et n’a
aucune raison d’être prise en compte comme
composante de la série. Comme nous le pressentions, le trend en niveau apparaît dans les
trois cas peu variable. Il semble être déterministe dans le cas des séries de PIB mexicain
et brésilien6. Seul le PIB argentin présente un
trend de nature stochastique. Pour les trois
pays, la variance de la pente du trend ne semble pas être significative statistiquement.
L’analyse de la significativité des composantes basée sur l’état final montre que le trend
et la pente ont un effet certain sur les trois
séries. La composante saisonnière est stochastique pour le Mexique et l’Argentine mais
présente une faible variabilité. Le cycle est
stochastique au Mexique et en Brésil et de
nature déterministe en Argentine. L’analyse
de la significativité des composantes basée
sur l’état final permet également de montrer
que le cycle déterministe sous-jacent au PIB
argentin est fortement significatif.
Argentine
La prise en compte du trend, du cycle et de la
saisonnalité semble être suffisante pour prédire l’essentiel de la série. Bien que les séries
présentent certaines parties qui peuvent s’apparenter à des cassures, la spécification parcimonieuse retenue passe les différents tests
habituels sur les résidus. La qualité prédictive du modèle pour les trois pays est excellente, ce qui autorise la mesure des trends et
des prévisions, au moins jusqu’à 2009, bornés entre leurs intervalles de confiances.
6
Compte tenu des travaux publiés dans ce domaine,
cet aspect est assez surprenant et mériterait de plus
amples investigations dans des travaux ultérieurs.
PIB tendanciel et PIB observé
5.9
En logarithme
(corrigé des variations saisonnières)
Observé
Tendanciel (lissé)
5.7
5.5
5.3
5.1
81 83 85 87 89 91 93 95 97 99 01 03 05 07 09
Source : Coe-Rexecode
51
Analyse structurelle
bonne qualité prévisionnelle du modèle autorise à penser que le PIB tendanciel devrait
connaître un ralentissement avec un output
gap légèrement négatif.
deuxième semestre 2006. Pour les cinq prochaines années, le modèle prédit que l’output
gap devrait se réduire pour s’établir autour
de -0.4% du PIB tendanciel en moyenne.
Brésil
Mexique
Dans le cas du Brésil, les résultats sont également globalement cohérents avec les faits
stylisés, même si l’interprétation de certains
points précis est également difficile et exigerait des analyses complémentaires. La
période 1980-1990 est marquée par une forte
instabilité macroéconomique et par une série
de crises ce qui se traduit par une croissance
inférieure en moyenne à la croissance tendancielle à partir de 1982 et par un output
gap très négatif entre 1986 et 1989. Sur la
période 1990-1993, période caractérisée par
une très forte inflation, l’output gap est en
revanche fortement positif. Entre le quatrième trimestre 1994 et le troisième trimestre
1998, période marquée par la mise en place
du Plan Real et par une série de chocs externes, le modèle fait apparaître un output gap
en moyenne négatif. L’output gap ressort
ensuite en positif jusqu’au quatrième trimestre 2003. A partir du deuxième trimestre
2003, l’output gap se réduit, devenant négatif
à partir du premier trimestre 2004. Il continue à se creuser jusqu’à fin 2006, ce qui peut
apparaître étonnant compte-tenu de l’accélération de la croissance observée depuis le
Dans le cas du Mexique, les résultats sont globalement cohérents avec les faits stylisés,
même si l’interprétation de certains points
précis est également difficile et exigerait des
analyses complémentaires. L’output gap positif observé au début des années 1980 se réduit
et devient négatif à partir du deuxième trimestre 1983, après la crise de la dette (1982).
Entre le premier trimestre 1986 et le premier
trimestre 1990, période de forte volatilité
macroéconomique, l’output gap restera négatif, le troisième trimestre 1988 marquant un
point bas. L’output gap redevient positif entre
le troisième trimestre 1990 et le deuxième trimestre 1994. L’output gap redevient fortement
négatif après la crise financière de 1994, le
point bas étant atteint au deuxième trimestre
1995. Entre le deuxième trimestre 1997 et le
quatrième trimestre 2001, l’output gap est à
nouveau positif, le point haut étant atteint au
troisième trimestre 2000. Sur la période 2003
2005, l’output gap est resté négatif, redevenant très légèrement positif à partir du premier trimestre 2006. Le modèle prédit pour les
cinq prochaines années un output gap oscillant entre 0.3 % et -0.3 % du PIB tendanciel.
Estimation de l’output gap
Brésil
4
En % du PIB tendantiel
Mexique
2
2
1
0
0
-2
-1
-4
-2
81 83 85 87 89 91 93 95 97 99 01 03 05 07
Source : Coe-Rexecode
52
En % du PIB tendantiel
81 83 85 87 89 91 93 95 97 99 01 03 05 07
Source : Coe-Rexecode
Quelles perspectives de croissance pour l’Amérique latine à moyen terme ?
Les sources de la croissance
Pour affiner le diagnostic de moyen terme,
une analyse des sources de la croissance des
trois grandes économies d’Amérique latine
que sont l’Argentine, le Mexique et le Brésil
sur longue période peut être utile.
La méthode
La décomposition de la croissance peut être
effectuée de manière purement comptable à
partir de la méthodologie définie par Solow
(1957). On suppose une fonction de production de type Cobb Douglas avec des rendements d’échelles constants en condition de
concurrence pure et parfaite du type :
Y
=
1−α
α
AK L
Où
Y
est le PIB
K
est la quantité de capital physique utilisée
dans le processus de production
L
est la quantité de facteur travail utilisé
dans le processus de production
A est la productivité totale des facteurs
α est la part du travail dans le produit de
l’économie
Dès lors, l’équation de décomposition de la
croissance peut s’écrire comme suit
d ln Y
d ln L
d ln K
d ln A
=α
+ (1 − α )
+
dt
dt
dt
dt
Le premier terme de la somme mesure la
contribution du facteur travail, le deuxième la
contribution du capital et le troisième la contribution de la productivité totale des facteurs.
En l’absence de séries longues sur les heures
effectivement travaillées, les données d’emploi
fournies par le Groningen Growth and
Development Center sur la période 1960-2006
sont utilisées comme proxy de la quantité de
travail utilisée dans le processus de production.
S’agissant des données de PIB en volume, des
séries longues peuvent être reconstruites à
partir des données de comptabilité nationale
publiées par les différents instituts statistiques nationaux. Dans le cas du Brésil, on utilise les données publiées par l’IBGE dans le
cadre des « Statistiques du XXe siècle » sur la
période 1947-2006 en intégrant les révisions
liées au passage au nouveau système de
comptes nationaux en base 2000 à partir de
2000. Dans le cas du Mexique, l’INEGI fournit une série annuelle consolidée de PIB aux
prix constant de 1980 sur la période 19001996 et une série annuelle de PIB à prix
constants de 1993 sur la période 1980-2006.
Dans le cas de l’Argentine, on utilise la série
de PIB à prix constant de 1993 reconstruite
par Maia et Nicholson (2001).
Le stock de capital est calculé à partir de la
méthode dite de l’inventaire permanent, ce
qui suppose de disposer de données d’investissement depuis le début du XXe siècle. Pour
l’Argentine les données proviennent de la
base établie par Maia et Nicholson (2001) et
mise à jour à partir des données d’investissement publiées par l’INDEC dans le cadre du
système de comptabilité nationale en base
1993. Le calcul est effectué à un niveau
détaillé, en différenciant selon les types d’investissement. Dans le cas du Mexique, une
série longue d’investissement total peut être
reconstituée à partir des travaux de Mariña
Flores (2000) et des données de comptabilité
nationale. Dans le cas du Brésil, on utilise les
données publiées par l’IBGE dans le cadre
des « Statistiques du XXe siècle » sur la
période 1947 2006 en intégrant les révisions
liées au passage au nouveau système de
comptes nationaux en base 2000 à partir de
l’année 2000. Les taux de dépréciation retenus sont calculés en fonction de la structure
de l’investissement total, la durée de vie des
constructions étant supposée plus importante
que la durée de vie des machines et équipements. En retenant, de manière convention53
Analyse structurelle
nelle, un taux de dépréciation annuel de
16 % pour les investissements en machines
et en équipements et de 3 % pour les investissements en construction, on aboutit à un
taux de dépréciation annuel moyen de 10 %
pour le Mexique, de 8 % pour le Brésil et de
5 % pour l’Argentine7.
Les coefficients sont choisis en fonction du
partage de la valeur ajoutée au cours d’une
année de base (1993 pour l’Argentine et le
Mexique et 2000 pour le Brésil). Les valeurs
retenues sont de 0,5 pour l’Argentine, de 0,5
pour le Brésil et de 0,7 pour le Mexique8.
Faute de données suffisantes, le facteur travail est supposé homogène et les fluctuations
dans l’utilisation du capital sont ignorées.
Leurs effets sont donc capturés dans la productivité totale des facteurs qui est calculée
comme un résidu.
Les résultats
Les principaux résultats sont résumés dans
les tableaux page suivante9. Dans les trois
pays, les fluctuations du stock de capital et
de la productivité totale des facteurs expliquent la majeure partie des variations du
rythme de la croissance intervenues depuis le
début des années 1960.
La période 1960-2003
En Argentine, le ralentissement de la croissance de la productivité totale des facteurs et
celui du stock de capital expliquent respectivement 49 % et 42 % de l’écart entre les
rythmes moyens de croissance observés sur la
période 1960-1980 et 1980-2003. Au Brésil, le
ralentissement de l’accumulation de capital
7
8
9
physique est à l’origine de 56 % de l’écart
entre les rythmes moyens de croissance observés sur la période 1960-1980 et 1980-2003. Au
Mexique, si l’on retient la même périodisation,
la contribution de la productivité totale des
facteurs au ralentissement de la croissance est
un peu plus importante (46 %) et celle du
stock de capital un peu plus faible (36 %).
Le ralentissement de la productivité totale
des facteurs s’esquisse dès le milieu des
années 1970 et explique plus de la moitié de
l’écart entre les rythmes de croissance observés au cours de la période 1960-1980 et de la
« décennie perdue » 1980-1990 (61 % au
Mexique 54 % au Brésil et 70 % en
Argentine). Sur cette période, la productivité
totale des facteurs s’est contractée en
moyenne chaque année de 1,9 % en
Argentine, 1,3 % au Mexique et 1,3 % au
Brésil. La diminution de la contribution du
capital s’opère essentiellement à partir du
début des années 1980 et explique également
une part significative de l’écart entre les
rythmes de croissance observés sur la
période 1960-1980 et 1980-1990 (44 % au
Brésil 31 % au Mexique et 28 % en
Argentine). Le stock de capital ne retrouvera
jamais les rythmes de croissance qui étaient
les siens au cours des années 1960, en particulier au Brésil, et ce sont les fluctuations de
la productivité totale des facteurs qui sont à
l’origine des fluctuations ultérieures.
La décénnie 1990-1998 est marquée par un
retour à des rythmes de croissance de la productivité totale des facteurs plus soutenus,
avec une chronologie un peu décalée selon les
pays. En Argentine, la progression de la productivité totale des facteurs se redresse à partir de 1991, date à laquelle est mis en place le
currency board et atteint même un rythme
jamais observé auparavant (+3,5 % par an
Ces hypothèses sont globalement conformes à celles retenues dans d’autres travaux. Voir notamment Maia
Nicholson (2005) et Faal (2005).
Le choix de coefficients constant est une hypothèse forte mais peut être justifié par l’absence de convergence
des trois pays auxquels on s’intéresse ici.
Les résultats obtenus paraissent globalement cohérents avec ceux qui figurent dans la littérature. Les hypothèses relatives à la part du travail et du capital retenues, la méthode et la nature des données retenues pour générer le stock de capital peuvent toutefois expliquer certains écarts. Voir notamment Maia et Kweitel (2005), Faal
(2005), Pinheiro, Serven et Thomas (2001), Bosworth and Collins (2003), Loayza et alii (2005) et Solimano et Soto
(2005).
54
Quelles perspectives de croissance pour l’Amérique latine à moyen terme ?
Sources de la croissance des différents facteurs de production (en %)
Taux de croissance annuel moyen
PIB
Capital Travail
TFP
Contribution annuelle moyenne
PIB
Capital
Travail
TFP
3,5
0,8
-0,6
4,8
-3,1
8,9
3,5
1,0
1,0
0,9
1,4
0,5
1,6
1,2
1,5
1,5
0,5
5,2
1,0
-0,3
-1,9
3,5
-4,0
5,8
3,5
0,8
-0,6
4,8
-3,1
8,9
1,6
0,5
0,4
0,4
0,7
0,2
0,9
0,6
0,8
1,6
0,3
2,8
1,0
-0,3
-1,9
3,5
-4,0
5,8
6,6
2,5
2,4
2,8
1,9
5,7
2,9
3,3
7,7
3,4
3,9
2,2
2,5
0,5
3,5
3,1
4,2
3,0
3,7
3,0
2,8
3,9
2,1
1,6
1,2
-0,7
-1,3
0,0
-0,8
2,9
0,4
1,2
6,6
2,5
2,4
2,8
1,9
5,7
2,9
3,3
2,6
1,1
1,3
0,8
0,9
0,2
1,2
1,1
2,7
2,0
2,4
2,0
1,8
2,6
1,4
1,1
1,2
-0,7
-1,3
0,0
-0,8
2,9
0,4
1,2
7,4
2,4
2,4
1,9
1,7
3,4
8,5
2,8
4,1
1,8
2,1
1,3
3,4
2,0
3,2
0,7
1,9
3,0
1,5
0,0
-1,3
0,7
-0,3
1,3
7,4
2,4
2,4
1,9
1,7
3,4
4,3
1,4
2,0
0,9
1,0
0,6
1,7
1,0
1,6
0,3
1,0
1,5
1,5
0,0
-1,3
0,7
-0,3
1,3
Argentine
1960-1980
1980-2003
1980-1990
1990-1998
1998-2003
2003-2006
Mexique
1960-1980
1980-2003
1980-1990
1990-1998
1990-1996
1996-1998
1998-2003
2003-2006
Brésil
1960-1980
1980-2003
1980-1990
1990-1998
1998-2003
2003-2006
en moyenne) avant de décliner à nouveau
brutalement à partir de 1998. Au Mexique, le
redressement de la productivité totale des facteurs intervient après la crise de 1994-1995 et
se prolonge en revanche jusqu’en 2000. Au
Brésil, le redressement de la productivité est
également intervenu plus tardivement et a été
relativement limité sur la période 1990-1998.
La contribution du stock de capital à la croissance a en revanche été encore plus faible
qu’au cours de la période précédente, sauf en
Argentine où l’écart est toutefois faible.
Le ralentissement de la productivité totale des
facteurs explique intégralement ou quasi-intégralement la décélération de la croissance intervenue au Brésil et en Argentine au cours de la
demi-décennie suivante (1998-2003), demidécennie au demeurant marquée par des crises
majeures dans les deux pays. Au Mexique, le
ralentissement de la productivité totale des facteurs, comme celui de la croissance du reste, est
limité aux années 2001-2002.
De multiples facteurs explicatifs
possibles
De multiples éléments peuvent être avancés
pour expliquer le ralentissement de la progression du stock de capital et, dans une
moindre mesure, de l’emploi, ainsi que les
fluctuations marquées de la productivité
totale des facteurs observées entre 1980 et
2003 dans les trois pays d’Amérique latine
étudiés ici. Les trois éléments sont du reste
dans une large mesure auto-corrélés, ce qui
complique l’analyse. Les liens entre progression de l’emploi et croissance du PIB ne sont
notamment plus à démontrer. S’agissant des
liens entre croissance du stock de capital et
de la productivité totale des facteurs, de nombreux travaux [(De Long, Summers (1991,
1992) Klenow Rodriguez Clare (1997)] ont
montré qu’il existait une relation forte et
positive entre taux d’investissement productif
et taux de croissance de la productivité totale
des facteurs ainsi qu’entre croissance de la
55
Analyse structurelle
productivité totale des facteurs et intensité
capitalistique. Ces liens sont du reste loin
d’être univoques. L’accroissement de l’intensité capitalistique ou l’introduction de nouveaux équipements incorporant des innovations technologiques peut accroître l’efficacité des facteurs de production. Inversement,
une productivité plus élevée peut permettre
la réalisation de projets d’investissements qui
sans cela n’auraient pas été rentables.
Les liens entre productivité totale des facteurs et accumulation de facteurs de production, capital comme emploi, sont sans doute
d’autant plus étroits que la productivité
totale des facteurs est calculée comme un
résidu et incorpore donc tous les éléments
non pris en compte dans la mesure du capital ou du travail (structure du stock de capital, contenu en innovation, distorsions dans
l’allocation des ressources, variation de la
durée du travail, niveaux d’éducation et de
qualification de la main d’œuvre etc…).
L’évolution de la productivité totale des facteurs risque dès lors d’être affectée par des
phénomènes cycliques et d’absorber en partie les fluctuations liées à la succession de
crises qu’ont connues les trois pays de la
zone depuis le début des années 1980.
– La décomposition de la croissance effectuée ci-dessus ne tenant pas compte, faute
de données suffisantes, des variations
dans l’utilisation du stock de capital, la
baisse du taux d’utilisation des capacités
qui apparaît usuellement dans les phases
de ralentissement du cycle, et a fortiori
pendant les périodes de crise, est prise en
compte dans le résidu, c’est-à-dire dans la
productivité totale des facteurs. Inversement la hausse des taux d’utilisation
qui se produit dans les phases d’accélération du cycle, et a fortiori pendant les
périodes de récupération post crises, se
traduit par une accélération de la productivité totale des facteurs. L’effet peut être
particulièrement intense dans les périodes
de forte instabilité macroéconomique : la
croissance du stock de capital est généralement faible pendant les périodes de
crise, voire dans l’immédiat après crise si
prévaut une forte incertitude macroécono56
mique. Les taux élevés de croissance de la
productivité des facteurs observés dans
les trois pays considérés au cours des
périodes succédant à de fortes crises
financières pourraient ainsi apparaître
comme des phénomènes de rattrapage. La
dynamique s’avèrerait insoutenable en
l’absence de croissance soutenue du stock
de capital.
– Le même raisonnement peut être appliqué
au facteur travail. Les variations de la
durée du travail n’étant pas prises en
compte dans les données d’emploi utilisées pour effectuer la décomposition de la
croissance, la baisse du nombre d’heures
effectivement travaillées qui intervient en
période de basses eaux conjoncturelles, et
a fortiori en période de crise, est capturée
par la productivité totale des facteurs.
Inversement la hausse du nombre d’heures travaillées qui s’opère dans les phases
de reprise se traduit par une hausse de la
productivité totale des facteurs. Les liens
entre productivité totale des facteurs et
emploi sont renforcés dans les trois pays
étudiés ici par l’existence d’un important
emploi informel qui n’est que très partiellement pris en compte dans les données
officielles de population active. Il y a de
bonnes raisons de penser que dans les
périodes post-crise, la montée en puissance de l’emploi informel n’est pas capturée par les statistiques et se retrouve
dans le résidu (productivité totale des facteurs). La poursuite de la phase de normalisation de l’économie peut tendre à l’inverse à surestimer l’accumulation de facteur travail (reformalisation des relations
de travail) et à sous-estimer la croissance
de la productivité totale des facteurs.
D’une manière générale, le plus ou moins
grand degré de stabilité macroéconomique
joue sans doute un rôle d’autant plus important qu’il est un déterminant commun important de la croissance de la productivité totale
des facteurs et du stock de capital (Fisher
1993). Une mauvaise gouvernance macroéconomique et des institutions faibles peuvent
induire des pertes d’efficacité aussi bien dans
le secteur public que privé. Une hyper-
Quelles perspectives de croissance pour l’Amérique latine à moyen terme ?
inflation, des politiques distorsives, une série
de déséquilibres fondamentaux accroissant
les risques de crise ou une forte insécurité
juridique peuvent décourager l’investissement productif et entraîner une allocation
sous-optimale des ressources en capital
comme en travail. La productivité totale des
facteurs s’en trouvera affectée en retour et
empêchée de croître durablement à un
rythme élevé. De nombreuses études récentes
tendent du reste à mettre en évidence le rôle
primordial de l’instabilité et de la faible gouvernance macroéconomique dans l’explication des médiocres performances de
l’Amérique latine depuis le début des années
198010.
D’autres études mettent également en avant
les inégalités dans la distribution des richesses. L’Amérique latine présente, avec
l’Afrique, le plus fort degré d’inégalités de
distribution des richesses et de revenus11, ce
qui se traduit par des coefficients de Gini très
élevés (entre 50 et 60 pour les trois pays étudiés ici contre des indices compris entre 30 et
50 pour les pays d’Asie émergente) et ne
montrant pas de signe de réduction au cours
du temps. Le lien entre inégalités internes et
performance économique globale a fait l’objet d’une vaste littérature depuis Kuznets.
Cornia et Court (2001) trouvent un impact
négatif sur la croissance pour un niveau
d’inégalités trop faible (Gini < 0.25) ou trop
élevé (Gini > 0.4). Pour Barro (1999), un
haut niveau d’inégalité est préjudiciable dans
les pays pauvres. Ces résultats sont vivement
discutés car il semble qu’il y ait aussi un
impact de la croissance sur le niveau d’inégalités ce qui complique l’analyse statistique.
Quoi qu’il en soit, le degré d’inégalités dans
la zone est régulièrement avancé par les institutions internationales comme pesant négativement sur la croissance de ces pays.
10
11
La période 2003-2006
Sur la période récente (2003-2006) qui nous
intéresse plus particulièrement, le redressement de la productivité totale des facteurs
apparaît une nouvelle fois comme la principale source de l’accélération de la croissance
perceptible dans les principaux pays de la
zone. La contribution du facteur travail ne
joue positivement et significativement qu’en
Argentine où la période post-crise a été marquée par une vive croissance de l’emploi. Au
Mexique et surtout au Brésil, la contribution
du capital à la croissance a été encore plus
faible en moyenne qu’au cours de la période
précédente et en Argentine, elle a été à peine
plus élevée. Cette faible contribution de l’accumulation de facteurs physiques, travail
(Mexique) et surtout capital (Brésil Mexique
et Argentine) apparaît même comme le principal trait distinctif entre la période actuelle et
la période de vive croissance observée entre
1960 et 1980.
De ce point de vue, la période de croissance
actuelle s’apparente sans doute davantage à
celle observée entre 1991 et 1998 en
Argentine, 1993-1998 au Brésil et 1996-2000
au Mexique, qui s’acheva par des crises
majeures (Brésil - Argentine). Faut-il en
conclure que le régime de croissance actuel
n’est pas soutenable ? La faible accumulation
de facteurs physiques qui le caractérise
constitue-t-elle un trait durable ou peut-on
s’attendre à retrouver à moyen terme un
régime de croissance plus équilibré, qui serait
caractérisé à la fois par une accumulation de
facteurs physiques et par une vive croissance
de la productivité totale des facteurs ? Quels
rythmes de croissance peut-on attendre dans
les cinq prochaines années compte tenu des
évolutions observées depuis 2003 ?
Voir Singh et Cerisola notamment pour une revue de littérature et Solimano Soto (2005) pour une analyse des
liens entre évolution de la TFP en Amérique latine et instabilité macroéconomique.
Deininger et Squire 1997. Ce sujet est également amplement documenté dans les différents rapports de l’ONU
et de la Banque Mondiale.
57
Analyse structurelle
La complexité des liens entre productivité
totale des facteurs et croissance du stock de
capital et la multiplicité des facteurs susceptibles d’expliquer leurs évolutions respectives
rendent difficile un diagnostic a priori, exigeant une analyse plus approfondie de la
situation de chaque pays.
Analyse de différents
scénarios de moyen terme
Plusieurs scénarios de moyen terme peuvent
être envisagés sur la base de l’exercice de
décomposition de la croissance auquel nous
nous sommes livré, selon que la récente
hausse de la productivité des facteurs soit
considérée comme durable ou non et selon
que l’investissement retrouve ou non les
rythmes de croissance qui étaient les siens
lors de la période 1960-1980, permettant un
redressement progressif de la croissance du
stock de capital et des gains de productivité.
Le facteur travail est supposé évoluer en ligne
avec la population de 15 à 64 ans, ce qui
revient à supposer un taux d’activité et un
taux d’emploi constant.
Scénarios 2007-2011
2003-2006
1
Argentine
PIB
Contributions
- du capital
- du travail
- de la TFP
Mexique
PIB
Contribution
- du capital
- du travail
- de la TFP
Brésil
PIB
Contribution
- du capital
- du travail
- de la TFP
58
Scénarios
2
3
8,9
8,3
9,1
2,9
0,2
2,8
5,8
1,8
0,7
5,8
2,5
0,7
5,9
1,4
0,7
0,8
3,3
3,9
5,2
2,9
1,1
1,1
1,2
1,5
1,2
1,2
2,0
1,2
2,1
1,4
1,2
0,3
3,4
3,2
4,0
2,5
0,6
1,5
1,3
1,2
0,7
1,3
1,8
0,7
1,5
1,2
0,7
0,6
• Le scénario 1 (« scénario moyen »)
prolonge les tendances récentes. Le
redressement de la productivité totale des
facteurs observé sur la période récente est
supposé durable. La productivité totale
des facteurs continue donc à croître aux
mêmes rythmes que ceux observés en
moyenne depuis 2003. En revanche, le
taux d’investissement est maintenu
constant à son niveau de 2006.
• Le scénario 2 (« scénario haut ») est
celui d’une croissance plus intensive en
capital. Pour le Brésil et le Mexique, cette
hypothèse se traduit par un retour aux
taux de croissance très élevés de l’investissement observés au cours de la période
1960-2003. Dans le cas de l’Argentine, où
l’investissement a enregistré des rythmes
de progression historiquement élevés au
cours de la période récente, cette hypothèse se traduit par un retour progressif, à
horizon 2011, aux taux d’investissement
plus élevés observés en moyenne au cours
de la période 1960-1980. Le redressement
de la productivité totale des facteurs
observé sur la période récente est non
seulement considéré comme durable mais
est également supposé s’accélèrer légèrement. Pour le Brésil, cette accélération se
traduit par un retour aux rythmes moyens
de progression de la productivité totale
des facteurs observés sur la période 19601980. Pour le Mexique, les rythmes de
croissance de la productivité totale des
facteurs observés au cours des deux dernières années sont prolongés. Dans le cas
de l’Argentine, l’hypothèse retenue est
celle d’une poursuite graduelle de l’accélération de la productivité totale des facteurs à partir des rythmes de croissance
historiquement élevés observés au cours
des dernières années.
• Dans le scénario 3 (« scénario bas »)
non seulement aucun changement significatif ne s’opère dans le régime d’accumulation du capital, ce qui se traduit par des
taux d’investissement constants, mais le
redressement de la productivité totale des
facteurs observé sur la période récente
n’est pas supposé durable. La productivité
Quelles perspectives de croissance pour l’Amérique latine à moyen terme ?
totale des facteurs retrouve des rythmes
de croissance équivalents à ceux observés
en moyenne sur longue période (19602006).
Les rythmes de croissance moyens obtenus à
horizon 2011 à l’issue de cet exercice sont
assez variables non seulement selon les scénarios mais aussi selon les pays, en raison
des évolutions différenciées observées sur le
passé récent, nécessitant une analyse au cas
par cas.
Le cas du Brésil
Dans le cas du Brésil, un scénario de croissance « faible » du type du scénario 3, où la
productivité totale des facteurs retrouverait
les rythme de croissance médiocres observés
en moyenne sur la période 1960-2006 apparaît peu probable. Le redressement de la productivité totale des facteurs observé à partir
de 2004 possède certes sans doute une composante cyclique. Il est notamment probablement à mettre en relation avec une utilisation
plus intensive du stock de capital dans un
contexte d’accélération cyclique. Un net
redressement du taux d’utilisation des capacités dans l’industrie est du reste perceptible
à partir de début 2004. Toutefois, le modèle à
composantes inobservables que nous avons
utilisé suggère que l’output gap est resté en
moyenne négatif au cours des quatre dernières années, continuant même à se creuser en
dépit de l’accélération de la croissance intervenue à partir du second semestre. Surtout,
le redressement de la productivité totale des
facteurs perceptible au cours des trois dernières années est sans doute également le reflet
des mutations profondes qu’a connues l’économie brésilienne depuis trois ans et peut, de
ce point de vue, apparaître durable.
Les réformes introduites à partir de 1999 ont
notamment permis de considérables progrès
sur le front de la stabilité macroéconomique
et une réduction de la vulnérabilité aux chocs
externes. Sur le front monétaire, la politique
de ciblage d’inflation adoptée après la mise
en flottement du real en 1999 a permis une
désinflation spectaculaire. Certes, les résultats sont apparus fragiles dans un premier
temps. La cible d’inflation fixée par le
Conseil Monétaire National a notamment été
dépassée à trois reprises (2001 et, surtout,
2002, 2003), en raison d’une série de chocs
d’offre défavorables et de la forte nervosité
sur les marchés financiers qu’a suscité l’élection du président Lula en 2002. Depuis trois
ans néanmoins, les cibles d’inflation ont été
atteintes et l’inflation a nettement reflué. Le
glissement annuel de l’indice des prix à la
consommation (IPCA) est ainsi passé de
17,2 % en mai 2003 à 3 % en novembre 2006
et s’est stabilisé depuis à ce niveau. Cette
évolution a sans doute été facilitée par une
conjoncture plutôt favorable et notamment
par l’appréciation du real dans un contexte
de liquidité mondiale abondante, de vive
croissance du commerce mondial et de
hausse des cours des produits de base dont le
Brésil est exportateur net.
Toutefois, elle semble également pouvoir être
portée au crédit des efforts de communication (publication rapide des comptes rendu
des réunions de politique monétaire, explicitation des chocs ayant conduit au dépassement des objectifs d’inflation dans des
« lettres ouvertes », analyse trimestrielle des
risques inflationnistes dans des « rapports
d’inflation » publics etc), de la rigueur et de
l’indépendance dans l’usage de ses instruments dont a fait preuve la Banque centrale
depuis trois ans. Les autorités monétaires ont
notamment montré depuis 2002 qu’elles
étaient à même de résister aux pressions
émanant des responsables politiques comme
de l’opinion, n’hésitant pas à remonter leur
taux directeur jusqu’à 26,5 % en 2002 et
jusqu’à 19,75 % en 2005 pour juguler les tensions inflationnistes, et ne le baissant que
très progressivement ensuite pour ne pas
compromettre leur objectif d’inflation malgré
des chiffres de croissance médiocres. Elles
semblent de ce fait avoir acquis une certaine
crédibilité : depuis trois ans, les anticipations d’inflation sont nettement moins volatiles et tendent à converger vers le point central des intervalles cibles.
59
Analyse structurelle
Sur le front budgétaire, même si la situation
des finances publiques reste une source de
fragilité, de considérables progrès ont également été accomplis. Les objectifs d’excédents
primaires fixés annuellement, conformément
à la « loi de responsabilité budgétaire » de
2001, ont été respectés, même en période de
ralentissement économique ou de cycle électoral. Des conditions financières plus favorables et une politique active de refinancement
ont parallèlement permis une réduction de
plus de 20 points de PIB de la composante
externe de la dette publique nette depuis septembre 2002, le secteur public consolidé
étant même devenu créditeur net en devises
à partir du mois de juin 2006. Le gouvernement a notamment remboursé par avance ses
obligations auprès du FMI (5,5 milliards de
dollars en juillet 2005 et 15,5 milliards de dollars en décembre 2005) et auprès du Club de
Paris (1,7 milliard de dollars en mars 2006),
et racheté par anticipation en avril 2006 pour
6,6 milliards de Brady Bonds.
Dans ce contexte, la dette publique est restée
sur une trajectoire soutenable. Le rapport de
la dette nette du secteur public consolidé au
PIB a même nettement reculé depuis fin
2003, passant de 57,2 % en décembre 2003 à
49,7 % en janvier 2007. Les autorités budgétaires se sont également efforcé d’améliorer
la structure de la dette externe en lançant un
vaste programme de rachat des titres dont la
maturité était inférieure à 2010 et plus récemment à 2012. S’agissant de la dette publique
interne, qui représente désormais la totalité
de la dette nette du secteur public consolidé,
un programme actif de refinancement a également permis de réduire l’exposition au risque de change et de taux. Les titres indexés
sur le taux de change ont été éliminés et la
part des titres à taux fixe dans l’ensemble des
titres de la dette domestique est passée de
2,2% en décembre 2002 à 35,4 % en février
2007. Des mesures visant à élargir le marché
des titres de la dette domestique en le rendant plus accessible aux investisseurs étrangers pour permettre, à moyen terme, un
allongement des maturités et une poursuite
de la baisse des primes de risque, ont également été adoptées. La taxe de 15 % sur les
gains de capital et les revenus à laquelle
60
étaient soumis jusqu’à présent les non résidents a notamment été supprimée en février
2006.
Cette stabilisation monétaire et budgétaire,
même si elle demande encore à être consolidée, crée des conditions plus favorables aux
gains de productivité, portant à considérer le
scénario 1, qui prolonge les tendances récentes en la matière comme probable. En revanche, le passage à un régime de croissance plus
soutenue fondé sur un accroissement de l’intensité en capital et sur une accélération des
gains de productivité, paraît plus difficile à
l’horizon de moyen/court terme retenu ici. Les
obstacles à une croissance soutenue de l’investissement et de la productivité totale des
facteurs restent en effet nombreux et ne peuvent être levés qu’au moyen de réformes dont
le bénéfice ne sera sans doute pas perceptible
avant plusieurs années. L’accès au financement reste notamment problématique même si
les crédits au secteur privé non financier ont
enregistré une vive progression au cours des
dernières années. Le maintien d’un système de
crédit administré continue en effet à drainer
une part significative de l’épargne vers des
investissements peu rentables12. Sur le segment non réglementé, le coût du financement
reste extrêmement élevé. En dépit du net
assouplissement de la politique monétaire
intervenu depuis septembre 2005, les taux
d’intérêt réels sont encore proches de 10 % si
l’on prend comme référence le Selic, et supérieurs à 20 % sur les crédits non réglementés
aux entreprises, en raison notamment des difficultés de recouvrement des prêts et de la
lourdeur de la charge fiscale qui pèse sur l’intermédiation financière (OCDE, 2005 et 2006).
D’une manière générale, à 32,8 % du PIB en
2006, la charge fiscale paraît relativement élevée au regard de celle qui prévaut dans les
pays émergents de niveau de revenu comparable et constitue un frein à la croissance de
l’investissement et de la productivité. Malgré
une nette réduction depuis 1990, les taxes sur
12
Les prêts administrés représentent encore près d’un
tiers du total des encours de prêts. Sur le détail du
fonctionnement du système de prêts administrés,
voir OCDE (2005) et OCDE (2006).
Quelles perspectives de croissance pour l’Amérique latine à moyen terme ?
les importations, dont on sait qu’elles peuvent être de formidables vecteurs de diffusion
de l’innovation, restent notamment plus élevées que dans la moyenne des pays de
l’OCDE. La pénurie d’infrastructures crée
également des conditions peu propices à une
accélération de l’investissement et des gains
de productivité. De ce point de vue, le vaste
programme d’investissement en infrastructures (504 milliards de reals entre 2007 et 2010
soit 4 à 5 points de PIB par an) présenté en
janvier 2006 par le président Lula dans le
cadre du « Programme d’accélération de la
croissance » (PAC) apparaît bienvenu. Son
financement apparaît toutefois peu assuré.
Même sous les hypothèses très favorables de
croissance retenues par le gouvernement, et à
moins d’envisager une décrue sans précédent
des taux d’intérêt, une prise en charge totale
par le secteur public consolidé des dépenses
prévues pousserait en effet à nouveau la
dette publique à la hausse. Une implication
significative du secteur privé paraît donc
nécéssaire. Elle semble toutefois loin d’être
acquise en dépit des incitations fiscales prévues dans le dispositif (exonération de la taxe
sur les recettes des nouveaux investissements
en infrastructures) du fait de la persistance
d’obstacles règlementaires et du coût élevé
du financement. La pénurie de main d’œuvre
qualifiée qui est associée à des taux de scolarisation encore faibles, notamment dans le
secondaire et dans le supérieur, et à des inégalités de revenu encore très fortes avec des
poches d’exclusion sociale importantes,
demeure également sans doute une limite
sérieuse à une accélération de la productivité
totale des facteurs (OCDE, 2005 et 2006).
Le cas de l’Argentine
Dans le cas de l’Argentine en revanche, un
scénario du type du scénario 3 où la productivité totale des facteurs retrouverait à moyen
13
terme les rythmes de croissance très médiocres observés en moyenne sur la période
1960-2006 semble le plus plausible. Le
modèle à composantes inobservables que
nous avons utilisé montre du reste que l’output gap est positif depuis début 2005. En prévision, il suggère que l’output gap redeviendrait négatif à partir de 2008 et fait apparaître
de surcroît un net ralentissement de la croissance tendancielle. Les forts gains de productivité observés depuis 2003 (+5,8 % par an
en moyenne) sont de fait sans doute essentiellement le reflet d’un phénomène de rattrapage « post-crise » dans un contexte
conjoncturel au demeurant très favorable. La
productivité totale des facteurs dépassait du
reste à peine en 2006 son niveau de 1998 (cf.
graphique ci-dessus) et les obstacles à une
poursuite de son redressement à un horizon
de moyen terme paraissent nombreux.
Le maintien des rythmes de croissance de la
productivité totale des facteurs observés
depuis quatre ans pourrait notamment être
compromis par une accumulation de capital
insuffisante. Certes, la progression très soutenue de l’investissement (+27,9 % par an en
moyenne depuis quatre ans) a permis au
stock de capital total de retrouver son niveau
antérieur à la crise. Selon nos estimations, il
dépassait même en 2006 son niveau de 2001
de 1,7 %. En revanche, sous les hypothèses
de dépréciation du capital13 que nous avons
retenues, le stock de machines et équipement
s’inscrivait encore en 2006 à un niveau légèrement inférieur à celui qui était le sien avant
la crise.
Surtout, jamais les ratios stock de capital par
employé et stock de capital sur PIB n’ont été
aussi faibles depuis le début des années
1980. Cette situation se traduit par des tensions persistantes sur les capacités. Les taux
d’utilisation des capacités dépassent notamment les 90 % dans certains secteurs clefs de
l’industrie manufacturière (raffineries de
A la suite de Maia et Nicholson (2001), nous avons retenu un taux de dépréciation de 13 % pour le stock de
capital en machines et équipement (hors transport) national et de 16 % pour le stock de capital en machines et
équipement (hors transport) sur la période 1998-2006 en supposant notamment, ce qui est une hypothèse plutôt favorable, que la crise dramatique qu’a connue l’économie argentine n’a pas entraîné d’accélération du
vieillissement des équipements.
61
Analyse structurelle
pétrole et industries métalliques de base)
depuis fin 2004. Les tensions sont également
importantes dans les secteurs de l’électricité
et du gaz, les capacités de transport dans ce
dernier secteur semblant notamment insuffisantes pour soutenir une accélération de la
demande. Les risques de voir apparaître, à un
horizon de cinq ans, des goulots d’étranglement et des situations de rationnement des
approvisionnements en énergie qui entraîneraient probablement des pertes d’efficacité
dans un grand nombre de secteurs, sont donc
non négligeables. Le problème de l’énergie
semble notamment particulièrement aigu
dans la mesure où les investissements de
capacités mettent souvent plusieurs années
avant d’être opérationnels. Si le gouvernement devrait prendre en charge certains projets14 en la matière, un redressement de l’investissement privé paraît en revanche plus
incertain en l’absence de résolution du
conflit qui oppose l’Etat argentin aux prestataires privés de services publics, qui ont subi
une compression drastique de leurs marges
du fait de la pesification de l’économie et du
gel de leur tarifs.
Les mesures de contrôle des prix ont du reste
été étendues à partir de la fin 2005 à une
vaste gamme de produits à l’issue d’accords
entre les principaux producteurs et distributeurs du pays et le gouvernement. Certes,
cette politique hétérodoxe a permis de limiter
pour l’instant le dérapage de l’inflation.
Celle-ci avait nettement accéléré à partir de la
fin 2004 en lien, semble-t-il, avec les tensions
croissantes sur les capacités de production et
avec un output gap positif. Le glissement
annuel de l’indice des prix à la consommation est ainsi passé de 12,3 % en décembre
2005 à 9,1 % en mars 2007. Toutefois, outre
que le récent remplacement de la responsable
en charge de la mesure des prix à la consommation par une fonctionnaire du Ministère de
l’économie a jeté un doute sur la crédibilité
14
15
des données, les mesures de gel des prix
pourraient s’avérer inefficaces à moyen
terme. Elles pourraient même peser sur l’investissement, accroître les distorsions dans
l’économie et limiter les gains de productivité, conduisant à une accentuation des tensions inflationnistes.
Les risques d’un dérapage de l’inflation sont
d’autant plus importants que les salaires
continuent à progresser à un rythme nettement supérieur à l’inflation (+18,4 % en
glissement annuel en janvier 2007) et pourraient même accélérer encore à l’issue des
négociations salariales qui se tiennent actuellement15. Surtout, les politiques macroéconomiques conservent une orientation très
expansionniste, qui, si elle était parfaitement
adaptée dans l’immédiat après-crise, paraît
moins légitime à présent, l’économie tournant aux limites de ses capacités. Ces politiques expansionnistes contribuent à réduire la
visibilité sur la trajectoire de moyen terme de
l’économie argentine et accroissent la probabilité d’un scénario d’ajustement brutal via
une accélération de l’inflation, créant un climat peu favorable à une accélération de l’investissement et au maintien de gains de productivité soutenus.
La politique monétaire semble notamment
peu à même de stabiliser l’économie. En
dépit d’une remontée graduelle depuis quelques mois, les taux d’intérêt réels demeurent
négatifs. Certes, le maintien de taux d’intérêt
faibles peut paraître approprié dans un
contexte où les ratios crédits sur PIB demeurent très faibles et où une vive croissance de
l’investissement est nécéssaire pour limiter
les tensions sur les capacités et permettre une
poursuite du redressement de la productivité.
Dans un contexte où les ratios de crédits sont
faibles, une hausse des taux d’intérêt n’est du
reste pas le meilleur outil pour refroidir la
demande. En revanche, le maintien du taux
Pour plus de détail, consulter la liste des projets d’investissements publics disponible sur le site du ministère de
l’économie http://www2.mecon.gov.ar/pnip/basehome/invpub.php
De nombreuses organisations syndicales demandent en effet des hausses de salaires supérieures ou égales à
20 %, prenant argument des substantielles revalorisations du traitement récemment accordées par le gouvernement aux enseignants (+24 % en termes nominaux) et de la possible sous-estimation de l’inflation par les
chiffres officiels.
62
Quelles perspectives de croissance pour l’Amérique latine à moyen terme ?
de change du peso à un niveau compétitif
que semble toujours privilégier la Banque
centrale risque d’entrer en conflit avec l’objectif de stabilisation de l’inflation, encourageant notamment les hausses des salaires et
des prix dans le secteur des biens non échangeables.
Une politique budgétaire plus restrictive
pourrait être l’outil approprié pour refroidir la
demande et, ce faisant, calmer les tensions
inflationnistes. Les évolutions actuelles ne
semblent toutefois pas aller dans ce sens, les
dépenses primaires tendant à progresser plus
vite que les recettes et ayant même nettement
accéléré depuis quelques mois. Cette tendance devrait perdurer dans les mois à venir.
La perspective des élections présidentielles
de 2007, où le président Kirchner devrait être
candidat à sa propre succession, rend en effet
peu probable un durcissement de la politique
budgétaire. Certes, le solde des administrations publiques s’inscrit toujours en excédent
(+1,8 % du PIB en 2006) et les ratios dette
publique/PIB et service de la dette /PIB ont
continué à diminuer après l’opération de
restructuration de la dette en défaut lancée le
17 janvier 2005 et le remboursement par anticipation des obligations externes contractées
auprès du FMI en décembre 2005.
Les risques de sanction financière à court
terme paraissent donc limités et les spreads
obligataires s’inscrivent du reste à un niveau
plancher. A moyen terme toutefois, le rythme
actuel de croissance des dépenses publiques
semble difficilement soutenable, ne serait-ce
que parce que la vive croissance des revenus
observés depuis quatre ans reflète en partie
un processus de normalisation de l’économie
après la crise. La faible qualité des institutions budgétaires laisse toutefois craindre que
l’ajustement des dépenses à un scénario de
plus faible croissance des recettes ne soit
dominé par des considérations politiques de
court terme et ne se fasse au détriment des
dépenses d’investissement.
Le cas du Mexique
Dans le cas du Mexique comme dans le cas du
Brésil, le redressement de la productivité
totale des facteurs observé sur la période
récente possède à l’évidence une composante
conjoncturelle et peut notamment être mis en
relation avec une utilisation plus intensive du
capital dans un contexte d’accélération cyclique. Toutefois, le modèle à composantes
inobservables que nous avons utilisé suggère
que l’output gap est très proche de zéro.
Surtout, les progrès accomplis en matière de
stabilité macroéconomique depuis la crise de
1995 rendent peu probable un retour aux rythmes très médiocres de croissance de la productivité totale des facteurs observés sur longue période. L’économie mexicaine a du reste
montré une remarquable résilience depuis
neuf ans. Elle a notamment été épargnée par
les crises qui ont affecté les économies brésiliennes et argentine en 1998 et en 2001-2002.
Sur le front de la politique monétaire, le passage à une politique de ciblage d’inflation
après la crise de 1995 et l’abandon de l’ancrage par le change a permis une désinflation. Le glissement annuel de l’indice des
prix à la consommation est passé de 51 % fin
1995 à 4,4 % fin 2001 et s’est depuis maintenu dans un intervalle allant de 3 à 5,5 %.
Ce mouvement a été accompagné par une
réduction progressive des objectifs d’inflation
fixés. Les autorités monétaires visent depuis
quatre ans une cible de 3 % avec un intervalle de tolérance de + ou – 1 %. La transparence du cadre de politique monétaire a été
progressivement renforcée (institution d’un
calendrier préfixé pour les réunions de politique monétaire et communication rapide des
décisions, publication régulière de rapport
d’inflation explicitant les perspectives d’évolution des prix). Le mécanisme d’intervention de la Banque centrale a également pu
être modifié, le système du « corto », qui
consistait à modifier le montant des fonds
63
Analyse structurelle
proposés aux banques à un taux supérieur à
celui du marché, ayant été remplacé à partir
de 2005 par un taux directeur. Les autorités
monétaires sont, dans ce contexte, parvenues
à acquérir une certaine crédibilité. Depuis
2004, les anticipations d’inflation sont restées
bien ancrées dans l’intervalle ciblé par les
autorités monétaires, bien que le glissement
annuel de l’indice des prix à la consommation ait à plusieurs reprises franchi la barre
des 4 %. La politique monétaire est même
parvenue à un certain degré d’autonomie par
rapport au cycle américain, les autorités
monétaires ayant notamment pu assouplir les
conditions monétaires en 2005 au moment où
la FED relevait ses taux directeurs.
Sur le front budgétaire, la situation des finances publiques a été nettement assainie depuis
dix ans même si elle reste fragile. Les résultats budgétaires ont été dans l’ensemble
conformes aux objectifs fixés et le déficit
budgétaire n’a jamais dépassé -1,2 % du PIB
depuis 199516 en dépit des fluctuations cycliques et des variations des prix du pétrole. Un
fond de stabilisation pétrolière a même été
créé en 2000 pour amortir l’impact sur le
budget des fluctuations des recettes pétrolières, qui représentent plus de 30 % des recettes publiques, et d’éviter que l’ajustement en
cas de ralentissement conjoncturel ne se
fasse via une compression des dépenses et
notamment des dépenses d’investissement.
Le poids de la dette publique a nettement
diminué depuis 1995, se stabilisant depuis
2002 aux alentours de 20 % du PIB et une
politique active de gestion a permis d’améliorer sa structure (allongement des maturités,
réduction du poids de la dette externe et rem16
64
Le concept de déficit public retenu par le gouvernement mexicain donne une image un peu biaisée
toutefois de la réalité des finances publiques dans
la mesure où il exclut le coût des programmes de
sauvetage du secteur financier et celui des projets
mixtes d’investissement public / privé qui ont une
incidence différée sur le budget (PIDIREGAS). Il
inclut en revanche les recettes exceptionnelles
liées notamment aux privatisations. De ce point de
vue, il est préférable de se référer au « besoin de
financement du secteur public ». Quoi qu’il en
soit, celui-ci n’a cessé de reculer depuis sept ans,
passant de 6,4 % du PIB à 1,2 % du PIB en 2006.
boursement par avance de certaines obligations contractées auprès de la Banque mondiale et de la Banque interaméricaine de
développement, diversification des sources
de financement, remplacement sur le marché
interne des instruments à taux variables par
des instruments à taux fixes).
Comme dans le cas du Brésil, les progrès réalisés en matière de stabilisation des conditions macroéconomiques au cours des dernières années créent des conditions plus favorables aux gains de productivité et à l’investissement, accréditant des rythmes de croissance proches en moyenne à moyen terme de
ceux envisagés dans le scénario 1. Toutefois,
le passage à un régime de croissance plus
élevé du type de celui envisagé dans le scénario 3 paraît tout aussi peu probable d’autant
que les réformes nécéssaires pourraient être
rendues difficiles par les troubles politiques
apparus à la suite de l’élection du président
Calderon en juillet 2006 et par l’absence de
majorité stable au Congrès. La pénurie de
main d’œuvre qualifiée, qui se reflète dans
un nombre moyen d’années de scolarisation
très faible au regard de celui observé dans les
autres pays de l’OCDE associés à des inégalités de revenus très fortes (OCDE, 2005 b)
constitue notamment une limite sérieuse à
une accélération de la productivité du travail.
Les rigidités du marché du travail, qui se
caractérisent par un dualisme prononcé entre
un secteur formel où les emplois, généralement plus qualifiés, sont protégés par une
législation très stricte et un secteur informel,
drainant près de 40 % des effectifs employés,
sont également généralement considérées
comme un obstacle à une allocation efficiente
de la main d’œuvre et aux gains de productivité (Loayza, 1997, Faal, 2005 et OCDE,
2005). Par ailleurs, l’insuffisance des infrastructures (électricité transport et communication), associée notamment aux rigidités des
industries de réseaux, renchérit les coûts de
production, pèse sur la productivité et crée un
climat peu favorable à l’investissement
(OCDE, 2005 b). Les incertitudes juridiques et
le degré élevé de corruption sont également
des facteurs désincitatifs. Des réformes dans
ces domaines sont nécessaires pour que le
Quelles perspectives de croissance pour l’Amérique latine à moyen terme ?
Mexique puisse faire face à la concurrence
chinoise et tirer pleinement bénéfice de
l’ALENA et de sa proximité géographique avec
les Etats-Unis. Les impacts pour l’économie
mexicaine de la libéralisation du commerce
avec les Etats-Unis et le Canada sont jugés
soit positifs mais faibles (Banque Mondiale,
FMI, Hufbauer et al. 2005), soit non significatifs (Weisbrot, Rosnick et Baker 2004). Cette
situation est généralement attribuée aux faiblesses structurelles précédemment citées de
l’économie mexicaine (degré trop limité de
concurrence dans de nombreux secteurs,
insuffisances de capital humain et d’infrastructures et absence de montée en gamme).
Conclusion
Au final, si la croissance a nettement accéléré
au cours des quatre dernières années dans la
plupart des pays d’Amérique latine, les conditions pour une reprise de la convergence avec
les Etats-Unis à un horizon de moyen ne
paraissent toujours pas réunies. Les perspectives semblent toutefois très différenciées
selon les pays. En Argentine, le redressement
de l’activité apparaît en grande partie comme
le résultat d’un phénomène de rattrapage
après la crise dramatique de 2001 dans un
contexte conjoncturel au demeurant très
favorable. Les rythmes de croissance observés sur la période récente ne semblent pas
pouvoir être extrapolés à un horizon de
moyen terme. Le modèle à composantes
inobservables que nous avons estimé suggère
que l’output gap est positif depuis début 2005
et prédit un net ralentissement de la croissance. L’appareil industriel fonctionne au
demeurant aux limites de ses capacités et le
risque de voir se généraliser des goulots
d’étranglement à un horizon de cinq ans ne
peut être écarté. Un maintien des rythmes de
croissance élevés de la productivité totale des
facteurs observés sur la période récente et
une accélération dans les rythmes d’accumulation du capital paraissent d’autant moins
probables que les politiques économiques
contribuent à réduire la visibilité sur la trajectoire de moyen terme de l’économie argen-
tine et accroissent la probabilité d’un scénario d’ajustement brutal via une accélération
de l’inflation. Nous privilégions donc à horizon 2011 pour l’Argentine un scénario bas
avec des rythmes de croissance plus proches
de 3 % l’an en moyenne que des 9 % observés sur la période récente.
Dans le cas du Brésil et du Mexique, les changements profonds intervenus depuis la fin
des années 1990 incitent à davantage d’optimisme. L’accélération de la croissance est
certes sans doute associée à un phénomène
d’accélération cyclique, le redressement de la
productivité totale des facteurs observé sur la
période récente étant notamment probablement en partie le reflet d’une utilisation plus
intensive des facteurs de production.
Toutefois, le modèle à composantes inobservables que nous avons utilisé suggère que
l’output gap est quasi nul dans le cas du
Mexique et encore très négatif dans le cas du
Brésil où la politique monétaire a été très restrictive au cours des dernières années.
Surtout les progrès considérables accomplis
en matière de stabilité macroéconomique
dans les deux économies créent un climat
favorable au maintien des forts gains de productivité et des taux d’investissement observés sur la période récente. Toutefois, le passage à un régime de croissance plus élevé
paraît difficile à moyen terme compte tenu
des faiblesses structurelles dont souffrent ces
deux économies (faiblesse et coût élevé du
financement bancaire, pénurie d’infrastructure, taux d’imposition élevé, importance des
inégalités de revenu et faibles niveaux de formation de la main d’œuvre au Brésil ; pénurie d’infrastructure, importance des inégalités
de revenu et faibles niveaux de formation de
la main d’œuvre, insécurité juridique et degré
élevé de corruption au Mexique). Aussi privilégions-nous pour ces deux pays des « scénarios moyens » qui correspondent à des
rythmes de croissance proches de 4 % l’an au
Mexique et de 3,2 % l’an au Brésil.
Achevé de rédiger le 25 avril 2007
Mourad Ayouz - [email protected]
Valérie Perracino - [email protected]
65
Analyse structurelle
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66
Analyse structurelle
Marché européen
Compétitivité hors prix
des biens de consommation
par Laurent Ferrara
En décembre 2006, Coe-Rexecode a mené une enquête sur l’image en termes de prix et sur les aspects hors prix des biens de consommation importés
sur le marché européen. L’enquête recueille l’image des produits en provenance des principaux pays européens, des pays d’Europe centrale et orientale, des Etats-Unis, du Japon, et des pays émergents d’Asie, en particulier
la Chine. Les résultats montrent que les biens de consommation allemands
restent en tête sur les aspects hors prix, devançant les produits français qui
possèdent toujours une bonne compétitivité hors prix.
orsqu’on cherche à analyser l’évolution à court terme des parts de marché d’un pays, le facteur explicatif le
plus souvent évoqué est la compétitivité-prix. On dira qu’un pays est compétitif en termes de prix s’il est capable de
proposer sur un marché des produits similaires à ceux de ses concurrents mais à des prix
inférieurs. Cette compétitivité-prix repose
principalement sur les coûts de production, la
productivité (à travers les coûts salariaux unitaires), les taux de change et le comportement
de marge des entrepreneurs. Mais, au-delà de
cette compétitivité-prix, conjoncturelle, l’évolution des parts de marché est aussi fonction
de la compétitivité hors prix, plus structurelle.
Un pays est considéré comme compétitif sur
les aspects hors prix s’il est capable d’imposer
ses produits indépendamment de leur prix.
L
Ainsi, la qualité, le contenu en innovation
technologique, l’ergonomie ou le design d’un
produit sont des aspects qui permettent à une
entreprise de gagner des parts de marché. De
même, d’autres critères hors prix tels que la
notoriété de la marque ou la performance des
réseaux de distribution (efficacité des services commerciaux, brièveté et respect des
délais de livraison) constituent des facteurs
importants dans la compétition internationale. Ces critères hors prix des produits évoluent plus lentement et sont moins sensibles
aux fluctuations conjoncturelles que les prix.
Ils sont fonction de déterminants tels que
l’effort d’investissements matériel (augmentation et amélioration des capacités de production) et immatériel (formation, marketing, logiciels, recherche et développement),
l’organisation du travail et de la production
ou la politique économique.
L’actualité économique de ces derniers mois
est également venue souligner l’importance
croissante du rôle de la compétitivité hors
prix dans le commerce international. En effet,
cette dernière constitue un outil efficace pour
les entreprises européennes face à l’arrivée
massive de biens en provenance de pays à bas
coûts de main-d’œuvre, possédant donc une
forte compétitivité-prix. De plus, la compétitivité hors prix joue également un rôle d’amortisseur des chocs monétaires, en termes de
parts de marché à l’exportation. C’est le cas
notamment pour les entreprises européennes
en période de surévaluation de l’euro vis-à-vis
des principales monnaies, en particulier le
dollar auquel sont plus ou moins arrimées la
plupart des monnaies asiatiques.
67
Analyse structurelle
La stagnation du dollar vis-à-vis de l’euro
entre les deux enquêtes n’a pas permis aux
produits américains d’améliorer leur imageprix depuis 2004 ; ils restent ainsi jugés trop
chers sur le marché européen. De plus,
comme ils n’ont pas restauré leur compétitivité hors prix, qui s’était fortement dégradée
en 2004, ils affichent un mauvais ratio qualité-prix. En revanche, les biens de consommation japonais parviennent à conserver leur
compétitivité hors prix face aux trois grands
pays européens, notamment par leur qualité
et leur contenu en innovation. En revanche,
malgré la faiblesse du yen, les produits japonais sont jugés comme de plus en plus chers,
ce qui reflète certainement un comportement
de marge de la part des exportateurs.
Afin de fournir une mesure de la compétitivité hors prix des pays, Coe-Rexecode mène
tous les ans une enquête d’opinion auprès
d’un échantillon d’importateurs européens
sur l’image compétitive des produits importés
de chacun des ces pays européens, ainsi que
d’autres zones économiques, en termes de
prix et de critères hors prix (voir encadré cidessous pour la méthodologie de l’enquête).
La dernière enquête compétitivité hors prix
de Coe-Rexecode, effectuée en décembre
2006, met en lumière l’avance des biens de
consommation allemands sur leurs aspects
hors prix. Pour les quatre secteurs considérés
(habillement-textile, équipement du logement, hygiène-beauté et agro-alimentaire),
les biens allemands devancent les biens français et italiens, ces derniers se positionnant
en retrait des biens français. Les allemands
maintiennent leur écart avec leurs deux principaux concurrents grâce à la qualité de leurs
produits, mais également grâce à des scores
élevés dans les services.
Présents depuis 2004 dans l’enquête compétitivité hors prix, les produits chinois sont
jugés comme étant extrêmement avantageux
en termes de prix, affichant la meilleure
image-prix. Leur appréciation relative aux
prix est particulièrement élevée dans les sec-
Positionnement relatif de l’image-prix et hors prix
des biens de consommation en 2004 et 2006
0.6
0.5
Chine
0.4
Score prix
0.3
0.2
Asie émergente
0.1
Espagne
Italie
Peco
France
0.0
-0.1
Etats-Unis
Japon
-0.2
Allemagne
-0.3
Royaume-Uni
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Compétitivité hors prix des biens de consommation
Evolution de l’image du ratio qualité-prix
des biens de consommation entre 2004 et 2006
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Et
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Ro
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Depuis 1990, Coe-Rexecode réalise chaque
année une enquête auprès des importateurs
de six pays européens (France, Allemagne,
Italie, Royaume-Uni, Belgique et, depuis
1996, Espagne) sur l’image relative à la compétitivité des produits importés en termes de
prix et de critères hors prix. L’enquête porte
alternativement sur les biens de consommation, d’une part (années paires), et les biens
intermédiaires et d’équipement, d’autre part
(années impaires). Depuis 1998, l’enquête
incorpore l’image des produits importés de
l’Asie émergente. Depuis 2000, l’enquête a
été également élargie aux biens en provenance des Etats-Unis et du Japon et, depuis
2002, l’image des biens en provenance des
pays d’Europe centrale et orientale a été également recueillie. Enfin, depuis deux ans,
Ch
in
e
Ja
po
n
Méthodologie de l’enquête
Coe-Rexecode
Les importateurs évaluent si le produit, sous
ces différents aspects, est mieux, aussi bien
ou moins bien placé que l’ensemble des produits concurrents présents sur leur marché (y
compris les produits nationaux). Pour chaque
critère, des scores sont alors calculés, en supposant que ces notes résultent d’une variable
latente distribuée selon une loi n o r m a l e
centrée-réduite. On en déduit donc des scores
moyens relatifs pour chacun des pays d’origine, sur le critère prix et sur l’ensemble des
critères hors prix. Par la suite, l’analyse des
scores moyens est effectuée pour chacun des
marchés considérés, puis pour chacun des
secteurs.
Ita
lie
Es
pa
gn
e
D’une manière générale, l’enquête met en
évidence une amélioration significative des
scores-prix des pays à bas coûts de main
d’œuvre (Chine et PECO) sur le marché européen, en particulier sur deux secteurs clés,
l’habillement-textile et l’équipement du logement. De plus, en dépit d’une évolution favorable de leur monnaie depuis quelques
années, l’enquête révèle que les biens japonais et américains n’arrivent pas à s’imposer
par leurs prix sur les marchés européens.
Sur chacun des six marchés européens, les
importateurs enquêtés jugent les produits des
autres pays étudiés selon leur prix et leurs
caractéristiques hors prix. Les critères hors
prix considérés sont les suivants : la qualité,
le contenu en innovation technologique, la
notoriété, les délais de livraison, le service
commercial, le service aux utilisateurs et le
rapport qualité-prix. Depuis 2000, l’enquête
incorpore également un item relatif à l’ergonomie et au design des produits. Les biens de
consommation considérés dans l’enquête
sont regroupés en quatre secteurs différents :
habillement-textile, équipement du logement,
hygiène-beauté et agro-alimentaire.
ag
ne
Fr
an
ce
Enfin, les produits en provenance des pays
d’Europe centrale et orientale (PECO) améliorent simultanément leur compétitivité-prix et
hors prix par rapport à 2004. Ceci implique
un net redressement de leur ratio qualité-prix
qui rejoint désormais celui des produits asiatiques ou américains.
l’image des biens chinois a remplacé celle des
biens belges dans l’enquête.
Al
le
m
teurs de l’habillement-textile et de l’équipement du logement. De plus, malgré la stabilité de leur monnaie face à l’euro entre les
deux enquêtes, leur image-prix s’améliore sur
le marché européen. Les biens chinois se différencient ainsi des biens en provenance de
l’ensemble de l’Asie émergente en étant
mieux jugés, à la fois sur leurs aspects prix et
sur leurs aspects hors prix.
© Coe-Rexecode
69
Analyse structurelle
Compétitivité hors prix
des pays
Nous présentons ci-dessous les principaux
résultats de l’enquête compétitivité hors prix
de 2006 pour chacun des pays ou zones,
considérés, classés par ordre décroissant
selon le critère synthétique hors prix.
et l’équipement du logement, bien que leur
image-prix dans le secteur de l’agro-alimentaire s’améliore. Cette évolution sectorielle
est peut-être due à un effet de gamme. Ainsi,
le ratio qualité-prix des produits allemands se
dégrade par rapport à 2004, mais reste cependant le plus apprécié.
Bonne compétitivité
des produits français
Les produits allemands
toujours devant
La compétitivité hors prix des biens de
consommation allemands sur le marché européen en 2006 devance nettement celle des
autres pays considérés dans l’enquête. Bien
que n’ayant que très peu évolué cette année,
le critère hors prix des produits allemands
reste largement le plus apprécié. L’écart entre
les biens allemands et les biens des autres
pays est surtout sensible sur les aspects liés
aux services (service commercial, service
client et délais de livraison). De plus, le critère de la qualité arrive en tête dans tous les
secteurs. En revanche, sur les autres critères
hors prix, les biens allemands sont jugés de
manière équivalente aux biens français et italiens. Seul leur design est jugé un peu en
retrait par rapport aux autres critères et on
note que le contenu en innovation et la notoriété de leurs marques sont en recul.
Les biens de consommation français présentent une bonne image sur le marché européen, à la fois sur les critères prix et hors
prix. Leur image-prix se situe dans la
moyenne des pays enquêtés, s’améliorant
même légèrement par rapport à 2004.
S’agissant des aspects hors prix, les biens français obtiennent en 2006 de bons scores et se
positionnent derrière les biens allemands,
juste devant les biens italiens. Les critères hors
prix les plus appréciés restent la qualité, le
design et la notoriété des marques. Le design
français est d’ailleurs de plus en plus apprécié,
se situant juste derrière celui des italiens, leaders sur ce critère. En revanche, le contenu en
innovation technologique des biens est toujours en retrait vis-à-vis des autres critères. Ce
fait stylisé est récurrent chez les biens français
au fil des enquêtes, que ce soit pour les biens
de consommation ou les biens d’équipement.
S’agissant des prix, les produits allemands
sont jugés de plus en plus chers sur le marché européen, notamment dans l’habillement
Bien qu’en recul marqué dans le secteur de
l’hygiène-beauté par rapport à la dernière
Allemagne
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Compétitivité hors prix des biens de consommation
enquête, c’est dans ce secteur que les biens de
consommation français obtiennent leurs meilleurs scores hors prix. Ils y recueillent la plus
forte notoriété et rivalisent avec les biens allemands sur la qualité et avec les biens italiens
sur le design. Par contre, c’est dans le secteur
de l’équipement du logement que les biens
français sont les moins bien positionnés, la
qualité et le contenu en innovation technologique leur faisant défaut et la notoriété étant
en nette baisse.
Dans ces conditions, le ratio qualité-prix des
biens français se rapproche de celui des biens
allemands, loin devant celui des autres pays
enquêtés. Par secteur, ce ratio qualité-prix est
toujours bien positionné, excepté dans l’équipement du logement où il est un peu en retrait.
Des produits italiens compétitifs
sur les aspects hors prix
Après avoir progressivement amélioré leur
compétitivité hors prix, pour s’approcher
désormais des biens français sur ces aspects,
les biens de consommation italiens subissent
un recul de leur score hors prix en 2006. En
particulier, les biens italiens sont en baisse
sur leurs aspects les plus appréciés, à savoir
leur contenu en innovation technologique,
leur notoriété et leur design. Toutefois, sur
ce dernier critère, les produits italiens devancent toujours les autres pays. S’agissant des
services, les biens italiens recueillent de
moins bons scores, dans la moyenne des
Italie
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autres pays, sans évolution notable par rapport à la précédente enquête.
Par secteur, c’est dans l’équipement du logement que les produits italiens subissent la
plus forte dégradation de leurs scores hors
prix, en particulier pour les critères de qualité et de notoriété des marques.
L’image-prix des biens italiens est celle qui
subit la plus forte baisse entre les deux
enquêtes. Cette évolution est principalement
engendrée par le fort recul observé dans
l’équipement du logement et, dans une moindre mesure, dans l’hygiène-beauté. Dans le
secteur de l’équipement du logement, les produits italiens subissent certainement la
concurrence sur les prix des pays à faible
coût de production comme les pays asiatiques émergents et les PECO. Dans ce
contexte, le score du ratio qualité-prix se
dégrade, mais reste positif.
Les produits japonais
jugés trop chers
Les biens de consommation japonais,
concurrents habituels des biens des trois
grands pays européens sur leurs aspects hors
prix, maintiennent leur bonne image hors
prix sur le marché européen. Les produits
japonais sont surtout appréciés pour leurs
caractéristiques intrinsèques, à savoir la qualité, le design et le contenu en innovation
technologique. Sur ce dernier critère, les
biens japonais sont les plus appréciés,
devant les biens allemands, italiens et américains. En revanche, ils sont pénalisés par les
services offerts autour des produits. En particulier, les délais de livraison sont toujours
jugés trop longs, en dessous de la moyenne
des autres pays, notamment dans le secteur
agro-alimentaire.
Par secteur, c’est dans l’habillement que les
produits japonais sont les moins appréciés,
alors que leurs scores dans l’hygiène-beauté
se sont fortement dégradés par rapport à l’enquête précédente.
71
Analyse structurelle
mentaires et de l’équipement du logement
voient baisser sensiblement leur image-prix.
Japon
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Après avoir enregistré une amélioration de
leur positionnement sur les prix au début des
années 2000, l’image-prix des produits japonais subit un net recul en 2006 sur le marché
européen. Ainsi, malgré leur bonne image
hors prix, les produits japonais présentent un
ratio qualité-prix négatif.
L’image-prix américaine
ne profite pas
de la faiblesse du dollar
Dans le même temps, la compétitivité hors
prix des biens américains, habituellement
proche de celle des trois grands pays européens, en reste éloignée en 2006. Cet écart est
particulièrement marqué dans le secteur de
l’habillement, surtout en ce qui concerne la
qualité et le design. D’une manière générale,
les biens de consommation américains sont
de plus en plus appréciés pour leur contenu
en innovation technologique et possèdent
toujours une forte notoriété. En revanche, les
scores relatifs au design et aux services se
dégradent.
Au total, le ratio qualité-prix des produits
américains est donc en recul ; il se situe
désormais juste devant celui des produits
asiatiques et des PECO.
Les produits britanniques
toujours les plus chers
La stagnation du dollar vis-à-vis de l’euro
entre les deux dernières enquêtes de novembre 2004 et décembre 2006, autour d’un faible
niveau, n’a pas permis aux produits américains d’améliorer leur image-prix. Ces derniers
restent jugés trop chers sur le marché européen, proches des produits japonais en termes
de prix. En particulier, les produits agro-ali-
Après avoir enregistré une amélioration entre
2002 et 2004, la compétitivité hors prix des
biens de consommation britanniques recule
légèrement cette année. Cette évolution est
due à une nette dégradation des scores relatifs aux services autour des produits, points
forts traditionnels des produits britanniques.
Dans le même temps, l’image des critères
intrinsèques aux produits ne parvient pas à
s’améliorer significativement. Les critères de
Etats-Unis
Royaume-Uni
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Compétitivité hors prix des biens de consommation
design et de contenu en innovation technologique sont jugés en retrait de l’ensemble des
critères hors prix.
Parmi les secteurs, l’équipement du logement
est le seul pour lequel les produits britanniques rivalisent sur les aspects hors prix avec
les produits italiens, américains ou français.
Malgré une amélioration par rapport à 2004
dans le secteur de l’hygiène-beauté, les biens
de consommation britanniques affichent toujours la plus faible image-prix des pays considérés dans l’enquête. En fait, les biens britanniques n’arrivent pas à regagner les pertes
d’image-prix subies entre 1998 et 2000, lorsque la livre s’était fortement appréciée face à
l’euro.
Amélioration du ratio
qualité-prix espagnol
Malgré une légère amélioration, l’image hors
prix des biens de consommation espagnols
reste la moins appréciée des pays européens,
se situant toutefois devant les pays asiatiques
et les PECO. Parmi les différents critères hors
prix, les produits espagnols pêchent surtout
par un faible contenu en innovation technologique et une maigre notoriété, dont le score
se dégrade par rapport à l’enquête effectuée
en 2004. Dans l’ensemble, les critères intrinsèques aux produits sont moins appréciés
que les services dont les scores se situent
dans la moyenne des pays.
Dans les secteurs de l’hygiène-beauté et de
l’agro-alimentaire, les biens espagnols ont
gagné en compétitivité hors prix via les
aspects intrinsèques aux produits, notamment la qualité et le design.
En termes de ratio qualité-prix, les biens
espagnols améliorent leur position relative en
prenant la quatrième place aux produits chinois et en se rapprochant des produits italiens. Cette évolution positive de leur ratio
qualité-prix est particulièrement sensible
dans le secteur agro-alimentaire.
Des produits chinois
imbattables sur les prix
Les biens de consommation en provenance de
Chine sont considérés comme possédant la
meilleure image–prix, devançant largement les
autres pays. De plus, leur position sur les prix
s’est sensiblement améliorée depuis la dernière
enquête de 2004 : ils ont connu la plus forte
progression des scores-prix. L’écart sur les prix
avec les autres pays est particulièrement marqué dans l’habillement et dans l’équipement du
logement. En revanche, leurs aspects hors
prix sont moins appréciés ; ils souffrent en
particulier d’un fort déficit de notoriété sur le
marché européen et leurs scores sur la qualité et le design sont largement négatifs.
Au total, le ratio qualité-prix des biens chinois est jugé intéressant par les importateurs
européens qui le placent juste derrière celui
Espagne
Chine
0.20
0.60
0.10
2004
0.40
2006
0.20
0.00
0.00
-0.20
-0.10
2004
-0.40
-0.20
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2006
-0.60
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73
Analyse structurelle
des quatre grands pays de la zone euro. Ce
ratio subit toutefois un léger recul par rapport
à 2004, à cause d’une nette baisse du score
hors prix dans l’équipement du logement.
Les biens chinois se différencient ainsi des
biens en provenance de l’ensemble de l’Asie
émergente en étant mieux jugés, à la fois sur
les aspects prix et hors prix.
Bonne compétitivité-prix
pour les produits asiatiques
Les biens de consommation en provenance
de l’ensemble des pays émergents d’Asie possèdent toujours une très bonne image-prix
sur le marché européen, en particulier dans
les secteurs de l’habillement et de l’équipement du logement. De plus, le score des prix
dans l’habillement augmente sensiblement
par rapport à la précédente enquête de 2004,
indiquant ainsi que les importateurs européens jugent les produits textiles asiatiques
comme de moins en moins chers.
Bien qu’en légère amélioration par rapport à
2004, la compétitivité hors prix des produits
asiatiques reste très faible, se situant juste
devant celle des produits en provenance des
PECO. En particulier, le design des produits et
la notoriété des marques obtiennent des scores très négatifs. Au total, en dépit de leur
image-prix avantageuse, le ratio qualité-prix
des biens asiatiques est toujours l’un des plus
mal perçu sur le marché européen.
Forte amélioration
de la compétitivité des PECO
Parmi l’ensemble des biens de consommation
considérés dans l’enquête, ceux en provenance des PECO présentent la plus forte progression des scores, à la fois sur les critères
prix et hors prix. Par conséquent, le ratio
qualité-prix croît de manière très significative : il rejoint désormais celui des produits
asiatiques et américains.
Même si la compétitivité hors prix des produits PECO reste encore la plus faible, elle se
rapproche nettement de celle des pays émergents d’Asie et en particulier de la Chine.
Cette progression est sensible sur l’ensemble
des critères hors prix, même si on peut noter
que les services recueillent de meilleures
appréciations que les critères intrinsèques
aux produits. L’hygiène-beauté est le secteur
pour lequel les produits PECO recueillent les
moins mauvais jugements sur les aspects
hors prix, devançant d’ailleurs les produits
chinois sur ce secteur.
S’agissant des prix, le score des PECO continue
de s’améliorer depuis 2002 ; il est désormais
supérieur à celui des quatre pays de la zone
euro. La plus forte progression de l’image-prix
a eu lieu dans les secteurs de l’équipement du
logement et de l’agro-alimentaire.
Achevé de rédiger le 16 mars 2007
Laurent Ferrara
[email protected]
PECO
Asie
0.40
0.20
0.20
0.00
0.00
-0.20
-0.20
-0.40
-0.40
2004
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-0.80
-0.80
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2004
-0.60
2006
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Titre de chapitre
Point de vue
77
Trend or cycle?
On the causes of the improved economic
performance in Germany
Roland Döhrn
75
Point de vue
Trend or cycle?
On the causes of the
improved economic
performance in Germany
par Roland Döhrn
In 2006, the German economy grew unexpectedly strong. This gives rise to
argue whether this was caused by a prudent policy enhancing potential output growth, or whether it was only a cyclical phenomenon. This paper takes
the second view. Undoubtedly, Germany undertook a lot of reforms in the
product market, the labour market and in fiscal policy. But their impact on
potential output growth seems having been limited up to now. One reason is
that reforms where not very ambitious in many fields compared to other
countries, and many obstacles to higher growth continue to exist. Secondly,
empirical findings on the interrelation between growth and structural
reforms suggest that it takes some time until reforms will bear their fruits.
But the paper also argues that potential output growth in Germany may
have been underestimated in recent years.
n 2006 the German economy grew
unexpectedly strong. Most forecasters had underestimated the dynamics of the upswing substantially.
The Consensus Forecast of GDP growth
was 1.6% in January 2006 compared to
2.7 % which is the official figure published
in February 2007. Currently, the perspectives
for this year look promising, too. The latest
RWI Essen forecasted GDP to grow at a rate of
2.3% which, admittedly, is at the upper bound
of the band of predictions published to date.
But also less optimistic institutions foresee
growth rates that are clearly above what in
recent years was considered to be trend
growth, which is mostly used as a proxy for
potential output growth. One year ago, most
observers would have agreed that the latter is
somewhere in the range between 1% and
1.5%, depending on the technique employed.
I
The strong expansion in 2006 triggered a discussion about the reason of this turnaround.
Some argue it was caused by policy. They
make the point that the German economy now
benefits from several « structural » reforms
that have been undertaken since the mid nineties, namely liberalizing many product markets, a deregulation of the labour market, and
some fiscal reforms. Others share a more sceptical view concerning the role of policy. They
argue that the upswing in 2006 is mostly a
cyclical phenomenon. After five years in
which the economy grew markedly slower
than potential output it is quite natural in their
eyes that a period of above trend growth will
follow. If this would not happen, even the low
estimate of potential output growth would be
over-optimistic. Because the period of subdue
expansion was so long the turnaround must
be strong to close output gap.
However, differentiating between trend and
cycle is difficult. Therefore, a third explanation
must be taken into consideration: Maybe, the
trend growth estimates published in recent
years were too low. The difficulties to determine the growth trend are well known. The
77
Point de vue
procedures employed for that such as filter
techniques but also – maybe to lesser extent –
production functions tend to give observations
at the end of the sample period a high weight.
Therefore it is no wonder that all estimates of
potential output growth where revised downward between 2001, when it mostly was considered to be around 1.8% (e.g. Denis et al.
2002), and 2005, when the estimates were in
the range mentioned above.
Up to now, Germany has experienced only one
year of buoyant growth after a series of years
with subdue expansion. Therefore, it is too
early to expect a definite answer, whether
trend growth has changed. However, it may
help to look at the factors that might have
influenced potential output. Undoubtedly,
Germany has undertaken structural reforms in
a number of fields in the past ten or fifteen
years. What these reforms were and how they
may have influenced growth will be discussed
subsequently. The first section will spot product markets reforms, which might be a
widely underestimated factor. Then, in the
second section, I will turn to labour market
reforms. The third will focus on fiscal reforms.
Finally, the fourth section will conclude.
Product market reform
Like in most industrialized countries, Germany
started a number of reforms in diverse product
markets during 1990s. The formerly state
owned postal and telecommunication service
providers have become listed companies, and
the state reduced its influence on the companies although still being an important sharehol-
der. Amongst others in the context of creating
the EU internal market, also the air and the
road transport sector were liberalized. The rail
transport sector is still dominated by the former
state monopolist, which has not been privatized yet. But the market was opened to competitors which raised their share in particular in
local markets. The supply of electricity and gas
was traditionally in the hand of the private sector in Germany. Nevertheless, a small number
of big suppliers were monopolists in their distribution areas, and they were exempted from
German competition laws. In the meantime, a
new regulation body, the Bundesnetzagentur,
was established to improve the market access
for new suppliers in the electricity and gas market. Since 2005, it is also responsible for the
telecommunication and the rail transport market. For instance, it regulates the conditions
under which new suppliers may get access to
the infrastructure of the monopolists, which
increases competition in these markets.
To measure the extent to which markets are
open are competition the OECD developed
« liberalisation indices ». They range from 6
(no competition) to 0 (market is totally free)
and are calculated from a large number of
indicators characterizing the situation in
diverse markets (for details see Convay et al.,
2005, Conway and Nicoletti, 2006). These
indices make evident the significant progress
Germany made in deregulating markets. For
network industries, the indicator stood at 4.6
in 1990, and it dropped to 2.8 in 1998 and to
1.7 in 2003. For product markets, the indicator
signals a rather liberal regime already in 1998
and it fell from 1.9 to 1.4 in 2003. Also in busi-
Indicators of market regulation in Germany and in the OECD countries1
GER
Product market
Network industries market2
Business services3
Labour market4
4.6
3.2
1990
OECD
4.7
2.4
GER
1.9
2.8
4.2
2.5
1998
OECD
2.1
3.3
2.4
2.0
GER
1.4
1.7
3.1
2.2
Source: OECD.
1
2
3
4
78
Arithmetic mean.
Scaled between 6 (highly regulated) and 0 (free of regulation); Air, rail and road transportation,
telecommunication, postal services, electricity and gas.
Accounting, Architect, Engineering, and Legal Service.
Employment Protection Legislation Index. Scaled between 4 and 0.
2003
OECD
1.5
2.3
2.1
2.0
Trend or cycle? On the causes of the improved economic performance in Germany
ness services some steps toward deregulation
have been taken. Nevertheless, the markets
are still subject to a rather rigid regime compared to the OECD on average. It is worth noting,
that Germany all in all was not a frontrunner
in the « liberalisation race ». In most cases the
indices fell at the same extent as they did in
the OECD countries on average.
There is a long list of papers showing that
market liberalisation has a positive influence
on potential output growth (for an overview
Ahn and Hemmings, 2000). Recently, Nicoletti
and Scarpetta (2005 a,b) tested the interrelation between market liberalisation indices in
network industries and output as well as
employment growth. Based on their results,
Fuentes et al. (2006) conclude that a shift to
best practice in the regulation of these industries could raise the productivity level in
Germany by 5 percent within 20 years. In
other words, the annual trend growth could be
lifted by approximately 0.25 percentage points
over this period. However, reaching best practice is quite challenging. In 2003, the liberalisation index was 1.7, as already mentioned.
Best practice would mean, the index must be
reduced further to 0.5. Such a low value had
not been reached by any OECD member in
2003. However, as the market regulation indices improved significantly since 1990, product
market deregulation should have had a significant positive impact on growth.
Nevertheless, there also exist sizeable barriers
to growth at the same time. Business services
are – as already mentioned – still highly regulated compared to other OECD countries.
Concerning product market regulation, where
Germany holds a medium position amongst
the OECD countries, this ranking is owed to
the very open external trade regime. With respect to other forms of market regulation, e.g.
impediments to register a start up business, or
in terms of the state’s influence on company
decisions, Germany still is an underperformer
compared to other industrialised countries.
Labour market reform
Germany’s rigid labour market regulations are
often blamed to be the most important obstacles to higher growth. Indeed, scrutinizing the
factors contributing to growth, which is done
here in a growth accounting framework, the
particular role of labour becomes evident (see
table below), (for details, Döhrn, 2005). The
most prominent feature of Germany’s unfavourable growth performance between 1991
and 2004 is the negative contribution of
labour input to growth. Already in the 1980’s
labour input stagnated in Germany and the
Euro Area, whereas it had been the main driver of growth in the U.S.
Going more into detail, a good deal of the differences between the regions considered here
can be explained by the low population
growth in Germany compared to the U.S.
Concerning this, policy has only limited
means to stimulate growth potential in the
short run. However, also the number of hours
De-composition of GDP Growth in Germany, the Euro Area, and the U.S.
1980-2004, contribution to growth in %-points
Annual average contribution of
Real GDP growth Hours worked
Capital
Multi-Factor
(%, annual avg.)
Productivity
Germany
Euro Area
U.S.
2.6
2.4
2.9
1980-1991
0.0
0.0
0.9
1.0
0.7
1.0
1.5
1.7
1.1
Germany
Euro Area
U.S.
1.3
1.8
3.3
1991-2004
-0.3
0.1
0.8
1.1
0.8
1.0
0.5
0.8
1.5
Source: RWI calculations based on figures from the Federal Statistical Office, BEA, ECB, and from the
Groningen Growth and Development Centre (www.ggdc.net)
79
Point de vue
worked per person was shrinking in Germany
in the 1990s. This partly reflects the growing
importance of part time employment, but is
also owed to a general shortening of the number of the weekly working hours. Furthermore
the activity rate remained constant over a long
period while it was growing in the U.S. Only
recently, the activity rate started to rise.
Among others this is a consequence of having
made early retirement less attractive. Finally,
unemployment increased sharply, in particular
long term unemployment, which also lowered
growth potential.
Over the last 15 years, some deregulations
have taken place in the labour market, too. The
OECD Employment Protection Legislation
(EPL) index for Germany declined from 3.2 in
1991, which was clearly above OECD average,
to 2.2 in 2003, which comes close to the OECD
mean. For instance, the restrictions on the use
of temporary workers were abolished between
2000 and 2004. Maybe, labour market deregulation is not fully reflected in the EPL index as
some measures are not taken into account
when calculating it (OECD, 2007). For example, the workplace threshold for protection
against unfair dismissal was raised from 5 to 10
workers, which applies to 19% of private sector employees. Many other changes in labour
market policy are not mirrored in the EPLindex, too. So, the active labour market policy
was reformed, the generosity of unemployment benefits was reduced, and steps were
taken to increase the efficiency of the labour
administration. These measures, known as «
Hartz-Reforms » were implemented between
2003 and 2005, and they are accompanied by a
scientific evaluation of their effectiveness. First
results suggest that reforms aim into the right
direction, as they try to increase the incentives
to move from welfare to work. However, many
of the instruments introduced for this purpose
did not work very well and have to be revised
(for an overview of the Hartz-evaluation see
Jacobi and Kluve, 2006).
Whether these reforms being effective or not,
it is a different question to what extent labour
market reforms may increase growth. Most
studies find no impact of labour market
reforms on unemployment rates (e.g. Kluve
80
and Schmidt, 2003). However, there is much
evidence that deregulated labour markets and
less generous payments in the case of unemployment have a positive impact on employment (e.g. Boerri et al. 1999, Berger and
Danninger, 2006). These results are consistent
with the finding that reforms increase labour
market participation (e.g. Macculloch and Di
Tella, 2005). Nevertheless, the impact on
growth is less clear. Aiginger (2004) finds a
negative correlation between the severity of
rules against unfair dismissal and growth in
the EU countries; a result confirmed by Feld
(2001) in panel regressions. However, the size
of the impact is difficult to measure and
depends very much on the way how EPL is
quantified. As Feld (2001) shows, different
measures even do not necessarily exhibit a
high correlation.
One reason behind this unclear picture of the
influence of labour market regulation on
growth may be that it is difficult to quantify the
various aspects of labour market flexibility. It
is not only characterized by labour legislation,
but also in the way laws are enforced, by the
gratuity of replacement payments, by the way
wages are negotiated, and not at least by the
level and structure of labour costs. In terms of
hourly labour costs, Germany always was and
it still is a « high wage country ». This is not
necessary true when looking at unit labour
costs, because the companies managed to raise
productivity to a level enabling them to be
competitive despite of high labour costs. This
had the consequence that growth in Germany
was mainly generated by capital deepening
and higher productivity, as it was shown
above. But high wages also were an obstacle to
Negotiated wages in the Euro area
and in Germany
2001-2006, yoy increase in %
2001
2002
2003
2004
2005
2006
Germany
Euro area
2,0
2,6
2,0
1,2
0,9
1,1
2.6
2.7
2.4
2.1
2.1
2.2e
Source: Bundesbank, ECB - eEstimate.
Trend or cycle? On the causes of the improved economic performance in Germany
capital formation, as companies shifted parts
of their investment to countries with lower
labour costs, in particular in Eastern Europe.
However, concerning labour costs, Germany’s
position in the Euro area improved significantly in recent years. Since 2001, the negotiated wages in Germany rose more slowly compared to the Euro area in every year.
Furthermore the wage drift was negative,
which means that the effective wages per hour
grew slower than the negotiated rate.
Globalisation of production as well as labour
market reforms contributed to this wage
moderation. In particular, it was triggered by
of various measures to create a highly flexible
segment of the labour market for persons such
as students, pensioners and non-employed
spouses, which are interested to work only a
few hours per week (so called Minijobs).
Improved possibilities to apply fixed term
labour contracts, and the deregulation of temporary employment worked into the same
direction. On the one hand, the low rise of
wages in recent years had a negative effect on
income and thus on aggregate demand. On the
other hand it had a positive impact on fixed
capital formation and on growth. In the end, it
seems having contributed to the accelerated
rise of German employment which is observed
since the beginning of 2006.
All in all, labour market reforms should have
had a positive influence on growth through
various channels. But to what extent Germany
has already benefited from these reforms is
difficult to determine. This is particularly true
as labour market reforms seem to come into
effect more slowly than fiscal reforms or pro-
duct market reforms (IMF 2004). Furthermore,
the Germany policy must not be seen isolated
from the changes having taken place in other
countries. When deciding about investment
companies as a rule have the choice between
different locations. As shown above, the
Germany has improved its position compared
to other countries in some fields, but quite
oftem the conditions are still less favourable
than in the OECD on average.
Fiscal reforms
Despite violating the Maastricht fiscal criteria
between 2002 und 2005, Germany also made
some progress in fiscal reform in recent years.
After the reunification, the share of public
expenditure in GDP started to climb and it reached its maximum in 1996 at 49.3% (see table
below). Since then it was reduced stepwise, as
all governments limited the increase of public
expenditure strictly. Until 2006 the expenditure ratio has come down to 45.7 %, which is
the lowest figure since 1989.
There is much research on the influence of
public finance on growth (for an overview see
Afonso et al., 2005). One of the insights it provides is that growth will be spurred by lowering the expenditure ratio. For instance the
ECB found that the EU countries which were
successful to consolidate their budget have cut
their expenditure ratio by 9 percentage points
on average (ECB, 2006). Compared to this, the
progress in Germany to date is still small, as
the reduction was 3.6 percentage points only.
However, even this little improvement could
have influenced trend growth significantly.
Fiscal Indicators for Germany
2001-2006, in % of GDP
Expenditure ratio
Revenue ratio
Taxes
Social security contr.
Budget balance
Public investment
1991
1996
2000a
2003
2005
2006
46.3
43.4
22.0
16.8
-2.9
2.6
49.3
46.0
22.4
19.0
-3.3
2.1
47.6
46.4
24.2
18.3
-1.2
1.8
48.5
44.5
22.3
18.3
-4.0
1.6
46.8
43.6
22.0
17.7
-3.2
1.3
45.7
44.0
23.0
17.4
-1.7
1.4
Source: Destatis- a-Excluding income from the UMTS auction.
81
Point de vue
Following an estimate by Heitger (2001),
which was drawn from a panel of industrialized countries, a reduction of the expenditure
ratio by 10 percentage points would lift annual
GDP growth by 0.5 percentage points.
Applying this elasticity to the actual reduction
of the expenditure ratio since 1996, trend
growth could be about 0.15 percentage points
higher than before.
Since 2000, there has also been some progress
in reducing the tax burden. In 2001, the corporate income tax was reduced. Up to then, two
tax rates were applied: profits distributed to
the shareholders or owners were taxed less
than profits kept in the company. After the
reform, a uniform and lower than before tax
rate is applied. For profits not distributed up to
then (and subject to the high rate in the past),
earlier payment are reimbursed, when the profits are distributed. This led to negative
« eceipts » from corporate taxes for some time,
which was one reason for the deterioration of
the fiscal balance. However, even after this
reform corporate taxes in Germany belong to
the highest in the EU. In 2008, the corporate
tax rate will be reduced further, but at the
same time the tax base will be broadened.
This might stimulate growth, but up to now
the impact of tax reforms on potential output
can be expected to be small.
There are more reasons to assume that the
overall impact of fiscal reform on potential
output growth is less pronounced up to now.
Firstly, the elasticity found by Heitger is large
compared other estimates. According to the
findings of the he German Council of
Economic Advisors (Sachverständigenrat,
SVR, 2002), the reduction of the expenditure
ratio could have added less than 0.1 percentage points to German trend growth, when
taking into account that adjustment takes
quite a long time. Secondly, other fiscal indicators were less favourable with respect to
growth. As already said, fiscal balance deteriorated in particular after 2000, which should
have a negative impact on trend growth accor-
1
ding to most estimates. Furthermore, public
investment, which is expected to enhance
growth, was reduced significantly relative to
GDP since 1991. Hence it is far from clear
whether fiscal reforms of contributed to higher
trend growth at all. This scepticism is underpinned by the fact that « qualitative consolidation » is still lagging behind, i.e. there was no
shift in the budget towards expenditures that
enhance growth such as spending on education or on research and development.
Conclusions
This paper takes a rather sceptical view on the
role economic policy played for the unexpectedly good economic performance of Germany
in 2006. Of course Germany has undertaken
many reforms in recent years which can be
expected to enhance growth. However, putting
these reforms into perspective and looking at
the links between reforms and growth, it can be
assumed that their impact on potential output
growth is limited. Maybe, a total impact of 0.25
percentage points is a good guess. Therefore it
is plausible that the strong expansion in 2006
was mainly caused by cyclical reasons.
However, the recent experience in Germany
also gives another example for the difficulties
to determine potential output growth correctly. Up to now, there are no signs that the
strong growth has boosted inflation. Even the
reaction to the rise of the value added tax at
the beginning of this year was moderate. This
gives reason to assume that there still is
enough spare capacity. Therefore, potential
output growth may have been higher in recent
years than it was estimated by the standard
statistical methods. If today’s estimates lead to
a higher trend growth, this also may correct a
measurement error made in the past.
Achevé de rédiger le 15 mars 2007
Roland Döhrn
Head of the business cycle department,
RWI, Essen1
Ndlr : l’institut allemand RWI appartient, tout comme Coe-Rexecode, au réseau Euren qui rassemble six des principaux instituts de conjoncture européens.
82
Trend or cycle? On the causes of the improved economic performance in Germany
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Diagnostic(s)
Tarifs 2007
Tarif pour quatre numéros par an : 60 euros TTC
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Les publications de Coe-Rexecode
Diagnostic(s), revue de Coe-Rexecode, fournit des analyses structurelles et de politique
économique. Chaque semestre les prévisions de Coe-Rexecode y sont présentées. Une place
particulière est donnée à l’analyse cyclique.
Janvier 2007, n °2 :
Conjoncture et prévision : Perspectives européennes • Positionnement cyclique
des économies
Analyse structurelle : • La compétitivité française se dégrade • Perspectives démographiques
mondiales à horizon 2050 • Un indicateur d’entrée et sortie de récession pour la zone euro
Point de vue : Insatisfactions françaises sur le marché européen de l’électricité
Avril 2006, n °1 :
Conjoncture et prévision : Perspectives européennes • L’Europe face aux défis du textile •
Produits de base • Investissement et situation financière des entreprises
Analyses : Positionnement cyclique des économies • Indicateur du rythme de croissance (IRC)
• Politique monétaire américaine
Tendance(s), lettre d’information mensuelle, propose chaque mois un état des lieux de l'environnement économique. Dans une actualité économique foisonnante, ce quatre pages sélectionne les sujets les plus pertinents pour aider les entreprises à comprendre leurs clients et leurs
marchés. Chaque mois, une rubrique est dédiée aux indicateurs originaux de Coe-rexecode.
Les documents de travail présentent les travaux de recherche de Coe-Rexecode.
N° 1 La compétitivité française en 2006, décembre 2006
Coe-Rexecode résulte du rapprochement de Rexecode et du Centre d’Observation Economique
de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris, le 1er novembre 2006 .L’ensemble des
publications périodiques du Coe et de Rexecode publiées antérieurement restent accessibles
sur les sites Internet www.coe-rexecode.fr et www.coe.ccip.fr.
Documents de travail du COE
AIECE: general report . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .N°
La compétitivité hors prix des biens intérmédiaires et d’équipement
sur le marché européen en 2005 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .N°
Indicateur Récession Zone Euro . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .N°
Compétitivité hors prix des biens de consommation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .N°
Le difficile retour en emploi des seniors . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .N°
Objectif de Barcelone : 3 % du PIB pour l’effort de recherche en Europe . . . . . . . .N°
L’image des biens intermédiaires et d’équipement sur le marché européen en 2003 . . . . . . . .N°
Le syndrome japonais est-il transmissible aux État-Unis et à l’Europe ? . . . . . . . . . .N°
L’image des biens de consommation sur le marché européen en 2002 . . . . . . . . . . .N°
Pour une meilleure protection de l’emploi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .N°
74 - Oct. 2006
73 - Juil. 2006
72 - Juin 2006
70 - Juin 2005
69 - Avril 2005
67 - Oct. 2004
66 - Juin 2004
65 - Déc. 2003
64 - Juil. 2003
63 - Juin 2003
Ouvrages
Les entreprises françaises (annuel, de 2001 à 2006) (Editions Economica)
L’Europe face à la concurrence asiatique (L’Harmattan) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Nov. 2001
Documents d’étude de Rexecode
Performances du marché du travail : la France à la traîne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Avril 2006
Partage de la valeur ajoutée, pouvoir d’achat et croissance économique . . . . . . . . .Mai 2005
Revue de Rexecode
Véritable constitution européenne ou simple codification des textes actuels . . . . . . . . . .N° 83, 2e trim. 2004
Les perspectives économiques 2004-2005 • La France perd du terrain en Asie émergente depuis cinq ans
Une croissance retrouvée mais encore fragile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .N° 81-82, 4e trim. 03/1er trim. 04
Les États-Unis en voie de désindustrialisation ? • Et si on avait baissé les charges sociales
sans faire les 35 heures ?
Indicateurs des cycles conjoncturels
Ouvrages publiés à l’occasion des Rencontres de la Croissance (Editions Economica)
• Demain l’emploi si…(2006)
• La croissance par la réforme (2005)
• Des idées pour la croissance : 77 économistes proposent leurs priorités pour une croissance durable
en France (2003)
Setori • Avril 2007