L`homme qui
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L`homme qui
12 NAMUR MAGAZINE • DÉC . 2001 / PORTRAIT L’homme qui roulait sa bosse Jean-Claude Pirotte est un personnage romanesque. Poète, auteur d’une vingtaine de romans et de récits, il est aussi conteur, peintre et un peu comédien. Dans son dernier film. « En cavale », il joue son propre rôle. Celui d’un homme qui a préféré la poudre d’escampette à la mise au placard. ean-Claude Pirotte voit le jour à Namur en 1939, il fait partie de la première fournée de bébés nés dans la nouvelle maternité provinciale. Enfin c’est le souvenir qu’il en a (« je suis né sans le savoir, comme beaucoup de gens »). Enfant, au lieu d’aller jouer au foot et de chaparder des pommes dans le jardin du voisin comme tous les moutards, il dévore les bouquins et se pique de versions latines. Nulla dies sine linea… jamais une journée sans écrire. Sa devise. Du moins en théorie. L’école, il la rêve buissonnière. « A 8 ans, petit gamin merdeux, je fais ma première fugue. Sans réel motif, sans quête apparente, sinon la recherche de liberté. Echapper aux contraintes, c’était, ça reste, l’un de ses grands principes. Presque une hygiène de vie. L’hygiène de l’écrivain. Après des études de droit à Bruxelles, il bourlingue, fait des affaires et un peu de politique, puis s’inscrit au barreau de Namur. Figure en vue du palais, il traite quelques milliers de dossiers par an dans un grand cabinet d’avocats. Jusqu’au jour où… on aurait presque envie de dire que la fiction dépasse la réalité. Jean-Claude Pirotte est inculpé pour complicité dans la tentative d’évasion d’un de ses clients. Il nie, parle de règlement de compte. Il est condamné à vingt mois de prison ferme. C’est alors que commence la fuite, la vie dans l’ombre et la littérature. « Si c’était à recommencer ? Je fonce. Je recommencerais ! ». Depuis lors, le mot cavale est devenu un leitmotiv, presque une marque de fabrique. « Cavale », c’est un roman paru aux éditions de La Table ronde, un récit qui n’a rien à voir avec sa condamnation. « En cavale », c’est aujourd’hui un film réalisé par Joseph Beauregard qui met en scène des anciens braqueurs, délinquants et révolutionnaires qui ont préféré la fuite à la prison, l’aventure à la soumission. Parmi eux, Pirotte. Présenté en septembre dernier dans le cadre du FIFF, « En cavale » constituait pour l’ex-avocat un bon prétexte pour faire un saut à Namur, histoire de saluer les copains. Car Jean-Claude Pirotte, s’il vit aujourd’hui en France, près de Carcassonne, n’a jamais rompu les liens avec sa ville natale. « Namur reste un point fort de mon univers. J’y suis toujours domicilié et j’y ai mes amis ». J Justice, les platanes alternent avec les Marronniers. Le soir, c’est l’endroit le plus calme de la ville. Les mères recommandent vivement à leurs filles de ne jamais s'égarer en ces lieux après le couvre-feu, car une monumentale vespasienne les honore de son inquiétant parfum ». (« Ange Vincent », Editions La Table ronde, 2001). Passager clandestin La preuve que Namur reste gravée dans sa mémoire, elle apparaît ci et là dans son œuvre, au détour d’une rue, d’un quartier. Moins dans sa version touristique ou bourgeoise qu’à travers le regard aguerri et rentre-dedans d’un vieux couche tard qui, à l’instar d’un Mac Orlan ou d’un Carco, en connaît les coins les plus intimes, voire interlopes. « Nous étions quelques affidés, noctambules, férus de poésie farguienne, de batellerie, et de crimes inexpliqués, à fréquenter assidûment ce quartier d’un romanesque tenace, scandaleusement menacé d’éradication par les idéologues corrompus à l‘hygiène morale. Aujourd’hui, pauvre de moi, exproprié vieillissant et pleureur de comptoir, passager clandestin de ma propre cité, je titube entre la Halle à la chair et la rue du Collège, où Baudelaire ne cesse de s’écrouler sur le parvis de SaintLoup, tandis que son ami Félicien Rops, loin de s’attendre aux secours de la religion, réclame d’un geste augural l’aide inefficace d’une soubrette à l’œil espagnol qui agite son jupon sous le linteau de l’estaminet voisin » (« Autres arpents », La table ronde, 2000). ■ n le disait un peu roublard, un peu grande gueule, parfois bizarre, noctambule invétéré, aimant le vin et le whisky. On l’a rencontré, en fin d’après-midi, aimable, autour d’un verre de bière. On le croyait inaccessible. Il s’est montré affable, se pliant au jeu des questions réponses et de la caricature… Un conseil : n’écoutez pas ce qu’on dit sur Jean-Claude Pirotte! O Le roman que vous n’écrirez jamais ? Mon autobiographie Livre jamais lu ? La Bible en entier Une heure de la journée ? Minuit, l’heure romanesque où tout peut arriver, un ange, une sorcière... Votre plus gros mensonge ? Y en a trop Le plat que vous concoctez à vos amis ? Brouillade de truffes Le plat que vous destinez à vos pires ennemis ? Les machins du « Mac Do » La plus grande escroquerie du siècle ? Le néolibéralisme Le courrier électronique, une invention… Que je ne connais pas La littérature… Ne sert à rien. Sinon de temps en temps à faire du bien jean-claude Pirotte