La démocratie scolaire Une démocratie représentative et participative
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La démocratie scolaire Une démocratie représentative et participative
P A R T I E 1 La démocratie scolaire Une démocratie représentative et participative 3UpVHQWDWLRQGHODGpPRFUDWLHVFRODLUH La commission scolaire constitue une structure démocratique où la population peut intervenir à plusieurs niveaux et sous différentes formes. Quels sont ces niveaux et quelles sont ces formes? Dans quels lieux s’exerce cette démocratie? Comment se porte la démocratie scolaire? Avant de soumettre des réponses à ces questions, il s’impose de rappeler quelques notions relatives au concept de démocratie, concept à géométrie variable s’il en est un. Il s’agit d’un régime politique dans lequel le peuple détient la souveraineté. La démocratie est directe quand le peuple participe directement au vote des lois et au choix de ses chefs. Elle est représentative lorsque le peuple exerce sa souveraineté par l’intermédiaire de représentants élus ou de représentantes élues. Il s’agit, dans ce cas, du mode de fonctionnement le plus généralisé étant donné le nombre élevé de citoyennes et de citoyens dans nos démocraties actuelles. Originaire de la Grèce, il y a plus de deux millénaires, le concept a évolué avec le temps et en fonction des civilisations qui l’ont incarné. Ainsi, le président américain Abraham Lincoln l’a traduit dans une formule plus populiste lorsqu’il fit sa célèbre déclaration : La démocratie, c’est le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. Aujourd’hui, le terme « démocratie » s’est enrichi d’autres qualificatifs, tels que : la démocratie élective (des chefs d’État élus démocratiquement sans plus), la démocratie d’exécutif (des chefs d’État qui ont ou qui prétendent avoir le pouvoir de négocier des ententes sans requérir l’accord des assemblées parlementaires) et la démocratie participative (quand on prévoit mettre en place des mécanismes de consultation et de participation de la société civile et renforcer les institutions démocratiques). Ces distinctions constituent une preuve que la démocratie est un concept à géométrie variable. -4- 8QHGpPRFUDWLHUHSUpVHQWDWLYHHWSDUWLFLSDWLYH Si le concept de démocratie s’incarne le plus souvent dans nos sociétés sous la forme représentative (par les personnes élues au Parlement, à l’Assemblée nationale, dans les commissions scolaires et dans les municipalités), la notion de démocratie participative devient, pour sa part, de plus en plus présente dans les structures scolaires. C’est ainsi que la population est invitée à participer à des référendums, à des consultations populaires (ex. : Les États généraux sur l’éducation de 19951996). Les principes fondamentaux de la démocratie incluent la participation universelle, le consentement des individus gouvernés et l’imputabilité publique des personnes élues. En transposant ces concepts dans le monde de l’éducation, il est clair que la démocratie scolaire est d’abord la participation aux élections des commissaires de la commission scolaire. S’ajoute à cela une certaine autre forme de démocratie, soit celle de l’élection des membres des conseils d’établissement par leurs pairs. Ces conseils constituent un palier où il est possible d’influencer la gestion des affaires scolaires à tous les niveaux. Un troisième niveau de démocratie scolaire s’exprime par les divers comités de la commission scolaire où, là aussi, les membres sont élus par leurs pairs (comité de parents, comité des services aux élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage, comité de transport, organismes de participation des parents…). Enfin, en guise de quatrième niveau de démocratie, on retrouve la possibilité pour les parents et la population en général d’intervenir lors de consultations par la commission scolaire ou de se faire entendre lors des réunions du conseil des commissaires. En d’autres termes, la démocratie scolaire, c’est à la fois un processus formel d’élection (démocratie représentative) et un processus informel d’influence (démocratie participative). -5- 8QHORQJXHWUDGLWLRQGpPRFUDWLTXH Le premier niveau de participation a été celui de l’élection des gouvernements; un système électoral mis en place au début du régime anglais. Puis, dès 1829, il y a eu création d’un deuxième niveau, celui du système des commissions scolaires tel que nous le connaissons aujourd’hui. C’est à partir de 1841, que l’expression « commissaires d'écoles » entre dans nos mœurs. Si, au début, les personnes ayant le droit de vote aux élections scolaires étaient d’abord les propriétaires, ensuite ce furent les contribuables et les personnes jouissant de la condition parentale et finalement tous les citoyens et les citoyennes. Il faut se rappeler que la population de Montréal et de Québec n’a obtenu ce droit qu’en 1972. Il faudra attendre l’actuelle réforme scolaire de 1998 pour voir apparaître une plus large participation de la population à la structure démocratique. On assiste alors à un renforcement de la démocratie participative en instituant pour chacun des établissements des commissions scolaires, des conseils constitués de membres élus par leurs pairs représentant les parents, les élèves et le personnel. De plus, le législateur a aussi ouvert l’accès à la communauté à cette nouvelle structure par la nomination de personnes pour les représenter. 8QHGpPRFUDWLHTXLQ¶DULHQjHQYLHUDX[DXWUHV Comme il fut mentionné, notre réseau scolaire est le reflet d’une combinaison des deux formes les plus « vivantes » et les plus socialement acceptées de démocratie, c’est-à-dire la démocratie représentative et la démocratie participative. En prenant en compte ces deux qualités de la démocratie, il s’avère qu’au Québec, il n’y a aucun autre niveau de gouvernement où la forme de la démocratie participative est aussi présente que dans le réseau scolaire. -6- Au plan de la démocratie représentative, le taux moyen de participation aux élections scolaires, depuis 1987, a été de l’ordre de 18 %. En 1998, pour seize commissions scolaires, le taux a varié entre 20 % et 29 %, alors que pour seize autres commissions scolaires, le taux a même dépassé les 30 %. À titre d’exemple, quatre commissions scolaires francophones ont eu un taux se situant entre 36 % et 41 % alors que pour toutes les commissions scolaires anglophones, le taux a varié entre 41 % et 65 %. Doit-on en déduire que la démocratie scolaire se porte mal et que la représentativité des commissaires est mise en doute? Qu’en est-il alors de la représentativité des députés du Québec et du Canada élus, lors d’élections partielles, avec des taux de participation inférieurs à 40 % et même à 30 %? Que penser des élections québécoises dans Mercier en avril 2001 avec 41 % de participation, et ce, malgré la très grande médiatisation? Et de celles dans Outremont en 1996 avec 34 % de participation? Que dire également des dernières élections fédérales partielles, tenues sur le territoire du Québec, dans Hull-Aylmer et Mont-Royal avec respectivement 26 % et 28 % de participation? Pouvons-nous en conclure que ces députés représentent moins bien leurs électeurs et leurs électrices que les autres députés? On a malheureusement tendance à mesurer rapidement la démocratie à partir d’un seul paramètre, soit le taux de participation aux élections. Mais la démocratie scolaire, c’est beaucoup plus que cela. La démocratie scolaire se démarque, par rapport aux autres paliers de gouvernement, par une application beaucoup plus large des concepts de la démocratie représentative et de la démocratie participative. Là où la démocratie scolaire prend un sens qui n’a pas son pareil ailleurs, c’est au plan de la démocratie participative. Dans l’ensemble du réseau scolaire, ce n’est pas seulement les 1 305 commissaires qui sont garants de la démocratie. Il faut aussi compter plusieurs milliers de personnes (plus de 20 000) élues par leurs pairs et qui siègent à l’un ou l’autre des conseils d’établissement. Il faut également compter les nombreux parents qui œuvrent au sein des divers comités (de parents, de transport, de services aux élèves handicapés ou en difficulté -7- d’adaptation ou d’apprentissage…) et des organismes de participation des parents. En somme, la structure démocratique des commissions scolaires présente une remarquable fusion des deux types de démocratie : la démocratie représentative par l’élection de représentantes et de représentants et la démocratie participative par la participation de la population aux prises de décisions concernant les affaires scolaires. Sans négliger les efforts pour améliorer la démocratie représentative, il est également très important d’associer davantage l’ensemble de la population et surtout les parents, à la prise de décisions afin de renforcer la démocratie participative. Cela suppose une présentation beaucoup plus claire à la fois de l’information, des enjeux et des possibilités de choix. Plus la population considérera l’éducation comme « son affaire », plus on se rapprochera de la définition que Lincoln donnait de la démocratie : « ...le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». -8-