La place de la psychanalyse dans le soin des psychotiques en
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La place de la psychanalyse dans le soin des psychotiques en
La place de la psychanalyse dans le soin des psychotiques en institution. Claude Deutsch Mon argument est celui ci : pour parler de la place de la psychanalyse dans la prise en charge des psychotiques en institution, il n'est pas suffisant de parler de la place d'un (ou du) psychanalyste dans l'institution, ni de faire une référence historique figée à la psychothérapie institutionnelle. Pour ce qui est du premier sujet, on sait combien la position du psychanalyste peut être une position de maître, supposé savoir de l'inconscient et en tirant une possibilité de pouvoir terroriste sur les autres (j'ai fait référence à l'article de jean Claveul dans le Bulletin de la Convention). D'autres fois, il sert de caution. L'institution est thérapeutique puisqu'elle a un thérapeute l'institution bien rigide, l'enferme dans un placard et continue son train-train. Parfois enfin, il fait convenablement son travail et l'institution remplit convenablement les conditions de liberté suffisante pour qu'il le fasse. Pour moi, voir les choses sous cet angle, cela permet de s'écarter du sujet, à savoir comment il y a de la psychanalyse dans le fonctionnement même de l'institution. Par rapport à la psychothérapie institutionnelle, ma réserve tient, non dans les supposés théoriques auxquels je souscris pleinement, mais dans l'utilisation qui peut en être faite parfois et qui consisterait à marquer certains lieux comme thérapeutiques en eux-mêmes. Il est nécessaire de réunir le maximum de conditions pour que l'institution puisse être un espace de dire. Cette nécessité s'impose comme l'asepsie en chirurgie, comme dirait mon maître Oury. Ce n'est pas suffisant pour garantir la fonction thérapeutique de l'institution. Il n'y a pas d'appellation contrôlée, de label. C'est de cette recherche du lieu idéal qu'est marqué l'échec de Marc Leclerc et Claude David à Nantes. Pour moi, voir les choses sous cet angle, cela permet de s'écarter du sujet, à savoir comment s'articule, se joue et se dénoue le transfert du sujet en institution. J'ai avancé la notion de moments organisateurs pour le sujet en travail et pour l'équipe soignante,.moments organisateurs qui sont à penser en rapport avec le " stade du miroir " et le moment où " l'enfant se surprend lui-même ". de Winnicott. C'est là qu'il se passe quelque chose qui fait prendre sens, qui est de l'ordre de l'interprétation. Wo es war, sol Ich werden. Il faut que je dise d'où je parle avant d'illustrer mon propos. A l'issue de ma première tranche d'analyse, j'ai crée un lieu de vie à vocation thérapeutique, avec l'idée qu'un milieu suffisamment bon, c'est à dire authentique, pouvait permettre au sujet d'advenir. Certains connaissent le Foyer de Cluny de Bellengreville, cette structure intermédiaire (comme on dit dans l'après coup) chaleureuse et à volonté thérapeutique où mes amis ont toujours pensé qu'il y avait de l'analyse. J'ai défendu la thèse que l'élaboration du roman familial joue, dans le traitement des psychotiques en institution, l'équivalent de la névrose de transfert dans la cure psychanalytique classique et la notion de greffe de transfert, mise en lumière et en avant par G.Pankow, est assez bien admise aujourd'hui. L'inscription, l'adhésion dans et à l'institution sont nécessaires à l'émergence du transfert. Mais, j'ai appris à me méfier de ce fantasme du bon lieu qui suggère un recommencement imaginaire. A celui-ci, je préfère la référence à l'aire de jeux où l'expérience peut s'exercer. Je prendrai mon premier exemple dans les situations de réunion de pensionnaires, qui permettent de voir les événements à la loupe. Dans la mesure où ce lieu est leur lieu, il arrive souvent qu'un pensionnaire apporte un problème personnel et apparemment sans lien avec ce qui est proposé, sinon - et exclusivement pour lui - de juxtaposition dans le temps, du type : "Quand est-ce que je vais chez mes parents?" ou "Deutsch est là pour me défendre". Qu'en faire? Parfois, un élément plus dynamique du groupe ne "laisse pas le temps" et renvoie l'intéressé à une réalité peu plaisante : " Ce n'est pas le moment, ou le lieu, d'en parler " Parfois, le groupe est bien embarrassé parce qu'il n'a rien d'autre à proposer que ces affirmations sur les parents ou sur Deutsch. Cette " proposition aberrante " peut alors modifier le cours de la réunion si un lien autre, qu'uniquement de juxtaposition temporelle, peut être trouvé. Ainsi, si le sujet est " qu'est-ce que le groupe va faire pour le week-end de Pâques? " la question des parents n'est pas aussi aberrante qu'elle peut paraître. Si le sujet est toujours le même mais qu'il y a eu récemment par exemple un vol, l'affirmation sur Deutsch prend un sens. Même s'il n'y a pas eu vol, cette affirmation peut dénoter un sentiment d'insécurité. Il devient alors intéressant de développer la question de l'insécurité en rapport avec le week-end de Pâques. Pour qui? Pour le groupe? " Ils " feront bien ce qu'ils voudront au weekend de Pâques. Pour le sujet qui a amené la question au contraire ce développement est important. Il a énoncé une phrase et elle a été entendue. Cette phrase, sans doute, l'a-t-il déjà prononcé dans de nombreux endroits au Foyer, et fort mal à propos, et il lui avait été répondu de se taire, qu'il embêtait et voilà que là, cette phrase qui l'encombrait, elle va devenir un moteur. Le moteur entraînera la machine de manière plus ou moins efficace suivant la personnalité de l'énonciateur, la capacité de renvoyer la balle. Mais cette phrase aura été renvoyée sur un projet. Elle aura été récupérée et renvoyée comme agissant sur le devenir de l'intéressé ou des autres. Il y a projet en même temps qu'il y a sujet. C'est l'adhésion qui donne le droit à la parole, à la reconnaissance de cette parole, au devenir de cette parole. C'est la possibilité d'avoir un devenir qui donne un sens à la parole et la position de sujet à celui qui l'a émise. Je tirerai l'autre exemple de l'expérience du travail d'équipe et particulièrement d'un moment récent, Le Foyer de Cluny est d'une grande fidélité à sa finalité, dans la transaction avec la personne en souffrance psychique et, en même temps, l'équipe n'est pas figée dans son organisation. Jusqu'à récemment, et après avoir vécu d'autres schémas, l'institution s'organisait suivant trois lieux et l'équipe se décomposait en trois sous groupes : Bellengreville, lieu de vie rural de 10 à 12 pensionnaires, la Plateforme, à la fois lieu de référence de jour pour tous et lieu d'accueil des pensionnaires externes et le petit Foyer de Bastion, lieu de vie urbain pour 4 pensionnaires seulement. Pour des raisons historiques, Bastion est situé dans le même immeuble que la Plateforme. I1 y a deux ans, la sous équipe de Bastion déclarait forfait. La présence permanente d'un éducateur ou infirmier dans un espace limité et un groupe restreint, renforçait la fonction paranoïsante de celui-ci. " La parole (la leur comme celle des pensionnaires) dit l'un deux, rebondit sur les murs comme une balle de ping-pong. " I1 nous fallait ouvrir l'huis clos. Un autre collectif, gardant des attaches à Bellengreville, se proposait alors pour la relève. Le projet était d'introduire de l'absence et, en même temps, de trouver une identité entre internat et externat. Ceci donna lieu à un débat de deux ans à l'intérieur de l'équipe et sur le fond et sur la forme. Le paradoxe d'un lieu de vie sans présence éducative de nuit était-il trop subversif ou trop incohérent ? La tâche du directeur fut de gérer le débat au lieu de trouver des solutions. Et l'absence de solution, la confrontation au manque furent parfois douloureux. C'est aussi ce qui permit qu'il y ait de l'élaboration, que ça s'organise. La question, en effet, prit rapidement un tour très concret. Il apparaît que, si un accord verbal pouvait intervenir, cet accord volait en éclat lorsqu'il engageait réellement les personnes. Le projet restait celui d'un groupe de volontaires et ne passait pas au stade de loi institutionnelle. En cas d'absence d'un membre du groupe, personne n'acceptait de le remplacer. Evident symptôme, l'absence imprévisible constante et répétée de l'un, puis plusieurs d'entre eux, rendait compte de la souffrance. Il y eut de ma part refus d'interdire la mise en place du projet, seule alternative proposée au forfait de la sous équipe précédente, il y eut ensuite refus de résoudre la crise en désignant des volontaires. Et, il y eut travail d'élaboration qui permit une nouvelle organisation (qui parait satisfaisante actuellement. Maintenant, une sous équipe Caen étoffée prend en charge tant la Plateforme que Bastion. Qu'est-ce que cette histoire d'emploi du temps d'éducateurs ou d'infirmiers a à voir avec le traitement de la psychose? Il semble important pour le psychotique que l'événement advienne pour que puisse s'amorcer une prise en compte du symbolique. Ici nous voyons une équipe, au plus profond d'elle-même, ignorante de son propre devenir. Elle est bien sûre d'abandonner la toute puissance. Et puis, elle parvient à élaborer quelque chose de sa propre forme, de sa propre identité, de sa propre image. Quelque chose qu'elle trouve elle-même, qui ne lui est pas dictée par l'autorité. C'est bien sûr un comportement qu'elle reproduira inconsciemment auprès des pensionnaires. On a beaucoup parlé de l'espace de parole que cela crée et Oury, de son côté, cite souvent l'exemple de chaises qui viennent à manquer dans l'institution et qu'il ne faut pas remplacer comme ça. Aujourd'hui, j'ai voulu, à la lumière de ces deux exemples, mettre l'accent sur le moment organisateur. Je voudrais m'arrêter un moment sur l'histoire d'Aimée Vy. Le souvenir d'Aimée restera attaché à l'année 1988. Aimée est arrivée au Foyer en Octobre 1986 à la suite d'un processus d'admission mémorable. En effet, c'est sa maman qui d'abord a pris contact demandant à visiter les chambres afin de voir si elle pouvait y placer sa fille. Lors de la visite, Aimée manifestera un vif désir de se joindre à nous et présentera une pathologie grave en même temps qu'une grande intelligence. Ses parents (essentiellement sa mère) nous informent qu'une ligature des trompes qu'ils viennent de faire opérer permet à leurs sens l'admission. Aimée revendique le droit d' avoir des enfants. Le médecin qui la suit la décrit ainsi : "L'ensemble symptomatique (agressivité, attitude d'opposition, apragmatisme, incohérence du langage avec écholalie et stéréotypies verbales, tabagisme compulsif) évoquait une organisation psychotique de la personnalité évoluant vraisemblablement depuis la première enfance évoquant à l'état adulte une schizophrénie de type hébéphrénique. Par ailleurs une pathologie relationnelle de type symbiotique entre la mère et Aimée n'était pas pour simplifier l'aspect thérapeutique que nous pouvions proposer ". Aimée confirme le 30 Septembre son désir de venir par un courrier qui se termine ainsi "J'espère que ça va bien se passer et que je pourrais vivre la vie sociale parfaitement avec tous les éducateurs et éducatrices du foyer ainsi que les filles qui aura là-bas (sic). Veuillez m'excuser de m'arrêter ce petit discours je nous quitte et j'attend votre réponse le plus vite. Merci d'avance " Aimée. Les sentiments du groupe vis à vis d'Aimée sont contradictoires. Il y a quelque chose en elle d'aimable mais les larcins qu'elle commet sont mal supportés. Les réunions de groupe que cela provoque permettent que cela soit parlé et Aimée alors déclare: "Je n'aurais pas cru que c'était çà le foyer". Elle arrête alors ses larcins provisoirement. La première partie du séjour d'Aimée prend des allures promotionnelles. Aimée s'inscrit à de nombreuses activités semble vouloir s'affirmer. Dans le même temps elle ne tient pas en place à table, vit dans un nuage de fumée. Elle s'isole de plus en plus fréquemment dans sa chambre. Ne pouvant recourir au " faire semblant " elle ne supporte aucun contact. A l'issu d' une réflexion approfondie d'équipe nous faisons le choix de la "jachère ". Permettre à Aimée de " vivre là ", à Bellengreville, à son rythme sans chercher à imposer des exigences qui se heurteraient à un mur. " Vivre là " mais pas dans l'indifférence. Pour l'équipe c'est au contraire le moyen de l'approcher (Aimée est comme écorchée vive) et de lui permettre de prendre ses repas avec le groupe. L'évolution qui s'opère alors est difficile à relater car toute contenue dans la relation. Aimée montre plus d'ouverture et de confiance à l'égard des femmes alors qu'elle reste d'une violence interprétative très grande à l'égard des hommes. Une modification du traitement permet d'atténuer ce symptôme. C’est dans ce contexte qu'Aimée ira en Corse avec les Éclaireurs de France. Le compte-rendu du comportement d'Aimée pendant ce séjour est déplorable, la conclusion péremptoire : il semble qu'Aimée n'est pas faite pour ce type de séjour en collectivité ". Malgré des faits tangibles (vols etc.) l'équipe de Bellengreville s'insurge contre ce discours négatif. Dans la période qui suit une partie de l'équipe (médecin, éducatrice chef, directeur) reçoit régulièrement les parents tandis que l'autre ménage et aménage à Aimée un jardin secret. Ainsi c'est Dr X (médecin femme) qui l'écoute et Dr Y (médecin homme) qui reçoit les parents. Aucun éducateur ne participe à ces rencontres. Ces rencontres apparaissent comme nécessaires car Aimée semble partagée entre son désir d'être une petite fille (soumise ou frondeuse) dépendante du milieu familial et une jeune adulte en quête de son autonomie au Foyer. C'est dire qu'à ce moment là et à ce moment là seulement ce type de question se pose pour Aimée (après un an de séjour). Cela révèle qu'il y a une restauration chez Aimée de son rapport à la réalité, que le divorce avec la réalité est moins profond. Nous mettons cette évolution à profit pour proposer à Aimée une vie plus structurée : descendre à la Plateforme participer à des activités d'expressions (mais aussi décider d'en exclure d'autres) commencer à apprendre à gérer son argent de poche. Aimée peut accepter certaines règles dans la mesure où le regard de l'autre sur elle devient moins chargé de menace (supposée). C'est alors que se pose pour nous la question : comment permettre à Aimée d'élaborer une amorce de perception d'elle même? Il faut souligner ici comme élément déterminant de l'évolution d'Aimée l'immense tendresse d'Annie G. à son égard. Certes toute l'équipe fait preuve d'un engagement très grand pour qu'Aimée "s'en sorte" mais le statut d'Annie est particulier. Annie est investie spécifiquement de la confiance d'Aimée (qui écoute ses conseils plus qu'aucun autre) parce qu'elle même a une confiance absolue dans la capacité d'Aimée à vivre par elle même, à être elle-même. Elle la reconnaît. En même temps comme dirait Bettelheim " L'amour ne suffit pas ". Cette relation d'amour et de confiance n'est pas un face à face qui pourrait être dangereux. Elle se construit dans le cadre d'une communauté, dans une confrontation commune à une réalité extérieure partagée dont le temps le plus fort sera le voyage en Italie. Mais nous n'en sommes pas là. La prise en compte de la réalité par Aimée n'est pas sans difficulté donc sans souffrance et puisqu'elle souffre c'est que nous les autres la faisons souffrir. Aimée développe un discours persécutif au nom duquel elle justifie les comportements les plus marginaux ou agressifs : elle récuse les éducateurs, disparaît du groupe pour des séjours au café où son comportement est équivoque recours de plus en plus .à un look de " poulbot " voir de "petite frappe" d'allure masculine. Ceci donne lieu à des bilans des mises au point dans le bureau du directeur où des règles de vie sont rappelées mais où aussi elle parle d'elle. Ainsi elle verbalise sa (con)fusion en verbalisant sa souffrance: les problèmes des autres l'envahissent alors qu'elle a déjà tant à faire avec les siens. En disant cela explicitement elle parle des autres pensionnaires. Pourtant objectivement dans le même temps Aimée est l'enjeu de 2 projets contradictoires qui la concernent : ∑ le projet thérapeutique de l'équipe; ∑ les projets de sa mère qui refuse de voir en elle une malade en quête de sens pour voir une handicapée. Aussi sa mère voudra-t-elle successivement la placer en C.A.T et lui impose une Tutelle. Le comportement d'Aimée (qui n'a pas perdu tout espoir de vivre en étant aimée chez ses parents) signe ce conflit que les échanges entre les cadres et les parents essaient d'atténuer. Ce comportement devient inacceptable au Foyer dans l'espoir embivalent pour Aimée de retourner chez ses parents (l'été précédent Aimée avait eu un comportement symétrique chez ses parents pour revenir au Foyer). La crise éclate à Pâques, Aimée refusant toute autorité de notre part, assistée par sa mère qui nous récuse ouvertement. Aimée est exclue temporairement avec proposition de réfléchir, à son projet au sein du Foyer. Elle écrit alors la lettre suivante Claude Rendez-vous 15h J'ai bien réfléchit pendant les cinq jours de pâques. J'aimerais bien revenir aux foyer épuis progressés devantage mieux, puis me réintégrée aux grouppes. Parceque je suis intteligentte et pas bête. Puis mettre la table comme on me le demande. Puis dialogués un peux avec mes camarades du foyer je pensse que sa ira mieux et que je progresserai très bien déjà. Les éducateurs me trouve très capable de faire les chose avec soin il suffit encore un peux de temps aux foyer parce que il y a. des choses encore à apprendre et j'aimerais resté aux foyer pour le moment pour pouvoir déjà réfléchir à l'avenir. Je pense que ça m'apporterai beaucoup de choses. Je pensse aussi que sa m'aiderais beaucoup et que je pense que ça me donnerai beaucoup de courage puis ça m'aidera dans la vie pour plus tard. Un jour je partirais puique on rete pasaux fouer toute la vie personne ne reste aux foyer toute la vie on me l'a dit. Votre pensionnaire qui vous aimes. Aimée. Mais J'apprend un peux a ce que vous allez me dire. Puis je suis sur quand quand on i mettant du miens je réussirer dans la vie déjà connaitre du monde me faire des copains, des copines, puis je pense que cela a beaucoup d'importance en moi et envers vous puis pour moi et pour ma vie surtout Votre pensionnaire encore. J'insiste pour rester le plus longtemps en progressants vrès vite envers tous le monde. J'ai pas du tout envie de vous quitter tous cela me, génerais de vous quitter si vite. Je vous saluts beaucoups bien des fois et je vous oublies pa. Jy compte bien je vous dit mon aetours aux foyer merci de votre aimmabilités a tous a l'heure puis je suis bien décider de rester aux foyer. Pour le moment parce que vous voullé que j'aille autrement pour le moment. Je tiens beaucoup a retravailler avec vous et en avoir de bon résulta. Merci de votre compréenssion. Aimée est donc réadmise à sa demande et nous rencontrons les parents. Ceux ci, tout en exprimant moult revendications envers le Foyer, conviennent des progrès sensibles d'Aimée en maturité, en initiative. Nous suggérons que cette évolution soit reconnue par une responsabilisation plus grande d'Aimée sur son argent (son carnet de chèque est chez la mère). Le père propose que cela soit fait à partir de Septembre sous réserve qu'Aimée ait fait ses preuves. Nous acceptons. La maman acquiesce. C'est dans ce contexte qu’Aimée part en Italie portée par le désir d'Annie. Cela semblait être une gageure. Aimée pourrait-elle rester suffisamment calme dans le trafic ? Ainsi que l'explique Patrice l'immersion en Italie a produit une enveloppe protectrice permettant à nos écorchés vifs et tout particulièrement à Aimée d'échanger avec l'extérieur sans difficulté apparente. Exclus du milieu par la langue (aucun d'eux ne parle Italien) nos voyageurs-enquêteurs n'ont nul besoin du langage (comme modèle de la communication) (pour plus de détails voir article infra). La capacité d'Aimée a montré pendant ce voyage d'échange authentique avec les autres (les autres du groupe les italiens) sa capacité à gérer son argent ont montré une réelle accession au registre symbolique. On ne peut pas dire qu'elle soit pour autant définitivement sortie de la psychose et le retour à Caen verra la carapace se reformer, l'angoisse envahir la conscience avec son cortège de fantasmes délirants. Cependant l'expérience d'un monde possible a été vécu et ce vécu là a permis à l'existence de prendre sens même si cette expérience est brève, limitée. Rien n'est jamais plus comme avant. Aussi la maman s'en trouve-t-elle grandement insécurisée. Il semble que l'angoisse de celle-ci soit ancienne et mal compensée. Mme Vy va vivre dans l'angoisse persécutive qu'Aimée soit kidnappée par sa fille aînée (que Mme Vy a eu d'un précédent mariage) fille qui l'a profondément trahie en prenant son indépendance. Mme Vy récuse son engagement précédent de responsabilisation d'Aimée par rapport à son argent. Elle prétend entreprendre des démarches en vue d'une Tutelle. Cette histoire entre autre question amène à s'interroger sur la responsabilité des parents. Il s'agit ici non de juger mais de comprendre. La maman est en souffrance au moins autant qu'Aimée mais ne peut le dire (elle est elle-même dans une relation de dépendance très grande à sa mère infirme). La référence à une loi commune est irrecevable pour la maman autant que pour la fille bien que sur des modes différents. Aimée tente de supprimer la réalité, Mme Vy tente de la biaiser... Elle y parvient en niant et diminuant les potentialités d'Aimée (ligature des trompes, tutelles etc..) (car sinon elle n'existe plus). Elle a besoin (à la différence d'Aimée qui se recroqueville sur elle même et cherche son père) de la complicité de l'entourage pour ne pas s'en sentir coupable. En lui refusant cette complicité nous devenions alors très inquiétants (" qui n'est pas pour moi est contre moi ") d'autant plus que très proches (comme sa fille aînée). Peut-être nous imaginait-elle liguée avec Aimée contre elle? Le père de son côté ne peut se manifester au risque d'être complice ou de l'une (aux dépends de l'autre dans l'imaginaire) ou de l'autre (au dépend etc.) or il ne peut risquer de fragiliser un peu plus l'une ou l'autre (ce qu'il fait au bout du compte en ne se montrant pas). Mme Vy attendait. de nous une réduction orthopédique de la révolte d'Aimée. Notre séparation avec Aimée a été le signe de la prise en compte de ce malentendu. Les rendez-vous avec les cadres sont " manqués " (alors que Mr Vy maintenant au chômage est plus disponible). Le comportement d'Aimée devient de nouveau explosif. Récusant les éducateurs avec fracas elle casse des vitres dans le hall. Au point où nous en sommes dans le travail avec Aimée il n'est pas possible de la considérer comme irresponsable. Non seulement son accrochage au réel est suffisant mais il n'est pas possible de refuser le travail qu'elle a fait avec nous pour y arriver. Il lui est donc demandé de payer la franchise " bris de glace " soit avec son argent soit par son travail. Aimée demande l'autorisation à sa mère qui lui refuse. Nous ne pouvons alors continuer le travail avec Aimée qui nous quitte avec possibilité de revenir si elle est décidée à payer sa dette. Il était là plus important de tenir une parole vraie quitte à devoir interrompre un travail prometteur que de reproduire une connivence invalidante en acceptant l'irresponsabilité dictée par la maman. Cette histoire tente de montrer comment l'élaboration du registre symbolique s'instaure avec la mise en situation d'une personne dans une communauté elle-même active et située dans une histoire. Cette élaboration se fait bien évidemment par la prise en compte de la dimension affective par la prise en compte puis la liquidation du transfert.