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Bull. Tech. Apic., 33 (4), 2006, 187-196
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Du nouveau dans la lutte biologique
contre Varroa destructor
Deux années d’utilisation dans les ruches d’un champignon
entomopathogène pour lutter contre V. destructor
V. Girod1, G. Mercadier2 et W. Meikle2
1. ADAPRO-LR, CRA LR, Maison des Agriculteurs, Mas de Saporta CS 30012, 34875 Lattes, France. 2. European Biological Control
Laboratory, USDA – ARS, Campus International de Baillarguet, CS 90013 Montferrier-sur-Lez, 34988 Saint-Gely du Fesc, France.
Les partenaires du projet
L’European Biological Control Laboratory
Le principal laboratoire de lutte biologique de l'United State Department
of Agriculture /Agricultural Research
Service (USDA/ARS) situé hors des
États-Unis, se trouve près de Montpellier (Hérault).
Il s’agit de l'EBCL, né en 1991 d'une
fusion de l'ancien Laboratoire européen des parasites fondé à Paris en
1919 avec le Laboratoire de contrôle
biologique des mauvaises herbes
ouvert à Rome en 1958. L'EBCL est
la première installation de recherche construite en dehors des USA
par l'USDA/ARS.
Les recherches menées par les spécialistes de l'EBCL visent à développer des technologies de lutte
biologique pouvant être utilisées
pour limiter l'invasion des insectes
nuisibles et des mauvaises herbes.
La station expérimentale apicole ADAPRO-LR/CTSAG
A l’initiative de quelques apiculteurs
professionnels du Gard, en 2000, a
été créé le Comité technique et sanitaire apicole du Gard (CTSAG) dont
la vocation est de mettre en place
des expérimentations pour répondre
aux préoccupations des apiculteurs
professionnels. Le CTSAG a passé une
convention avec l’ADAPRO-LR (Association de développement de l’apiculture professionnelle en Languedoc-Roussillon) qui regroupe actuel-
30
lement plus d’une centaine d’apiculteurs professionnels et cinq structures apicoles départementales
(groupements de défense sanitaire
apicole et syndicats). Les missions
que le CTSAG confie à l’ADAPRO-LR
concernent principalement l’étude
du nourrissement des colonies, la
recherche de méthodes alternatives
de lutte contre Varroa destructor et
autres mala dies du couvain, et une
veille sur la qualité des produits de
la ruche à partir d’analyses ciblées
d’échantillons de miels et de cires,
fournis par les apiculteurs ou issus
d’expérimentations. Ces actions,
selon le cas, sont réalisées soit sur
le rucher expérimental créé en 2000
par les apiculteurs du CTSAG, soit
chez des apiculteurs professionnels
volontaires. Le programme d’expérimentation est financé par VINIFLHOR, le Conseil général du Gard et
les apiculteurs.
Le rucher expérimental, qui compte
une cinquantaine de colonies en 2006,
permet de tester de nouveaux produits
ou de nouvelles méthodes avant de
faire des essais chez les apiculteurs
qui mettent alors du temps de travail
et des colonies à disposition. Chaque
année, plus d’une centaine de colonies est ainsi concernée par les expérimentations.
Les différents contacts établis depuis
4 ans et une veille bibliographique
régulière ont permis d’établir des collaborations avec des laboratoires pri-
vés, des centres de formation, des organismes de recherche. Le CTSAG et
l’ADAPRO-LR ont ainsi acquis différents
produits et formulations présents sur
le marché national ou international,
et les ont testés dans les conditions
d’une apiculture méditerranéenne.
Un partenariat ADAPRO-LR / EBCL
C’est naturellement que fin 2004,
nous avons été en relation avec
l’EBCL qui envisageait pour 2005 la
mise en place d’un programme de
recherche portant sur l’utilisation de
champignons entomopathogènes
pour lutter contre V. destructor. Ainsi
dès le printemps 2005, les premiers
contacts entre Guy Mercadier et
William Meikle, les chercheurs de
l’EBCL et Vincent Girod, technicien
de l’ADAPRO-LR ont permis de préciser les attentes et objectifs de chacun et la nature éventuelle de cette
collaboration.
Ce partenariat a permis d’aboutir en
2005 et 2006 à la réalisation d’expérimentations de terrain avec des
résultats très encourageants. Ces derniers ont fait l’objet de publications
scientifiques(1) par William Meikle et
ont été présentés par Guy Mercadier,
à l’occasion des séminaires organisés par l’ADAPRO-LR, devant plus
d’une centaine d’apiculteurs professionnels venus de toute la France.
Par ailleurs, ponctuellement et en
accord avec l’ECBL, Vincent Girod présente les résultats aux structures apicoles intéressées (CNDA, ADA).
Photo 1. Larve de Galeria mellonella envahie `
par Beauveria bassiana
Les micro-organismes utilisés en
lutte biologique sont des virus, des
bactéries, des micro-champignons,
des nématodes ou des protozoaires.
À ce jour, plusieurs milliers de
micro-organismes entomopathogènes et pathogènes des mauvaises
herbes ont été décrits et plusieurs
espèces sont utilisées en plein
champ. Ils sont naturellement présents dans l’environnement (sol, air,
eau) et infectent généralement leur
hôte par ingestion ou par pénétration à travers la cuticule ou par les
Photo Guy Mercadier
Photo Guy Mercadier
La lutte biologique avec des micro-organismes
Photo 2.
Mouche de l'olivier envahie par B. bassiana
orifices. L’agent pathogène se multiplie dans l’hôte en lui causant des
dommages par destruction des tissus, entraînant sa mort plus ou
moins immédiate par septicémie ou
toxémie.
Parmi les micro-organismes utilisés
en lutte biologique, plus de 700
espèces de micro-champignons sont
entomopathogènes et jouent un rôle
important dans la régulation naturelle des populations d’insectes. Le
plus grand nombre de ces champignons pathogènes se trouve dans
la classe des Zygomycètes, mais les
plus utilisés en lutte biologique proviennent des Deuteromycètes (Fungi
imperfecti).
Les espèces des genres Beauveria,
Metarhizium, Verticillium, Erynia, Hirsutella, Entomophthora, Entomophaga, Paecilomyces et Aschersonia
sont les plus utilisées en lutte biologique. Elles ont un intérêt agronomique majeur dans la lutte biologique contre les ravageurs de cultures et sont l’objet d’études de plus
en plus poussées.
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Lutter contre V. destructor avec des champignons entomopathogènes
A plusieurs reprises, la presse apicole internationale s’est faite l’écho de différentes recherches
effectuées avec des champignons
entomopathogènes comme Hirsutella thompsonii et Metarhizium
anisopliae (2) pour lutter contre varroa.
Les travaux de l’EBCL portent sur une
souche de Beauveria bassiana, champignon entomopathogène, trouvé naturellement dans des ruchers.
Mode d’action du champignon Beauveria bassiana
Le mode d'infection de B. bassiana
se divise en quatre étapes distinctes :
● l’adhésion est caractérisée par un
mécanisme de reconnaissance et de
compatibilité des spores avec les cellules tégumentaires de l'insecte. Cette
phase se scinde en deux étapes distinctes, la première, passive, est la
fixation sur la cuticule, réalisée grâce
à des forces hydrophobes et électrostatiques ; la seconde, active, est
caractérisée par la production d’un
mucilage qui va engendrer une modification épicuticulaire aboutissant à
la germination ;
● la germination va dépendre des
conditions environnantes et aussi de
la physiologie de l'hôte, (composition biochimique de la cuticule de
l'hôte) qui peuvent la favoriser ou
l’inhiber ;
● la différenciation est caractérisée
par la production de tubes germina-
tifs encore appelés appressorium. Ces
structures terminales vont servir de
point d’ancrage, ramollir la cuticule
et favoriser la pénétration ;
● la pénétration de l'hôte se fait par
la combinaison de pressions mécaniques et de processus enzymatiques.
La colonisation de l'hôte a lieu
lorsque le champignon parvient à
surmonter les mécanismes immunitaires de défense de l'insecte et envahit l'hémolymphe.
Un nouveau programme de recherche initié par l’EBCL
La découverte de la souche Bb05002
Durant le printemps 2005, à l’initiative de l’EBCL et en partenariat avec
l’ADAPRO-LR pour les aspects apicoles, une phase de prospection a été
réalisée sur une dizaine de ruchers
des départements du Gard, de l’Aude,
de l’Hérault et des Pyrénées-Orientales. Au total, 112 ruches ont été visitées et un poudrage de sucre glace a
été réalisé pour récolter des varroas.
3 000 individus ont ainsi été collec-
tés et étalés dans des boîtes de Pétri
dans un milieu neutre favorable au
développement naturel des champignons.
Le seul champignon entomopathogène trouvé a été B. bassiana et ce,
dans quatre ruchers visités seulement.
L’équipe de l’EBCL avait initialement
prévu de travailler sur le champignon
M. anisopliae. Mais, découvrant que
B. bassiana était présent naturelle-
ment dans plusieurs colonies, elle a
depuis axé son travail sur cette souche, référencée Bb05002*. Avant d’envisager une utilisation apicole sur le
terrain, cette souche a fait l’objet d’un
travail préliminaire de laboratoire au
sein de l’équipe de l’EBCL.
* Cette souche est conservée dans l’azote
liquide dans la collection de champignons
entomopathogènes de l’EBCL et fait l’objet d’une
protection par l’USDA.
Les bioessais de laboratoire
Avant toute utilisation en milieu
extérieur, une expérimentation en
conditions contrôlées de laboratoire
est nécessaire. C’est ainsi que des bioessais ont été réalisés durant l’été
2005 pour évaluer l’action pathogène
et la virulence de la souche Bb05002
sur V. destructor.
La première phase du travail a
consisté à mettre au point une
méthode permettant de conserver
des varroas vivants plusieurs semaines. Des varroas ont donc été récoltés vivants (par la méthode du
poudrage de sucre glace ou encore
prélevés dans du couvain operculé),
32
puis ont été transférés dans des boîtes aérées sur des nymphes d’abeilles
et maintenus à 30°C et 70 % d’humidité relative.
Une fois la méthode validée, une
deuxième phase a consisté à produire
des spores de la souche identifiée de
B. bassiana sur un milieu nutritif
(SDAY) et à les récolter afin de préparer une suspension à 107 spores/ml.
Puis une troisième phase a consisté
à déposer, à l’aide d’une tour de Potter, une dose précise de spores sur
des varroas vivants. Ces derniers
sont ensuite placés sur des nymphes
d’abeilles.
Enfin, les boîtes ont été contrôlées
journellement et les varroas morts
transférés dans une boîte de Pétri
sur de l’agar liquide pour confirmer
l’infection par B. bassiana, souche
Bb05002.
Deux essais ont ainsi été réalisés ;
la durée de vie moyenne des varroas
a été de 5 jours dans l’un des essais
et de 8 jours dans l’autre alors que
dans les deux lots témoins non traités, la durée de vie moyenne a été
de 23,5 jours dans un cas et de 26
dans l’autre.
La première étape de l’étude a permis la mise en évidence de l’action
très pathogène de la souche Bb05002
de B. bassania sur V. destructor en
conditions de laboratoire. Les premiers essais sur colonies dans les
conditions de la pratique apicole
ont été effectués durant l’automne
2005.
Les deux essais de terrain 2005
Une première étude a été réalisée dès
l’automne 2005 sur les ruchers de
l’EBCL (courant septembre) et de
l’ADAPRO-LR/CTSAG (courant octobre)
avec pour objectifs :
● d’appliquer les spores de la souche
isolée Bb05002 sur des colonies infestées par varroa et vérifier leur action
pathogène,
● d’observer la durée de vie des varroas
dans les colonies traitées mais aussi
dans les colonies proches non traitées,
● d’estimer la quantité de spores présentes sur les abeilles.
L’analyse statistique des résultats issus
des 2 essais a été effectuée avec les
logiciels SAS et JMP (SAS Institute,
Inc., Cary NC, USA).
La préparation de la formulation
Sans appareillage spécialisé (en particulier, un biofermenteur), la préparation d’une quantité de spores de
champignon nécessite un travail long
et fastidieux. En effet, l’obtention
de 10 g de spores est l’aboutissement
de trois semaines de préparation
environ.
La souche de B. bassiana isolée sur
les varroas a été mise en culture pendant 15 jours sur un milieu nutritif
(SDAY) dans des boîtes de Pétri puis
les spores ont été récoltées par grattage manuel et séchées. La viabilité
des spores a été ensuite évaluée
après incubation à 23°C pendant 24h
par observation au microscope (environ 200 spores).
Les spores ont été ensuite mélangées
avec de la poudre neutre Entostat® en
tant que support de distribution dans
la colonie et avec une petite quantité
de silicate (anti-agglomérant).
Les modalités d’application de l’essai au rucher EBCL
8 colonies Dadant 10 cadres équipées d’un plancher grillagé muni
d’un plateau de fermeture ont été
séparées en 3 groupes :
● 2 colonies traitées par poudrage
direct sur les abeilles d’un mélange
homogène contenant 0,38 g de spores de Bb05002, 10 g de poudre
Entostat® et 0,05 g de silicate,
● 2 colonies traitées par poudrage
direct sur les abeilles d’un mélange
homogène de 10 g de poudre Entostat® et 0,05 g de silicate,
● 4 colonies non traitées (témoin).
Sur les colonies traitées, une seule
application entre les cadres occupés
par les abeilles a été réalisée avec
une pissette de laboratoire.
une balance a été ouverte et l’ensemble des composants (hausses,
cadres, corps) a été pesé sans les
abeilles avec une balance électronique portable de précision (± 1 g).
Le poids de l’essaim a été ainsi calculé par soustraction des différents
composants de la ruche.
Photographies
Des photographies numériques de
toutes les faces de cadres ont été
prises avec un appareil photo numérique. Les surfaces de couvain operculé ont été ensuite estimées en
utilisant le logiciel ArcView 3.0.
Conditions métérologiques
Les actions suivantes ont également
été réalisées :
Une station météo implantée sur le
rucher a permis d’enregistrer la température ambiante, l’humidité relative et la pluviométrie.
Pesée des colonies
Comptage des varroas
Deux ruches de chaque groupe sont
posées en permanence sur une
balance électronique autonome
d’une capacité de 100 kg (± 30 g).
Trois semaines avant le début des
essais et par la suite chaque
semaine, chaque ruche posée sur
Des langes quadrillés autocollants
ont été disposés à partir du 14 septembre 2005 sous les 8 ruches. Les
langes ont été remplacés 2 jours
après l’application afin de réduire
les risques de contamination dus à
la présence de poudre sur le lange.
Après les 2 semaines qui ont suivi
l’application, les langes ont été remplacés 2 fois par semaine. Tous les
varroas sont comptés et 40 de
chaque lange sont prélevés et placés sur un milieu de culture (agar
liquide et chloramphénicol) propice
au développement des champignons.
L’ensemble des échantillons placés
en incubateur à 23°C a fait l’objet
d’un examen au bout de 15 jours et
la sporulation a été examinée.
Prélèvement d’abeilles
Des prélèvements d’abeilles vivantes
ont été effectués le jour précédant
le traitement (n) et les jours suivants
(n+3, n+8, n+16 et n+24). Environ
25 à 30 abeilles de chaque colonie
ont été récoltées, placées dans un
sac plastique et immédiatement
conservées au congélateur pendant
3 semaines. Puis, par 3 lots de 5
abeilles, celles-ci ont été placées dans
un tube plastique et centrifugées
pendant 3 mn dans une solution
adaptée. La suspension récupérée a
été mise en culture sur milieu nutritif SDAY pendant 14 jours et le nombre de spores présentes sur les
abeilles a été quantifié.
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Les modalités d’applications de l’essai au rucher ADAPRO-LR
11 colonies Dadant 10 cadres équipées d’un plancher entièrement
grillagé muni d’une plaque de fermeture ont été séparées en 3 groupes d’une manière aléatoire :
● 4 colonies traitées avec 1 g de spores Bb05002 + 9 g d’Entostat® et 0,05
g de silicate,
● 3 colonies traitées avec 9 g d’Entostat® et 0,05 g de silicate,
● 4 colonies non traitées (témoin).
Sur les colonies traitées, une seule
application entre les cadres occupés
par les abeilles a été réalisée avec
une pissette de laboratoire.
Les actions suivantes ont également
été réalisées :
Données températures
L’utilisation de thermochrons® a
permis d’enregistrer la température
extérieure mais aussi la température
interne de la colonie.
Comptage des varroas
Des langes quadrillés autocollants
ont été placés sous les ruches à partir du 3 octobre 2005. Les langes ont
été changés au démarrage le 10 octobre. Les varroas tombés naturellement ont été comptés et échantillonnés, puis de nouveaux langes
ont été positionnés sous la ruche.
Les langes ont été renouvelés tous
les 3 ou 4 jours après traitement
durant 3 semaines et ensuite chaque
semaine durant les 3 semaines qui
ont suivi.
Les varroas retrouvés sur les langes
autocollants sont tous comptabilisés
et 40 d’entre eux sont prélevés et
placés sur un milieu de culture (agar
liquide et chloramphénicol) pour
confirmer l’origine de leur mort. L’ensemble des échantillons placés en
incubateur à 23°C a fait l’objet d’un
examen au bout de 15 jours : la sporulation sur B. bassiana a pu être
examinée.
Les résultats des essais de terrain de 2005
Ces résultats sont les premiers
concernant l’étude de l’application
d’un champignon entomopathogène
trouvé sur un V. destructor issu d’une
ruche, en vue de lutter contre lui.
Dans les figures 1 et 2, la proportion
de varroas infectés par la souche
Bb05002 concerne les 40 varroas
prélevés aléatoirement sur les langes et étalés en boite de Pétri pour
suivre leur évolution et la sporulation. La différence entre les 3 lots
est statistiquement significative.
Pour le lot traité (Entostat®+spores),
le pourcentage de varroas infectés a
été supérieur à 60 % pendant au
moins deux semaines après le traitement.
D’autre part, le cumul des chutes de
varroas correspond au nombre total
de varroas morts pendant le traitement. Ces courbes montrent clairement l’impact important du
traitement sur la chute de varroas.
Cette action est également mise en
34
évidence dans l’article scientifique à
paraître dans la revue Apidologie3.
La mortalité journalière de varroas
est maximale entre 5 et 8 jours après
application. Le traitement a causé
une infection significative des varroas dans les ruches traitées, mais
aussi un peu dans des ruches non
traitées. Rappelons que lors des prospections sur V. destructor au printemps, sur 3000 varroas, seuls 6
d’entre eux étaient infectés naturellement avec B. bassiana. Dans l’essai
qui nous concerne il est clair que l’effet de la dérive est responsable des
varroas contaminés par B. bassiana
dans les ruches non traitées et non
pas des spores présentes naturellement.
Enfin, la densité moyenne de spores
de B. bassiana par abeille dans les
ruches de l’EBCL traitées immédiatement après l’application était d’environ 1,1 x 104 CFU (colonies formant
une unité) par abeille.
Ces premiers résultats de terrain montrent que les applications de 0,38 et
1 g de spores de champignons trouvées naturellement dans une ruche
provoquent à la fois un accroissement
significatif du taux de varroas infectés par B. bassiana mais également
une mortalité de varroas plus importante.
Ces résultats sont prometteurs pour
le développement de nouvelles stratégies de contrôle de V. destructor.
Les dosages utilisés ici peuvent être
considérés comme suffisants, sans
être excessifs, puisque la production
de spores est longue et coûteuse.
Enfin, il n’a pas été jugé nécessaire
de faire un traitement de contrôle
afin d’estimer le nombre de varroas
résiduels, l’objectif étant, rappelonsle, de vérifier uniquement l’action
pathogène in situ de B. bassiana sur
V. destructor.
Spores + entostat + silicate
Date
de traitement
Entostat + silicate
Témoin
1.0
*
*
Proportion de
varroas infectés
0.8
*
*
*
0.6
*
*
0.4
*
0.2
0.0
1200
Cumul des chutes
de varroas par ruche
1000
800
600
400
200
v.
no
07
31
24
oc
t
oc
t.
.
oc
t.
17
10
oc
oc
t.
t.
.
pt
se
03
19
26
se
pt
.
0
Figure 1. Nombre de varroas infectés et mortalité dans l’essai ECBL 2005
Spores + entostat + silicate
Entostat + silicate
Témoin
*
1.0
*
Proportion de
varroas infectés
0.8
*
0.6
*
*
0.4
0.2
0.0
300
Cumul des chutes
de varroas par ruche
250
200
150
100
50
v.
no
14
v.
no
7
31
oc
t.
t.
oc
24
t.
oc
17
10
oc
t.
0
Figure 2. Nombre de varroas infectés et mortalité dans l’essai ADAPRO-LR 2005
À noter : les étoiles sur les graphes indiquent que la différence entre les 3 lots est significative.
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Le troisième essai de terrain
Forts des résultats encourageants
obtenus en 2005, les auteurs se sont
fixés comme objectif majeur en 2006,
l’étude de l’impact de ce traitement
fongique sur le comportement de la
ruche, en particulier la dynamique
de population des abeilles, le déve-
loppement du couvain, l’aptitude à
produire du miel et enfin la comparaison de l’adjuvant employé avec les
spores, la poudre Entostat® avec de
la farine.
L’expérimentation a été menée au
printemps 2006 sur le rucher de l’A-
DAPRO-LR (du 23 mai au 27 juin). La
préparation de la formulation à base
de spores de la souche Bb05002 a été
identique à celle de 2005. L’analyse
statistique des résultats obtenus a
été effectuée avec les logiciels SAS
et JMP.
Les modalités d’applications de l’essai au rucher ADAPRO-LR
Vingt-deux colonies placées dans des
ruches Dadant 10 cadres, équipées
d’un plancher entièrement grillagé
muni d’une plaque de fermeture, ont
été séparées de manière aléatoire en
3 groupes :
● 5 colonies traitées par poudrage
direct sur les abeilles avec un
mélange homogène de 1g de spores
de Bb05002, 9 g de poudre Entostat®
et 0,05 g de silicate,
● 5 colonies traitées par poudrage
direct sur les abeilles d’un mélange
homogène contenant 1 g de spores
de Bb05002, 9 g de farine et 0,05 g
de silicate,
● 4 colonies traitées par poudrage
direct sur les abeilles avec 9 g de
farine et 0,05 g de silicate,
● 8 colonies non traitées (témoin).
Comme en 2005, sur les colonies traitées, une seule application a été
réalisée entre les cadres occupés par
les abeilles avec une pissette de laboratoire.
Les actions suivantes ont également
été réalisées :
Pesée des colonies
Comptage des varroas
Au début et en fin d’expérimentation,
l’ensemble des composants de la ruche
(hausses, cadres de corps, fonds…)
est pesé afin d’en déduire le poids de
l’essaim et suivre ainsi son évolution.
Chaque semaine, les ruches (corps et
hausse) sont pesées avec la balance
scientifique de l’EBCL afin de déterminer l’impact éventuel du traitement
sur la production de miel.
Des langes quadrillés autocollants
(sticky board) ont été disposés sous
les colonies. Ceux-ci ont été renouvelés à chaque comptage des varroas soit
2 fois par semaine du 15 mai au 30
juin 2006. Les varroas retrouvés sur
le lange autocollant sont tous comptabilisés et 40 d’entre eux sont prélevés
de manière aléatoire et mis sur agar
liquide pour confirmer l’origine de leur
mort.
Photographies
Prélèvement d’abeilles
Des photographies numériques de
chaque face de cadres (avec ou sans
couvain) ont été prises avec un appareil photo numérique en début et fin
d’expérimentation. Les surfaces de
couvain et de provisions miel/pollen
ont été ensuite calculées en utilisant
le logiciel ArcView 3.0.
L’utilisation de thermochrons® (enregistreurs autono-mes de température)
a permis d’enregistrer à la fois la température extérieure mais aussi la température interne de la colonie.
Afin d’évaluer l’action éventuelle des
spores sur les abeilles et leur répartition dans la colonie, chaque semaine
20 abeilles vivantes sont prélevées et
stockées en sac plastique avant
conservation au congélateur. Comme
en 2005, les abeilles feront l’objet d’un
rinçage pour évaluer la densité de
spores présentes sur elles. Des trappes à pollen de devant (modifiées)
permettront de recueillir les cadavres
évacués par les abeilles. Les abeilles
mortes sont comptabilisées, puis
conservées et exploitées comme précédemment.
abeilles, réserves en miel et pollen)
au fil des semaines. Avant traitement (symbolisé par le trait vertical), les lots sont relativement
homogènes. Par la suite, en fonction de la dynamique des différentes populations constituant les lots,
le gain de poids a été plus ou moins
marqué durant la période de la miellée. Le lot « Farine seule » a gagné
en moyenne le plus de poids en rai-
son de la très bonne performance
d’une de ses colonies.
Durant la période d’observation,
l’ensemble des lots a gagné du poids
et toutes les ruches ont produit du
miel dans les hausses. Le traitement
n’a a priori pas affecté la capacité
à produire des colonies. L’objectif
recherché est donc atteint.
Le comptage bihebdomadaire des
varroas sur langes et le prélèvement
Données de température
Les résultats de 2006
Les différents composants des
ruches ont été pesés pour en
déduire le poids de l’essaim. Puis,
durant toute la période d’expérimentation, les colonies ont été
pesées chaque semaine afin de suivre leur progression tant en production de miel qu’en terme de
population d’abeilles.
La figure 3 montre l’évolution du
poids des colonies (couvain, cire
36
aléatoire de 40 d’entre eux pour
vérifier l’origine de leur mort ont
permis d’obtenir les informations de
la figure 4. Ainsi, en moyenne, ce
sont les lots traités dans lesquels on
trouve le plus grand nombre de varroas tués par les spores. La proportion de varroas infectés par les
spores diminue rapidement au delà
de 5 jours, probablement à cause de
l’augmentation de la température.
Statistiquement, le cumul des chutes de varroas par ruche a été le plus
important avec le lot « spores+ Entostat® ». La différence avec les autres
lots est significative. On observe une
chute de varroas régulière et progressive et ce sur les 3 lots. Ceci est
probablement lié à l’augmentation
de la température et l’émergence
d’un nombre important d’abeilles/
varroas (blocage de ponte dû à la
Date
de traitement
miellée).
A la date de la rédaction de cet article, seules les photographies numériques des lots témoin et « spores+
Entostat® » ont été exploitées avec
le logiciel ArcView 3.0.
Les résultats montrent qu’il n’y a pas
eu d’impact du traitement sur le
volume de couvain produit ni sur les
provisions de miel et de pollen et
enfin sur la population d’abeilles.
Spores + entostat + silicate
Spores + farine
Farine seule
Témoin
40
Poids des colonies (kg)
35
30
25
20
15
30
20
10
in
ju
26
ju
in
19
n
ju
i
12
ju
in
05
ai
m
29
m
ai
0
22
Température (°C)
10
Figure 3. Poids hebdomadaire des colonies avant et après traitement
et température journalière (min., max. et moyenne).
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37
Recherche
Recherche
➤
Spores + entostat + silicate
Spores + farine
Farine seule
Témoin
Date
de traitement
1.0
*
Proportion de
varroas infectés
0.8
*
0.6
*
0.4
0.2
0.0
800
Cumul des chutes
de varroas par ruche
700
600
500
400
300
200
100
in
26
ju
ju
in
in
ju
19
05
12
ju
in
ai
m
29
22
m
ai
0
Figure 4. Nombre de varroas infestés et mortalité
Témoin
Spores + entostat + silicate
25
Poids (kg)
20
15
10
0
Couvain
opercule
Abeilles Miel et
adultes pollen
Avant traitement
23 mai
Couvain Abeilles
opercule adultes
Miel et
pollen
Après traitement
27 juin
Figure 5. Couvain, abeilles adultes et provision avant et après le traitement
38
Graphiques : William Meikle
5
En conclusion
2. Un traitement avec B. bassiana
cause une augmentation significative des fréquences d’infections
constatées parmi les varroas présents
dans les ruches.
3. Un traitement avec B. bassiana n’a
aucun effet détectable négatif sur le
gain de poids de la ruche, sur la
masse totale du couvain ou des abeilles adultes.
Photo Guy Mercadier
Photo Guy Mercadier
1. Des souches de champignon entomopathogène virulentes contre le
varroa sont naturellement présentes
dans les ruches. La seule espèce trouvée est Beauveria bassiana.
Photo 3. Pesée de l’ensemble du matériel
Photo 4. Mesure des surfaces de couvain et de provision.
Les perspectives pour 2007
En considérant la dynamique de
chute des varroas, l’infection et la
densité de spores par abeille, le travail de 2007 consistera à explorer les
effets d'un deuxième traitement, probablement après une ou deux semaines, au moment où la densité de
spores présentes sur les abeilles a
décliné. Ainsi, il sera possible d’évaluer l’efficacité du traitement et de
le comparer à d’autres moyens de lutte actuellement utilisés.
Références bibliographiques
1. MEIKLE W. G., MERCADIER G., GIROD V., DEROUANÉ F. and JONES W. A.
(2006) - Evaluation of Beauveria bassiana (Balsamo) Vuillemin
(Deuteromycota: Hyphomycetes) strains isolated from varroa mites in
southern France - J. Apic. Res., 45(3): 219–220.
2. KANGA L. H. B., JAMES R. R. and BOUCIAS D. G. (2002). Hirsutella
thompsonii and Metarhizium anisopliae as potential microbial control
agents of Varroa destructor, a honey bee parasite - J. Invertebr. Pathol.,
81:175-184.
KANGA L. H. B., JONES W. A. and GRACIA C. (2006). Efficacy of strips coated
with Metarhizium anisopliae for control of Varroa destructor (Acari:
Varroidae) in honey bee colonies in Texas and Florida - Exp. appl. Acarol.,
40: 249-258.
3. MEIKLE W.G., MERCADIER G., HOLST N., NANSEN C.and Girod V. (2006).
Duration and spread of an entomopathogenic fungus, Beauveria bassiana
(Deuteromycota: Hyphomycetes), used to treat varroa mites (Acari:
Varroidae) in honey bee (Hymenoptera: Apidae) hives - J. Econ. Entomol.,
100: 1-10.
- MEIKLE W.G., MERCADIER G., HOLST N., NANSEN C.and Girod V. (2006).
Impact of a treatment of Beauveria bassiana (Deuteromycota:
Hyphomycetes) on honeybee hive health and on varroa populations –
Apidologie (2007) – à paraître.
5- Aupinel P., Fortini D., Dufour H., Tasei J.N., Michaud B., Odoux J.F. and
Pham-Delègue M.H., 2005. Improvement of artificial feeding in a standard
in vitro meth
➤
39
Bull. Tech. Apic., 33 (4), 2006, 202
Commercialisation des produits de l’OPIDA
Avis important : les personnes désireuses d’acquérir une ou plusieurs de nos publications doivent désormais
s’adresser chez leur fournisseur habituel de matériel apicole, coopérative, centrale syndicale, groupement d’achat.
Cet avis ne concerne pas le service des abonnements au BTA qu’ils soient directs ou souscrits sur
liste, les souscriptions restant toujours à adresser à :
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ABEILLE D’AUVERGNE-LIMOUSIN-APICULTURE
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04 73 27 14 84
APICOOP
Rue Branly, 11000 CARCASSONNE
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APICULTURE LEROUGE
Route de Rioux, CRAVANS, 17260 GEMOSAC
05 46 90 08 81
APICULTURE LEROUGE
91, rue Mangin, 60130 SAINT-JUST-EN-CHAUSSÉE
03 44 78 54 88
APICULTURE ROUTE D’OR
49150 CLEFS
02 41 82 84 70
BRETAGNE APICULTURE
Moulin des Salles, 29460 DAOULAS
02 98 25 98 06
COMPLEXE APICOLE CHAVIGNON
02000 CHAVIGNON
03 23 21 61 62
COOPÉRATIVE APICOLE DU JURA
Rue Victor Puiseux, ZI, 39000 LONS-LE-SAUNIER
03 84 43 20 74
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04 90 40 49 71
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86, rue de l’Île du Roi, 19100 BRIVES
05 55 87 63 06
Éts MENTHON
36-38, rue du Commerce, 74200 THONON-LES-BAINS
04 50 70 23 22
Éts NEVIÈRE
Route de Manosque, 04210 VALENSOLE
04 92 74 85 28
Éts VERNET
Min. Bat.J, route de Marseille, 84000 AVIGNON
04 90 87 78 33
L’ABEILLE DE VITRÉ
ZA 18, rue de la Briqueterie, 35500 VITRÉ
02 99 75 09 01
LES ABEILLES
21, rue de la Butte-aux-Cailles, 75013 PARIS
01 45 81 43 48
LUBERON APICULTURE
Route des Taillades, 84460 CHEVAL-BLANC
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THOMAS APICULTURE
BP 2, 45450 FAY-AUX-LOGES
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