le mobbing
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CENTRE DE FORMATION H+ COURS DE CADRE NIVEAU II - ICS - C2 - 98 mise à jour mars 2005 Jacques ARNOULD, Stéphane COENDOZ, Erik JANSSEN LE MOBBING OU LE HARCELEMENT PSYCHOLOGIQUE AU TRAVAIL MOBBING 2 1. TABLE DES MATIÈRES 1. TABLE DES MATIÈRES .................................................................................................................................2 2. INTRODUCTION..............................................................................................................................................3 3. ETYMOLOGIE ET DEFINITIONS................................................................................................................4 3.1 LE STRESS AU TRAVAIL..........................................................................................................................4 3.2 LE BURN OUT .............................................................................................................................................4 3.3 LE HARCÈLEMENT SEXUEL ...................................................................................................................5 4. MECANISMES DU MOBBING.......................................................................................................................5 4.1 AGRESSEUR ET VICTIME ........................................................................................................................5 4.1.1 L’AGRESSEUR .....................................................................................................................................5 4.1.1.1 L’agresseur est un collègue ou un groupe de collègues – mobbing horizontal – ..............................................6 4.1.1.2 Les subordonnés, agresseurs de leur supérieur hiérarchique – mobbing ascendant – .......................................6 4.1.1.3 L’agresseur est le supérieur hiérarchique –mobbing descendant – ...................................................................6 4.1.2 LA VICTIME ..........................................................................................................................................6 4.2 LES TYPES D’AGRESSIONS .....................................................................................................................7 4.3 LES QUARANTE-CINQ AGISSEMENTS CONSTITUTIFS DU MOBBING (TIRE DE L’OUVRAGE DE HEINZ LEYMANN).................................................................................................................................................8 4.3.1 AGISSEMENTS VISANT A EMPECHER LA VICTIME DE S’EXPRIMER ..........................................8 4.3.2 AGISSEMENTS VISANT A ISOLER LA VICTIME................................................................................8 4.3.3 AGISSEMENTS VISANT A DECONSIDERER LA VICTIME AUPRES DE SES COLLEGUES...........8 4.3.4 DISCREDITER LA VICTIME DANS SON TRAVAIL ............................................................................8 4.3.5 COMPROMETTRE LA SANTE DE LA VICTIME .................................................................................9 4.4 L’INSTALLATION DU MOBBING............................................................................................................9 4.4.1 LES QUATRE PHASES DE LA « PSYCHOTERREUR » ....................................................................10 5. LES CONSEQUENCES ..................................................................................................................................11 5.1 LES CONSEQUENCES POUR LA VICTIME ..........................................................................................11 5.2 LES CONSEQUENCES POUR L’ENTREPRISE......................................................................................11 6. LA SPECIFICITE DU MILIEU HOSPITALIER ........................................................................................11 7. LA PREVENTION ..........................................................................................................................................12 8. LES ASPECTS LEGAUX ...............................................................................................................................12 9. LE ROLE DU CADRE...................................................................................................................................14 10. EN CONCLUSION .......................................................................................................................................14 11. BIBLIOGRAPHIE.........................................................................................................................................15 MOBBING 3 2. INTRODUCTION Nous nous proposons de décrire et d’étudier un phénomène vieux comme le travail, mais dont la description et l’étude approfondie ne datent que des années quatre–vingt, avec les travaux du Professeur Heinz LEYMANN, professeur de psycho–sociologie à l’Université de Stockholm. Parfois appelé « psychoterreur au travail » ou « harcèlement psychologique sur le lieu de travail », le phénomène est de plus en plus connu sous le nom de « MOBBING » – de l’anglais to mob : harceler, attaquer à plusieurs – qui lui a été attribué pour la première fois par H. Leymann en 1993. Nos recherches nous ont révélé son ampleur tant en Suisse qu’à l’étranger. De nombreux articles dans la presse spécialisée ou grand public y font référence, des émissions de radio ou de télévision y sont consacrées ; tant et si bien que le mot « mobbing » est souvent utilisé abusivement et assimilé à d’autres phénomènes tels que le stress au travail, le « burn out » ou le harcèlement sexuel, termes qui seront définis par la suite. Si nos différents parcours professionnels nous prouvent que malheureusement le secteur hospitalier en Suisse n’est pas épargné, nous avons également pu constater sa présence dans tous les milieux professionnels et à tous les niveaux. Les responsables que nous sommes sont particulièrement exposés au mobbing. Nous participons à certaines décisions, nous les subissons et devons veiller à leur application parfois contestée et contestable. Nous sommes à la fois subordonnés, collègues et supérieurs ; nous sommes donc exposés au mobbing descendant, horizontal, ascendant et combiné ! D’autre part, un rapide et désagréable examen de conscience nous révèle que la frontière « mobbé/mobbeur » est bien étroite et qu’elle se franchit parfois à notre insu –dans le meilleur des cas ! –. Dans le cadre de notre formation H+, notre approche du mobbing se veut préventive et s’inscrit dans un esprit de gestion promotionnelle de la santé de nos collègues et de nos services et institutions. MOBBING 4 3. ETYMOLOGIE ET DEFINITIONS Selon les différentes traductions, le verbe anglais « to mob » signifie « harceler », « attaquer à plusieurs », « houspiller », « malmener ». Le mobbing se révèle par des attaques directes ou sournoises, répétées, émanant d’une personne ou d’un groupe contre une victime désignée. La représentation d’une agression par un essaim d’insectes illustre bien le phénomène. Le Professeur Leymann définit le mobbing comme l’effet d’un processus de communication défaillant menaçant l’individu dans son intégrité morale et physique. On ne parle de mobbing que lorsque le comportement hostile est répété constamment. « Par mobbing, nous entendons une situation communicative qui menace d’infliger à l’individu de graves dommages psychiques et physiques. Le mobbing est un processus de destruction ; il est constitué d’agissements hostiles qui, pris isolément, pourraient sembler anodins, mais dont la répétition constante a des effets pernicieux. » Les caractéristiques du mobbing sont les suivantes : confrontation, brimades et sévices, dédain de la personnalité et répétitions fréquentes des agressions sur une assez longue durée (plusieurs mois). Le mobbing ne concerne donc pas les petits conflits ponctuels dus à l’énervement ou à la mauvaise humeur durant le travail. Avant de décrire les mécanismes du mobbing, il convient de définir trois autres aspects négatifs ou pervers rencontrés dans le cadre des relations de travail qui sont à la fois proches et bien distincts de notre sujet. 3.1 LE STRESS AU TRAVAIL Le mot « stress » est un anglicisme signifiant « effort intense, tension ». La notion de stress a été définie comme «la réponse non-spécifique que donne le corps à toute demande qui lui est faite ». Le stress se révèle par ces symptômes : la nervosité, la migraine, l’hypertension, les ulcères, l’insomnie, l’anxiété, le désarroi, etc... Le stress est une réaction de l’organisme à une agression du milieu (bruit, surcharge de travail, fatigue, …). La réponse peut être négative (maladie) ou positive (stimulation). 3.2 LE BURN OUT Le burn out est le stade ultime de la fatigue professionnelle physique et mentale. C’est l’épuisement dû à une surcharge professionnelle qui se traduit par des sentiments d’impuissance, de vide, d’images négatives de soi et des autres, ce qui engendre un sentiment d’échec et d’insatisfaction profonde. La personne est incapable de faire face à l’environnement et de l’apprécier. MOBBING 5 3.3 LE HARCÈLEMENT SEXUEL Le harcèlement sexuel constitue une atteinte physique et psychologique d’une personne. Il se manifeste, de façon répétée ou isolée, par des actes physiques, verbaux ou non verbaux, à connotation sexuelle et de nature contraignante. Ces comportements ont pour but ou pour effet de créer un climat hostile de travail et/ou de compromettre l’emploi d’une personne. Les victimes du harcèlement sexuel sont, dans l’immense majorité des cas, des femmes, mais il peut arriver que des hommes soient concernés. Le harcèlement sexuel peut prendre des formes variées, telles que : propos et plaisanteries sexistes, exhibition et étalage de matériel pornographique, contacts physiques déplaisants, invitations inopportunes, propositions sexuelles explicites, rapports sous contrainte. Notons que si le stress au travail et le burn out peuvent parfois être induits par certaines formes de mobbing, le harcèlement sexuel est, quant à lui, l’un des 45 agissements constitutifs du mobbing recensés par H. Leymann, que nous reprenons au chapitre suivant. 4. MECANISMES DU MOBBING 4.1 AGRESSEUR ET VICTIME 4.1.1 L’AGRESSEUR Le mobbing étant une forme de communication, certes particulière, l’agresseur peut agir au début de manière inconsciente ou en tout cas sans stratégie de destruction. Dès lors que dans un processus de communication l’émetteur et le récepteur sont OK, il n’y a pas de problèmes même si les brimades débutent à ce moment. Les problèmes surgissent au moment où le récepteur en l’occurrence la victime, ne perçoit plus ce mode de communication comme adéquat. Si l’émetteur ne reçoit pas un signe révélateur, il peut poursuivre dans son attitude aussi longtemps. D’où l’importance de l’intervention rapide d’un médiateur. Il existe toutefois un cas particulier, il s’agit de l’agresseur pathologique qui agit dans l’ensemble de son environnement professionnel et privé. Marie-France Hirigoyen le décrit dans son ouvrage « Le harcèlement moral » édité aux éditions Syros. Le profil psychologique de cet agresseur se définit par un sentiment de grandeur, un égocentrisme extrême et une absence totale d’empathie. Il est appelé pervers narcissique. La situation conflictuelle donnant lieu au mobbing peut s’exprimer par trois cas de figures possibles. MOBBING 6 4.1.1.1 L’agresseur est un collègue ou un groupe de collègues – mobbing horizontal – Quatre scénarios possibles : a - la personne–cible résiste aux normes fixées par le groupe qui va la contraindre. b - des inimitiés personnelles entre collègues apparaissent et dégénèrent en mobbing. c - l’agression survient par rapport à l’altérité de la victime (sexe, nationalité, physique …). d - la victime est désignée comme bouc émissaire, et subit l’agressivité et le désœuvrement du groupe. 4.1.1.2 Les subordonnés, agresseurs de leur supérieur hiérarchique – mobbing ascendant – Deux cas de figures sont envisagés : a - soit le supérieur hiérarchique vient d’être nommé et ce choix ne sied pas aux subordonnés. b - soit le supérieur hiérarchique est décrié par ses subordonnés qui lui reprochent son autoritarisme, sa partialité. 4.1.1.3 L’agresseur est le supérieur hiérarchique –mobbing descendant – Dans ce cas, si les agissements du mobbeur sont divers et multiples, ils résultent d’une utilisation démesurée et archaïque du «pouvoir ». 4.1.2 LA VICTIME Les ouvrages et études consultés, nous démontrent qu’il n’y a pas de profil – type de la personne harcelée, ni même de la personne à risque. De plus, des test de personnalité ne montrent aucune différence significative entre la personnalité d’un individu harcelé et non – harcelé. La victime est victime parce qu’elle a été désignée par l’agresseur. La différence se fait sur la façon de chacun de résister ou de sortir d’un harcèlement psychologique. MOBBING 7 4.2 LES TYPES D’AGRESSIONS Le professeur Leymann répartit les types de mobbing en 5 catégories selon les conséquences pour la victime. (voir « les 45 agissements constitutifs du mobbing » en chapitre 4). Priver la victime de toute communication. Isoler la victime en détruisant les relations sociales. Discréditer la victime et la déconsidérer auprès de ses collègues. Compromettre et discréditer la victime dans son travail. Compromettre et nuire à la santé de la victime. Au travers des descriptions des personnalités de l’agresseur et de la victime, et de la classification des types d’agressions, nous constatons que le mobbing se manifeste à tous les niveaux hiérarchiques et qu’il a différentes orientations. Notons que les directions peuvent être combinées (mobbing ascendant et horizontal) et que les types d’agressions sont le plus souvent multiples et diversifiés. MOBBING 4.3 8 LES QUARANTE-CINQ AGISSEMENTS CONSTITUTIFS DU MOBBING (Tiré de l’ouvrage de Heinz Leymann) 4.3.1 AGISSEMENTS VISANT A EMPECHER LA VICTIME DE S’EXPRIMER Le supérieur hiérarchique refuse à la victime la possibilité de s’exprimer La victime est constamment interrompue Les collègues l’empêche de s’exprimer Les collègues hurlent, l’invectivent Critiquer le travail de la victime Critiquer sa vie privée Terroriser la victime par des appels téléphoniques La menacer verbalement La menacer par écrit Refuser le contact (éviter le contact visuel, gestes de rejet, etc.) Ignorer sa présence, par exemple en s’adressant exclusivement à des tiers 4.3.2 AGISSEMENTS VISANT A ISOLER LA VICTIME Ne plus lui parler Ne plus se laisser adresser la parole par elle Lui attribuer un poste de travail qui l’éloigne et l’isole de ses collègues Interdire à ses collègues de lui adresser la parole Nier la présence physique de la victime 4.3.3 AGISSEMENTS VISANT A DECONSIDERER LA VICTIME AUPRES DE SES COLLEGUES Médire d’elle ou la calomnier Lancer des rumeurs à son sujet Se gausser d’elle, la ridiculiser Prétendre qu’elle est une malade mentale Tenter de la contraindre à un examen psychiatrique Railler une infirmité Imiter la démarche, la voix, les gestes de la victime pour mieux la ridiculiser Attaquer ses convictions politiques ou ses croyances religieuses Se gausser de sa vie privée Se moquer de ses origines, de sa nationalité La contraindre à un travail humiliant Noter le travail de la victime inéquitablement et dans des termes malveillants Mettre en question, contester les décisions de la victime L’injurier dans des termes obscènes ou dégradants Harceler sexuellement la victime (gestes ou propos) 4.3.4 DISCREDITER LA VICTIME DANS SON TRAVAIL Ne plus lui confier aucune tâche La priver de toute occupation et veiller à ce qu’elle ne puisse en trouver aucune par elle-même La contraindre à des tâches totalement inutiles et/ou absurdes La charger de tâches très inférieures à ses compétences Lui donner sans cesse des tâches nouvelles Lui faire exécuter des travaux humiliants Confier à la victime des tâches exigeant des qualifications très supérieures à ses compétences, de manière à la discréditer MOBBING 9 4.3.5 COMPROMETTRE LA SANTE DE LA VICTIME Contraindre la victime à des travaux dangereux ou nuisibles à la santé La menacer de violences physiques L’agresser physiquement, mais sans gravité, « à titre d’avertissement » L’agresser physiquement, sans retenue Occasionner volontairement des frais à la victime dans l’intention de lui nuire Occasionner des dégâts au domicile de la victime ou à son poste de travail Agresser sexuellement la victime 4.4 L’INSTALLATION DU MOBBING A chacune des 4 étapes décrites dans le schéma qui suit, le processus peut être enrayé. Nous aborderons plus loin les moyens de résister et de combattre le mobbing. Tous les cas de harcèlement psychologique n’aboutissent heureusement pas à l’exclusion du marché du travail. Dès que le mobbing est identifié, soit par la victime, soit par une personne extérieure, soit même par l’agresseur, il peut être interrompu en fonction des ressources, des qualités humaines, des réactions individuelles de chacun des protagonistes. Dans tous les cas, la résolution du conflit émergera d’un rétablissement de la communication. MOBBING 10 4.4.1 LES QUATRE PHASES DE LA « PSYCHOTERREUR » 1 Conflits, attaques, mesquineries, brimades 2 Passage au mobbing et à la « psychoterreur » 3 Déni des droits de la victime toléré ou décidé par la direction du personnel 4 Exclusion du marché du travail Congé maladie de longue durée Déplacer, transférer Mettre sur une voie de garage Licenciement avec indemnités Succession de transferts d’un poste à l’autre Décision autoritaire d’internement psychiatrique Mise en invalidité Agressions, violences Meurtres Suicides MOBBING 11 5. LES CONSEQUENCES 5.1 LES CONSEQUENCES POUR LA VICTIME Toute personne vivant une agression de type mobbing élabore un processus de stress. Les conséquences sont différentes selon le profil de la personne. On distinguera des conséquences au niveau physiologique, psychologique (cognitive, émotionnelle, et comportementale) et sociopathologique (irritabilité). 5.2 LES CONSEQUENCES POUR L’ENTREPRISE Peu d’études ont été réalisées sur le sujet pour nous donner suffisamment d’éléments. Comme le mobbing est différent d’un cas à l’autre, nous pensons que les coûts sont variables et très difficiles à chiffrer. Sans compter les éventuels réparations en dommages et intérêts et les frais pour les caisses maladie, les points suivants ont une influence importante sur les coûts : chute de rendement qualitatif et quantitatif qui entraîne une baisse de rentabilité absentéisme et/ou réduction du temps de travail remplacement de la victime ou une éventuelle restructuration Le constructeur Volvo a évalué le coût annuel lié au climat social à 30 millions de couronnes suédoises (≈ 5 millions de francs suisses). Volvo démontre dans un rapport que la principale cause d’absentéisme doit être cherchée dans l’atmosphère régnant sur le lieu de travail, en particulier dans les conflits latents ou déclarés. 6. LA SPECIFICITE DU MILIEU HOSPITALIER Si les mécanismes du mobbing sont bien définis par H. Leymann, il faut souligner que chaque milieu professionnel a ses spécificités dans ce domaine aussi. Certains aspects du milieu hospitalier actuel le rendent particulièrement sensible au mobbing: La hiérarchisation à outrance (pas toujours selon les compétences). Importance du nombre d'intervenants. Importance de la technologie. Relations personnel hospitalier - patients. Notions d'urgence et responsabilité. Concurrence externe et interne. MOBBING 12 Prédominance de la communication par rapport à l'activité. Période de crise (restructuration et planification). Mobilité et instabilité du personnel. Importance de la proportion de personnel étranger. Importance de la proportion de personnel peu qualifié. etc. Cette liste non exhaustive met en évidence la fragilité et la sensibilité du personnel hospitalier face au mobbing, ainsi que l'importance d'une réelle prévention (information du personnel) et d'une sensibilisation des cadres (formation). 7. LA PREVENTION Le meilleur moyen d’éviter le mobbing est l’application d’une culture d’entreprise ouverte. Il est important d’informer et d’éduquer les cadres et le personnel. En cas de dégradation du climat de travail avec des problèmes relationnels persistants, une intervention rapide est souhaitable. La capacité de communiquer et de résoudre les conflits est capitale. La mise sur pied d’un système d’arbitrage indépendant de la hiérarchie peut éviter des situations complexes en cas de conflits. Comme dans la plupart des cas, l’agresseur se trouve être un supérieur hiérarchique, la solution la plus répandue est le déplacement de la victime dans un autre service. A notre connaissance, il n’y a pas de mesures répressives à l’encontre de l’agresseur. Dans ces conditions, il n’y a pas de raison qu’il s’arrête. Il serait donc judicieux que des sanctions puissent être prises, par exemple par une diminution du traitement salarial ou d’autres mesures administratives. 8. LES ASPECTS LEGAUX En Suisse, des articles de lois spécifiques au mobbing n'existent pas spécifiquement, néanmoins le Code des Obligations (CO), La Loi sur le Travail (Ltr) et l’Ordonnance 3 (OLT3) y font référence, en particulier, les articles suivants: Art. 328 du CO : « L’employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur ; il manifeste les égards voulus pour la santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu’ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes ». « Il prend, pour protéger la vie, la santé et l’intégrité personnelle du travailleur, les mesures commandées par l’expérience, applicables en l’état de la technique, et adaptées aux conditions de l’exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l’exiger de lui ». MOBBING 13 Art. 6 de la Ltr : « Pour protéger la santé des travailleurs, l’employeur est tenu de prendre toutes les mesures dont l’expérience a démontré la nécessité, que l’état de la technique permet d’appliquer et qui sont adaptées aux conditions d’exploitation de l’entreprise ». « L’employeur doit notamment aménager ses installations et régler la marche du travail de manière à préserver autant que possible les travailleurs des dangers menaçant leur santé et du surmenage ». « L’employeur fait collaborer les travailleurs aux mesures d’hygiène. Ceux-ci sont tenu de seconder l’employeur dans l’application des prescriptions sur l’hygiène ». « Les mesures d’hygiènes qui doivent être prises dans les entreprises sont déterminées par voie d’ordonnance ». Art. 2 de l’OLT3 : « L’employeur est tenu de prendre toutes les mesures nécessaires afin d’assurer et d’améliorer la protection de la santé et de garantir la santé physique et psychique des travailleurs. Il doit en particulier faire en sorte que: a. en matière d’ergonomie et d’hygiène, les conditions de travail soient bonnes; b. la santé ne subisse pas d’atteintes dues à des influences physiques, chimiques ou biologiques; c. des efforts excessifs ou trop répétitifs soient évités; d. le travail soit organisé d’une façon appropriée. » « Les mesures d’hygiène que les autorités exigent de l’employeur doivent être proportionnelles au regard des répercussions qu’elles ont sur la conception du bâtiment et sur l’organisation de l’entreprise. » Les différents actes d’agressions utilisés dans le mobbing peuvent relever du code pénal, Gabrielle Webnust, licenciée en lettres et en droit décrit très bien ces actions dans son ouvrage « Mobbing, le harcèlement psychologique analysé sur le lieu de travail » édité aux Réalités sociales. On retrouve par exemple les articles : 117 : homicide par négligence 118 : incitation au suicide 122 : lésions corporelles engendrées par un état de frayeur psychologique 126 : voies de fait 144 : dommage à la propriété 173 : diffamation 174 : calomnie 176 : injure 179 : violation de secrets privés 1797 : abus de téléphone 180 : menaces 181 : contraintes 193 : abus de détresse Le code civil dans ses articles 28 et suivants précise que « celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité peut agir en justice pour sa protection contre toute personne qui y participe » Dans le cadre de l’entreprise, le droit suisse mentionne qu’une lésion corporelle peut également être le fait d’une abstention. Compte tenu du fait que l’employeur est tenu comme garant (art 101 et 55 du CO), son abstention dans son devoir de protection de la personnalité du travailleur (art 328 du CO) est punissable. Il s’agit d’un acte appelé « commission par omission » MOBBING 14 9. LE ROLE DU CADRE Le cadre doit être conscient qu’il peut être "agresseur", de part les pouvoirs qui lui sont conférés. Dans les cas relatés à Lausanne et Genève, l’agresseur est, dans la majorité des cas, un supérieur hiérarchique. Il est donc important de mettre en place un programme de prévention et d’information. Ce programme devra définir et expliquer la dérive d’un conflit unique en mobbing, relever les conséquences extrêmes pour les victimes et pour l’entreprise, et rendre attentif le cadre, aux conséquences administratives et/ou juridiques auxquels il doit s’attendre. Enfin la gestion de conflit doit être étudiée et pratiquée. Le cadre d’une petite équipe sera en revanche dans une position difficile lorsque le mobbing a lieu en son sein , car ses collaborateurs ne lui reconnaissent pas le rôle d’arbitre qu'il doit joué. L’importance de faire intervenir des médiateurs est donc primordiale. Le cadre ainsi informé et formé devra être capable de répondre rapidement à une situation conflictuelle et la régler dans les plus brefs délais de manière à ce qu’elle ne s’oriente pas vers un mobbing. Le rôle du cadre ne doit donc pas seulement se borner à une gestion bureaucratique, mais il doit être en mesure de favoriser le dialogue, faire confiance, encourager son personnel, bien communiquer et faire circuler les informations. 10. EN CONCLUSION Arrivés au terme de ce travail, nous sommes frappés par l'importance du mobbing dans nos divers milieux professionnels, et également étonnés par l'intérêt que nos recherches ont suscité dans nos entourages respectifs tant privés que professionnels. Nous ne doutons pas que ce travail pratique (TP) suscitera une réflexion chez nos collègues de formation, et que celle ci participera à prévenir autant que possible toute apparition de mobbing. Cette approche s'inscrit dans un courant de prise de conscience, de réflexion et d'action face à ce phénomène. Si chaque cas est particulier, tant par la personnalité des protagonistes que par le cadre où il s'exerce, nous avons souhaité démontrer la particularité du monde hospitalier où la psychoterreur peut avoir des effets particulièrement graves sur la qualité de vie des collaborateurs mais aussi des patients. MOBBING 15 11. BIBLIOGRAPHIE Heinz Leymann - MOBBING: La persécution au travail - Edition du Seuil 1996. Christelle Liebesens - Quand le travail devient source de persécution: tentative de définition du mobbing - Institut libre MARIE HAPS sous le patronage de l'université catholique de Louvain. - année académique 1996-1997. Etat de Vaud - Projet de loi de la fonction publique - Internet : www.vd.ch Syndicat suisse des services publiques - Divers articles et coupures de journaux Gilbert Kunzi et Dr Jean-Charles Rielle - Manager la santé dans l'entreprise - Editions Carrefour prévention Genève 1998 Etat de Genève - Lettre du Conseil d'Etat au personnel - juin 1997 Office du personnel de l'Etat de Genève - OP-INFO - No 27 - mars 1997 Conseil national - 97.1183 Question ordinaire Widmer: mobbing dans l'administration fédérale Service social de la Poste - Mobbing : psycho-terreur sur le lieu de travail La Poste - Cadres info : le mobbing: harcèlement et persécution sur le lieu de travail No 38 - août 1997 Télécom PTT - Mobbing : Vademecum à l'intention des cadres - décembre 1996 Revue PTT - Harcèlement sur le lieu de travail - 3/1996 Ville de Lausanne - Groupe de confiance - Lutte contre le mobbing et le harcèlement sexuel - L'expérience lausannoise - novembre 1997 RS 220 Loi fédérale complétant le Code civil suisse - Droits des obligations du 30 mars 1911 (Etat le 21 décembre 2004) RS 822.11 - Loi fédérale sur le travail dans l’industrie, l’artisanat et le commerce du 13 mars 1964 (Etat au 13 août 2002) RS 822.113 – Ordonnance 3 relative à la loi sur le travail du 18 août 1993 (Etat au 1er février 2000) Gabrielle Wennubst - MOBBING - Le harcèlement psychologique analysé sur le lieu de travail - Editions Réalités sociales - 1999