HISTORIQUE DE LA PASSERELLE SAINT-FRANCOIS

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HISTORIQUE DE LA PASSERELLE SAINT-FRANCOIS
HISTORIQUE DE LA PASSERELLE SAINT-FRANÇOIS
Surprise peut-être pour certains d’entre vous, confirmation renouvelée
pour d’autres, mais nous sommes encore aujourd’hui redevables à
l’Ancien Régime, tout citoyens de l’an 2013 que nous soyons.
Noblesse oblige, ce fut en effet Louis-Philippe lui-même, qui par l’article I
de son ordonnance du 12 février 1833, autorisa la construction d’une
passerelle sur la rivière du Guindy, en lieu et place d’un passe-cheval qui
existait jusqu’alors en cet endroit, et assurait le passage d’une rive à
l’autre. L’ordonnance royale précisait en outre dans son article II qu’une
adjudication publique retiendrait pour la construction de l’édifice, le
soumissionnaire offrant, comme de juste, les conditions les plus
avantageuses et qu’il lui serait concédé, aux frais de construction et
d’entretien, la perception d’un droit de péage.
Jusqu’alors et pour traverser la rivière, il convenait effectivement aux
habitants ou riverains de nos deux communes, d’emprunter un bac à
péage et de s’acquitter d’un droit de passage auprès des Cordeliers du
Monastère Saint-François érigé en cet endroit dans une courbe de la
rivière.
Mais si le cours du Guindy en ce lieu est des plus sereins, ne nous
n’imaginons pas pour autant que la passerelle allait connaître une
existence royale, exempte de toutes vicissitudes, même si elle fut portée
en son temps sur les fonts baptismaux par une volonté royale
précisément.
Mais un mot d’abord sur le constructeur : selon toute vraisemblance un
certain Marc Seguin, ingénieur de grand talent, précurseur des ponts
suspendus à fil de fer, ardéchois d’origine et petit-neveu des frères
Montgolfier. Ce qui lui conférait déjà d’emblée et on en conviendra
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aisément, une notoriété bien établie, suffisamment garante en tout cas
pour innover et élever un pont suspendu de 71,20 mètres, de faible
largeur, 2 mètres, au-dessus d’un méandre du Guindy, et lancer avec
hardiesse son tablier de bois de 2 mètres à 49 mètres, quelques mètres
au-dessus des marées de hautes eaux.
Pour en venir maintenant à l’histoire même de la passerelle, c’est à Mr
Auzou, déjà concessionnaire du premier pont Canada ouvert le 25 mai
1834, que l’on doit la paternité de ce nouvel ouvrage d’art et à qui fut
octroyée l’exploitation pour une durée de 54 ans et 11 mois.
Mais de fait et bien vite, suite à une vente par licitation, ce furent
Monsieur de Gomincourt, alors inspecteur des douanes à Tréguier et
Monsieur Hovius, négociant à Saint-Malo, qui obtinrent dès 1849 les
concessions des différents ponts de Tréguier.
Cependant, Histoire oblige, et on retiendra donc que le nom de Monsieur
Auzou est étroitement lié à la naissance de notre passerelle SaintFrançois, du nom bien entendu du monastère où en 1483 s’établirent en
cet endroit des Cordeliers, grâce à l’entremise et à la générosité de Jean
De Kérouzy, Seigneur de Kerdeozer.
S’agissant maintenant de la vie propre de la passerelle, on soulignera
qu’apparaissent dès 1850, c’est-à-dire quelques années à peine après
sa mise en fonction, des difficultés d’utilisation, en particulier quand sont
souhaités l’élargissement des accès et les alignements afférents. Des
courriers, par exemple du Sieur De La Baronnais, font état des
préoccupations régulières et répétées des usagers à ce propos.
En 1867 autre péripétie. Financière ou économique, c’est selon. Le
conseil municipal se saisit en effet de demandes récurrentes de la
population et réclame auprès du Conseil général la suppression du
péage. Une pétition des élus du canton viendra plus tard en 1871
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soutenir et appuyer cette demande, qui sera finalement honorée le 1er
février 1873, quand le Conseil général, suite aux rachats des deux ponts
de Tréguier pour 195 000 francs, rendra effective la suppression des
péages. Mais autrement plus préoccupante, puisque touchant à
l’existence même de la passerelle, fut la requête du sous-préfet, en date
du 21 septembre 1904, s’interrogeant auprès du maire de Tréguier sur
l’opportunité de conserver la-dite passerelle après la construction d’un
nouveau pont, le pont Noir, assurant les mêmes services avec une
sécurité accrue et proposant de surcroît le passage de véhicules
motorisés.
Vent de fronde aussitôt chez tous les administrés, des plus petits aux
plus grands, des écoliers, des ménagères, des commerçants, des
promeneurs, de tous les usagers démunis de voitures et que ne rebutait
nullement la montée de la rue Saint-François pour accéder au pied de la
cathédrale. Même les lavandières couchèrent leur nom au bas de la
pétition, comme en attestent les archives municipales de la ville de
Tréguier, arguant qu’elles ne pourraient ainsi plus faire sécher leur linge
sur les landes de Plouguiel et « offrant au besoin la couverture inutile de
leur lavoir pour arranger le tablier du pont. ».
Chaude alerte s’il en fut et qui conforta la collectivité de conserver cet
ouvrage d’art autant par nécessité économique, que touristique et
patrimoniale.
Cependant, l’âge aidant, l’édifice commençait à souffrir des maux des
ouvrages mal entretenus ou négligés, et en 1954 un marché de gré à gré
est passé avec une société parisienne, l’entreprise Coignet, pour démolir
et reconstruire la vieille passerelle. De fait, la cure de jouvence prescrite
ne sera pas suivie d’effet et la collectivité se déterminera plutôt pour la
reconstruction du Pont Noir en 1954.
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Il reste que de multiples interventions eurent néanmoins lieu pour
préserver autant que peut se faire la vie du vieux pont. A titre
d’exemples : remplacement en 1972 des suspensions, suspentes,
étriers, tablier ou autres entretoises, ou encore en 1991 des attaches de
suspentes…
Des cautères sur une jambe de bois qui ne retardaient en rien une fin de
vie imminente.
C’est en janvier 2004 que tomba le couperet, suite à une inspection
conduite par le laboratoire Régional des Ponts et Chaussées : ordre fut
alors donné de fermer la Passerelle pour des raisons clairement
partagées par tous de sécurité.
Et maintenant, retour sur le présent pour nous dire, comme vient de le
faire Madame CLOCHET, Maire de Plouguiel pour sa commune, la
grande satisfaction de la commune de Tréguier d’avoir pu mener à bien
la réhabilitation de la passerelle Saint-François.
Alors que depuis des années, nous butions sur la reconnaissance du
titre de propriété de la passerelle (Conseil Général ? Tréguier ?
Plouguiel ?), nos deux communes ont décidé de passer outre et de s’unir
à égalité pour rendre à nos deux populations et plus largement aux
nombreux touristes amoureux du patrimoine, aux promeneurs, aux
randonneurs un plein usage de cette passerelle fermée, rappelons-le
depuis 2004.
Oui, c’est une réussite, vraiment une réussite dont nous sommes tous
fiers et qui, pour nous, est un exemple de mutualisation entre
communes.
Merci encore à la commune de Plouguiel pour son amicale et combien
efficace participation.
Comme toujours dans ce type de réalisations, il y a eu des hommes et
des femmes des deux communes qui ont plus que d’autres
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particulièrement contribué à ce succès. Je ne les citerai pas car ils sont
assez nombreux et j’aurai trop peur de faire des oublis : je suis sûr
toutefois qu’ils se reconnaitront.
Merci, un grand Merci à eux.
Merci aussi bien-sûr à tous les financeurs de cette opération que
Madame le Maire de Plouguiel a rappelé tout à l’heure et, à mon tour, je
veux rendre un hommage tout particulier et, oh combien mérité, au
Président et à tous les bénévoles de l’Association de la Passerelle pour
leur soutien efficace et indéfectible dans cette opération, soutien sans
lequel cette réhabilitation aurait été beaucoup plus compliquée.
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