Scot et Pays : Vers un outil unique
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Scot et Pays : Vers un outil unique
Scot et Pays : Vers un outil unique ? Contribution aux débats sur la modification des lois SRU, Voynet, Chevènement, … par Robert GROSSMANN, • Président de la Communauté urbaine de Strasbourg, • Président du Syndicat mixte pour le SCOTERS et Michel REVERDY, Urbaniste, • Directeur du Syndicat mixte pour le SCOTERS (Schéma de cohérence territoriale de la région de Strasbourg) Au départ est le projet de territoire, politique la plupart du temps. Et pour donner vie au projet, il faut penser simultanément l’outil de mise en oeuvre. Deux lois (SRU et LOADT) ont engendré 2 outils : les « SCOT » et les « Pays ». Sans sous-estimer les différences de conception entre ces deux instruments, force est de constater qu’au lieu de simplifier l’inter-intercommunalité, ils en complexifient la lecture. Aujourd’hui, chacun est d’accord pour dire qu’on a atteint les limites de la complexité du système, et qu’il faut simplifier. Mais comment faire ? Cette contribution est une piste, certes modeste, à ce débat important et nécessaire. A : Les SCOT et les Pays : plus de points communs que de différences - Issus de la loi SRU, les SCOT sont des outils de planification et d’orientation du développement (durable) des aires urbaines. La force des SCOT réside dans la nécessaire cohérence des politiques publiques sectorielles et territoriales qu’ils se doivent d’organiser, et dans leur validité juridique. - La loi Voynet a repris le concept des « Pays » de la loi d’aménagement du territoire dite loi « Pasqua-Hoeffel ». Les nouveaux Pays sont essentiellement des -1- cadres de réflexions sur des projets de territoires, assortis d’une possibilité de contractualisation avec l’Etat et les Régions. Les projets de développement sont élaborés avec les représentants de la société civile, du monde économique et associatif. La Charte de Pays exprime le projet commun de développement durable du territoire. • Ce qui rapproche SCOT et Pays - L’idée de « développement durable » est contenue dans les deux lois, SRU et Voynet . - Un périmètre est nécessaire, et dans les deux cas, une commune ne peut faire partie, ni de deux SCOT, ni de deux Pays (–en phase finale-) - Une charte de Pays (en l’absence d’un SCOT sur un même périmètre) peut vouloir intégrer une partie « planification » de son développement . Du côté des SCOT, la nécessité de concertation peut impliquer une élaboration conjointe avec les représentants du monde socio-économique et associatif, ce qui s’apparente assez à un Comité de développement, sans le dire. - Dans les deux cas, ce sont d’abord des documents plus « politiques » que techniques. Sans projet politique, il n’y a pas plus de SCOT que de Pays… - Les deux outils, sans suivre la même procédure, débutent chacun par un diagnostic, pour se terminer par un document d’orientations ou un projet de développement. - Les deux peuvent avoir besoin d’un Syndicat mixte pour exister, le SCOT dès le départ, le Pays ensuite pour contractualiser avec l’Etat. - Les deux sont censés s’établir sur des territoires allant au-delà des intercommunalités classiques. On parle, selon les lois, d’aires urbaines ou de bassins de vie. - La différence entre le côté « rural » des Pays et « urbain » des SCOT tend à disparaître (des grandes agglomérations montent des pays urbains, et des Scot se font en territoires plus ruraux…). - Les Syndicats mixtes portant les SCOT et les structures portant les Pays ont chacun l’avantage de rassembler des élus urbains et ruraux qui partagent les mêmes problèmes. - Et les deux obligent les mêmes élus à assister à des réunions où se discutent des aspects quasiment identiques, avec les mêmes représentants des mêmes administrations ! • Ce qui les différencie >>> La différence essentielle, outre leur contenu –évidemment variable selon les structures qui les élaborent -, est bien le cadre juridique final. Le SCOT, outil de planification, d’orientation et de cohérence des politiques publiques, opposable aux documents sectoriels. Le Pays, outil de réflexion (avec le monde socio-économique, associatif et les habitants) et de contractualisation des projets. Il semble donc qu’il y ait beaucoup plus d’éléments de rapprochement que de différenciation entre ces 2 outils, issus de 2 lois (et de 2 ministères) différents… -2- B : Constat, pistes de réflexions, questions En admettant que les 2 lois d’origine -SRU et Aménagement du territoire- soient jugées comme individuellement intéressantes, dans leurs objectifs de faire primer le projet politique sur la seule traduction technique et d'élargir le périmètre habituel de réflexion au delà des intercommunalités classiques, leur interaction fait que l’addition des 2 outils, SCOT et Pays, ne fabrique pas forcément une grande cohérence territoriale. Les élus, au même titre que les professionnels, les administrations publiques ou les habitants, ont pris conscience de l’enjeu formidable que représentent le développement, l’urbanisme et l’aménagement de nos territoires. Il nous reste à mieux ancrer la prospective et le développement durable dans les projets décidés aujourd’hui. C’est un sujet pour le moins complexe, tout le monde en convient ! Une simplification des procédures et des outils pourrait nous aider. >>> Mais, si on simplifie, il faut vraiment simplifier ! Et il ne faudrait surtout pas succomber à la tentation d’ajouter une nouvelle couche qui assurerait la cohérence de l’ensemble (qu’elle soit législative en ajoutant des dispositions aux actuels instruments de planification ou de contractualisation, ou qu’elle passe par un transfert de compétence intermédiaire, aux Régions par exemple)… • Que peux t-on faire ? - Une simplification législative pourrait-elle aller jusqu’à fondre ces deux outils, SCOT et Pays, qui, certes, n’ont pas été conçus pour faire la même chose, mais dont la finalité peut se rejoindre ? Cela signifierait sans doute de fondre –à terme- les 2 lois d’origine, et ne garder qu’une seule « grande loi » qui concernerait l’urbanisme et l’aménagement des territoires, avec les questions transversales des transports, de l’habitat, de l’économie, de l’environnement… Est-on prêt aujourd’hui à s’y atteler ? - Si nous n’en prenons pas le chemin, faut-il alors faciliter des superpositions SCOT / Pays, qui garderaient les avantages des deux outils : Le Scot pour planifier le développement et assurer la cohérence des politiques sectorielles et territoriales, le Pays pour en négocier et en partager le contenu avec le monde socio-économique et associatif, et contractualiser les projets avec l’Etat et les collectivités locales ? On imagine dans ce cas qu’il n’y aurait plus qu’une seule structure pour porter les deux outils (au moins on l’espère…). En ce qui concerne les périmètres (dont on pourrait minimiser l’importance pour en diminuer les effets parasites) Si on garde les deux outils, on peut imaginer soit qu’un grand Pays comporte plusieurs Scot, soit qu’un grand Scot comporte plusieurs Pays. Mais au moins sur des limites qui concordent !!!…Dans ce cas, il faut peut-être éviter qu’une commune fasse partie à la -3- fois d’un Pays et d’un Scot de périmètre différent, sauf si l’un est totalement inclus dans l’autre. - Faut-il aller jusqu’à supprimer l’un des deux instruments ? Il peut sembler difficile d’aller jusque-là, ne serait-ce que parce que SCOT et Pays existent déjà dans la réalité, et parce qu’ils permettent, chacun, de fabriquer de l’intercommunalité (et souvent, d’ailleurs, de « l’inter-communauté » !). Les premières expériences, sur ce niveau du « faire ensemble », sont plutôt réussies, quel que soit l’outil choisi d’ailleurs… Le principal frein viendra certainement des structures en place qui démontreront toutes, chacune, leur utilité… C: Proposition L’idée proposée est de garder le meilleur des 2 dispositifs « SCOT et Pays » et de ne disposer, à terme, que d’un seul instrument d’étude et de mise en oeuvre. Cette proposition consisterait à reprendre la base du SCOT, et à enrichir la nécessaire concertation avec le public par ce qui a fait l’intérêt du Pays, à savoir la faculté de réunir, autour du même projet négocié, tous les habitants, élus et représentants du monde socioéconomique et associatif. On garde ainsi, des SCOT, la philosophie générale de mise en cohérence des politiques publiques sectorielles (déplacements, habitat, économie, environnement…) et territoriales (dont les PLU sont les traductions spatiales). Le SCOT reste l’outil de planification né d’un projet politique dont les élus représentent l’aire urbaine. Il garde une force juridique et reste lié à un projet concerté et soumis à enquête publique. La procédure actuelle reste axée sur un diagnostic, un projet politique (le PADD) et un document d’orientations. Dans le même temps, on garde des Pays le concept de réflexion partagée et discutée avec les représentants du monde socio-économique, associatif et des habitants. On peut retrouver cette façon de « faire émerger le projet avec la société civile » sans s’enfermer dans des périmètres et procédures qui favorisent des enjeux de pouvoirs. Cela accentuerait en fait l’aspect « concertation » des actuels SCOT. Ne resterait donc plus qu’un seul outil de portée juridique – et donc contraignanteà la fois de planification (concertée, négociée) et de contractualisation, cette dernière partie permettant d’ailleurs sa mise en œuvre, tellement importante. Il ne subsisterait alors plus qu’une seule structure (de type Syndicat mixte, GIP ou Communauté –selon le périmètre choisi) pour porter cet outil. En ce qui concerne le périmètre, une alternative pourrait consister à laisser aux communes ou aux groupement de communes, -comme dans l’actuelle loi d’aménagement du territoire-, la possibilité de choisir le périmètre final dans lequel elles souhaitent s’engager, en pouvant participer à des études (limitées au seul diagnostic) sur des périmètres différents. C’est un point à discuter. -4- • La question de la cohérence « supra-SCOT ou supra-Pays » Quand SCOT et Chartes de Pays seront terminés, pour peu que ces documents soient basés sur des orientations politiques fortes (ce qui est souhaitable), que se passera-t-il si ces orientations sont fondamentalement différentes (ce qui n’est pas forcément à exclure) ? La question reste ouverte quant à la cohérence entre ces 2 documents, si la loi devait les laisser en l’état. Qui jouerait ce rôle : l’Etat (avec les Directives Territoriales d’Aménagement ? ), les Régions (qui semblent intéressées…), les Départements, ou bien des comités –informels- d’élus intercommunaux qui veilleraient à une bonne articulation de leurs outils ??? On sent bien que le problème existe, et que plusieurs institutions aimeraient bien exercer ce rôle de la « cohérence de la cohérence… » Un outil unique nous aiderait certainement à éviter les empilements de périmètres que l’on connaît ici ou là. Il devrait également nous permettre de faire quelques économies, car bien souvent, on finance 2 fois les mêmes diagnostics… Conclusion Nous sommes, en France, dans le cadre d’un urbanisme de droit, à la différence d’un urbanisme plus négocié, réalité de plusieurs pays européens. La démarche proposée, débouchant sur un outil unique de planification et de mise en œuvre, va dans le bon sens. La loi peut-elle seule faire émerger l’outil pertinent sur un périmètre idéal ? Sans doute pas, tellement les situations sont complexes et différentes. Réduisons donc l’encadrement législatif à ce qui peut servir de base ou de référence commune, et simplifions au maximum les procédures, en gardant au premier plan de nos préoccupations l’esprit de la loi, ses orientations, ses objectifs : la cohérence de l’action publique, le partage du projet avec les habitants. Robert GROSSMANN Michel REVERDY -5-