Judaïsme, judaïcités et humanisme

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Judaïsme, judaïcités et humanisme
Judaïsme, judaïcités et humanisme
par Chantal Bordes-Benayoun
N’intervenant pas en tant que théologienne mais comme sociologue des religions, je
me bornerai tout d’abord à éclairer quelques aspects de la tradition juive en ce qu'elle
peut rencontrer les principes de l'humanisme. Dans un deuxième temps, je m'attacherai
plutôt à invoquer l'incarnation de cet humanisme dans la réalité historique et sociale
du monde juif.
Je commencerai par une citation de Montaigne qui me semble être tout à fait en affinité
avec la tradition juive : « Chaque homme porte en lui la forme entière de l'humaine
condition ». Cette célèbre formule est en affinité avec le judaïsme, non seulement en
raison des probables origines juives de son auteur mais surtout parce que, bien que chrétien, Montaigne se révèle comme un marrane, figure de la modernité juive, et passeur
entre les cultures.
Avec une autre idée majeure de son œuvre, quand il considère l'homme comme variable,
susceptible de changer dans ses choix, Montaigne entre aussi en écho avec la tradition
juive. L'être humain y est en effet à la fois placé au centre, libre de ses choix et face à ses
responsabilités ici-bas.
Pour la sociologue que je suis, parler du judaïsme n'est pas une chose simple. Le judaïsme se décline selon des formes multiples et ne saurait se résumer à une religion,
d'où la difficulté. C'est pourtant une religion. Il existe ce qu'on appelle des Juifs sociologiques, qui ont une relation avec la religion parfois très ténue, peu exigeante, parfois
pas de relation du tout.
Demander à un Juif ou un non Juif de définir le judaïsme donne lieu à une multitude
de termes et d'agencements : religion, torah, Israël, philosophie, spiritualité, mémoire,
histoire, peuple, patrimoine culturel, état d'esprit, sensibilité, humour, différence géographique, vision du monde et de la place des hommes dans l'histoire, etc. Aussi est-il
nécessaire de distinguer eu égard à ce qui nous occupe ici la tradition (les textes fondateurs) dans ses contenus humanistes et l’humanisme dans l’expérience concrète historique et sociétale.
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Quelques principes humanistes de la tradition juive.
L’autre est le même
Tout d'abord le judaïsme se présente comme une morale universelle dans laquelle l'autre
est le même. Au-delà de ses spécificités, le judaïsme est d'abord une morale qui se veut
valable en tout lieu, mais cette vocation universaliste a été souvent mal interprétée
comme la revendication d'un monopole du peuple juif et de son élection. Or la distinction entre le bien et le mal opérée par le judaïsme, dès sa naissance, constitue une rupture avec le polythéisme. Cette distinction du bien et du mal devient un code universel
et, dans un premier temps, un socle commun aux monothéismes dans leur diversité…
qui deviendra un principe laïc par la suite.
L'AVENIR DE L'HOMME DANS NOS SOCIÉTÉS - CHANTAL BORDES-BENAYOUN
Dans le judaïsme, il y a une interdépendance, une relation étroite, systémique, entre
tous les humains. « Tout être humain, écrit l'écrivain Marc Agi, est concerné par tout
ce qui arrive à l'homme, même si c'est aux confins de la terre ». C'est ce qui donne sens
et valeur à la condition humaine dans son ensemble et non pour le seul bienfait d'un
peuple ou d'une nation.
Au centre de ces commandements, l'égalité de tous, la liberté, la valeur de la vie humaine
ont directement inspiré la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de 1789,
souvent représenté par les Tables de la Loi de Moïse, puis la Déclaration Universelle des
Droits de l'Homme, dont l'un des célèbres auteurs français, René Cassin, était juif. Ils
ont fait de l'interdiction de tuer l'une des valeurs cardinales et universelles.
L'article 1er de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme dit : « tous les êtres
humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont libres de raison et de
conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité ». C'est
leur premier droit. Et l'article 3 : « tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté
de sa personne ».
En ces jours de deuil, il est bon de citer ces principes énoncés dans le Talmud : « Un
seul être a été créé afin de nous montrer que si quelqu'un fait périr un seul être humain,
celui-là sera compté comme s'il avait fait périr tout un univers et que si quelqu'un sauve
un seul être humain, cela lui sera compté comme s'il avait sauvé tout un univers. » (Sanhedrin, 38b).
La deuxième caractéristique, me semble-t-il, et on voit bien cette interdépendance entre
les Juifs et les autres, c'est que les lois juives ne s'appliquent pas exclusivement aux Juifs.
Sur les 613 commandements de la loi juive dans la Torah, il en existe sept, dites Lois
Noachiques, (dont une partie a été édictée par Noé). Rappelons-les :
- L’obligation d’établir des institutions judiciaires
- L’interdiction du blasphème du Nom divin
- L’interdiction de l’idolâtrie
- L’interdiction du meurtre
- L’interdiction des unions interdites
- L’interdiction du vol
- L’interdiction de consommer de la viande arrachée à un animal vivant.
Le non-Juif qui respecte ces lois pourra être sauvé sans pour autant devoir embrasser
la religion juive. « Quiconque parmi les païens accomplit ces lois fait partie des Justes
parmi les nations et a sa part au monde futur » (Rambam, Hilkhoth melakhim 8, 11)
Le souci des autres
Une autre caractéristique est le respect, le souci des autres. L'affirmation de l’égalité
de tous est au cœur de ce monothéisme. L'aspiration à l'équité et la justice en sont le
corollaire.
Je vais me contenter de citer une phrase extraite du Traité des Pères qui résume ce souci :
« si je ne m'occupe pas de moi, qui le fera ? Mais si je ne m'occupe que de moi, que
suis-je ? ». Mon humanité dépend de mon altruisme. Comme illustration de ce souci de
l'autre, un extrait d'un poème d'Edmond Fleg :
« Je suis juif, parce qu'en tous lieux où pleure une souffrance, le Juif pleure.
Je suis juif parce qu'en tous temps où crie une désespérance, le Juif espère. »
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Une tradition de lecture, de questionnement liée à l’impératif d’instruire les
générations suivantes
Une troisième caractéristique du judaïsme renvoie aussi à l'humanisme, un humanisme
conçu comme un devoir de connaissance et d'éducation. Une caractéristique forte de
l'histoire du judaïsme est la tradition de lecture et de questionnement, pas simplement
une lecture, une exégèse sans objectif, mais lecture d’un texte à actualiser et transmettre
aux générations suivantes.
Parmi les facteurs qui ont contribué à la perpétuation pluriséculaire du judaïsme, en
dépit des vicissitudes de l'histoire, est un sentiment unitaire des Juifs, malgré leur dispersion et les malheurs de l'exil. Au cours de leurs migrations, les Juifs éprouvèrent la
nécessité de se ressourcer aux textes de la religion pour préserver leur identité, mais
aussi parfois pour chercher un sens à leurs épreuves.
L'importance de l'étude du Talmud, de la Thora, de la Bible, a souvent été soulignée
à propos des Juifs ; l'étude non pour elle-même, mais pour les autres. Pas d'étude sans
transmission. Le devoir de transmission figure par exemple dans la prière la plus importante du judaïsme, Shema Israël (« Écoute Israël, l’Éternel est notre Dieu, l’Éternel
est UN ») dans le verset suivant du Deutéronome (Deutéronome 6, 5-7) : « tu adoreras ton Dieu de tout ton cœur, de toute ta vie, de tous tes moyens. Ces paroles que je
t'ordonne aujourd’hui seront sur ton cœur. Tu les enseigneras à tes fils, tu les diras chez
toi et en chemin, à ton coucher et à ton lever. » D'une sorte d'habitude interrogative, si
on reprend les expressions chères aux sociologues et en particulier à Bourdieu, naît la
relation singulière que les Juifs ont avec leur Dieu, dont certes ils craignent les foudres,
mais auquel ils peuvent s'opposer fréquemment, comme le montre le récit biblique, où
ils expriment révoltes ou désarrois.
Toutefois, le judaïsme n'est pas un système philosophique, mais un ensemble de préceptes qui fédèrent entre elles des personnes ayant des opinions différentes sur des sujets
essentiels.
Je vais revenir sur l'expérience historique de cette pluralité qui caractérise le judaïsme, et
qui fait que, pour ma part, j’emploie volontiers le terme de judaïsmes au pluriel.
La pluralité des choix et des courants comme expression de la liberté
humaine
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Le judaïsme, comme vous le savez, n'a pas de dogme véritable Tout peut-être discuté à
l'infini, y compris la question de croire ou de ne pas croire. La tradition de relecture et
la réinterprétation constante de la tradition, mais aussi la dispersion, ont contribué à la
diversification des habitudes et manières de penser et de faire des juifs au cours de l’histoire. Elles ont aussi entraîné d’innombrables conflits d'interprétation : débats théologiques, réorganisations successives du culte et dissidences innombrables. Une anecdote
dit : quand on a deux juifs on a déjà trois opinions. Mais les protestants disent la même
chose !
Tout au long de l'histoire antique, on a vu apparaître des groupes de fidèles divers, qu'on
appellerait peut-être aujourd'hui des sectes, des mouvements de dissidents : Sadducéens,
Pharisiens, Zélotes, Esséniens, Karaïtes…
L'histoire des Juifs se caractérise par cette constante diversification, née à la fois de la
discussion et de la contestation du texte, et du phénomène de la diaspora qui a accentué le questionnement sur soi. Il ne s'agit pas tant d'exégèse que de la constance d'un
L'AVENIR DE L'HOMME DANS NOS SOCIÉTÉS - CHANTAL BORDES-BENAYOUN
questionnement qui concerne le rapport que les Juifs ont avec les autres. La dispersion
des Juifs, qu'on appelle la diaspora, après la première puis la seconde destruction du
Temple, a conduit à se demander ce qui séparait les Juifs des autres et ce qui pouvait
les unir. Comment se mouvoir parmi les autres quand on est minoritaire ? On peut
rattacher la question juive à l'humanisme. Il ne suffit pas de poser l'humanisme comme
centralité de l'homme, il faut aussi l'inscrire dans la dialectique de l'un et de l'autre, dans
la relation à l'autre. C'est sans doute cela l'histoire de l'exil, du déplacement, de la migration, ce qui nous renvoie à la question plus générale de l'étranger et de la nécessaire mise
en perspective, de la mise en mémoire avec d'autres, qui est une marque essentielle de
la judéité.
Comment penser la relation et entrer en relation avec l'autre majoritaire ? L'autre,
parfois, souvent, dominant, parfois accueillant, mais souvent persécuteur. Telle est la
question. Les conditions historiques ont conduit les Juifs à développer une projection
sur l'altérité et sur l'ouverture à l'autre, qui me semble les prédisposer quelque peu à
l'humanisme.
C'est bien dans cette question de l’altérité qu'Albert Jacquard voit précisément le fondement de l'humanisme authentique, par opposition à la simple tolérance qui n'exige
pas nécessairement d'entrer en relation avec l'autre. Il peut tolérer sans jamais avoir de
relation. « Les autres ne sont pas notre enfer parce qu'ils sont autres, ils sont notre enfer
lorsqu'ils n'acceptent pas d'entrer en relation avec nous. » (Jacquard A., Petite philosophie à l’usage des non-philosophes, Calmann-Lévy, 1997, page 15). La diversification
du judaïsme résulte de ce double mouvement d'interrogation, ce que le philosophe Robert Misrahi appelle la condition réflexive de l'homme juif. Les contacts nombreux au
sein de la judaïcité, (par judaïcité on entend la population pour la distinguer de la tradition), sont autant d'expressions d'une ouverture ou d'une fermeture du groupe juif selon
les contextes. C'est là que la prédisposition à l'humanisme trouve parfois ses failles. Car
si la relation à l'autre mérite autant d'attention que le retour sur soi, le judaïsme ne doit
pas s'y perdre. La volonté de durer malgré la dispersion s'exprime toujours peu ou prou.
Être soi et en même temps être proche de l'autre, c'est la gageure de l’expérience juive,
spécifique mais éminemment transposable à l'autre. Se reconnaître dans l'autre, mais
aussi être reconnu par l'autre, telle serait la leçon d'humanisme à retenir, tel serait aussi
l'humanisme à construire, l'ouvrage à remettre sempiternellement sur le métier. C'est le
degré de tension entre identique et autre que manifestent avec force les divers courants
du judaïsme.
L'un des points de différenciation de ces courants porte précisément sur le rapport à
l'autre et le degré de séparation avec l'autre, mais aussi sur les séparations internes, car
l'autre est aussi au sein même de la judéité. L'enjeu de ces oppositions, de ces contrastes,
concerne ce qui distingue les Juifs de leurs contemporains, les frontières que la vie moderne et démocratique abolit en principe, tandis que certains lieux de la vie religieuse en
général, pas seulement des Juifs, tentent au contraire de rétablir ou de créer.
Si l’on comprend que les nécessités rituelles ou les interdits alimentaires font partie
de cette distinction entre les uns et les autres. Mais aujourd’hui c’est aussi autour de
l’altérité interne que se jouent les oppositions entre les différents courants, celle des
femmes en premier lieu, celle des autres juifs considérés comme moins juifs que d’autres,
avec notamment toute la question des unions dites mixtes ou intermariages et de leurs
enfants - qui ne sont reconnus comme juifs que quand la mère est juive - et enfin de la
conversion. La tendance au repli identitaire, à l’entre-soi, s’exprime aujourd’hui d’autant plus fortement que la mixité sociale et religieuse est forte. Dans l’enquête sur la
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condition juive que nous avons menée avec Dominique Schnapper et Freddy Raphaël,
ce sont 7 personnes interrogées sur 10 en France qui disent avoir des mariages mixtes
dans leur entourage le plus proche. C’est aussi une tendance au retour à une tradition
plus rigoureuse repliée essentiellement sur les textes de la tradition, exprimée en hébreu,
qui s’oppose à la tradition du judaïsme éclairé hérité du XVIIIe siècle soucieux d’érudition classique et d’humanités, s’exprimant dans la langue du pays, et à l’héritage des
israélites conjuguant leur appartenance citoyenne, leur patriotisme avec la fidélité au judaïsme. La tendance au repli identitaire, à l'entre-soi, s'exprime d'autant plus fortement
que la mixité sociale et religieuse est forte. C'est aussi une tendance au retour vers une
tradition plus rigoureuse, repliée essentiellement sur les textes de la tradition, exprimés
en hébreu, qui s'opposent à la tradition du judaïsme éclairé hérité du XVIIIe siècle, soucieux d'érudition classique et d'humanité, s'exprimant dans la langue du pays d'installation, et à l'héritage des Israélites conjuguant leur appartenance citoyenne, leur patriotisme, avec la fidélité au judaïsme.
On distingue trois grands courants dans le judaïsme : le judaïsme traditionaliste qui
est le plus important, qui vise à concilier l'observance religieuse rigoureuse avec les
exigences de la société contemporaine. On observe dans ce judaïsme, qui est celui du
consistoire israélite en France par exemple, une tentation rigoriste de plus en plus poussée, le rétablissement de certaines frontières, notamment la séparation dans les synagogues entre les hommes et les femmes…
Né en Europe, le deuxième mouvement est le mouvement orthodoxe, qui s'oppose
comme une résistance à toute assimilation, préconise un respect à la lettre de la tradition, et revendique l'étude en hébreu au détriment de la langue du pays de la diaspora.
Enfin, le judaïsme libéral réformé a été inspiré depuis le XVIIIe siècle par les Lumières
et par la Haskala (mouvement des Lumières juif) dont le principal penseur fut Moses
Mendelssohn et qui entendait aborder la religion à partir de la raison. Ce judaïsme
libéral réformé se trouve notamment en France et aux États-Unis, il a opéré une modernisation tout à fait considérable et a maintenant plusieurs femmes rabbins.
A ces trois grands courants (France, Etats-Unis ou Israël) qui comportent eux-mêmes
d’infinies nuances, il faut ajouter l’importance prise par un courant philosophique areligieux, le courant juif laïc qui est une manifestation de la liberté de choix née dans la
modernité et avec l’Emancipation. Il s’inscrit avec toutes ses variantes dans l’héritage
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L'AVENIR DE L'HOMME DANS NOS SOCIÉTÉS - CHANTAL BORDES-BENAYOUN
des Lumières mais entend se démarquer des courants religieux. Il entretient d’ailleurs
des rapports compliqués avec la religion car il est partisan, dans l’esprit républicain,
de la séparation des ordres politiques et religieux, tout en se rattachant au monde juif
sans en clore la définition. Le nombre d’associations laïques qui se sont développées en
France témoigne de la difficulté à trouver la ligne directrice de ce point de vue. La plupart des conflits observés portent sur la proportion de rituels ou de pratiques religieuses
admissibles.
L’idée laïque a suscité historiquement l’adhésion de nombreux juifs. Il ne faut pas oublier la contribution des juifs avec les protestants à la conception d’une société laïque.
Par opposition à la précarité et à l’oppression des siècles antérieurs, l’émancipation des
juifs, c'est-à-dire leur accession à l’égalité de droits, opéra un changement radical dans
leur condition. Avec les Lumières, leur exclusion juridique et sociale devait apparaître
comme le symbole manifeste de l’intolérance et de la tyrannie de l’Ancien Régime. Leur
émancipation par la révolution française en 1791 servit de phare à toute l’Europe et
fut suivie de mesures analogues adoptées en Italie et aux Pays-Bas, puis dans les États
d’Europe, dans un processus qui dura un siècle.
La rupture qu’avait introduite pour les juifs la Révolution française après un long combat, la sortie du ghetto, furent à leurs yeux l’aboutissement d’un projet égalitaire qui ne
pouvait que faire écho aux principes fondateurs du judaïsme et du monothéisme. Le
parallèle fut constant durant l’époque révolutionnaire. La rupture la plus important est
celle qui, qui en faisant du juif un citoyen individuel, ouvrait la possibilité de ne plus se
définir par une identité religieuse et communautaire comme sous l’Ancien Régime inégalitaire. Elle permettait dès lors de laisser le choix à l’individu de ses appartenances et
obédiences, de se dire juif ou non. Cette liberté explique l’adhésion d’un grand nombre
aux valeurs universalistes.
On pourrait conclure ici, si l’actualité depuis le début des années 2000 ne nous invitait
à sortir du cadre d’une réflexion de pure sociologie des religions pour observer que la
condition juive en France aujourd’hui est marquée profondément par l’inquiétude qui,
comme le disait Raymond Aron, est une spécificité de la condition juive. Aujourd’hui,
en France, les juifs sont de plus en plus inquiets de la progression des actes antisémites
qui réveillent les incertitudes d’hier. Les événements de 2015 montrent à l’évidence que
leur sort est lié à celui des valeurs démocratiques que quand on tue les juifs on tue l’humain, la liberté humaine et que le combat pour l’humanisme et contre l’obscurantisme
et la haine qui en sont la négation n’est vraiment pas terminé.
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Chantal Bordes-Benayoun est Socio-anthropologue, Directrice de recherches au CNRS
et enseignante à l’université Toulouse - Jean Jaurès et à l’EHESS
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