Interprété par Kurt Russell Les années 80
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Interprété par Kurt Russell Les années 80
100 icônes badass du cinéma Les années 80 • John Plissken • SNAKE PLISSKEN Interprété par Kurt Russell • Le film : New York 1997 (Escape from New York, 1981). Réalisé par John Carpenter • C’ était un soir de l’été 1981, l’année de mes 10 ans. Starfix n’était pas encore né mais mon imaginaire, à coup de Strange, Star Wars et Goldorak atteignait déjà l’intensité d’une supernova. Alors que ma cinéphilie bourgeonnante et pas encore tout à fait consciente s’apprêtait à exploser, mes parents m’avaient emmené voir New York 1997 dans un ciné du côté de Montparnasse. Parfum de soufre, le film était interdit aux moins de 13 ans à l’époque. J’ai un souvenir très précis de l’ouvreuse vaguement dubitative (“ mais vous êtes sûrs qu’il a 13 ans ce garçon ? ”), de mes parents droits dans leurs bottes de mauvaise foi (“ mais bien sûr madame, enfin ! ”)… et du film. De la claque. De l’immersion affolante dans un New York du futur nocturne et coupé du monde, rongé par la crasse et la mort. De ce petit prologue anxiogène et excitant nous apprenant que Big Apple a vu son taux de criminalité augmenter de 400 % en 1988 et que la situation incontrôlable a conduit le gouvernement à transformer la ville en prison à ciel ouvert. Je me souviens aussi de la musique, cette foutue mélodie en mode mineur façon marche funèbre au synthé, qui me file toujours la même bordée de frissons à chaque écoute, aujourd’hui encore. Et Snake Plissken. Kurt Russell. A-t-on jamais vu avant, et depuis, un salopard plus cool et culte au cinéma ? De son vrai nom S. D. Robert Plissken, “ Snake ” (baptisé ainsi raison du cobra tatoué sur son ventre) est un ancien héros d’une Troisième Guerre mondiale furtivement évoquée dans le film, devenu braqueur de banques avant d’être capturé par les forces de l’ordre. C’est à lui que le chef de la sécurité Bob Hauk (Lee Van Cleef, idée de casting géniale) demande d’aller récupérer le président des États-Unis (Donald Pleasence) dont l’avion s’est crashé en plein Manhattan. Plissken accepte, bien obligé : cette crevure de Hauk vient de lui injecter deux minuscules charges explosives dans les veines jugulaires, commandables à distance et qui ne seront désamorcées que si Snake ramène le président vivant. Le condamné s’acquittera de sa mission… mais réserve à Hauk (et au spectateur) un coup de théâtre final effroyable de nihilisme et d’humour désespéré. Pour un gosse de 10 ans à peine, la vision de Snake Plissken sur grand écran est un choc irré- médiable. Sous influence du Watergate et d’Un justicier dans la ville au moment de l’écriture du scénario (d’ailleurs Charles Bronson fut un temps envisagé pour le rôle de Snake…), Carpenter le rebelle a créé un double à son image (“ J’ai toujours eu un problème avec l’autorité ” confie-t-il sur le DVD paru en import chez MGM). Un alter ego impérial et fatigué, paria du système, dont le look et les actes vont frapper pour toujours l’imaginaire de millions de fanboys. Si EFNY est le reflet d’une Amérique en pleine déroute morale avant les années Reagan, Snake Plissken est devenu au fil des ans l’ultimate badass, l’antihéros de l’apocalypse, une icône de la “ fuck you ” attitude suscitant une increvable mythologie multimédia (comics, jeux vidéo…) depuis trente ans. Dans le rôle, Kurt Russell, imposé par Carpenter dont il est un ami proche depuis le tournage du téléfilm Le roman d’Elvis (Elvis, 1979), fait brillamment oublier l’ex-enfant acteur trimballant sa frimousse joufflue dans quantité de séries et produits Disney dans les sixties. À l’écran, il EST Snake Plissken et le restera à jamais, malgré une belle carrière principalement due à l’impact du chef-d’œuvre de Carpenter. Quinze ans plus tard, Snake reviendra avec dix kilos de plus dans le douloureusement nanardesques Los Angeles 2013 (Escape from L.A.), réalisé par un Carpenter aux abonnés absents et plombé par de gros problèmes de postproduction et de santé. Malgré ses tares, Los Angeles 2013 parvient à rester attachant ne serait-ce que pour un final qui, comme en 1981, nous laisse le cul par terre. Snake a encore frappé ! La pensée d’un remake de New York 1997 et d’un autre acteur dans ce rôle culte parmi les rôles cultes me désole et en même temps qu’importe. Dans nos cœurs, Snake Plissken est pour toujours le rôle magnifique d’un acteur magnifique dans une série B magnifique, symbole matriciel de son réalisateur et de l’indéfectible amitié qui l’unit à son comédien fétiche (ils tourneront ensuite ensemble The Thing et Les aventures de Jack Burton dans les griffes du mandarin). Aucun photocopieur au monde ne pourra jamais nous enlever le lien si étroit que nous partageons avec ceux-là. ¶ 91