Les banques ponctionnent les entreprises
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14/09/2016 NEWSLETTERS Dépôts Les banques ponctionnent les entreprises ÉVÉNEMENTS L'ANNUAIRE DES EXPERTS LETTRES PROFESSIONNELLES S'ABONNER LE MAGAZINE LE GROUPE OPTION FINANCE VERONIQUE NASSOUR La référence des professionnels de la finance PREMIUM Se déconnecter MON COMPTE MENU ACTUALITÉS DOSSIERS ENTREPRISES & FINANCE DROIT & AFFAIRES ASSET MANAGEMENT BLOGS & ANALYSES COMMUNAUTÉS PATRIMOINE Accueil › Entreprises & finance › Gestion financière › Les banques ponctionnent les entreprises GESTION FINANCIÈRE DÉPÔTS Les banques ponctionnent les entreprises OPTION FINANCE - 5 SEPTEMBRE 2016 - ARNAUD LEFEBVRE Placements de trésorerie ENVOYER IMPRIMER Partager Tweeter PARTAGER Affectées par les taux négatifs lorsqu’elles n’emploient pas leur cash, les banques françaises commencent à pénaliser les dépôts à court terme de leurs clients entreprises. Dans ce contexte, l’existence d’une relation commerciale forte avec un établissement ne devrait pas suffire à enrayer le mouvement. Si Natixis cherchait à faire comprendre sans ambiguïté à ce groupe du CAC 40 qu’il était devenu indésirable chez elle, la banque de grande clientèle de BPCE ne s’y serait pas prise autrement ! «Il y a quelques semaines, nous avons reçu, à notre grand étonnement, un courrier de leur part stipulant qu’une commission allait bientôt être prélevée sur l’argent placé sur notre compte courant, témoigne le directeur de la trésorerie de cette société. Refusant de voir notre cash ponctionné de la sorte, nous avons immédiatement clôturé ce compte et mis fin à notre relation avec la banque.» ARTICLES LIÉS STRATÉGIE Quel avenir pour la gestion monétaire ? TRÉSORERIE Finance Active lance une plateforme de gestion d’actifs avec FA Solutions PLACEMENTS DE TRÉSORERIE La rémunération des dépôts bancaires baisse légèrement PLACEMENT DE TRÉSORERIE Si l’attitude de Natixis a de quoi surprendre, elle n’est toutefois pas isolée à l’échelle européenne. Depuis mai 2014, c’estàdire depuis que la Banque centrale européenne (BCE) a commencé à rémunérer en territoire négatif les réserves excédentaires déposées chez elle ( 0,40 % actuellement) par les banques pour inciter ces dernières à employer leurs ressources, plusieurs établissements ont en effet choisi de répercuter cette situation sur leurs clients corporate. «Depuis cet été, Raiffeisen est la deuxième banque allemande à appliquer des taux négatifs sur les comptes courants d’entreprises notamment ( 0,4 % sur les dépôts supérieurs à 100 000 euros), après Skatbank (audelà de 500 000 euros) en 2014, signale Laurent Quignon, économiste responsable du département économie bancaire chez BNP Paribas. En Belgique, outre BNP Paribas Fortis, également dans ce cas de figure, KBC vient de changer le statut des comptes d’épargne réglementés “professionnels” en comptes non réglementés pour ne plus avoir à verser d’intérêts.» En dehors de la zone euro, la Suisse a été le premier pays à adopter cette pratique, devenue par ailleurs courante dans les pays scandinaves. La rémunération des dépôts bancaires continue de baisser MAGAZINE OPTION FINANCE N°1380 - 12 SEPTEMBRE 2016 Selon les spécialistes, cette tendance est appelée à s’amplifier. «Les liquidités injectées par la BCE circulant en circuit fermé sur le marché interbancaire, elles se retrouvent pour l’essentiel détenues sous forme de réserves excédentaires auprès de la BCE et sont pénalisées à 40 points de base, ce qui affecte les marges bancaires, poursuit Laurent Quignon. En outre, la faiblesse inédite des rendements obligataires, amplifiée par le programme de rachat d’actifs (QE), tend à écraser les marges sur la production nouvelle.» Même si les établissements empruntent à court terme à des conditions très attractives pour ensuite prêter à plus long terme à un taux supérieur, le différentiel est aujourd’hui devenu limité. «Afin de limiter l’érosion de leur produit net bancaire, certains établissements n’ont d’autre solution que de répercuter partiellement ces taux négatifs à la clientèle», indique l’économiste. Une pratique déjà appliquée aux dépôts des institutions financières mais qui, ne suffisant plus, est de plus en plus étendue aux dépôts des grandes entreprises. «En revanche, l’application de cette même politique commerciale aux particuliers se heurte à certaines limites, ajoute Laurent Quignon. http://www.optionfinance.fr/entreprisesfinance/gestionfinanciere/lesbanquesponctionnentlesentreprises.html AU SOMMAIRE DE CE NUMÉRO Banques centrales Vers la fin des politiques accommodantes ? S'ABONNER 1/5 14/09/2016 Dépôts Les banques ponctionnent les entreprises D’abord, des taux négatifs conduiraient à d’importants retraits sous forme de monnaie fiduciaire, d’où la limite connue sous le nom de “zero lower bound”. Ensuite, les déposants particuliers disposent d’autres échappatoires aux taux négatifs, comme les livrets d’épargne à taux réglementé.» Deux phénomènes qui auraient des conséquences négatives pour les banques. Des approches au cas par cas Malgré tout, la prise de position de Natixis consistant à facturer «au cas par cas» les comptes courants de corporates a pris de nombreux intervenants de court, y compris dans le monde bancaire. Certes, jusqu’alors, la quasitotalité des banques françaises n’a pas hésité à appliquer des rémunérations négatives sur plusieurs supports de placement au cours des derniers mois. Mais elles n’étaient jamais allées aussi loin en s’attaquant aux dépôts à vue. «Disposant de liquidités abondantes dans leur bilan, elles ne proposent plus de rémunération sur les dépôts à terme (DAT) dont la durée va de 0 à 18 mois pour les grandes entreprises», précise David Guyot, cofondateur du cabinet Pandat. Rares sont aujourd’hui les établissements qui, comme la Société Générale, rémunèrent encore cette catégorie de dépôts. «Pour un DAT d’une journée à dixhuit mois, nous offrons encore un rendement nul ou positif, notre objectif étant de ne pas basculer en territoire négatif pour nos clients entreprises», souligne par exemple Mireille Cuny, responsable mondiale des solutions de liquidité et d’investissement pour les entreprises chez Société Générale CIB. Toutes banques françaises confondues, cette rémunération s’élève en moyenne à 0,10 % jusqu’à un an, puis repasse le plus souvent en positif audelà. Le précédent Natixis devrait cependant faire bouger les lignes. «Cette décision a contribué à faire sauter des barrières, reconnaît Pierre Le Veziel, responsable mondial de la trésorerie de Crédit Agricole CIB. Même si la politique de rémunération des dépôts d’une banque est fondée sur l’équilibre de son propre bilan, et non pas uniquement sur les pratiques de la concurrence, le fait qu’un établissement opte pour une stratégie plus offensive amène forcément à se poser à nouveau des questions. Il n’est pas exclu que certaines banques chargent à l’avenir des coûts additionnels de fonctionnement sur les comptes des clients corporate.» Une position partagée par les autres établissements bancaires. Le side business au cœur des négociations L’idée n’est pas pour autant de vouloir supprimer la manne que représentent pour elles les dépôts d’entreprises. «Depuis la crise de liquidité de 2011 qui a frappé les banques européennes, nous avons décidé de réduire sensiblement la part des asset managers dans notre financement de court terme, leur comportement étant très volatil durant des périodes de tension, explique Mireille Cuny. Cette réallocation des sources de funding s’est faite au profit des dépôts de particuliers mais aussi d’entreprises, qui présentent l’avantage d’être beaucoup plus stables et d’apporter une diversification de nos sources de funding court terme.» Une stabilité à laquelle sont sensibles les régulateurs bancaires. «D’un point de vue prudentiel, les dépôts d’entreprises sont importants car les sommes qu’elles déposent sur un compte courant sont par exemple prises en compte à hauteur de 75 % ou 60 % selon les cas dans le calcul des ratios de liquidité mis en place sous Bâle 3 (LCR et NSFR), illustre Pierre Le Veziel. Pour les dépôts à terme d’une durée supérieure à un mois, ce seuil passe à 100 %. Par conséquent, le fait d’offrir à une société non financière un rendement positif a un coût que les banques peuvent être prêtes à payer pour conserver ce type de dépôts.» Un tel «sacrifice» n’est toutefois pas consenti à tous les clients. D’abord, l’ancienneté et, surtout, la nature de la relation avec l’entreprise va constituer un premier critère discriminant. «Aujourd’hui, le fait d’offrir un rendement positif, voire nul, sert souvent pour la banque de monnaie d’échange, son but étant de “fidéliser” son client afin qu’il lui confie des mandats pour des missions lui apportant des commissions», note David Guyot. Une logique confirmée par les banquiers. «Sauf en cas de nouvelle baisse de taux de la part de la BCE, nous ne facturerons http://www.optionfinance.fr/entreprisesfinance/gestionfinanciere/lesbanquesponctionnentlesentreprises.html 2/5 14/09/2016 Dépôts Les banques ponctionnent les entreprises pas si la relation commerciale est équilibrée», assure Mireille Cuny Des tailles de ticket restreintes Mais le respect de cette condition ne suffira pas à elle seule aux entreprises pour bénéficier d’un taux nul ou positif. En effet, même les sociétés consommatrices de services bancaires sont concernées par la mise en œuvre de mesures restrictives. D’abord, tous les dépôts au jour le jour sont, sauf exception, dorénavant refusés. «Nous cherchons à les éviter car ils sont inemployables par la banque, qui n’a d’autre choix que de les déposer à la BCE au taux de 0,40 %», justifie Mireille Cuny. De nombreux groupes se sont ainsi vu récemment forcer la main pour allonger la durée de leurs placements sur au moins trois mois, faute de quoi ils seraient facturés. En outre, les montants déposés par les trésoriers sont dorénavant strictement encadrés. «Quel que soit le client, les banques réduisent aujourd’hui la taille des dépôts qu’elles sont prêtes à accepter», observe David Guyot. Dans ce contexte, leur vigilance a été renforcée. «Nous veillons à ce que l’encours des comptes de nos clients ne se charge pas de manière anormale», informe Pierre Le Veziel. Les banques prévoient ainsi de chasser la recherche d’effets d’aubaine de la part des entreprises, en s’assurant qu’elles ne rapatrient pas des dépôts placés chez la concurrence à taux négatifs chez elles, où ces dépôts seraient rémunérés à zéro ou positivement. Afin de prévenir de tels comportements, l’instauration de montants plafonds audelà desquels la rémunération versée deviendrait négative fait partie des principales réflexions menées. De quoi susciter des revendications au sein des directions financières. «Les taux négatifs s’étant généralisés dans l’économie, il n’est pas illogique, dans l’absolu, que les banques répercutent cette “anomalie” sur leurs clients, considère le responsable en charge de la trésorerie d’un grand groupe. En revanche, dans pareil cas, la politique de la banque doit être cohérente : dans le cadre d’un emprunt, elle doit également faire profiter son client des taux négatifs. Or ce n’est actuellement clairement pas le cas !» Alors que les taux Euribor, qui sont intégrés dans le coût global d’un crédit, s’établissent à 0,30 %, les banques instaurent dans la grande majorité des documentations un plancher à 0 % sur ce taux («floor»). «D’abord, il n’est pas sûr d’un point de vue juridique qu’on puisse prêter à taux négatif, témoigne un banquier. Mais même si c’était le cas, nous ne serions pas disposés à payer pour prêter.» Dans les prochaines semaines, les négociations entre les banques et leurs clients promettent d’être particulièrement vives sur ce sujet. TROUVER DU RENDEMENT SANS RISQUE, C’EST POSSIBLE, À CONDITION D’ÊTRE PATIENT • Alors que la grande majorité des banques proposent, sur un horizon allant parfois jusqu’à dixhuit mois, des rendements négatifs, le meilleur moyen de bénéficier d’une rémunération positive consiste à allonger substantiellement la durée de ses placements. «En déposant aujourd’hui de l’argent sur un compte à terme pour une durée de cinq ans, une grande entreprise peut encore espérer percevoir 0,2 % à 0,5 % d’intérêts, constate David Guyot, cofondateur de Pandat. Pour une PMEETI, ce taux peut même être supérieur, en particulier en région, où les banques mutualistes restent en recherche de dépôts pour financer l’économie locale.» • Pour les groupes prêts à bloquer leur cash plus longtemps, les produits à cliquet proposés constituent également une solution intéressante. «Un de nos clients vient par exemple d’effectuer un dépôt auprès d’une banque pour une durée pouvant aller jusqu’à dix ans, http://www.optionfinance.fr/entreprisesfinance/gestionfinanciere/lesbanquesponctionnentlesentreprises.html 3/5 14/09/2016 Dépôts Les banques ponctionnent les entreprises explique David Laugier, président de Redbridge DTA. Alors qu’il perçoit dans un premier temps 0,25 %, ce taux sera majoré tous les semestres, jusqu’à atteindre à l’échéance du contrat 3,75 %.» Si les modalités varient selon l’entreprise et les banques, ces dernières mettent pour la plupart à disposition ce type de solutions pour leurs clients historiques ou stratégiques. TAUX NÉGATIFS : UN IMPACT À RELATIVISER POUR LES BANQUES ? • Les banques justifient l’application de taux négatifs auprès de leurs clients par la politique de la Banque centrale européenne, qui a notamment fixé le niveau de la facilité de dépôt à 0,40 %. Ce taux, qui correspond à la rémunération des liquidités excédentaires des établissements déposées à la BCE, vise à inciter les établissements à prêter leur cash plutôt qu’à le placer, afin d’accélérer la distribution de crédits dans la zone euro. • Même si les banques n’employant pas leurs ressources perdent actuellement 40 points de base, certains spécialistes jugent l’impact limité au regard des sommes concernées. «A ce jour, les liquidités excédentaires placées à la BCE s’élèvent à 360 milliards d’euros, rappelle Muriel Nahmias, senior director chez Redbridge DTA. En tenant compte du taux de 0,40 %, ces dépôts coûtent donc aux banques européennes 1,4 milliard d’euros. Or les profits qu’elles ont réalisés se sont élevés à quelque 100 milliards d’euros en 2015 !» Soit environ 70 fois plus… QUESTIONS À CYRIL MERKEL, PRÉSIDENT DE LA COMMISSION PLACEMENTS AU SEIN DE L’ASSOCIATION FRANÇAISE DES TRÉSORIERS D’ENTREPRISE (AFTE) Quelle est aujourd’hui la position des grandes banques françaises face aux dépôts de leurs clients entreprises non financières ? Depuis plusieurs mois déjà, les établissements offrent des rendements négatifs sur quasiment tous les produits de placement, en particulier sur les comptes à terme, et ce pour toutes les maturités jusqu’à un an. Audelà de cette durée, il est encore possible de percevoir des intérêts, mais de l’ordre de quelques points de base seulement. La nouveauté concerne les comptes courants. La banque Natixis a en effet récemment ouvert le débat de leur facturation, en annonçant à certains de ses clients corporate qu’elle comptait appliquer des commissions sur les dépôts placés sur ce type de support. A notre connaissance, aucun autre groupe bancaire n’a, à ce jour, adopté la même approche. Face à cet environnement de taux, la stratégie de placement des corporates évolue telle ? Rien n’a changé au cours des mois précédents, la préservation du capital restant la priorité absolue. La liquidité demeure également un objectif important. La notion de «cash and cash équivalent» (horizon de placement à 3 mois maximum) ne semble pas à ce jour être remise en cause par les corporates, même si cela se fait au détriment de la rémunération. En plaçant leur cash sur des supports éligibles à cette notion, les sociétés peuvent retrancher ces montants de leur endettement brut. Ce faisant, leur dette nette se trouve réduite et, par ricochet, leurs ratios d’endettement améliorés. Malgré des rémunérations proposées négatives, et cela risque de durer encore longtemps, il ne faut pas perdre de vue la notion du risque de contrepartie : pour quelques points de base supplémentaires, ne pas faire n’importe quoi… Dans ce contexte, quelles sont les marges de manœuvre des trésoriers pour capter du rendement ? Outre les dépôts à terme de moyen et long terme, les OPCVM monétaires commercialisés par les principaux gérants d’actifs de la place continuent encore de dégager des rendements légèrement positifs. Dans une démarche de diversification, certains groupes peuvent s’intéresser aussi aux fonds obligataires court terme. Présentant un horizon de placement plus long, ils offrent en théorie des rémunérations légèrement supérieures mais avec une volatilité accrue. Une autre solution consiste, pour les corporates disposant d’un programme d’émission de commercial papers aux EtatsUnis (USCP), à émettre en dollars, et ensuite les swapper pour échanger pendant une période définie les dollars contre des euros. Durant cette période, ils deviennent ainsi emprunteurs en euros (ils versent des intérêts en euros) et prêteurs en dollars (ils reçoivent des intérêts en dollars). Comme les taux d’intérêt en dollars sont plus élevés que les taux en euros, ils bénéficient d’un gain de portage, http://www.optionfinance.fr/entreprisesfinance/gestionfinanciere/lesbanquesponctionnentlesentreprises.html 4/5 14/09/2016 Dépôts Les banques ponctionnent les entreprises d’environ 150 points de base pour une maturité de trois mois. Même s’ils replacent ensuite leurs euros à des taux négatifs, le gain reste malgré tout considérable. Enfin, une autre approche peut consister à repenser la gestion du besoin en fonds de roulement (BFR). Le cash «brûlant» les mains, pourquoi ne pas payer les fournisseurs plus rapidement, et ce moyennant un escompte. Ceci participerait à l’objectif de la Banque centrale européenne de recycler le cash dans l’économie réelle. ENVOYER IMPRIMER Partager Tweeter PARTAGER À LIRE AUSSI DÉLAIS DE PAIEMENTS Le cadre législatif se durcit pour les retards DOSSIER Brexit : ce qui pourrait changer DROIT BOURSIER Foncière de Paris : l’offre moinsdisante peutelle l’emporter ? 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