Paris : le Sacré-Coeur cible de tags anarchistes

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Paris : le Sacré-Coeur cible de tags anarchistes
Paris : le Sacré-Coeur cible de tags anarchistes
Benoît Hasse (avec R.T) | Publié le Parisien 19.03.2014
Le parvis du Sacré-Coeur à Paris a été vandalisé dans la nuit de mardi à mercredi. | LP/Benoit
Hasse
Des tags anarchistes ont été découverts ce mercredi matin à l’entrée de la basilique du Sacré-Coeur, dans le
XVIII e arrondissement de Paris. Sur les portes de l’édifice, un des sites culturels les plus fréquentés de la
capitale avec 10 millions de visiteurs par an, il a notamment été écrit à la bombe rouge « Ni Dieu, ni maître, ni
Etat ».
Un « Burn me » — « Brûle moi » en anglais — a également été peint sur une colonne.
Sur le marbre du parvis, toutes sortes de message ont été laissés : « A bas toute autorité », « feu aux chapelles »
ou encore « Fuck Tourism ».
On peut également y lire «1871, vive la commune», une inscription qui fait référence à l'anniversaire du
soulèvement de la Commune de Paris, le 18 mars 1871. L'édifice religieux a été bâti à l'issue de la répression
dans le sang de la Commune de Paris par les troupes envoyées par le gouvernement d'Adolphe Thiers.
Bertrand Delanoë, le maire PS de Paris, a condamné ce vandalisme « avec la plus grande fermeté ». « Ces
dégradations, et ce ne sont pas les premières, sont inacceptables », a estimé l’élu dans un communiqué.
Anne Hidalgo, candidate PS à la mairie de Paris, a dit elle aussi condamner «la profanation de la Basilique du
Sacré-Coeur de Montmartre qui a eu lieu cette nuit» dans un communiqué.
D'autres élus comme Pierre-Yves Bournazel, candidat UMP dans le XVIIIe arrondissement, ont aussi réagi via
son compte Twitter officiel. «Je dénonce les graves dégradations commises au sacrécoeur et demande la plus
grande fermeté vis-à-vis des coupables» déclare-t-il.
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Photos diverses
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Dégradations au Sacré-Coeur: plainte du diocèse, élus indignés
Libération - AFP 19 mars 2014 à 19:01
Graffitis sur le
parvis du Sacré-Coeur à Paris, le 19 mars 2014 (Photo Martin Bureau. AFP)
Le diocèse de Paris a porté plainte mercredi après l’inscription d’insultes sur la basilique du SacréCoeur, qui ont été très vivement condamnés par les politiques de tous bords à quatre jours des
élections municipales.
«Ni Dieu, ni maître, ni Etat», «A bas toute autorité», «Feu aux chapelles», pouvait-on notamment lire
sur la porte et le parvis de la basilique, l’un des lieux les plus visités de la capitale.
De source policière, les inscriptions, faites avec une bombe de peinture rouge, dateraient de la nuit de
lundi à mardi. On pouvait aussi lire «fuck le touriste», d’après cette source.
Une plainte a été déposée mercredi au commissariat du 18e arrondissement, selon le diocèse de Paris
qui ne souhaite pas communiquer davantage «pour ne pas attiser la haine».
Les dégradations ont en revanche suscité une avalanche de réactions dans la classe politique.
«Ces inscriptions sont une offense aux fidèles catholiques et une atteinte grave à un monument
emblématique du patrimoine», a déclaré le ministre de l’Intérieur Manuel Valls, en assurant que «tout
était mis en oeuvre pour identifier et interpeller les auteurs».
Anne Hidalgo, candidate PS à la mairie de Paris, Jean-François Copé parlant au nom de l’UMP qu’il
préside, et l’ex-garde des Sceaux Rachida Dati (UMP) ont dénoncé, dans des communiqués distincts,
«une profanation», soulignant l’importance de la liberté de culte et appelant à des poursuites
judiciaires.
«Ces dégradations, et ce ne sont pas les premières, sont inacceptables», a écrit de son côté le maire PS
de Paris Bertrand Delanoë.
http://www.liberation.fr/societe/2014/03/19/degradations-au-sacre-coeur-plainte-du-dioceseelus-indignes_988379 photo1http://www.liberation.fr/societe/2014/video/jpg/MMV608467_TFR.jpghttp://www.libe
ration.fr/societe/2014/video/flv/MMV608467_TFR.flvPhilippe Martel, candidat FN-RBM dans le
XVIIIe arrondissement, où se situe le Sacré-Coeur, a mis en cause des «mouvements anarchistes».
Selon lui, «c’est bien tout un climat anti-chrétien qui favorise de tels comportements».
Comme lui, Rachida Dati, candidate à sa réélection comme maire du VIIe arrondissement, a rappelé
une action militante très controversée des Femen à l’intérieur de l’église de la Madeleine en décembre,
pour estimer que la foi catholique était de nouveau visée par «une attaque grave».
AFP
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Nouvel obseravateur
Partenaire
Tribune 20/03/2014
La profanation, c’est la basilique du Sacré-Cœur, pas les tags
Roland T.
Qu’est-ce que j’entends dans les commentaires ? TOUS les candidats à la mairie (ainsi que le ministre de
l’Intérieur, grand tartuffe des religions dans ce pays) condamnent cette « profanation » (« odieuse » selon JeanFrançois Copé) ?
Making of
Roland T. a 42 ans, il est professeur d’histoire-géo dans le Val-d’Oise. Rue89
Nous ne saurons sans doute jamais qui sont les auteurs de ces actes, sauf si la police se donne des moyens en
disproportion du délit incriminé. Je ne le souhaite pas, car j’imagine par avance la sévérité « exemplaire » et
hypocrite des sanctions pénales.
Et à quoi bon critiquer « là-bas » les pays qui mettent en prison des chanteuses punks « blasphématoires » si
c’est pour faire pareil ici ?
« Profanation » dans toutes les bouches
Par contre, si je rencontre ces « anarchistes », je les engueule, parce que leur acte est contre-productif par
rapport… mais par rapport à quoi en fait ? On ne vous l’a pas dit ? Je vais y revenir.
En fait, ce qui me pousse à réagir, ce ne sont pas les graffitis, car à quoi bon rappeler que les actes de personnes
qui se pensent irresponsables de ce monde ne peuvent être qu’irresponsables dans ce monde ? Ce qui me
donne envie de réagir, ce sont les réactions des responsables politiques.
« Profanation ». Tous utilisent ce mot. Pas délit, pas vandalisme, pas dégradation : profanation. Soit un rapport
au sacré. Aucun recul, aucune neutralité dans l’exercice d’une fonction publique. Le fait religieux est posé comme
une évidence, et pas question de rappeler que si l’action publique organise la libre expression religieuse, elle ne
reconnaît rien.
Des communards tués à cet endroit
Maintenant, venons-en au cœur de cette affaire du Sacré-Cœur, celui qu’aucun politique n’a relevé : pourquoi
commettre pareil acte à cette date et à cet endroit ?
Le 18 mars 1871, le peuple parisien, assiégé et affamé, se soulève contre l’Assemblée versaillaise, réactionnaire,
monarchiste et cléricale. Les Parisiens montent au sommet de la colline de Montmartre, à l’époque dépourvue de
cette fameuse basilique, simple vignoble urbain, sur laquelle se trouvent des canons de l’armée. Le peuple
s’empare des armes, proclame la Commune, et en appelle au pays pour défendre la « vraie République ».
Nul n’ignore la fin de l’épisode : lors de « la semaine sanglante » (21-28 mai 1871), l’armée de Thiers reprend la
ville au prix de 20 000 à 30 000 morts (vous vous rendez compte ? Quasiment le bilan de l’insurrection du ghetto
de Varsovie), exécutés à la chaîne et enterrés sous les rues (on retrouvera plusieurs charniers pendant les
travaux de percement du métro dans les années 1897-1902).
L’humiliation par l’édification d’un basilique
Barricade rue de la Bonne, butte Montmartre, durant la Commune de Paris de 1871 (BHVP/RogerViollet/Wikimedia Commons/CC)
Avant leurs exécutions, traînés dans la ville sous les crachats des possédants, les Communards étaient
contraints de s’agenouiller devant chaque église, chaque croix et chaque image sainte rencontrée. C’est que le
peuple parisien était déjà, et de longue date, très profondément anticlérical et largement « athéisé », convaincu
depuis plusieurs révolutions (1792, 1848) du rôle réactionnaire du clergé.
Et que fait l’Assemblée versaillaise après la reprise de la ville, après ce triomphe face aux gueux ? Car les morts
ne lui suffisent pas. Il faut rééduquer les vivants par la pénitence. Il faut leur imposer « l’ordre moral ». Pour ce
faire, est votée une loi qui destine la colline de Montmartre à l’érection d’une basilique. Rien que ça. L’humiliation
par l’édification.
Une blessure jamais refermée
Les quartiers populaires sont contraints de taire leurs milliers de morts tandis que, lors du discours d’inauguration
du chantier, en 1875, on peut entendre que :
« Cette butte [était] sillonnée par des énergumènes avinés, habitée par une population qui paraissait hostile à
toute idée religieuse et que la haine de l’Eglise semblait surtout animer. »
L’anarchisme français est né dans cette blessure jamais refermée au cœur du peuple parisien. De cette
obscénité. Car s’il y a profanation, c’est d’abord dans la dissimulation du crime sous cette basilique.
Alors messieurs les politiques, quelques tags à effacer… vous qui faites afficher vos trombines à des milliers
d’exemplaires sur TOUS les espaces publics disponibles, souffrez qu’on voit la profanation là où elle se trouve :
dans l’existence même de cette basilique à cet endroit.
*********************http://rue89.nouvelobs.com/2014/03/20/profanation-cest-basilique-sacre-
coeur-les-tags-250836