Les Bambara, appelés également Banmana, ethnie principale du

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Les Bambara, appelés également Banmana, ethnie principale du
ANIMAL SACRÉ DU Kono (ou BoLI-Kono),
XIXe siècle, terre crue et couches de
matières sacrificielles,
44 x 59 cm, Paris, musée du Quai-Branly
ARTS PREMIERS AFRICAINS
Les Bambara, appelés également Banmana, ethnie principale du Mali,
honorent l'esprit de leurs ancêtres censés les protéger. Leur culte
religieux s'organise autour de différentes sociétés d'initiation destinées à
leur enseigner les principes de la vie. La caste
des forgerons, par exemple, représente la loi et enseigne la cosmologie.
Son chef est à la fois le juge de la tribu, et le seul, avec le prêtre, à
pouvoir manipuler l'animal sacré du Kono. Il en est également le gardien
et conserve l'objet
le plus sacré de la religion bambara dans une case transformée en
sanctuaire, à l'abri des non-initiés...
Regardez cet animal sacré. Il vient du Mali, où il était conservé dans un
sanctuaire Kono, du nom d'un culte très ancien. Fabriqué en terre et en
cire d'abeille, il est recouvert de sang coagulé. Il possède deux orifices,
une bouche et un anus, reliés entre eux par un conduit. Lors d'un
sacrifice, on introduit dans sa bouche un petit morceau de viande et de
l'eau, que l'on fait ressortir de l'autre côté en inclinant l'animal. Ne m'en
demandez pas plus. Ce genre de cérémonie est secrète. Ce que je peux
vous dire, en revanche, c'est comment cet animal se retrouve aujourd'hui
dans un musée parisien. Nous sommes en 1931, durant l'expédition Dakar Djibouti, dont fait partie Michel Leiris, le futur auteur de L'Afrique fantôme.
Leiris a tout raconté dans ce livre : le chantage et les menaces que lui et
d'autres membres de l'expédition ont fait subir aux chefs des Kono pour
leur extorquer des objets sacrés ; les mensonges aussi ; et les vols. Cet
animal, par exemple, ainsi qu'un masque, ont été dérobés au village de
Dyabougou. Leiris s'introduit subrepticement dans le sanctuaire et les
dissimule dans une bâche. « Tout est rapidement sorti du village », écrit-il.
Avant d'ajouter, avec un certain dégoût pour lui-même : « On se sent tout
de même joliment sûr de soi lorsqu'on est Blanc et qu'on tient un couteau
dans la main. »