Fernand Nouvion - Mémoire orale de l`industrie et des réseaux

Transcription

Fernand Nouvion - Mémoire orale de l`industrie et des réseaux
Entretien avec Fernand Nouvion
Fernand Nouvion (1905-1999)
M. Fernand Nouvion est né le 02/11/1905 à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine) [et décédé en 1999].
ENREGISTREMENT RÉALISÉ À L’Union Internationale des Chemins de fer (UIC) à Paris, LE
25/10/1990 PAR MONSIEUR ALAIN BELTRAN ET MONSIEUR JEAN-FRANCOIS PICARD.
FONCTION A LA SNCF
Chef de la division des Études de
traction électrique et de traction à
moteurs thermiques (1966-1970)
DATE D’ENTRÉE ET
DE DÉPART DE LA SNCF
1933-1970
AXE DE L’ÉTUDE
Les origines des grandes vitesses
ferroviaires en France
SUJET PRINCIPAL
Entretien avec Fernand Nouvion,
chef de la division des Études de
traction électrique et de traction à
moteurs thermiques (1966-1970)
THÈMES ABORDÉS
Les essais de vitesse ferroviaire de
1954 et de 1955
Développement de l’électrification
en courant à fréquence industrielle
(25 000 V 50 Hz)
Début de la carrière du témoin
Relations avec les constructeurs
ferroviaires
Opinions du témoin sur les choix
techniques français et européens en
matière de traction électrique
OUTIL DE CONSULTATION
2 CD audio
MATÉRIEL D’ENREGISTREMENT
1 cassette audio
DURÉE DE L’ENREGISTREMENT
01 heure 22 minutes 04 secondes
DURÉE APRÈS TRAITEMENT DU SON
01 heure 11 minutes 58 secondes
Carrière :
Ingénieur de l’École supérieure d’électricité (1927) – chef de section (1933-1935) – inspecteur
divisionnaire, chef d’arrondissement (1940-1944) – conçoit et réalise la campagne d’essais de 1954 et
1955 qui aboutit au record mondial de vitesse ferroviaire de mars 1955 – adjoint au chef de la division
des Études de traction électrique et de traction thermique (DETE), Marcel Garreau, à partir de 1958 –
chef de la division des Études de traction électrique (DETE) et de la division des Études de traction à
moteurs thermiques (DETMT) (1966-1970) – maître de conférences à l’École supérieure d’électricité
(1957-1970) – professeur à l’École spéciale des travaux publics (1950-1970) – membre de la Société
Fiche chronothématique réalisée par Emilie Pouget (janvier 2010)
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Entretien avec Fernand Nouvion
française des électriciens, de la Société des ingénieurs civils de France, Fellow Member de l’American
Institute of Electrical and Electronics Engineers (1968) – directeur technique de la société Traction
Export (1971-1985).
Extrait de Who’s who in France, édition 1997-1998, et de « Les très grandes vitesses ferroviaires en
France », Revue d’histoire des chemins de fer, n° 12-13, (printemps-automne 1995), page 250.
Décoration :
Commandeur de la Légion d’honneur
Communication :
Accord du témoin à la diffusion recueilli au moment de l’entretien
Compte rendu analytique
I – Les essais de vitesse ferroviaire de 1954 et de 1955
(Plage 01) Essais à grande vitesse avec la locomotive CC 7121 le 21 février 1954 (record mondial de
vitesse entre Dijon et Beaune : 243 km/h) – préparation des essais des Landes de mars 1955 :
changement des rapports d’engrenage, roues avec bandages remplacées par des roues monoblocs –
les essais du 28 mars 1955 avec la locomotive CC 7107 mettent en évidence des difficultés pour
capter le courant (pantographe de la CC détruit à 243 km/h) – choix des locomotives BB 9004 (MTESchneider) et CC 7107 (Alsthom) pour les essais – problème de transmission sur la CC révélé par les
essais – but des essais : déterminer le rendement maximum du matériel (07mn:58s).
(Plage 02) Essais du 29 mars 1955 avec la locomotive BB 9004 – commande manuelle sur la BB – le
témoin a reconduit la même équipe de conduite que celle des essais de la veille – nécessité de
maîtriser la commande manuelle en cas de panne électrique – démarrage plus lent du fait de
maladresses dans l’utilisation de la commande à main (conséquence : pantographe hors d’usage à
300 km/h) – déformation de la voie suite à l’essai de la BB 9004 – le témoin évoque un précédent
essai à 270 km/h et un de ses enseignements majeurs : la nécessité d’amortisseurs très raides pour
éviter le balancement du bogie – brève évocation de la transmission Jacquemin [André Jacquemin,
1902-1994, ingénieur à la division des Études de traction électrique de la SNCF de 1938 à 1964] –
enseignements des essais de 1955 : privilégier des roues monoblocs, changer le profil des bandages,
mettre des amortisseurs anti-lacets, changer le système d’électrification en passant au monophasé
haute tension (07mn:01s).
II – Développement de l’électrification ferroviaire en courant à fréquence industrielle
(25 000 V 50 Hz)
(Plage 03) Louis Armand [directeur général de la SNCF, 1949-1955], promoteur du courant
monophasé 50 Hz dans l’électrification des chemins de fer – scepticisme de nombreux pays devant le
passage au monophasé 50 Hz – inspirés par le congrès de Lille de 1955 où est montrée l’utilité de
l’électrification en courant à fréquence industrielle pour la grande vitesse, les Japonais mettent en
service la ligne du Tokaïdo en 1964 – en 1967, Edgard Pisani [ministre des Transports 1966-1967]
demande à la SNCF de relever les vitesses commerciales à 200 km/h après en avoir été convaincu
par Pierre Sudreau [député de 1967 à 1981, président de la Fédération des industries ferroviaires de
1963 à 2000], lui-même décidé par Fernand Nouvion – essais de Fernand Nouvion sur la ligne ParisToulouse, choix des sections de voie sur lesquelles la vitesse devait être relevée – les voitures à
grand confort essayées sur Paris-Toulouse ne sont pas compatibles avec la grande vitesse dans les
courbes (08mn:34s).
(Plage 04) La vitesse nécessite une voie droite, le captage du courant haute tension et des éléments
mécaniques – le témoin date l’association de la grande vitesse à la haute tension à partir du congrès
d’Annecy (congrès international d’électrotechnique à Annecy organisé à l’automne 1951 par Louis
Armand, directeur général de la SNCF 1949-1955) – augmentation de la distance de freinage avec la
grande vitesse – pour le témoin, ce n’est pas l’électricité qui permet la grande vitesse mais la
Fiche chronothématique réalisée par Emilie Pouget (janvier 2010)
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Entretien avec Fernand Nouvion
puissance – moteurs asynchrones utilisés sur le TGV Nord : mauvais choix selon Fernand Nouvion
(04mn:01s).
(Plage 05) Le témoin a rédigé un rapport en 1955 sur l’électrification de l’Inde (préconise l’utilisation
du 50 Hz) – adoption du monophasé en Inde, hommage à Fernand Nouvion en donnant son nom à
une locomotive indienne – électrification en 50 Hz en URSS – électrification en 50 Hz inexistante aux
États-Unis : faiblesse du trafic ferroviaire et trains lourds (03mn:36s).
III – Début de la carrière du témoin
(Plage 06) Fernand Nouvion est diplômé en 1927 de l’École supérieure d’électricité – souhaite alors
entrer au seul réseau électrifié de l’époque, le sud-ouest (Compagnie du Paris-Orléans, PO.), mais
entre finalement au réseau de l’ouest (Chemins de fer de l’État) sous la direction de Raoul Dautry
[directeur général des Chemins de fer de l’État, 1928-1937] – électrification de la ligne Paris-Le Mans
en 1937 – construction d’automotrices de ramassage pour circuler sur la ligne électrifiée Paris-Le
Mans (03mn:26s).
IV – Relations avec les constructeurs ferroviaires
(Plage 07) Le développement de l’industrie ferroviaire française pour l’exportation n’était pas une
priorité de la SNCF dans les années 1950 – construction par Alsthom des séries de locomotives CC
7000 et CC 7100 d’après les prescriptions de la division des Études de traction électrique et de
traction thermique (DETE) – le témoin évoque la réticence de Jean Dupuy [direction du Matériel,
1962-1974] à équiper les locomotives BB 9300 et BB 15000 d’un bogie monomoteur – question de la
présence d’ingénieurs concepteurs chez les constructeurs allemands et suisses posée par les
enquêteurs – en Suisse, l’invention des transmissions des locomotives électriques est à mettre au
crédit du constructeur BBC [Brown Boveri & Cie] – les ingénieurs jeunes diplômés préféraient la SNCF
à Alsthom (04mn:18s).
V – Opinions du témoin sur les choix techniques français et européens en matière de
traction électrique
(Plage 08) Le témoin relate une anecdote issue d’un débat autour du courant alternatif monophasé à
basse fréquence (16 2/3 Hz) [adopté en Allemagne et en Suisse] et à fréquence standard (50 Hz) qui
s’est tenu lors d’une conférence à Londres dans laquelle il intervenait – caractéristiques des moteurs à
courant continu – le réseau à 16 2/3 Hz nécessite une alimentation spéciale – choix d’Hippolyte
Parodi [1874-1968, ingénieur-conseil de la Compagnie du Paris-Orléans, directeur honoraire des
services de l'électrification] du courant continu 1 500 volts pour électrifier la ligne Paris-Orléans –
introduction des redresseurs en Europe par Fernand Nouvion (technologie d’origine américaine)
(05mn:40s).
(Plage 09) Inertie de la SNCF face aux possibilités de grande vitesse ferroviaire jusqu’en 1967 – à
partir de la fin des années 1960, l’idée de la traction autonome pour la grande vitesse se développe –
pour Fernand Nouvion, les vitesses permises doivent dépendre du matériel utilisé (exemple cité :
différence entre un autorail et une locomotive à vapeur de type Mountain) – Fernand Nouvion est
contre l’automatisation du système de conduite des trains (06mn:05s).
(Plage 10) Évocation d’André Chapelon [1892-1978, ingénieur mécanicien, concepteur de
locomotives à vapeur, embauché en 1925 au PO] – idée de la traction électrique sur les grandes
distances introduite par Hippolyte Parodi [1874-1968, ingénieur-conseil de la Compagnie du ParisOrléans, directeur honoraire des services de l'électrification] – électrification en 16 2/3 Hz en
Allemagne, alors que pour le témoin l’évolution des moteurs devrait imposer le passage au 50 Hz –
prévision d’une ligne à basse tension entre Douvres et Londres, choix de moteurs asynchrones remis
en question par Fernand Nouvion (05mn:12s).
(Plage 11) Hésitation entre la rame à adhérence totale et la rame remorquée pour le TGV soulignée
par Jean-François Picard – évocation de l’idée d’un moteur suspendu sous la caisse avec la
transmission à cardan – selon le témoin, ce n’est pas le Tokaïdo qui a influencé la France dans le
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Entretien avec Fernand Nouvion
passage à la grande vitesse mais l’intervention d’Edgard Pisani [ministre des Transports 1966-1967]
en 1967 (03mn:57s).
(Plage 12) Fernand Nouvion n’était pas convaincu par le projet d’Aérotrain de Jean Bertin [1917-1975,
ingénieur aéronautique] mais pense que cette invention aurait pu être avantageuse pour le
déplacement latéral de wagons dans les gares de triage – organisation du travail dans les ateliers de
triage – problème de l’infrastructure demandée par l’Aérotrain – brève évocation du record mondial de
vitesse du 18 mai 1990 (515 km/h) – en Allemagne, poursuite d’un développement parallèle de l’ICE
et d’essais de trains à sustentation magnétique (06mn:23s).
(Plage 13) Alain Beltran évoque une photographie de Fernand Nouvion en compagnie de Nikita
Khrouchtchev [1894-1971, président du conseil des ministres de l’Union des républiques socialistes
soviétiques à partir de 1958] – séries de locomotives CC exportées notamment en Chine, en URSS,
en Espagne, aux Pays-Bas – incompatibilité de la voie américaine avec les locomotives CC
(05mn:46s).
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