L`US Army Air Force face au Japon de mars à octobre 1942 Peu d

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L`US Army Air Force face au Japon de mars à octobre 1942 Peu d
L’US Army Air Force face au Japon de mars à octobre 1942
Peu d’avions, beaucoup de missions
Au printemps 1942, les planificateurs de Washington devaient faire face à des choix difficiles
dans l’affectation des forces aériennes américaines. Envoyer d’importants renforts dans le
Pacifique Sud et en Chine imposait de sacrifier l’espoir d’une offensive aérienne rapide et
puissante contre l’Allemagne, mais concentrer toutes les forces contre l’Allemagne signifiait que
l’on acceptait le risque de perdre le Pacifique Sud, voire une partie de l’Australie et que l’on se
désintéressait du sort de la Chine. Tout en faisant porter l’effort principal en Europe, il fallait
donc accorder au Pacifique Sud juste assez de renforts pour le défendre efficacement et fournir à
la Chine une aide au moins symbolique.
L’Air Force dans le Pacifique Sud
L’état-major général allié avait reconnu que l’Allemagne était l’ennemi le plus redoutable et que
les forces devaient être réparties de façon correspondante. Mais l’Australie n’était pas incapable
d’assurer sa propre défense, dans une certaine mesure au moins, grâce à ses troupes revenant du
théâtre européen, tandis que les Britanniques lui fournissaient Hurricane, Wellington, et bientôt
des Whitley et des Manchester, ainsi que deux divisions de troupes impériales. De plus,
l’USAAF, un peu renforcée par les unités repliées des Philippines et des Indes Néerlandaises,
était déjà présente en Australie et dans les îles entre l’Australie et Hawaï.
L’USAAF pouvait donc se contenter de renforcer les forces existantes sans affecter de nouvelles
unités au théâtre Pacifique. L’idée de départ du général Brett (qui commandait les forces
aériennes américaines en Australie) avait été d’opérer à partir de sept zones largement dispersées
(Darwin, Townsville, Brisbane, Melbourne, Adélaïde, Perth et Sydney), mais la présence des
forces alliées impliquait que ce plan pouvait et devait être aménagé. Par exemple, les installations
de Brisbane étaient déjà entièrement occupées par la RAAF et la NEIAF. Le général Brett avait
demandé à recevoir deux groupes de chasse de plus et trois groupes de transport, mais cette
demande fut rejetée. La décision de maintenir sur place une force de six groupes de
bombardement (deux légers, deux moyens et deux lourds) et trois groupes de chasse restait en
vigueur, tandis que ces groupes recevaient la responsabilité de couvrir l’ensemble du Pacifique
Sud-Ouest, en collaboration avec les Alliés – Australiens, Britanniques, Hollandais et même
Français.
De pauvres aviateurs loin de chez eux…
Au 18 mars 1942, les effectifs aériens américains en Australie étaient pourtant bien maigres.
– Dans la chasse, ils s’élevaient à 92 P-40, 33 P-39 et 52 P-4001 au sein des 8e, 35e et 49e Pursuit
Groups, pour des effectifs nominaux de 80 avions par PG. Pire encore, seul le 49e comptait des
pilotes ayant quelque expérience de la chasse : 13 en tout…
– La situation du bombardement était pire.
Le 7e Heavy Bombardment Group comptait 27 B-17 (dont 12 opérationnels) pour un effectif
nominal de 35 et le moral des hommes était au plus bas. Le 43e Heavy Bombardment Group
commença à arriver fin mars, mais le rythme prévu de deux B-17 par jour à partir du 20 ne fut
jamais tenu. L’objectif de 80 B-17, plus 40 en réserve, pour le total des deux groupes de
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Les P-400 étaient des P-39 au standard export, incapables notamment d’opérer à haute altitude.
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bombardement lourd ne fut jamais atteint en 1942, car les renforts dépassèrent à peine les pertes
durant l’année.
Les 22e et 38e Medium Bombardment Groups n’étaient que des coquilles vides, avec une demidouzaine d’avions opérationnels à eux deux. Néanmoins, dès le mois d’avril, le 22e allait recevoir
48 B-26 Marauder.
Les 3e et 27e Light Bombardment Groups avaient à eux deux 43 A-24, dont 27 opérationnels,
pour un effectif nominal de 57. Ils furent complètement réorganisés et deux des Squadrons du 3e
LBG convertis sur B-25.
– Par ailleurs, le 21st Troop Carrier Sqn, censé apporter son aide aux Lodestar de la NEIAF en
Nouvelle-Guinée, fut au contraire déployé en Nouvelle-Calédonie pour participer au
développement des installations en vue de l’opération Watchtower.
Si la situation des effectifs était désastreuse, celle de la logistique était catastrophique. Les
squadrons de l’USAAF n’avaient presque pas d’équipes d’entretien en dehors de leurs échelons
au sol organiques, et ceux-ci étaient bien au-dessous de la norme pour les Groupes évacués des
Philippines. Ils n’avaient aucun support administratif. Si, sur ce plan, la RAAF pouvait les aider,
l’appui technique et la disponibilité des pièces détachées étaient médiocres.
… harcelés par les problèmes d’intendance…
Les problèmes de commandement et de contrôle furent plus ou moins réglés à la fin du mois
d’avril. Le général Blamey devint commandant de la Région Australie et le général Brett
commandant de l’USAAF Expeditionary Force pour cette Région. Les discussions menées pour
créer une force aérienne de théâtre unifiée, rassemblant les unités de la RAF, de la RAAF, de la
NEIAF, de l’USAAF et de l’Armée de l’Air révélèrent des problèmes administratifs insolubles.
Du point de vue opérationnel, l’Air Vice-Marshall Bostock (RAAF) et le général Brett assurèrent
le commandement en équipe, et cet arrangement marcha de façon acceptable.
Mais cela ne suffit pas à régler les questions logistiques.
En Australie, l’USAAF devait faire face à une série de problèmes très gênants. En effet, elle
n’était que l’élément “front” d’une force combattante, manquant d’une grande partie des éléments
de soutien dont une telle force a besoin. La plupart de ces problèmes ne purent être corrigés qu’à
la fin de 1942. Jusque là, l’USAAF n’avait pas d’autre choix que de se reposer sur la RAAF et
même sur la NEIAF (qui développait des installations d’assemblage et un dépôt près de Brisbane)
pour ses besoins élémentaires. Cela ne convenait à personne, introduisait des échelons
intermédiaires superflus et nuisait aux capacités opérationnelles de tout le monde – cependant,
chacun savait que ce n’était qu’une mesure intérimaire et les trois services firent preuve de la plus
grande bonne volonté pour faire tourner la machine.
Finalement, Townsville devint la principale base américaine de la région. Le 35e Air Base Group
fut le premier à s’y établir et cinq autres suivirent, un allant à Charters Towers, un à Sydney et un
à Melbourne, où les machines venant d’arriver en caisses étaient assemblées et où les gros
travaux d’entretien étaient effectués. Le dépôt permanent de ravitaillement et d’entretien établi à
Townsville devint énorme, employant 6 000 personnes.
Mais tout cela prit du temps et l’USAAF dut faire de son mieux avec ce qu’elle avait pour
soulager un peu la RAAF. En mai, les P-39 du 8e PG furent basés à Port Moresby et les P-40 du
49e PG à Darwin. Le même mois, les B-25 du 3e LBG et les B-26 du 22e MBG commencèrent à
opérer en Nouvelle-Guinée, avant d’être transférés en Nouvelle-Calédonie pour appuyer les
opérations dans les Salomon. De même, le 49e PG fut par la suite redéployé en NouvelleCalédonie pour en assurer la défense aérienne. Peu à peu, la défense des îles réparties entre
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l’Australie et Hawaï reçut une priorité élevée, car ces îles permettaient l’acheminement en vol de
certains avions. Ainsi le 68 e Pursuit Sqn et ses 25 P-40E furent-ils envoyés aux Tonga, les 67 e et
70 e Pursuit Sqn aux Fidji, le 12 e à l’île Christmas etc.
L’établissement de ces garnisons provoqua un débat acharné au sein de l’USAAF, car il était
contraire à tous ses principes de concentration des forces. On affirma que diluer ainsi les forces
disponibles à travers le Pacifique garantissait d’être faible partout et fort nulle part, le tout à un
coût inacceptable en ressources. C’était exact. Cependant, les forces du théâtre Pacifique
dépendaient d’une structure stratégique très inhabituelle, une voie de ravitaillement linéaire sans
aucune profondeur défensive. Il n’y avait pas d’autre choix que de tenter de la protéger sur toute
sa longueur.
… mais combatifs
En dépit de tout, ce qu’il y avait d’avions ne cessa jamais les opérations contre les Japonais.
Malgré un moral souvent défaillant, en raison des longues périodes passées dans des régions très
reculées, à vivre dans des conditions très primitives, le courage et la combativité des pilotes ne
furent jamais pris en défaut.
Au début, les missions organisées étaient surtout des reconnaissances ou de petits raids de
bombardement effectués par des B-17, allant parfois jusqu’à Ambon ou Rabaul. Le 11 avril, les
10 B-25 disponibles, accompagnés de 3 B-17, volèrent de Darwin à Del Monte, aux Philippines,
pour soutenir, si peu que ce fût, les hommes de MacArthur dans leur lutte.
Par la suite, il y eut des succès, comme ceux des P-40 basés à Darwin, qui firent payer cher à la
Marine Impériale ses raids sur la cité, ou comme le raid sur Lae effectué le 16 mai par 14 B-25 de
la NEIAF, quatre B-26 et deux B-17 de l’USAAF. Il y eut aussi des échecs. Les A-24 (version
terrestre du SBD Dauntless), engagés en Nouvelle-Guinée et insuffisamment escortés, se firent
décimer par les Japonais en avril-mai 1942. Pire peut-être, le 8e Sqn du 3e LBG perdit plus
d’avions par accident que du fait des Japonais et ne totalisa que 29 sorties en combat ; fin mai,
l’unité fut retirée à Charters Towers pour y recevoir des B-25. Cependant, la NEIAF recevant en
priorité (selon la promesse du président Roosevelt) les B-25 qu’elle avait commandés (14 en juin
et juillet), le 8e Sqn ne comptait toujours que trois avions en août !
A cette époque, Port Moresby, mal protégé, n’était qu’une étape de ravitaillement pour les
bombardiers qui partaient d’Australie et y revenaient. L’USAAF y avait basé une partie du 35e
Pursuit Group. Cependant, ses P-39 et P-400 n’étaient pas des intercepteurs aussi efficaces que
les Hurricane de la RAAF et subirent de lourdes pertes. En juin, quand le 35e PG fut remanié et
alla recevoir des P-40 à Townsville, il avait perdu 29 P-39 et P-400 en combat, 8 sur atterrissage
forcé et trois détruits au sol.
C’est surtout dans les missions de reconnaissance profondes que l’USAAF apporta un concours
précieux, grâce à ses B-17. Ces derniers attaquèrent aussi Rabaul et Truk. Fin octobre 1942, ils
avaient accompli 60 sorties.
Mais il faut souligner que, de mars à octobre 1942, le nombre réel d’avions de combat dont
disposait le général Brett diminua au lieu d’augmenter : en raison de la guerre en Europe, les
livraisons étaient moins nombreuses que les pertes.
L’Air Force en Chine
La Xe Air Force fut d’abord commandée par le général Brereton, puis par le général Naiden.
Selon l’histoire de l’USAAF, en avril 1942, alors que Washington pensait que Brereton disposait
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d’un Pursuit Group et d’un Heavy Bombardment Group à effectifs nominaux, il ne commandait
que 7 B-17 et 10 P-40, le reste des avions qui lui étaient assignés gisant le long des routes de
transfert, en panne ou carrément transformés en épaves. De plus, les forces de Brereton n’étaient
pas vraiment en Chine, mais en Inde.
Le principal point de rassemblement de la Xe AF était Karachi et le QG de Brereton était à New
Delhi. En juin 1942, ce QG fut transféré à Chongqing, mouvement rendu possible par le maintien
de la Route de Birmanie. Cependant, il fallut deux Groupes de transport aérien pour relier
Karachi à Chongqing.
Les premières opérations offensives de la Xe AF furent des raids menés par de petits nombres de
B-17 contre les quais de Bangkok et l’aérodrome de Victoria Point dans les nuits du 5 au 6 et du
6 au 7 mars. En avril, les raids se concentrèrent contre Victoria Point.
Principaux adversaires : l’Himalaya et Joseph Stilwell
Ce n’est qu’en juin que les premiers avions de la Xe AF commencèrent à s’installer sur les
terrains chinois de la région de Chungking. Devant les difficultés rencontrées pour établir une
liaison aérienne régulière, les officiers de Brereton avaient déjà compris que les plans initiaux
étaient beaucoup trop optimistes sur ce point. De plus, pendant qu’il s’efforçait de résoudre ces
problèmes logistiques, Brereton devait faire échec aux efforts du général Stilwell, désireux
d’engager ses quelques B-17 dans des opérations d’appui tactique. Par bonheur pour Brereton,
Tchang Kai-chek partageait à la fois sa piètre estime pour Stilwell et son désir de commencer au
plus vite le bombardement des îles de la métropole japonaise. Néanmoins, jusqu’en juillet, devait
noter Brereton, l’opération la plus massive menée par la Xe AF avait engagé exactement six
appareils.
Les contrats de l’AVG expirèrent le 4 juillet et le général Chennault, nommé ce même jour à la
tête de la China Air Task Force (CATF), installa lui aussi son QG à Chungking. En pratique, il
commandait le bras armé de la Xe AF, pendant que Brereton retournait au QG de Delhi. Cette
répartition des tâches était rendue nécessaire par l’énormité des difficultés. La Xe AF devait être
ravitaillée à l’extrémité d’une ligne maritime de 19 000 km, suivie par un parcours mixte, fluvial
et routier, s’achevant par la fameuse (et cauchemardesque) Route de Birmanie, ou par un
parcours aérien des plus dangereux passant au-dessus de ce qui commençait à être connu comme
“the Hump”, la Bosse : l’Himalaya soi-même. Karachi restait le principal dépôt aérien, car
Rangoon était trop près des Japonais et de toutes façons déjà trop encombré.
Le 31 juillet, Brereton passait le relais au général Naiden. Il pouvait lui présenter l’ordre de
bataille suivant pour la Xe Air Force :
7e Heavy Bombardment Group (effectif nominal, 35 avions). Converti en Composite
Bombardment Group, doté de deux squadrons de B-17 et deux de B-25. Opérationnel en
septembre 1942.
11e Medium Bombardment Group (effectif nominal, 57 avions). Doté de B-25. Opérationnel en
septembre 1942.
51e Pursuit Group (effectif nominal, 80 avions). Doté de P-39. Opérationnel en octobre 1942.
23e Fighter Group (effectif nominal, 80 avions). Doté de P-40. Opérationnel en octobre 1942. Il
s’agit en fait de l’ex-American Volunteer Group, qui opère depuis la fin de 1941 en étroite
collaboration avec les forces aériennes françaises d’Indochine et dont les squadrons sont le plus
souvent basés à Dien-Bien-Phu ou à Kunming (la ville chinoise la plus proche).
3e Air Depot Group.
1er Air Ferrying Group.
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