Ancêtres kanak à Paris - Institut d`ethnologie

Transcription

Ancêtres kanak à Paris - Institut d`ethnologie
Cinéma des Océanistes 1
À l’occasion de l’exposition KANAK. L’art est une parole (musée du quai
Branly, Paris), une importante délégation des aires coutumières de Nouvelle-Calédonie s’est déplacée pour ouvrir l’exposition par une cérémonie
coutumière. Celle-ci a été adressée en premier lieu aux ancêtres présents
à travers les objets, puis aux concepteurs de l’exposition.
Le lendemain, Déwé Görödé, écrivaine kanak et ministre de la Culture
(FLNKS) du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, nous a guidés à
travers cette exposition exceptionnelle, à la découverte de la culture et de
l’histoire kanak.
Ancêtres
kanak
à Paris
musée du quai Branly,
octobre 2013
un film de
Mehdi Lallaoui
avec la collaboration
d’Isabelle Leblic
Tous fomats, secam
47 mn
© Société des Océanistes/
Mémoires vives productions/
Au nom de la Mémoire, 2013
avec la participation du CNRS-LACITO
Prix TTC : 15 €
isbn : 978-2-85430-116-8
© Société des Océanistes/
Mémoires vives productions/
Au nom de la Mémoire, Paris, 2013
À l’occasion de l’exposition KANAK. L’art est une parole, qui a été inaugurée au musée
du quai Branly le 14 octobre 2013, une importante délégation des aires coutumières
de Nouvelle-Calédonie s’est déplacée à Paris pour ouvrir l’exposition en effectuant, le
dimanche 13 au matin, dans le hall du musée, une cérémonie coutumière afin de permettre aux visiteurs de découvrir les représentations matérielles de leurs ancêtres et tous
les objets exposés.
Les paroles prononcées lors de cette cérémonie et les gestes qui les accompagnent sont
une adresse aux ancêtres kanak. Elles ont donc ici pris la forme d’un discours de deuil,
récité en xârâcùù par Damas Patrice Moasadi, enquêteur culturel à l’adck/Centre Tjibaou.
Isabelle Leblic, anthropologue, directrice de recherche au cnrs-lacito, a sollicité
Mehdi Lallaoui, réalisateur de documentaires, pour venir filmer cette cérémonie et a reçu
l’autorisation du service Communication du musée du quai Branly pour mener à bien ce
projet.
Le lendemain de l’inauguration, Madame Déwé Görödé, écrivaine et militante kanak,
aujourd’hui ministre de la Citoyenneté, de la Culture et de la Condition féminine au
gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, nous a guidés durant plus de trois heures à travers cette exposition exceptionnelle, à la découverte de la culture kanak et de son histoire.
Elle nous a fait part de ses réflexions devant plusieurs des objets exposés et a dialogué
avec des visiteurs.
Ce film présente donc une vision kanak de l’exposition et permet de faire comprendre,
à un public non connaisseur, ce que sont la culture kanak et ses coutumes dans cette
société du xxie siècle où les ancêtres kanak sont toujours présents et qui, comme le dit
Déwé Görödé, « ont traversé l’espace et le temps » pour être dans cette exposition, ici à
Paris, suite à un long travail d’inventaire du patrimoine kanak dispersé qu’avait réclamé
il y a trente ans Jean-Marie Tjibaou.
Images : Mehdi Lallaoui et Fabien Giacomini
Montage et mixage : Fabien Giacomini
Archives : ADCK
Remerciements à Déwé Görödé, à Emmanuel Kasarhérou, à la délégation des aires coutumières kanak de Nouvelle-Calédonie, à Wassissi Konyi et au musée du quai Branly.
© SdO/MVP/ANM, Paris, novembre 2013)
La cérémonie coutumière commence ici par l’arrivée de la délégation kanak en musique, et au son de la conque utilisée pour appeler les clans à se réunir et rendre les esprits
favorables. La délégation vient « porter le respect » aux ancêtres qui sont là, dans l’exposition. Elle fait face aux représentants du musée du quai Branly, considérés, dans cette
cérémonie coutumière de deuil, comme les personnes qui accueillent. Car, dans toute
cérémonie, il y a les invités – assimilés aux maternels – et les maîtres de la maison – les
paternels – qui accueillent et sont les premiers à recevoir des présents. Puis un des Kanak,
armé d’une sagaie, reproduit l’attaque faite par l’un des maternels dans les cérémonies
de deuil. Un autre déclame un discours généalogique de deuil en langue xârâcùù. Un tel
discours retrace les liens entre la personne décédée et ses paternels et maternels au sens
large, soit les lignages des maîtres de la maison et des invités réunis pour cette cérémonie.
Cette partie se termine par le lancement de la sagaie dans un bac de terre. Octave Togna,
sénateur coutumier de l’aire drubéa-kaponé, prend la parole au nom de la délégation
pour dire bonjour, ce qui clôt l’entrée des invités dans la cérémonie.
Stéphane Martin, président du musée du quai Branly, y répond par quelques paroles de
bienvenue.
Puis les échanges de présents coutumiers commencent ; les Kanak de la délégation déroulent leurs présents (nattes, étoffes et une monnaie de coquillages) et Armand Goroboredjo, sénateur coutumier de l’aire paicî-cèmuhî, prend la parole (en français puis en
paicî) pour accompagner leur geste. Il est suivi par Rival Jawa dit Ako, de l’aire ajië-arho,
qui prononce une parole dans sa langue « pour les ancêtres qui ne sont plus là ». Emmanuel Kasarhérou en traduit la teneur. Puis les maîtres de la maison étalent sur la natte
leurs présents (étoffes, livre, JSO) et Emmanuel Kasarhérou, représentant le musée et
donc les maîtres de la maison, répond en ajië à la délégation. Durant ce discours, il tient
dans sa main droite une monnaie kanak – enveloppée dans une étoffe – symbolisant les
ancêtres décédés présents dans l’exposition, qu’il donne ensuite à la délégation. Il résume son discours en français.
Ensuite, la délégation se rend vers l’exposition pour nouer des « manous », étoffes de
tissu coloré, sur les effigies représentant les huit aires coutumières kanak qui sont exposées à l’entrée. Ce geste, accompagné comme il se doit de paroles, est effectué en signe de
respect envers les ancêtres. La délégation parcourt ensuite toute l’exposition en musique,
ce « bruit » étant adressé aux ancêtres.
Dans la seconde partie du film, Déwé Görödé nous guide à travers l’exposition et s’arrête au gré de ses envies devant tel ou tel objet pour nous en parler. Cet itinéraire, qui a
duré plus de trois heures, est ici écourté mais permet d’avoir accès à de nombreux éléments de la culture kanak. La ministre écrivaine et militante rappelle que c’est grâce aux
ancêtres kanak «qui sont là» que cette exposition a pu avoir lieu. Et que tous ces objets,
ambassadeurs des Kanak à l’extérieur du pays, permettent aussi de retracer l’histoire du
peuple kanak, de certains faits notables de la colonisation et de la répression coloniale
(1878, Ataï, engagés kanak dans la Grande guerre, police indigène, etc.).