Troupes défendant l`île de Singapour

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Troupes défendant l`île de Singapour
Appendice 1
Troupes défendant l’île de Singapour
(au 1er avril 1942)
– 9e Division Indienne, Major-général A.E. Barstow :
- 8e Brigade [Brigadier B.W. Key] (2/10e Baluch Rgt, 3/17e Dogra Rgt et 1/13e Frontier Force
Rifles),
- 21e Brigade [Brigadier C.J. Weld] (2/4e Gurkha Rifles, 4/13e Frontier Force Rifles et 1er
Duke of Cornwall’s Light Infantry),
- 22e Brigade [Brigadier G. Painter] (5/11e Sikh Rgt, 2/18e Royal Garwhal Rgt, 2/12e Frontier
Force Rifles et 2e Loyal/North Lancashire Rgt)
– 11e Division Indienne, Major-général D.M. Murray-Lyon :
- 6e Brigade [Brigadier W.O. Lay] (2e/East Surrey Rgt, 2/8e et 2/16e Punjab Rgt),
- 15e Brigade [Brigadier K.A. Garrett] (2/9e Jat Rgt, 1/8e Punjab Rgt, 5/14e Punjab Rgt et 1er
Leicestershire Rgt),
- 28e Brigade (Gurkha) [Brigadier W. St-John Carpendale] (2/1er, 2/2e et 2/9e Gurkha Rifles)
– 17e Division Indienne
- 44e Brigade (6/1er, 6/14e et 7/8e Punjab Rgt),
- 45e Brigade (4/5e Jat Rgt, 5/18e Royal Garwhal Rifles et 7/6e Rajputana Rifles),
- 46e Brigade (3/7e Gurkha Rifles, 7/10e Baluch Rgt et 5/17e Dogra Rgt)
– Forteresse de Singapour, Major-général F.K. Simmons :
- Straits Settlements Volunteer Force (SSVF), colonel R.G. Grimwood : diverses unités, dont
la Dalforce (plusieurs compagnies d’éclaireurs), le Hong Kong and Singapore Infantry
Regiment (HKSIR) et le North China Volunteers Rgt (NCVR)
- Hong Kong and Singapore Royal Artillery (HKSRA)
- Troupes d’appui, génie, artillerie de forteresse…
– 1ère Division de Malaisie (formée à partir d’unités de la Forteresse de Singapour), acting
Major-general Archibald Paris :
- 12e Brigade d’Infanterie Indienne, Brigadier Archibald Paris (5/2e Punjab Rgt, 4/19e
Hyderabad Rgt et 2e Argyll & Sutherland Highlanders)
- 1ère Brigade d’Infanterie de Malaisie, Brigadier G.C.R. Williams (1er Malay Rgt, 2e Malay
Rgt)
- 2e Brigade d’Infanterie de Malaisie, Brigadier F.H. Fraser (1er/Manchester Rgt, 2e/Gordon
Highlanders Rgt, 2/17e Dogra Rgt)
– 2e Division de Malaisie, formée à partir de trois brigades d’infanterie britanniques :
- 137e (Staffordshire) Brigade (1er et 2e/South and North Staffordshire Rgt et 1er et 2e/Prince of
Wales’ Own Staffordshire Rgt)
- 138e (Lincoln & Leicester) Brigade (1er et 2e/Lincoln Rgt et 1er et 2e/Leicester Rgt)
- 55e Brigade [Brigadier JB Coates] (1er/Bedfordshire & Hertfordshire Rgt et 1er, 5e/Sherwood
Foresters Rgt), venant de la 18e DI britannique.
– 1ère Armoured Division australienne (AIF) [éléments], Major-général H.C.H. Robertson :
trois bataillons, les 2/5e, 2/6e et 2/7e Armoured Regiments.
– Les 53e et 54e Brigades de la 18e Division d’Infanterie britannique [Major-général Merton
Beckville-Smith] forment à présent la garnison de l’île forteresse de Penang.
- 53e Brigade, Brigadier CLB Duke (2/Cambridgeshire Rgt, 5 et 6/Royal Norfolk Rgt)
- 54e Brigade, Brigadier EKW Backhouse (4/Royal Norfolk Rgt, 4 et 5/Suffolk Rgt)
– La 8e Division d’Infanterie australienne (AIF) [Major-général Henry Gordon Bennett] a
été évacuée vers Sumatra et l’île de Sabang, avant d’être évacuée vers l’Inde puis rapatriée
pour reconstitution en Australie.
– Les hommes du 7e Armoured (Queen’s Own) Hussars, “emprunté” à la 7e Armoured
Brigade britannique, ont été évacués vers l’Inde. Ils ont laissé ce qui restait de leur matériel
aux éléments de la 1ère Armoured AIF.
Appendice 2
Rapport sur l’évolution de la situation
élaboré à l’intention du G.O.C. de la Région Militaire de Malaisie par les EtatsMajors des Services lors d’une réunion commune tenue à Simme Road
9 avril 1942, 20h00
Ce rapport est basé sur ceux des autorités civiles et militaires, dont la précision varie
en fonction des circonstances et de la charge de travail pesant sur les équipes de
terrain.
Présents
Contre-amiral Spooner (R.N.), Amiral Malaisie
Brigadier G.C. Eveleigh, Directeur délégué des Services du Matériel
Brigadier R.G. Moir, Transmissions
Brigadier T.K. Newbigging, Officier en chef de l’Administration
Brigadier I. Simpson, Commandant des Royal Engineers de Malaisie
Brigadier K.S. Torrance, Brigadier général, Etat-Major de la Région Militaire de
Malaisie
Brigadier A.W.G. Wildey, Défense anti-aérienne de la Royal Artillery
Brigadier C.H. Stringer, Directeur délégué des Services de la Région Militaire de
Malaisie
Brigadier C.D.K. Seaver, Directeur délégué des Services médicaux du IIIe Corps Indien
Squadron leader M.B. Bailey, Représentant du Bureau principal de la R.A.F. à
Singapour
Royal Navy
Les réparations et le ravitaillement du petit nombre de bateaux civils et militaires
restants se déroulent bien hors de Keppel Harbour. Sept petits vapeurs sont prêts à
prendre la mer si une occasion se présente ou sur ordre.
Toutes les opérations de démolition en dehors des toutes dernières ont été menées à
bien (notamment celle de l’épave du HMS Hermes). Celles qui restent doivent être
effectuées sur instructions du commandement de l’Armée, puisque la base navale est
à présent un élément tactique du champ de bataille.
Les réservoirs de mazout de la base sont préparés pour une destruction totale,
comprenant celle des réservoirs de stockage eux-mêmes, des systèmes de pompage,
des canalisations et des valves. Des charges explosives spéciales devront être
utilisées pour enflammer le carburant et le mazout en feu se déversera dans le détroit
de Johore, où le vent et les courants transformeront en un violent incendie liquide les
eaux à l’est de la jetée, autour de l’extrémité nord de Pulau Ubin et dans l’embouchure
du fleuve Johore, jusqu’à Kota Tinggi inclus. La quantité de carburant est si énorme
que le feu devrait brûler pendant des semaines. La chaleur due à l’intensité de
l’incendie provoquera des colonnes ou même un mur de fumée qui devrait s’élever à
2 000 pieds dans les airs, jusqu’à ce que cette fumée soit absorbée par les nuages de
mousson ou dispersée vers l’est ou le nord-est. Une fois refroidies, des quantités de
produits pétroliers non consumés retomberont sur le sol, en pluie ou même en blocs.
Artillerie
L’artillerie de campagne remplit actuellement en grande partie son rôle normal.
Cependant, les Japonais utilisent apparemment des unités spécialisées de
bombardiers en piqué. Comme l’ont montré les dernières actions en Malaisie, ces
unités semblent être conservées pour faire pencher la balance à des moments décisifs
en des points cruciaux du champ de bataille, pour emporter la décision. Leur cible
principale est notre artillerie – principalement les unités de contre-batterie – et les
retranchements les plus importants. Jusqu’ici, la seule réponse efficace est d’utiliser
des pièces dispersées autour des positions de tir normales d’une batterie au combat et
de tirer en brèves séries de coups rapides. Les seize unités de générateurs de fumée
ont été d’une certaine utilité pour masquer les tirs de certaines batteries, ainsi que le
fait de camoufler des canons dans des zones très soigneusement choisies, en donnant
la priorité à la qualité de la cachette sur la portée et le champ de tir.
Destruction de batteries fixes dans le Secteur Ouest et dans le Secteur de la Jetée
La perte des batteries fixes dans les secteurs attaqués peut être attribuée au fait que
ces batteries se sont découvertes en appuyant de façon soutenue les unités
d’infanterie attaquées, permettant à l’artillerie ennemie de les repérer facilement,
mais aussi au fait que la destruction par l’artillerie et l’aviation japonaises des filets de
camouflages, des feuillages et des paravents en bois masquant nos canons les avait
laissés à découvert, exposés aux attaques des bombardiers en piqué. De plus, les
protections construites ces dernières semaines autour des nouveaux emplacements
de batteries avec des sacs de sable, des planches, de la terre et du ciment avaient été
très endommagées par le pilonnage subi par ces batteries. En effet, une seule des
batteries détruites était permanente (celle de Pasir Laba).
Malgré tout, les emplacements des canons eux-mêmes sont de très petites cibles, et
leur destruction par les bombardiers en piqué exige beaucoup d’adresse de la part des
pilotes. Il faut aussi se souvenir qu’aucune de nos batteries n’a encore été atteinte par
un coup direct de l’artillerie ennemie ou d’une attaque aérienne conventionnelle. Le
travail continue pour améliorer la résistance des batteries aux near misses, grâce à
l’ajout de plaques de blindage récupérées dans la base navale.
Transmissions
Pendant tous les combats en Malaisie et maintenant sur l’île de Singapour, nous avons
souffert des médiocres performances de nos équipements de télécommunication sans
fil. Par exemple, les radios de type 108 fournies aux bataillons pour les
communications du QG avec ses compagnies de fusiliers sont censées avoir une portée
normale garantie de 3 miles, mais elles ne sont fiables, par moments, que jusqu’à 150
yards. Seuls les modèles très puissants, avec leur très longues antennes rétractables,
embarqués dans les camions de transmission des divisions alloués aux QG de brigade
(et à d’autres unités selon disponibilité), ont régulièrement démontré une efficacité à
peu près correcte.
Les vieux soldats, en particulier les vétérans des tranchées de la Première Guerre,
sont maintenant très demandés, car des stocks d’équipement de cette époque ont été
récupérés et sont en cours de livraison aux unités. Ce matériel ancien a prouvé sa
fiabilité et son efficacité dans l’eau et la boue des Flandres et du nord de la France –
Fullerphones, héliographes, lampes Lucas avec socles et batteries. Il en est de même
de dispositifs du commerce destinés à l’utilisation dans les mines (comme les
téléphones de mine de Western Electric).
Munitions
Dans les dernières vingt-quatre heures, plus de 5 000 tonnes de munitions ont été
dépensées et au moins 250 tonnes perdues du fait de l’ennemi. Au fur et à mesure que
davantage d’unités japonaises vont être déployées sur l’île de Singapour, dépenses et
pertes vont croître en proportion, ce qui mettra certains types de pièces à court de
munitions dans deux à trois semaines. En revanche, les stocks de munitions pour les
armes navales servies par l’Armée dépassent à ce jour la vie opérationnelle de l’âme
des canons.
Il ne semble pas que nous soyons menacés de pénurie de munitions pour les armes de
0.303, mais il faut craindre une telle pénurie pour les armes de 0.45 (pistolets,
revolvers et mitraillettes Thomson) et pour les fusils antichars de 0.55. Les stocks
d’obus pour les mortiers de 2 pouces sont adéquats, mais il faut s’attendre à des
difficultés pour les mortiers de 3 pouces.
Cependant, on peut espérer une certaine amélioration de la situation, car nous
continuons à découvrir des munitions dans les péniches et les entrepôts de Keppel
Harbour. En effet, dans les dernières semaines où Singapour a pu recevoir des navires
de transport, la priorité était de décharger ces navires le plus vite possible, et une
grande partie des matériels et des approvisionnements ont été incorrectement
répertoriés, étiquetés et rangés. Enfin, le déménagement des stocks de Kranji et de
Nee Soon progresse ; leur proximité des combats en fait le point de délivrance de
choix des munitions destinées aux unités sur le front.
Collaboration avec les Autorités Civiles
Nous fournissons actuellement 3 500 hommes à l’administration civile. De plus, 2 500
hommes sont employés à Keppel Harbour pour assurer la sécurité, trouver et
déplacer les stocks de matériel, etc.
La fourniture d’électricité est problématique, à cause des attaques japonaises répétées
contre la centrale Saint James. L’immeuble est en ruines, mais les chaudières et les
turbines marchent encore. Les principales difficultés touchent les transformateurs et
les zones de répartition et de distribution, où les équipes d’entretien n’arrêtent pas de
réparer et de régler le système. Le plus gros point noir est le manque d’isolateurs en
verre et céramique, qui sont relativement peu coûteux mais très vulnérables aux
chocs et aux dommages causés par le souffle et doivent continuellement être
remplacés. Pour maintenir la fourniture d’électricité, des centaines de nos hommes et
de nombreux générateurs ont été placés à des points clés, comme des hôpitaux et des
chambres froides pour la nourriture. En plus des générateurs militaires normaux et
de ceux d’unités de la base navale, un quart des camions générateurs destinés aux
projecteurs anti-aériens ont été prélevés sur la dotation des unités de DCA et mis à la
disposition des services civils.
Services de Santé
Les ressources des services de santé sont pour l’instant à la hauteur du nombre de
blessés. Cependant, si le rythme actuel des opérations se maintient, une sérieuse
surcharge est à prévoir d’ici la fin du mois. Il y a aussi un risque de baisse de
l’efficacité des services de santé si nos équipes médicales et leurs aides travaillent de
façon prolongée au maximum de leurs possibilités sans prendre de repos.
Le système médical civil affronte déjà des problèmes majeurs en raison des attaques
aériennes frappant la population. Depuis le mois de janvier, les pertes quotidiennes
moyennes de la population civile du fait des bombardements sont de 20 morts et 60
blessés nécessitant une hospitalisation. Il est prévisible que ce chiffre augmentera de
façon dramatique si la cité devait être la cible de violents tirs d’artillerie. Les
conséquences ne sont pas allégées par les dommages infligés à l’infrastructure
médicale civile et les pertes subies.
A l’heure actuelle, les pertes civiles quotidiennes n’augmentent pas malgré
l’intensification des attaques aériennes, car de nombreux civils se sont réfugiés dans
des habitations improvisées aux limites de la ville. Néanmoins, si les Japonais se
rapprochent, ces gens reflueront vers la ville elle-même.
Si les Japonais n’autorisent pas l’utilisation de navires hôpitaux pour évacuer les
malades et les blessés, nous aurons à faire face à une importante augmentation des
blessés graves, absorbant des ressources médicales disproportionnées par rapport à
nos possibilités et pouvant provoquer la désorganisation complète de nos services de
santé. Bien entendu, les services civils s’effondreront aussi, car l’ennemi ne semble
pas pour le moment tenter d’une façon quelconque d’épargner les civils.
Lignes de Communication et Travaux
Les problèmes normaux liés au séjour de troupes en zone civile ont virtuellement
disparu, car les hommes ont bien trop à faire pour s’occuper d’autre chose que de leur
mission. Le moral semble bon pour l’instant. Même dans les unités qui sont subi des
pertes sévères, les problèmes de traînards et d’indiscipline à l’arrière du front sont
relativement réduits.
Cependant, les bombardements créent des problèmes de circulation, de sécurité et de
maintien de l’ordre légal en zone urbaine. Des compagnies de Police Militaire
supplémentaires sont nécessaires pour le contrôle et la sécurité de la circulation et
quelques bataillons d’infanterie pour assurer la sécurité intérieure et sur le terrain.
Les zones de rassemblement permettant de mettre les civils à l’abri, de les loger et de
les nourrir ont jusqu’ici bien joué leur rôle, mais il est douteux que cela suffise si les
Japonais parviennent jusqu’à la ville.
Il est encore possible de compter sur les ouvriers civils dans la partie sud de l’île, mais
ailleurs, on ne peut compter que sur des unités d’ouvriers enrégimentés pour
travailler sous les obus et sous les bombes.
(signé)
Brigadier K.S. Torrance
Brigadier Général, Etat-Major de la Région Militaire de Malaisie
Appendice 3
Rapport sur la mission de l’Unité d’Exploration de la Flotte Combinée en
Mer du Sud
Kuching, le 24 avril 1942 (document établi par l’état-major de l’Unité Spéciale)
Le 31 décembre 1941 dans la soirée, des ordres urgents furent reçus de la Flotte Combinée
pour préparer et envoyer un navire convenablement équipé pour rechercher des documents et
des systèmes techniques dans des épaves de vaisseaux ennemis après les victoires remportées
par la Flotte dans les eaux méridionales. Il fut vite connu qu’il s’agissait d’un cuirassé anglais
de classe King George V. La Flotte Combinée avait déjà choisi le mouilleur de mines
moderne Yaeyama (1 380 t, 20 nœuds) pour cette tâche. Le chantier naval de Kure reçut la
tâche de préparer le navire à appareiller dans les 36 heures. Le navire fut immédiatement mis
en cale sèche pour rectifier tous les défauts éventuels. Ses canots normaux furent remplacés
par des embarcations de transport de personnel du type emporté par les croiseurs et une grue
de cinq tonnes (prélevée sur un bateau atelier pour hydravions en construction) fut ajoutée à la
poupe. L’Ecole de Plongée reçut l’ordre de préparer six équipes de deux plongeurs qui iraient
travailler avec les deux déjà installées à Kuching. Quatre plongeurs très expérimentés de la
direction de l’Ecole se sont joints à eux. Une grande quantité de matériel a été embarquée,
ainsi que des pièces détachées et du personnel de maintenance.
Le 1er janvier 1942, à nouveau sur ordre exprès de la 2e Flotte, les îles Tambelan furent
occupées. Dans l’après-midi de cette journée, couverte par la force de l’amiral Kondo, la 3e
Force d’Attaque Surprise du contre-amiral Hirose (DD Yamagumo, TB Chidori, Hatsukari,
Manazuru, Tomozuru, deux dragueurs de mines, neuf chasseurs de sous-marins) débarqua des
groupes d’infanterie de la Marine Impériale dans les îles Natuna, Selatan et Tambelan. Ces
débarquements ne rencontrèrent pratiquement pas d’opposition.
Le 2 janvier, le Yaeyama put appareiller.
Le 15 janvier, le Yaeyama arriva en baie de Kuching.
Pendant ce temps, la 2e Flotte avait beaucoup fait. Une chaîne de postes de guet avait été
établie, des hydravions montaient une garde constante contre les sous-marins ennemis et des
avions de chasse surveillaient la région en permanence. Des champs de mines de couverture
avaient été mouillés. Ils avaient été soigneusement positionnés pour qu’un sous-marin ne
puisse tenter de torpiller le Yaeyama sans franchir auparavant un barrage de mines. Surtout,
grâce à de nombreuses embarcations réquisitionnées sur place, le cuirassé ennemi avait été
localisé avec précision, marqué par des bouées, surveillé, et un plan de l’épave avait été
dressé. Il était évident que cette épave était d’une valeur incalculable, malgré le fait qu’elle fût
couchée sur le côté et presque retournée.
Des chasseurs de sous-marins, des torpilleurs et divers petits bâtiments furent mis à la
disposition de l’Unité d’Exploration pour apporter à Kuching le matériel et les documents
récupérés.
Le 16 janvier, le Yaeyama arriva sur zone et les plongées commencèrent immédiatement. Dès
ce moment, tous les objets récupérés furent au fur et à mesure envoyés à bord d’un torpilleur à
Kuching.
L’exploration permit de récupérer de très nombreux documents. Un grand nombre de manuels
sur le directeur de tir antiaérien “Type 285” furent ainsi découverts à l’avant. A l’arrière, les
équipes de plongeurs récupérèrent plusieurs lourds meubles à quatre tiroirs. Ce fut une
opération longue et compliquée, car ils durent être déboulonnés de la paroi, passés par une
porte puis par une écoutille malgré la situation presque sens dessus dessous du navire, avant
d’être remontés. L’un de ces meubles contenait des journaux de transmissions (surtout
administratifs), mais l’autre devait contenir des livres secrets (“Classified Books”). Hélas, il
s’avéra qu’il était vide ou presque, l’essentiel de son contenu ayant probablement été détruit
d’une façon ou d’une autre lorsque le navire parut condamné (sans doute dès le début de la
journée du 31 décembre).
Nous nous sommes aussi efforcés de récupérer tous les matériels ayant un rapport avec les
radiodétecteurs et surtout les détecteurs eux-mêmes.
A l’arrière, sept autres meubles à quatre tiroirs furent récupérés dans les bureaux d’état-major.
Eux aussi étaient presque vides. L’un des plongeurs les plus expérimentés réussit à pénétrer
en fin de journée dans les quartiers de l’Amiral. Il en revint avec la nouvelle fascinante qu’un
lourd coffre d’acier fermé et peint en rouge s’y trouvait. Il récupéra dans le bureau un grand
nombre de papiers et de documents, y compris ce qui semble être le journal personnel de
l’amiral Phillips. Il estima la masse du coffre à une tonne environ. Vu la situation du navire, il
était impossible de remoner le coffre lui-même. Il fut décidé de forcer ce coffre, après
nettoyage des bureaux d’état-major, avec des charges de 1 kg.
Le 20 janvier, les plongées continuèrent en dépit d’une mer formée et d’un temps venteux.
Les plongeurs ne se laissèrent pas intimider par le danger (l’un d’eux eut une main écrasée),
mais le Yaeyama mouilla deux crapauds d’amarrage supplémentaires. A l’arrière, dans les
bureaux d’état-major, huit meubles à tiroirs furent récupérés, pour un total de 17. Ils avaient
visiblement été vidés à la hâte, et il fut possible de récupérer quelques documents épars.
Comme d’habitude, ce matériel fut immédiatement envoyé à Kuching par un torpilleur
escorté.
Dans l’après-midi du 20, un avion ennemi survola le Yaeyama lors d’une éclaircie. Aucun
message radio ne put être capté, mais l’avion s’en alla en direction de Singapour. Il fut
impossible de l’intercepter. On décida de continuer à travailler dans la nuit, uniquement sur
les bureaux de l’Amiral et de l’état-major, en utilisant les dispositifs d’éclairage déjà installés.
Tous les plongeurs exigèrent de participer à cette très dangereuse activité. Il fut interdit à
quatre d’entre eux d’y participer, pour permettre de poursuivre le travail le lendemain avec
des hommes fatigués, mais non épuisés. Tous les plongeurs étaient en effet proches de
l’épuisement quand cette nuit de travail commença. Ils tinrent néanmoins à faire leur travail,
malgré le risque élevé, car la signification de ce qu’ils récupéraient leur avait été expliquée.
Le 21 janvier, peu après le lever du jour, le coffre rouge de l’Amiral fut forcé et son contenu
récupéré. Deux plongeurs furent perdus, tous deux du fait d’erreurs élémentaires, provoquées
par l’épuisement et le surcroît de travail. En fin de journée, le Yaeyama quitta le site pour les
îles Tambelan.
Le volume des documents livrés à Kuching ne fut pas loin de déborder les équipes chargées
de s’en occuper. Les meubles et coffrets furent immergés dans des bacs à circulation d’eau
douce jusqu’à ce que tout le sel eût été rincé, ce qui fut vérifié par un test au nitrate d’argent.
Sortis des bacs, meubles et tiroirs furent numérotés et ouverts. Les livres secrets et autres
documents importants avaient très bien supporté l’immersion, car ils étaient fermés et
empilés. Leurs pages furent précautionneusement tournées une à une, chacune étant
photographiée au fur et à mesure par procédé Kodak. Une feuille de buvard, une de celluloïd
et une autre feuille de buvard furent glissées entre chaque page pour éliminer le gros de
l’humidité. Les buvards furent ensuite enlevés (non la feuille de celluloïd) pour être séchés et
réutilisés, chaque page étant séchée séparément à l’air chaud par un marin. Ce travail prenait
normalement 24 heures. Les journaux de transmission étaient les plus fragiles et avaient
commencé à se désintégrer. Leurs pages ont dû être péniblement détachées les unes des autres
et traitées individuellement. Il est regrettable que tous ces efforts n’aient presque rien rapporté
d’intéressant, la plupart des documents secrets ayant évidemment été détruits, en application
de consignes de sécurité dont nous avons d’ailleurs retrouvé un exemplaire !
Le contenu du coffre rouge fut traité de la même façon, mais il ne fut manipulé que par des
officiers au-dessus du rang de lieutenant. On en fit aussi des copies photographiques. Cette
fois, les documents récupérés se révélèrent de la plus extrême importance, et souvent
parfaitement inattendus. Les originaux furent envoyés directement à l’amiral Yamamoto,
transportés par deux officiers armés.
Le 22 janvier, le Yaeyama resta aux îles Tambelan pour reposer les plongeurs.
Le 23 janvier, le Yaeyama revint sur zone, avec des plongeurs reposés.
Du 24 au 27 janvier, le travail de récupération des documents reprit. De nombreux
documents furent récupérés dans les bureaux de l’Amiral, dont ses documents personnels. Le
27, cette zone avait été nettoyée. A partir de ce moment, le travail continua à un rythme plus
mesuré, de façon méticuleuse et systématique. Des ordres stricts furent reçus de l’amiral
Yamamoto lui-même pour récompenser les plongeurs par des promotions au rang d’officier
pour les sous-officiers, et par des grades supérieurs pour les officiers. L’amiral envoya à
chacun des plongeurs une bouteille de saké de sa réserve personnelle, en reconnaissance pour
les exploits accomplis, et affirma que le nom de chaque homme serait porté à la connaissance
de Sa Majesté l’Empereur. Il envoya des instructions interdisant de risquer encore les vies des
plongeurs, et demandant de dépouiller soigneusement le vaisseau amiral ennemi de tout le
matériel accessible, ce qui fut fait.
Le 3 février, le premier plongeur put accéder au principal poste de transmissions. Ce poste
était situé au cœur du vaisseau ; son accès, et plus encore son entrée, étaient très dangereux.
Les innombrables cadavres pourrissant dans cette zone étaient un réel danger, attirant des
hordes de poissons et posant aux plongeurs de véritables problèmes physiques et
psychologiques dans l’obscurité des couloirs du vaisseau. Certains plongeurs n’ont pu
supporter ces conditions de travail et la plupart ont attrapé de graves infections cutanées, car
la moindre égratignure s’infectait, l’eau étant souillée par les chairs en décomposition. Les
efforts pour pénétrer dans cette pièce furent dès lors abandonnés provisoirement, jusqu’à ce
que les zones plus accessibles aient été vidées de tout élément intéressant.
Le 28 février, la récupération de la documentation de la plupart des salles de radiodétection
était achevée, nous permettant de constater qu’une quantité surprenante de documents étaient
disponibles en plusieurs exemplaires, mais leur exploitation, en l’absence des documents
principaux, risque de s’avérer extrêmement difficile, sinon impossible.
Du 1er au 28 mars, alors que le travail continuait par ailleurs, un puits d’accès fut ouvert audessus du poste de transmissions principal. Dans les deux dernières semaines du mois, ce
poste fut exploré et vidé. La plus grande partie du papier s’était détérioré, mais les machines
de codage, les manuels d’utilisation de ces machines et un important volume d’archives furent
récupérés, ainsi qu’un autre coffre rouge qui contenait un grand nombre de codes.
Malheureusement, tous ces documents étaient imprimés avec une encre se diluant très
facilement au moindre contact avec l’eau de mer, et ils étaient pratiquement illisibles, en
dehors des pages de titre, nous laissant d’autant plus de regrets.
Du 29 mars au 22 avril, les opérations se poursuivirent. Finalement, le vaisseau ne
renfermant plus guère de secrets, le Yaeyama retourna le 23 avril en baie de Kuching, où un
camp de repos spécial luxueusement aménagé a été aménagé pour les plongeurs et leurs
personnels de soutien. Ces équipes maintenant très expérimentées doivent en effet se reposer
et leur équipement doit être entretenu, car leur intervention sera sous peu nécessaire à
Singapour, dont la chute est prévue dans les prochains jours.
………
Note – Il est très heureux que les Britanniques aient conservé dans le bureau de l’Amiral une
grande quantité de matériel qu’ils auraient dû détruire. Cela ne peut probablement s’expliquer
que parce que l’amiral Phillips a été tué, que son état-major a été décimé et que personne n’a
donné à temps l’ordre de détruire ses documents secrets. C’est une chance extraordinaire.

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