Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel

19.07.2015
Que ta volonté soit faite…
Mt 6,10b
« Fais se réaliser ta volonté sur la terre à l’image du ciel ».
Voilà la version des traducteurs de la TOB de la partie du Notre Père qui nous
intéresse aujourd’hui : « Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel ».
Ce n’est pas sans difficulté que nous allons nous pencher sur la question. Les
commentateurs sont nettement moins loquaces sur cette requête que sur
toutes les autres. Ils passent comme chat sur braise. Ce n’est pas la traduction
qui pose problème.
Que ta volonté … : le mot ‘volonté’ a la même siginfication en grec qu’en
français. Je me suis toutefois posé la question quel mot araméen aurait pu
être à l’origine du mot grec. Et là, on pourrait être surpris de découvrir que
dans la pensée hébraïque, l’auteur de la volonté est avant tout le chef de
clan, voire Dieu. Cette volonté est un désir, voire un caprice…
Je me tiendrai donc à la conception grecque.
Que ta volonté vienne. Venir est un verbe très courant en grec qui veut dire :
naître, devenir. Ce serait joli de traduire « que ta volonté naisse ». Cela
pourrait indiquer une autre dynamique, un processus.
L’impératif utilisé ici (il y en a plusieurs en grec) pourrait être précisé de
manière suivante : que la volonté vienne dans un moment donné, de
manière ponctuelle. La volonté ne se réalise donc pas une fois pour toutes.
Comme : Deux possibilités s’offrent à nous, je n’ai pu trancher :
Que la volonté se fasse sur terre de même qu’au ciel, ou bien
Que la volonté se fasse sur terre à l’instar de celle du ciel.
Je ne me suis pas promis de trancher si la volonté de Dieu dans le ciel est
déjà accomplie ou en devenir. Je me limite à notre situation terrestre il y a
déjà pas mal à dire…
Justement : Est-ce que cette prière est bien fondée ? Comment s’articulent la
volonté de Dieu et la liberté humaine ? Et finalement le gros morceau : Quelle
est cette volonté au juste ?
Le théologien Gerhard Ebeling s’est posé la question du bien fondé de cette
requête (ne soyez pas choqués du langage. Ceux qui ont dû subir les
exercices de logique formelle comprennnent très vite) : « En dehors des lieux
où on parle de Dieu, la demande ‘que ta volonté soit faite dans le monde’
ressemble à une sottise pleine de contradictions. Car soit la volonté de Dieu
ne se réalise pas, alors il n’est pas Dieu et la prière n’a plus de sens. Soit les
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événements du monde expriment la volonté de Dieu et alors la prière n’est
pas nécessaire, sans compter qu’alors Dieu ne serait pas Dieu non plus. Car
comment donc quelqu’un qui veut les événements du monde tels qu’ils sont,
sans exception et sans nuances, serait-il Dieu ? ».
Au-delà de la boutade, la question reste si Dieu est vraiment Dieu, sa volonté
sera faite indépendamment de notre prière. Et il se pose immédiatement une
autre question bien plus fondamentale : la volonté de Dieu se réalise-t-elle
sans et même malgré ma volonté ? Quel est le rapport entre la volonté de
Dieu et la liberté humaine ? Où faut-il placer le curseur ? Je ne vais pas entrer
dans ce débat maintenant. On y reviendra.
Essayons déjà de voir la nature de la volonté de Dieu.
J’ai appris à me méfier de ceux qui prétendent connaître la volonté de Dieu
de trop près. Pour moi la connaissance de la volonté de Dieu (surtout la
volonté de Dieu pour les autres !) ne peut relever de la certitude. Elle restera
toujours provisoire et énigmatique pour les humains. J’aime bien la
conception de Dieu chez Luther : le Dieu caché.
Même si nous pouvons l’appeler Père, une part de son action nous
échappera toujours.
Les personnes de prière qui prononcent cette requête se voient dépassées
par la dynamique sollicitée. Elles ne sont pas pour autant des apprentis
sorciers. La volonté de Dieu peut être cernée.
Les textes bibliques nous donnent des indices :
Ø La volonté normative de Dieu : les10 commandements.
Ø La volonté créatrice : (cf. le poème de création, Ge 1-2,3)
§ Elle est exprimée par des impératifs tels que « que la
lumière soit ».
Ø La volonté destructrice :
§ abandonnée définitivement après le déluge.
Ø La volonté de salut :
§ Dieu notre Sauveur veut que tous les hommes soient sauvés
§ et parviennent à la connaissance de la vérité. (1 Tim. 2.4)
Ø La volonté de communion :
Le théologien Dietrich Karsch soulève cet dimensions en réinterpretant la prière de Jésus à Gethsémané « Mon Père, si cette
coupe ne peut passer sans que je la boive, que ta volonté
se réalise ». Mt 26,42 : Dieu veut nous associer à la réalisation
de sa volonté.
Jésus aurait eu la liberté de ne pas boire la coupe, et cette
phrase se trouve dans les 3 Evangiles.
Liberté de participer (requête qui ne se trouve que chez Matthieu).
Dire que la volonté de Dieu est une volonté de communion résout
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en partie la question de la volonté de Dieu et de liberté des hommes.
Reste la question du discernement de la volonté : Qu’est-ce que Dieu veut
très exactement pour moi ?
Le livre du Deututeronome nous dit au ch. 30 « J’ai mis devant toi la vie, la
mort, le bonheur le malheur, choisis ! ».
En préparant ce culte, j’ai parcouru la liste des impératifs dans la Bible, les
vocabulaires traduits par ‘volonté’.
C’est peut-être le plus saillant.
Le Vivant nous appelle à vivre pour Lui / avec Lui / devant Lui
Orientation qui permet de choisir notre action. Est-ce que ceci ou cela me
fait vivre ?
Témoignage : je ne pouvais plus prier, intercéder.
Phrase : intercéder cela ne changer pas le je, mais celui qui prie.
La volonté de ??? c’est peut-être cela : je prie ‘que ta volonté soit faite’ et
cela me transforme, transforme une vie, réoriente ma vie.
Le discernement n’est pas la quête de la volonté de Dieu en général mais
une réorientation de ma vie chaque fois que je prie.
Je reviens à l’impératif ??? qu’est utilisé.
Qu’advienne, que naisse ta volonté, je ne sais pas tout mais dans ma
situation concrète d’aujourd’hui. Cette requête serait comme un GPS qui a
un moment donné recalcule l’itinéraire : « Que ta volonté soit faite ».
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