Maîtriser la désinfection du matériel - CClin Sud-Est
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Maîtriser la désinfection du matériel - CClin Sud-Est
HYGIENE ET PRÉVENTION DES INFECTIONS DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SOINS POUR PERSONNES AGÉES LES BONNES PRATIQUES D’HYGIENE DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SOINS POUR PERSONNES AGÉES 2.4 Maîtriser la désinfection du matériel Rôle de l'environnement et du matériel dans la transmission de l'infection Acinetobacter baumannii, entérobactéries, Pseudomonas aeruginosa. Bien que souvent mal évalué, le risque de transmission des micro-organismes par le matériel ou l'environnement contaminé doit être pris en compte car ils constituent des réservoirs secondaires ou des vecteurs, en particulier dans un contexte d’infections à bactéries multirésistantes (1). Les micro-organismes suivants sont retrouvés sur de nombreux prélèvements de surfaces et de matériel dans les unités de gériatrie : Staphylococcus aureus résistant ou sensible à la méticilline, Comment traiter le matériel de soins après son utilisation ? Par la mise en œuvre d’une procédure de désinfection, permettant « l’élimination dirigée de germes destinée à empêcher la transmission de certains micro-organismes indésirables » (2) (Tableau VII). Une procédure de désinfection peut être partiellement ou totalement automatisée (lave-bassins, machines à laver le matériel). Les objectifs Les étapes Les modalités ◆ Abaisser le niveau de contamination (protection du personnel et de l’environnement) ◆ Faciliter le nettoyage* Prétraitement Trempage dans une solution impérativement détergente éventuellement bactéricide* Rinçage Eau courante Nettoyage Action mécanique + détergent Rinçage Eau courante Détruire les micro-organismes Désinfection* chimique ou thermique - Trempage dans une solution désinfectante - Application d'un désinfectant* - Élévation thermique dans un automate Éliminer les résidus de produits Rinçage si désinfection chimique Eau courante de qualité adaptée Séchage Égouttage, essuyage ou air Stockage Dans un placard propre et fermé Éliminer les salissures Éviter la recontamination Tableau VII Procédure de désinfection HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6 333 MAITRISER LA DÉSINFECTION DU MATÉRIEL OPTIMISER Tableau VIII - Niveaux de désinfection requis pour la désinfection du matériel. La procédure de désinfection passe par la connaissance des niveaux de risque infectieux potentiel du matériel, des niveaux de désinfection et des normes d'activité des produits Type de matériel/niveaux du risque infectieux potentiel matériel critique haut risque • matériel introduit dans un tissu stérile ou le système vasculaire : ex : optique de cœlioscopie. matériel semi-critique risque médian • matériel en contact avec muqueuse ex : thermomètre, endoscope digestif ou bronchique. • matériel sans contact avec muqueuse pouvant être souillé par des liquides biologiques ex : garrot, bassin. matériel non critique bas risque • matériel non souillé, sans contact avec les liquides biologiques ou touchant la peau intacte ex : stéthoscope, matériel de coiffeur, marteau à réflexes. Niveaux de traitement Normes d’activités AFNOR* stérilisation à défaut désinfection de haut niveau • bactéricide* • fongicide • virucide • mycobactéricide • sporicide désinfection de niveau intermédiaire • bactéricide NF EN 1040 • bactéricide NFT 72 170(171) présence de matières interférentes • bactéricide • fongicide • virucide • mycobactéricide • fongicide NF EN 1275 • virucide NFT 72 180 • sporicide NFT 72 230 (231) désinfection de bas niveau • bactéricide • lévuricide La désinfection chimique manuelle peut être effectuée par trempage pour le matériel immergeable, par application d’un désinfectant à l’aide d’une lavette pour le matériel non immergeable, par pulvérisation dirigée d’une solution désinfectante. Dans ce dernier cas, le personnel doit pouvoir se protéger de l’inhalation des produits désinfectants. Le tableau VIII décrit les différents niveaux de désinfection du matériel à atteindre en fonction de son utilisation. Comment organiser la désinfection ? Disposer d’un office spécifique pour l’entretien du matériel Ce local doit être distinct de l’office de préparation des soins (3, 4) et fonctionner avec des règles précises : ◆ Acheminer le matériel vers l’office en évitant tout risque de contamination des personnes (5) et de l’environnement. OPTIMISER OPTIMISER Les équipements L‘utilisation des produits automatiser le traitement du matériel par l’utilisation de lave bassins et de machine à laver le matériel, ■ placer l’office d’entretien à proximité des chambres, ■ adapter le nombre d’offices d’entretien du matériel au nombre de lits (un pour 15 lits) (4), ■ ranger le matériel propre dans un local spécifique, à l’abri de l’air, ■ toujours manipuler le matériel propre avec des mains propres. ■ mettre en place un distributeur automatique de produits, ■ élaborer des procédures écrites et former les personnes responsables de l’entretien du matériel, ■ évaluer périodiquement le respect des procédures, ■ protéger efficacement le personnel contre les risques chimique et biologique (5) lors de l’entretien. ■ 334 HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6 MAITRISER LA DÉSINFECTION DU MATÉRIEL Air médical Bac de nettoyage Bac de prédésinfection Bac de désinfection Paillasse égouttage Sens de la marche en avant Paillasse Figure 1 Organigramme d'un office d'entretien du matériel. Ventilation 4 à 6 volumes/heure Poste de lavage des mains Paillasse Sens de la marche en avant Lavebassins ou vidoir domestiques à risque Collecteur de déchets ◆ Mettre en place dans l'office un circuit du plus sale au plus propre (figure 1). ◆ Intégrer des bacs de trempage (munis d’un couvercle) adaptés (nombre, taille) aux besoins. ◆ Installer des plans de dépose du matériel sale et d’égouttage pour le matériel propre (figure 1). ◆ Respecter les paramètres suivants : concentration des produits, temps de contact, température, nettoyage* préalable du matériel. ◆ Préférer un conditionnement du désinfectant facilitant son utilisation. ◆ Ne pas mélanger les produits entre eux. ◆ Prévoir un taux de renouvellement d’air suffisant pour éliminer les vapeurs de désinfectants (4 à 6 volumes par heure). Bibliographie ◆ Disposer d'un point de vidange permettant l’évacuation des déchets liquides. 1 - BOYCE JM. Treatment and control of colonization in the prevention of nosocomial infections. Infect Control Hosp Epidemiol 1996, 17: 256-261. Utiliser des produits désinfectants adaptés 2 - Bonnes pratiques de désinfection. Guide CTIN/Conseil Supérieur d’Hygiène Publique 1997 (à paraître). Le choix des produits doit être confié à une personne formée aux normes d'étude des produits tant pour l'activité antimicrobienne, que pour la toxicité et l'agressivité sur les matériaux (pharmacien, hygiéniste) (cf. chapitres 2.4 et 2.9) ◆ Choisir des désinfectants à partir de cahier des charges établis (2) après recensement du matériel et des surfaces à désinfecter. HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6 3 - VANDERVEIKEN F. L’utilité sale. Bull Inf Hyg Hosp, XII, 1, 4-9. 4 - Hygiène et architecture dans les établissements de santé. Comité Technique Régional de l’Environnement Hospitalier- DRASS Rhône-Alpes. Avril 1997. 5 - Décret n°94-352 du 4 mai 1994 relatif à la protection des travailleurs contre les risques résultant de leur exposition à des agents biologiques. 335 HYGIENE ET PRÉVENTION DES INFECTIONS DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SOINS POUR PERSONNES AGÉES Lexique AFNOR biofilm Association Française de Normalisation. Association ayant pour mission de coordonner les programmes de normalisation en France et d’encourager la diffusion et l’application des normes. Ensemble de micro-organismes et de leurs sécrétions macromoléculaires qui sont présents sur la surface d’un matériau (Association pour la Prévention et l’Étude de la Contamination). antisepsie bionettoyage Opération au résultat momentané permettant, au niveau des tissus vivants, dans la limite de leur tolérance, d’éliminer ou de tuer les micro-organismes et/ou d’inactiver les virus, en fonction des objectifs fixés. Le résultat de cette opération est limité aux micro-organismes présents au moment de l’opération (AFNOR NF T 72 101). Procédé de nettoyage, applicable dans une zone à risques, destiné à réduire momentanément la biocontamination d’une surface. Il est obtenu par la combinaison appropriée d’un nettoyage, d’une évacuation des produits utilisés et des salissures à éliminer, de l’application d’un désinfectant. cas acquis antiseptique Selon AFNOR NF T 72 101, un antiseptique est un produit ou un procédé utilisé pour l’antisepsie dans des conditions définies. Si le produit ou le procédé sont sélectifs, cela doit être précisé. Ainsi, un antiseptique ayant une action limitée aux champignons est un antiseptique à action fongicide. Le caractère acquis d’une bactérie multirésistante peut être affirmé si un dépistage systématique à l’entrée dans un service a été réalisé et si celui-ci est négatif. La découverte d’une telle bactérie au cours du séjour plus de 48 à 72 heures après l’admission chez un patient antérieurement négatif laisse présumer que la bactérie a été acquise par transmission au cours du séjour. bactéricide Produit ou procédé ayant la propriété de tuer les bactéries dans des conditions définies (AFNOR, Comité Européen de Normalisation). Produit ou procédé ayant la propriété d’inhiber momentanément les bactéries dans des conditions définies (AFNOR). Le caractère importé depuis un autre établissement d’une bactérie multirésistante peut être affirmé si un dépistage systématique à l’entrée du patient dans le service a été réalisé et si celui-ci est positif. La découverte d’une telle bactérie chez un patient moins de 48 à 72 heures après l’admission laisse présumer que la bactérie a été transmise antérieurement par rapport au séjour actuel. biocontamination colonisation (colonisé) Contamination d’une surface (biologique ou inerte) ou d’un fluide par des micro-organismes véhiculés par l’air (contamination aéroportée ou aérobiocontamination), par des êtres vivants (la contamination par contact avec les mains en est la modalité majeure) ou par les objets. (Association pour la Prévention et l’Étude de la Contamination) Présence d’une bactérie dans un site qui en est normalement exempt, mais cette bactérie n’est responsable d’aucun symptôme local ou général d’infection ; exemple : présence d’une bactériurie isolée à Staphylococcus aureus dans les urines sans aucun signe d’infection urinaire. bactériostatique 364 cas importé HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6 désinfectant nettoyage Produit ou procédé utilisé pour la désinfection, dans des conditions définies. Si le produit ou le procédé est sélectif, ceci doit être précisé. Ainsi, un désinfectant ayant une action limitée aux champignons est désigné par : désinfectant à action fongicide (AFNOR NFT 72 101). Opération d’élimination des salissures (particulaires, biologiques, liquide,...) avec un procédé faisant appel dans des proportions variables les unes par rapport aux autres, aux facteurs suivants : action chimique, action mécanique, temps d’action de ces deux paramètres et température. désinfection nettoyage-désinfectant ◆ Opération au résultat momentané permettant d’éliminer ou de tuer les micro-organismes et/ou d’inactiver les virus indésirables portés par des milieux inertes contaminés, en fonction des objectifs fixés. Le résultat de cette opération est limité aux micro-organismes présents au moment de l’opération (AFNOR NFT 72 101). L’usage du terme « désinfection » en synonyme de « décontamination » est prohibé. Produit présentant la double propriété de détergence et de désinfection (Société Française d’Hygiène Hospitalière). ◆ Terme générique désignant toute action à visée antimicrobienne, quel que soit le niveau de résultat, et utilisant un produit pouvant justifier in vitro des propriétés autorisant à le qualifier de désinfectant ou d’antiseptique. Il devrait logiquement toujours être accompagné d’un qualificatif et l’on devrait ainsi parler de : • désinfection des dispositifs médicaux (= du matériel médical) • désinfection des sols, • désinfection des surfaces par voie aérienne, • et même désinfection des mains ou d’une plaie (Société Française d’Hygiène Hospitalière et Comité Européen de Normalisation). ◆ Élimination dirigée de germes destinée à empêcher la transmission de certains micro-organismes indésirables, en altérant leur structure ou leur métabolisme indépendamment de leur état physiologique (CEN) HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6 porteur (portage) Présence d’une bactérie dans un site où sa présence est habituelle sans qu’elle soit responsable d’infection ; exemple : présence de Staphylococcus aureus dans les narines ou dans d’entérobactéries dans les selles. précautions standard Ensemble des précautions d’hygiène qui s’appliquent à tout patient sans tenir compte de l’existence d’une éventuelle infection. Ces précautions intègrent la protection du personnel vis à vis des liquides biologiques, la prévention des accidents d’exposition au sang et les bonnes pratiques d’hygiène visant à limiter la transmission des micro-organismes hospitaliers lors des soins. Les précautions standard concernent l’hygiène des mains, les techniques de soins, le nettoyage et la désinfection du matériel de soins, l’entretien des locaux , de la vaisselle et du linge, la prévention des accidents d’exposition aux liquides biologiques dont le sang. L’application des précautions standard est indispensable à l’efficacité d’une politique de contrôle des infections nosocomiales. 365