monographie des elections au togo

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monographie des elections au togo
MONOGRAPHIE DES ELECTIONS
AU TOGO
Etude réalisée par
GBLODZRO Kossivi, Sociologue
Juillet 2012
1
Sommaire
INTRODUCTION................................................................................................................................... 4
1.
Présentation du Togo ................................................................................................................. 5
2.
Historique des élections ............................................................................................................... 6
3.
Cadre juridique ............................................................................................................................ 8
3.1 La constitution de la République ............................................................................................... 8
3.2 Le code électoral ....................................................................................................................... 9
3.3 Les normes juridiques internationales ........................................................................................ 9
4.
Le système électoral/ le mode de scrutin....................................................................................... 9
6. Organisation de l’administration électorale ................................................................................... 10
6.1. Structure et composition de la Commission électorale nationale indépendante (CENI)......... 11
6.2 Organisation et mode de fonctionnement de la CENI................................................................ 11
7. Partis politiques et candidats .......................................................................................................... 12
8. Rôle des principaux intervenants (nationaux et internationaux) ...................................................... 13
9. Organisations de la société civile ................................................................................................... 15
10. Budget et financement des élections ............................................................................................. 15
11. Financement des partis politiques ................................................................................................. 16
12. Périodicité du calendrier électoral et dernières dates en référence ................................................ 16
13. Etat d’avancement du processus électoral ..................................................................................... 16
14. Caractéristiques des matériels et documents électoraux: urnes, isoloir, bulletins de vote, encre
indélébile, procès-verbaux, imprimés électoraux, kits électoraux ........................................................ 17
15. Opérations électorales : carte électorale, situation et établissement de la liste électorale, mode de
publication de la liste électorale, gestion du contentieux de la liste électorale, gestion des résultats,
gestion du contentieux des résultats, éducation civique de l’électorat, genre et élections ..................... 17
16. Analyse des défis et perspectives ................................................................................................. 18
16.1. Les défis ............................................................................................................................... 18
2
16.2. Les facteurs de risque et de conflits ....................................................................................... 19
16.3.
Les perspectives : mesures et actions à entreprendre pour réduire les risques et conflits liés
aux élections .................................................................................................................................. 20
16.4.
Les institutions/organisations nationales susceptibles de jouer un rôle de prévention des
conflits ? 20
CONCLUSION ..................................................................................................................................... 20
Annexes ................................................................................................................................................ 21
3
INTRODUCTION
Depuis 1990, le Togo s’est engagé dans un processus de démocratisation jonché de crises de tout
genre. Les différentes tentatives de résolution des crises par les dialogues politiques, depuis
Colmar jusqu’à Lomé en passant par Ouagadougou, se sont soldées par des échecs dus soit à des
divergences de point de vue entre les partis politiques et à un souci de préservation des intérêts
partisans, soit au manque de mise en œuvre des accords issus des négociations antérieures. Le
climat politique s’est de jour en jour dégradé. Les rapports entre le pouvoir et l’opposition sont
des plus heurtés.
Le 14 avril 2004, le Gouvernement togolais a pris avec l’Union Européenne (UE), dans le cadre
de l’Accord de Cotonou, "22 engagements pour le renforcement du climat démocratique et l’Etat
de droit dans le pays". Le niveau de réalisation de ces engagements jugé satisfaisant par la
communauté internationale a favorisé la reprise de la coopération avec l’Union Européenne et les
bailleurs de fonds internationaux suspendue depuis 1993 pour déficit démocratique, et ouvert des
perspectives d'assistance nouvelles.
Les évènements dramatiques de 2005 qui ont suivie la présidentielle organisée pour assurer la
succession du feu Président GNASSINGBE EYADEMA ajoutés aux frustrations antérieures ont
une fois encore amené la classe politique et la société civile à entamer des discussions sous
l’égide de Son Excellence BLAISE COMPAORE, Président du Faso. Après de laborieuses
séances de travail à Lomé et à Ouagadougou en République du Burkina Faso, un accord dit
historique a été signé le 20 Août 2006 entre le gouvernement, les principales forces politiques et
la société civile : l’Accord Politique Global (APG). Le peuple togolais et la communauté
internationale ont unanimement salué cet accord car il a fait des recommandations pour régler
les multiples convulsions politiques que connait le processus démocratique au Togo. Certaines
de ces recommandations selon les termes de l’APG devraient être mises en œuvre à court terme
tandis que les autres progressivement. Au rang de ces dernières on peut citer :
• le régime politique ;
• la nomination et les prérogatives du Premier Ministre ;
• les conditions d’éligibilité du Président de la république ;
• la durée et la limitation du mandat présidentiel ;
• l’institution d’un sénat.
Outre ces recommandations, les différentes missions d’observation tant nationales
qu’internationales accréditées pour suivre les processus électoraux, ont aussi formulé des
recommandations en vue de l’amélioration des élections futures au Togo. Il s’agit principalement
de :
• revoir le découpage électoral afin de rééquilibrer la représentation des populations ;
• adapter et compléter le Code électoral afin de mieux tenir compte des caractéristiques du
système proportionnel ;
• inscrire dans le Code électoral l’obligation d’assurer la traçabilité et la sécurisation des
bulletins ;
• établir des procédures pour l’entretien et la gestion du fichier électoral national ;
4
•
inscrire formellement l’obligation de neutralité des autorités administratives à tous les
niveaux d’un processus électoral et prévoir la possibilité de sanctions administratives en
cas de non respect de cette disposition par les intéressés.
Ces différentes recommandations constituaient des opportunités données aux Togolais de se
réconcilier avec eux-mêmes et de mettre définitivement le Togo sur le chemin de la démocratie
et du développement. Malheureusement, plus de cinq (5) ans après la signature de l’Accord
Politique Global, et plusieurs mois après la fin des missions d’observation, le peuple togolais
attend toujours la mise en œuvre de ces réformes. Des actions, diversement appréciées, pour la
mise en place du cadre dans lequel ces recommandations devraient être étudiées ont été
entreprises notamment le Cadre permanent de dialogue et de concertation (CPDC).
Avec l’appui du Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme, un processus
"vérité, justice et réconciliation" est engagé en 2008 afin de faire la lumière sur les violences à
caractère politique qui ont marqué les élections au Togo depuis 1958 jusqu’à la signature de
l’Accord Politique Global. Le 03 avril 2012, un document-synthèse des recommandations a été
rendu public. Au terme de ce processus, à travers la justice et les réparations véritablement dues
aux victimes, les Togolais pourront espérer tourner la page et s’engager à construire une
démocratie fondée sur une vie politique apaisée.
Le Togo se prépare à organiser des élections locales et législatives dans le courant de l’année
2012. La révision du cadre juridique de ces élections par l’adoption de la loi organique portant
découpage électoral et du code électoral par l’Assemblée nationale, n’a pas trouvé de consensus.
Ce qui est à la base des contestations actuelles avec des manifestations émaillées de violence du
Collectif Sauvons le Togo (CST), une plateforme regroupant des organisations de la société
civile et des partis politiques.
La présente étude dont l’objet est de présenter un état des lieux du système électoral togolais
prend en compte le cadre juridique des élections, les institutions et acteurs clés du processus
électoral, la logistique et le climat socio politique en période électorale.
1. Présentation du Togo
Le Togo est un pays de l’Afrique de l’Ouest étendu sur 57 000 km2. Il est limité à l’Ouest par le
Ghana, à l’Est par le Bénin, au nord par le Burkina Faso et au sud par le Golfe de Guinée sur 50
km. Il possède un climat tropical, de moins en moins humide du sud au nord, c’est-à dire des
régions forestières aux régions de savane avec deux saisons pluvieuses et deux saisons sèches.
La population est estimée à 6 .151.195 habitants en 2011. Elle est à 71% rurale et 21% urbaine ;
on compte 80 habitants au km2. La population est majoritairement jeune à plus de 47%. Les
principales ethnies sont les Ewé, les Kabyè, les Kotokoli, les Akposso.
Le régime politique togolais est semi présidentiel avec une Assemblée nationale composée de
trois forces politiques (RPT, UFC, CAR)1 depuis 2007. Sur le plan territorial, le pays est découpé
en régions, en préfectures et en sous–préfectures. A la suite de la Conférence nationale tenue en
1991, le Togo s’est engagé sur la voie de la démocratie. Mais, très tôt, l’expérience démocratique
a connu des difficultés et l’ancien système politique semble s’être réinstallé à la seule différence
1 Rassemblement du Peuple Togolais (RPT), Union des Forces du Changement (UFC), Comité d’Action pour le Renouveau (CAR)
5
qu’il doit compter désormais avec un grand nombre de partis politiques, constituant une
opposition plus ou moins déterminée à lutter pour une alternance politique dans le pays.
2. Historique et contexte politique
La vie socio politique togolaise ne s’est guère améliorée depuis la présidentielle de 2010 à la
suite de laquelle Faure GNASSINGBE a été déclaré vainqueur. Les contestations de ces résultats
marquées surtout par les répressions des manifestations de l’Alliance Nationale pour le
Changement (ANC) qui réclamait la victoire de son candidat Jean Pierre Fabre, maintenaient le
pays dans ce climat d’instabilité.
Cette situation précaire s’était renforcée par la révocation du mandat en novembre 2010, de neuf
(09) députés de l’ANC du parlement, en violation des dispositions constitutionnelles et du
règlement intérieur de l’Assemblée nationale. Cette révocation fait suite à la scission interne de
l’Union des Forces du Changement (UFC) principale force d’opposition d’alors et dont certains
membres dissidents sont partis créés l’ANC. Malgré les décisions des juridictions de la
CEDEAO de réintégrer ces députés, les autorités togolaises ont délibérément refusé de mettre en
applications ces décisions qui d’office excluaient pour toujours ces élus.
Dans cette atmosphère de non droit, les réformes constitutionnelles et institutionnelles prévues
depuis août 2006 par l’Accord Politique Global (APG) et censées rétablir l’équilibre rompu entre
les institutions de la République par les modifications constitutionnelles unilatérales effectuées
en 2002 par le régime RPT, n’ont pas été réalisées jusqu’à ce jour. A cet effet, deux dialogues
politiques ouverts respectivement en septembre 2011 et février 2012 entre le pouvoir en place et
les principaux partis d’opposition, voient les débats piétinés sur des questions de formes et n’ont
guère permis de dégager un consensus sur les réformes à faire pour décrisper la situation
sociopolitique et donner des garanties de transparence et d’équité des élections législatives
devant en principe se tenir en cette année 2012.
Sur le plan des droits de l’Homme, on note une recrudescence des violations avec pour point
d’orgue la torture et l’impunité. En 2009, L’affaire de tentative d’atteinte à la sûreté de l’Etat qui
impliquait le demi-frère du Chef de l’Etat Kpatcha Gnassingbé et certains officiers de l’armée
togolaise, a révélé l’existence d’un centre de torture au Togo alors même que le pays a aboli la
torture et ratifié une convention internationale contre cette pratique. Ces allégations de tortures
lors du procès de ces accusés a fait demander par la justice togolaise une enquête que doit
conduire la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH). Cette commission a
constaté dans un rapport qu’elle a rendu public le 20 février 2012 qu’il a été commis sur les
accusés dans l’affaire de tentative d’atteinte à la sûreté intérieure de l’État, des actes de violences
physique et morale à caractère inhumain et dégradant et a recommandé au gouvernement que des
sanctions exemplaires soient prises à l’encontre de toutes les personnes ayant participé
directement ou indirectement à ces actes incriminés afin d’éviter que de tels actes ne se
reproduisent. A ce jour, force est de constater que les tortionnaires cités dans l’affaire courent
les rues, menacent leurs victimes et l’ensemble de la population togolaise, conduisant le
président de cette commission à fuir le pays. Le comble dans cette affaire est que le rapport remis
par la CNDH au gouvernement, a été falsifié par le gouvernement avant sa publication, sans que
6
les auteurs de cette falsification n’aient été officiellement identifiés et punis conformément à la
loi. Ce fait a suscité une importante vague de condamnations des organisations de la société
civile et des partis politiques qui en ont appelé à la démission de ce gouvernement et à la
poursuite des auteurs de ce forfait.
A cette situation d’impunité viennent s’ajouter les dérives constatées dans la gestion économique
du pays du fait de l’accaparement des ressources du pays par un petit groupe d’individus proches
du régime en place. Ce que dénonce l’opinion nationale excédée par la misère dans laquelle
croupissent les togolais tandis que les proches du pouvoir s’enrichissent impunément. Ceci a fait
monter les mouvements sociaux qui sont devenus récurrents. La plus importante de ces crises en
2012 fut celle du personnel soignant, des enseignants et des étudiants des deux universités du
pays qui ont fait retenir le souffle à tout le pays pendant plusieurs semaines.
C’est dans cette atmosphère d’incertitude que le pouvoir en place annonce les élections
législatives et locales pour octobre 2012. Le gouvernement s’évertue à organiser unilatéralement
des élections législatives couplées d’élections municipales sans un consensus sur le cadre
juridique de ces consultations. C’est ainsi qu’après quelques discussions au sein du Cadre
Permanent de Dialogue et de Concertation (CPDC en 2011) et les discussions tripartites de 2012
(CAR-RPT- ANC) avec la classe politique, soldées par des désaccords, le pouvoir en place a
introduit au parlement des projets de loi portant découpage et code électoral. Pour le
gouvernement ces nouveaux textes prennent en compte les recommandations des missions
d’observation électorales de l’Union Européenne, de la Commission Vérité Justice et
Réconciliation (CVJR) chargée de faire la lumière sur les violences depuis 1958 à 2005 et, de la
CNDH.
En dépit des appels et mises en garde de l’opposition, le pouvoir en place a fait adopter en Mai
2012 par l’Assemblée Nationale, où il dispose d’une majorité, ces deux lois sans aucun
consensus sur les réformes du code électoral et du découpage électoral. Il est à remarquer que
l’UFC, parti pourtant membre de la coalition gouvernementale a voté contre l’adoption de la loi
fixant le nombre de députés à 91.
Face à l’impunité, au nom respect des droits de l’homme, au refus du gouvernement d’aller au
consensus sur le cadre juridique de ces élections, un regroupement de neuf (09) organisation de
la société civile et (06) partis de l’opposition, dénommé Collectif « SAUVONS LE TOGO »,
créé en Avril 2012, s’invite dans le débat politique et présente une plate forme de revendications
pour l’assainissement de la vie politique avant la tenue des élections qu’il propose pour mars et
avril 2013. Pour ce collectif un prompt règlement de toutes ces violations sera un gage de bonne
foi des autorités togolaises. Cette plateforme concerne :
- L’abrogation des lois adoptées les 25 et 31 mai 2012 par l’Assemblée nationale portant
respectivement, code électoral et nombre de députés ;
- Le retour à la Constitution d’octobre1992 par l’abrogation de la loi 2002-029 du 31
décembre 2002 ;
- La mise en œuvre des recommandations de la CNDH ;
- La mise en œuvre des recommandations de la CVJR ;
7
- La réforme de la Cour constitutionnelle, de la HAAC2, de la Cour des comptes et de la
CENI ;
- L’adoption du nouveau découpage électoral proposé dans la présente plateforme,
essentiellement basée sur les résultats du recensement de la population et de l’habitat de
novembre 2010 ;
- La rédaction d’un nouveau code électoral consensuel.
L’arrivée du collectif sur la scène, amplifie de nouveau la tension politique. De part ses actions et
sa capacité de mobilisation de la population, il est devenu une force politique incontournable qui
régente actuellement la vie politique dans le pays. Les nombreuses répressions, arrestations et
intimidations du pouvoir pour affaiblir le collectif n’y firent rien mais renforcent plutôt le groupe
qui se durcit dans ses positions.
C’est dans ce contexte de tension et de blocage qu’est survenue la démission du Premier ministre
Gilbert Fossoun HOUNGBO, emportant tout son gouvernement le 12 juillet 2012. Des
consultations de toute la classe politique se poursuivent actuellement par le Chef de l’Etat pour la
reconstruction d’un nouveau gouvernement incluant tous les acteurs. Mais déjà, les responsables
du Collectif et de certains partis politiques ont déclaré ne pas vouloir rejoindre cette nouvelle
équipe gouvernementale.
3. Cadre juridique
Le cadre juridique d’une élection est l’ensemble des législations et tous matériels ou documents
aussi bien légaux que quasi-légaux liés à cette élection. Selon les analystes, le Togo dispose d’un
arsenal juridique raisonnable devant permettre des élections démocratiques en plus des
conventions internationales auxquelles il a adhéré pour des élections conformes aux normes
internationales.
Le cadre juridique se fondant sur la constitution de 1992 et le code électoral d’Avril 2000 est
source de conflits. Les acteurs politiques togolais sont toujours divisés sur ces textes pour
lesquels ils peinent à trouver un consensus. Ce qui va faire dire à l’opposition de retourner à la
constitution de 1992 qui présente un environnement qui leur est beaucoup plus favorable.
3.1 La constitution de la République
Le 27 Septembre 1992, lors de la transition démocratique, les Togolais par voie référendaire
avaient plébiscité la Constitution de la IVème République à 97%. Cette loi adoptée le 14 octobre
1992, prévoyait un mode de scrutin uninominal majoritaire à deux tours pour l’élection
présidentielle et une limitation de la magistrature à deux mandats.
2
Haute Autorité de l’Audiovisuelle et de Communication (HAAC)
8
Cette constitution a connue en 2002, 2007 et 2009, des modifications importantes non
consensuelles de plusieurs articles, ramenant le mode de scrutin à un tour et instaurant un
parlement bicaméral.
3.2 Le code électoral
Il a été adopté en 2000 et porte des dispositions relatives à l’organisation des élections. Depuis
son adoption, il a déjà fait l’objet de six (06) modifications notamment en 2002, 2003, 2005,
2007, 2009 ; la dernière modification date de mai 2012.
Ce nouveau code fait objet de vives contestations de la part de l’opposition qui le qualifie de non
consensuel car n’ayant pas préalablement fait objet d’un large consensus des acteurs comme le
stipule le protocole A/SP1/12/01 sur la démocratie et la bonne gouvernance additionnel au
protocole de la CEDEAO relatif au mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des
conflits, de maintien de la paix et de la sécurité qui dispose au point 1 de son article 2 qu’«
aucune réforme substantielle de la loi électorale ne doit intervenir dans les six (6) mois
précédant les élections, sans le consentement d’une large majorité des acteurs politiques ».
Selon ces partis de l’opposition le gouvernement viole cette disposition de la CEDEAO en
faisant passer ce code qui n’a pas l’adhésion de tous et ceci à moins de six mois des élections.
3.3 Les normes juridiques internationales
Le Togo est signataire des instruments internationaux et régionaux suivants, pertinents en
matière électorale :
• les Conventions internationales sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale
de 1965, sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes de 1979,
• la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples de 1981 et le Protocole de la même
Convention portant sur les droits des femmes en Afrique de 2003, au sein de l´Union africaine,
• le Protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance complémentaire au Protocole sur le
mécanisme pour la prévention, gestion et solution des conflits, maintien de la paix et sécurité
(2001), au sein de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO).
4. Le système électoral/ le mode de scrutin
Le mode de scrutin est l’ensemble des opérations qui constituent un vote ou une élection. Il peut
être public ou secret. Au Togo, le Président de la République est élu au suffrage universel direct
et secret pour un mandat de cinq (05) ans. Il est rééligible (art.59). La constitution de 1992,
révisée par la loi n°2002-029 du 31 décembre 2002 et modifiée en Février 2007, précise en son
9
article 60 que l’élection du Président de la République a lieu au scrutin uninominal majoritaire à
un (01) tour. Le Président de la République est élu à la majorité des suffrages exprimés. Cette loi
est renforcée par l’article 176 du code électoral modifié en Août 2009.
Les députés sont élus au suffrage universel direct et secret pour cinq (05) ans. Ils sont rééligibles
Chaque député est le représentant de la Nation tout entière (Art. 52 de la constitution modifiée en
2007). Il est important de relever que les députés de l’Assemblée nationale actuelle ont été élus
en 2007 sur la base du scrutin proportionnel de listes fermées sur consensus de la classe politique
à l’issue de l’Accord Politique Global (APG) signé en 2006.
Le mode de scrutin a toujours divisé les acteurs politiques togolais qui peinent à trouver un
consensus autour. Les partis de l’opposition réclament un retour à la constitution de 1992 que le
peuple s’était donné librement par référendum et qui limitait à deux (02) mandats la magistrature
suprême.
5. Découpage administratif et électoral
D’une superficie de 57 000 Km2, le Togo est un petit pays de l’Afrique de l’Ouest avec
6.151.195 habitants (Recensement 2011). Il compte cinq (05) régions administratives et
économiques subdivisées en 30 préfectures, portées récemment (2012) à 35.
Le système électoral retient comme circonscriptions électorales les préfectures en plus de Lomé
commune (divisé en 5 arrondissements). L’Accord Politique Global (APG) signé en 2006 entre
les acteurs politiques, a convenu de s’en tenir aux circonscriptions électorales et administratives
actuelles et à une Assemblée nationale de 81 députés en attendant un redécoupage électoral basé
sur un recensement général de la population. (APG 1.2.4)
Aujourd’hui le débat tourne autour du nouveau code et découpage électoral adopté par
l’Assemblée nationale en mai dernier, en vue des préparatifs des élections législatives et locales
fixées sur octobre 2012. Les partis de l’opposition demandent le retrait pur et simple de ces
textes qu’ils jugent non consensuels. Ce nouveau découpage ramène le nombre de siège à 91
selon la loi organique portant nombre de députés à l’Assemblée Nationale pour tenir compte des
nouvelles circonscriptions électorales issues de la création de nouvelles préfectures et des
disparités démographiques.
6. Organisation de l’administration électorale
Que les résultats d’une élection soient acceptés comme authentiques ou pas, cela dépend en
grande partie du degré de neutralité que l’on prête à la commission électorale. Au Togo, il existe
une administration électorale autonome appelée Commission Electorale Nationale Indépendante
(CENI) créée par la loi n° 2000-007 du 05 Avril 2000 en lieu et place du Ministère de
l’Administration territoriale qui était jusque là chargé de l’organisation des élections. Cette loi
plusieurs fois modifiée, reste au centre des controverses entre le pouvoir en place et les partis de
l’opposition.
10
6.1. Structure et composition de la Commission électorale nationale indépendante (CENI)
La CENI est une institution permanente chargée d’organiser et de superviser les consultations
électorales et référendaires. En tant qu’Autorité administrative indépendante (AAI), elle dispose
de prérogatives de puissance publique et jouit d’une autonomie d’organisation et de
fonctionnement3 . Les AAI sont des institutions de l’État chargées en son nom d’assurer la
régulation d’un secteur considéré comme essentiel et pour lequel, en théorie, le gouvernement
souhaite éviter d’intervenir de manière directe. Les AAI constituent une catégorie juridique
particulière, en ce qu’elles ne sont pas soumises à l’autorité hiérarchique d’un ministre. Elles
sont donc placées en dehors des structures administratives traditionnelles et ne sont pas soumises
au pouvoir hiérarchique. Les pouvoirs publics ne peuvent pas leur adresser d’ordre, de consignes
ou même de simples conseils, et leurs membres ne sont pas révocables.
La CENI est composée de dix-sept (17) membres :
- cinq (05) membres désignés par la majorité présidentielle ;
- cinq (05) membres désignés par l’opposition parlementaire ;
- trois (03) membres désignés par l’opposition extraparlementaire ;
- trois (03) membres désignés par la société civile ;
- un représentant de l’administration.
Les différentes entités présentes au sein de la CENI désignent leurs représentants qu’elles
proposent au parlement. Ces représentants sont en définitive nommés par l’Assemblée Nationale
et prêtent serment devant la Cour constitutionnelle.
6.2 Organisation et mode de fonctionnement de la CENI
La CENI est constituée d’une Assemblée plénière, d’un Bureau, de Sous-commissions et
d’équipes de supervision. L’Assemblée plénière est l’instance suprême de délibération de la
CENI, elle comprend l’ensemble des membres et traite de toutes les questions relevant de la
compétence de la CENI. Son quorum est de neuf membres. Les décisions de la CENI sont prises
par consensus. A défaut, il est procédé à un vote à la majorité qualifiée des deux tiers des
présents au premier tour, puis à la majorité relative des présents dans le cas ou un second tour
s’avère nécessaire. La CENI comprend cinq sous-commissions :
- Finances et affaires administratives,
- Opérations électorales,
- Formation et informatique,
- Sécurité,
- Matériel et logistique,
- Communication et relations publiques.
Chaque membre de la CENI est inscrit dans au moins deux sous-commissions. Les membres de
la CENI élisent en leur sein un bureau composé du président, du vice-président, d’un rapporteur
3
Article 6 du Code électoral, loi n° 2009 – 018 du 24 août 2009 – modifiée.
11
et d’un rapporteur adjoint. Le président élu de la CENI est nommé par décret pris en Conseil des
ministres. La CENI est également dotée d’un secrétariat, dirigé par un secrétaire administratif
nommé par décret en Conseil des ministres.
-
Le secrétaire administratif est assisté d’un adjoint.
Le secrétaire administratif permanent est chargé de :
la gestion du personnel de la CENI ;
la gestion du matériel administratif et électoral de la CENI ;
l’information du public sur les activités de la CENI sur instructions du président ;
la conservation de la liste électorale et du patrimoine électoral national.
La CENI est représentée dans les préfectures et dans Lomé commune et ses arrondissements par
ses démembrements qui sont les Commissions Electorales locales Indépendantes (CELI), les
comités de listes et cartes et les Bureaux de vote. Les CELI sont chargées de mettre en œuvre
les décisions de la CENI au niveau local.
Il est important de souligner que c’est en 2010 que la CENI seule en tant qu’entité a organisées et
supervisées les élections.
7. Partis politiques et candidats
Les partis politiques et les candidats sont les acteurs principaux dans les élections. Au Togo, le
retour au multipartisme en 1990 après le règne du parti unique RPT depuis 1967, a favorisé un
foisonnement de partis politiques sur la scène publique. La loi n° 91-97 du 12 Avril 1991 portant
charte des partis politiques, fixe le régime des partis politiques en République Togolaise et
déclare en son 2ème article que les partis politiques sont des organisations qui se forment
librement ayant pour objet de concourir à l’expression de la volonté politique des citoyens et à
leur formation civique.
Du fait de la multiplicité ethnique du pays, cette charte régule la création des partis politiques en
précisant en son article 6 qu’aucun parti ne peut s’identifier à une région, à une ethnie, à une
religion, ou à une corporation. Elle va plus loin, en exigeant que les fondateurs d’un parti
politique doivent être au minimum 30 provenant des 2/3 au moins des préfectures (art.11). Ces
dispositions de la charte constituent de véritables garde-fous contre le clivage ethnique, remarqué
chez les Togolais.
De 1991 à 2009, 93 partis politiques constitués se sont officiellement enregistrés au Ministère de
l’Administration Territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales. Parmi cette
multitude de partis, seule une vingtaine anime régulière la vie politique. Selon le rapport de la
mission d’observation de l’Union Européenne pour les législatives de 2007, 29 partis politiques
ont présenté des listes pour participer aux élections législatives avec 2122 candidats inscrits sur
les 395 listes des 31 circonscriptions électorales du pays.
Les candidats sont présentés ou non par un parti politique ou une coalition de partis politiques.
Peut faire acte de candidature à l’élection du Président de la République, tout citoyen remplissant
12
les conditions fixées à l’article 62 de la Constitution et qui réside sur le territoire national depuis
douze (12) mois au moins. Pour les législatives, tout citoyen qui a qualité d’électeur est éligible à
condition d’être âgé de 25ans révolus à la date des élections, d’être togolais de naissance et de
savoir lire et écrire en langue officielle. Les conditions d’éligibilité des candidats à la
présidentielle et aux législatives sont énoncées et renforcées aux articles 168, 169,196 et 197
du Code électoral.
A la présidentielle de mars 2010, onze (11) candidatures étaient enregistrées auprès de la CENI,
huit (08) ont été validées par la Cours constitutionnelle et, les trois (03) autres rejetées pour
défaut d’un certain nombre de pièces justificatives.
8. Rôle des principaux intervenants (nationaux et internationaux)
Les principaux intervenants dans les élections au Togo sont ces individus, groupes voire même
ces organisations qui ont des intérêts divers dans le processus électoral.
On peut principalement citer :
- La Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI):
C’est la principale institution en charge des élections. Ses membres sont les principaux acteurs
de la réussite ou de l’échec du processus électoral. La CENI est chargée d’organiser et de
superviser les consultations électorales et référendaires (Art.3 du code électoral).
-
Les partis politiques et les candidats
Ce sont eux qui s’affrontent dans la course au pouvoir en sollicitant le vote de l’électorat. Ils
concourent à l’expression de la volonté politique du peuple et participent à sa formation civique.
-
Le gouvernement :
Il est l’exécutif et organise les élections. Par décret pris en Conseil des ministres, il convoque le
corps électoral. Le succès ou l’échec des élections dépend de la collaboration et de la relation de
confiance entre la CENI et le Ministère de l’Administration Territoriale, de la Décentralisation et
des Collectivités Locales, le Ministère de la Sécurité et de la Protection civile ; car
respectivement, ces ministères fournissent les conditions de manifestation publiques et de
sécurisation des élections. Certaines attributions de la CENI telles que le recensement électoral,
le déploiement du matériel électoral, la formation des forces de sécurités des élections ainsi que
la formation des médias sont partagées avec le ministère de l’Administration territoriale et le
ministère de la sécurité.
-
L’électorat
L’électorat au Togo est majoritairement jeune. Il se compose des Togolais qui ont 18 ans
révolus, qui sont enregistrés sur les listes électorales et qui ont mandat de voter. Ils battent
13
campagnes aux côtés de leur parti ou candidat et lui accordent leur voix à travers le vote. A la
présidentielle de mars 2010, le corps électoral est estimé à 3 277 492 électeurs4.
Les femmes représentent au Togo 51,3% de la population. Cependant, leur participation aux
activités politiques et leur représentation dans les instances décisionnelles des partis politiques et
de l’État sont demeurées très limitées. Lors des législatives de 2007, malgré le souhait émis dans
l’APG d’assurer une meilleure représentativité des femmes, peu de femmes s’était présentée aux
élections. Au RPT, sur 20 femmes alors candidates, seules six siègent à l’Assemblée nationale
parmi 50 de ses élus. L’UFC compte deux femmes sur 27 élus et le CAR, une femme sur ses 4
élus.
Mais en 2010, une femme a été candidate à l’élection présidentielle pour la première fois dans
l’histoire du pays.
- Les organisations de la société civile
Elles sont actives et présentes dans tous les domaines dans l’ensemble du pays. Elles sont
particulièrement impliquées dans les processus électoraux à travers leurs actions de
sensibilisation sur la non violence des élections, les formations citoyennes, la participation des
femmes… Ainsi que les missions d’observation des élections.
- Les médias :
Leur rôle est décisif dans la réussite et l’échec du processus électoral tant par leur influence sur
la société. Tout comme les organisations de la société civile de la place, ils organisent des
émissions d’information citoyenne du public et servent de tribune aux candidats lors des
campagnes électorales.
- L’armée
Au Togo, l’armée s’est beaucoup impliquée dans les élections aux côtés du pouvoir en place,
particulièrement par la répression des manifestations lors de la contestation des résultats.
Toutefois, les forces spéciales élection souvent constituées à la veille des élections participent au
maintien de l’ordre et de sécurité en période électorale.
- Les fournisseurs ou entrepreneurs
Ce sont les prestataires de service à qui la CENI fait appel. Ils peuvent être des nationaux ou
internationaux
- Les bailleurs de fonds et les agences d’assistance électorale :
Ce sont les partenaires économiques du pays notamment l’Union Européenne et
individuellement l’Allemagne, la France, les Etats-Unis. Ils constituent des appuis essentiels aux
processus électoraux et au développement. Ils accompagnent financièrement le processus et
appui techniquement la CENI dans l’organisation et la gestion. Ils permettent à la CENI de
disposer de moyens pour accompagner la société civile te les médias.
- Les moniteurs/ observateurs d’élection :
4
Chiffres publiés par la Mission d’observation de l’Union Européenne en 2010.
14
Ils ont pour mission de suivre le déroulement des processus électoraux dans le pays. Ils sont
déployés par la société civile togolaise, les institutions nationales, régionales et internationales.
9. Organisations de la société civile
Elles sont présentes et actives au Togo. Tout comme les partis politiques, elles ont commencé à
occupé la vie publique à partir des années 90 à la suite du vent démocratique qui a soufflé sur le
pays. La société civile a été autorisée pour la première fois à observer le processus électoral lors
des législatives de 2007. Elle a pour mission l’information et la formation de la population sur le
processus du vote puis l’observation du scrutin.
Par rapport aux violences électorales enregistrées en 2005, la société civile intervient pour
appeler les populations à l’apaisement des élections à venir et surtout pour expliquer le processus
du vote et ses enjeux. C’est dans cette optique qu’en 2007, 21 organisations de la société civile
ont bénéficié d’un soutien du programme PEACE mis en œuvre par le Programme des Nations
Unies pour le Développement (PNUD) pour l’élaboration et l’exécution d’activités d’éducation
civique et de sensibilisation au vote. Ces organisations ont sillonné tout le territoire pour appeler
les populations à voter dans la paix et le respect d’autrui.
Suite à un appel d’offre du PNUD appuyé par le programme PEACE, douze (12) organisations
ont été retenues pour observer le scrutin. Ces dernières ont déployés 3000 observateurs dans les
bureaux de vote sur l’ensemble du territoire pour observer le déroulement du vote.
A la présidentielle de mars 2010, la société civile était également présente dans sa mission
d’information, de formation des populations et, d’observation du vote. Là encore, dix (10)
organisations accréditées par la CENI et appuyées par le PNUD, ont déployé 3000 observateurs
sur l’ensemble du territoire.
Il est à souligner qu’en dehors de l’accompagnement de certaines organisations appuyées par le
PNUD, d’autres initiatives émanant des organisations nationales ou institutions internationales,
ont été enregistrées dans le cadre des élections à savoir l’information et la formation de la
population à l’éducation civique et au processus du vote ainsi que l’observation du scrutin.
10. Budget et financement des élections
L’organisation des élections au Togo est en majorité financée par les partenaires techniques et
financiers (PTF) du pays en l’occurrence l’Union Européenne (UE) à travers le PNUD qui
accompagne et appuie la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) qui depuis
2007, est en charge de l’organisation des élections.
Ce financement des élections par les PTF est aussi perceptible au niveau de l’accompagnement
de la société civile togolaise dans la formation et l’éducation citoyenne des populations ainsi que
l’observation domestique du processus électoral. C’est ainsi qu’en 2010, un montant total de
15
152 000 euros soit 100 millions de FCFA a été accordé aux organisations de la société civile, à
travers le projet PAPE du PNUD pour leur implication dans la présidentielle de mars 2010.
11. Financement des partis politiques
Pour assurer un bon fonctionnement des partis politiques et pour leur assurer une égalité de
chance aux échéances électorales, les acteurs politiques togolais ont convenu de la nécessité d’un
financement public des partis. Ainsi la loi n° 91-97 du 12 Avril 1991 portant charte des partis
politiques, précise en son article 18 alinéa 2 que les partis politiques bénéficient en outre d’une
aide financière de l’Etat. Cette aide est attribuée aux partis ayant recueilli au moins 5% des
suffrages sur le plan national aux élections législatives. La loi prévoit également une prime
spéciale aux formations qui assureront la promotion des femmes en politique.
D’un montant total de 100 millions de FCFA, l’enveloppe pour le financement des partis va être
désormais répartie sur la base du nombre de député à l’Assemblée Nationale.
12. Périodicité du calendrier électoral et dernières dates en référence
Les élections se déroulent chaque cinq (05) ans au Togo. La constitution de la République stipule
que le scrutin est ouvert sur convocation du corps électoral par décret pris en conseil des
ministres soixante (60) jours au moins et soixante quinze (75) jours au plus avant l’expiration du
mandat du président en exercice. Et, de trente (30) jours précédant la fin de mandat des députés.
Le scrutin a lieu un dimanche sur convocation par décret du conseil des ministres (Art.98, 99
code électoral).
Les dernières législatives remontent au 14 octobre 2007 tandis que la présidentielle s’est
déroulée le 04 mars 2012. Les élections locales quant à elles datent de 1981.
Les prochaines locales et législatives sont annoncées pour se tenir dans le courant de l’année
2012 (en Octobre 2012) sans d’autres formes de précision.
13. Etat d’avancement du processus électoral
Le Togo se prépare en cette année 2012, à renouveler son Assemblée nationale arrivée en fin de
mandature et par la même occasion procéder à l’élection des élus locaux pour la consécration de
la décentralisation dans le pays.
A quatre (04) mois de ces élections fixées en 0ctobre, rien ne semble encore être prêt. Les
acteurs politiques sont divisés sur les textes électoraux que certains qualifient d’injustes et non
consensuels. Cette contestation du cadre juridique a provoquée une vive tension dans le pays,
marquée par des manifestations violemment réprimées par les forces de l’ordre avec déjà un
nombre important de blessés et trois morts parmi la population civile.
La tension politique qui ne baisse toujours pas à bloquer toute initiative de dialogue entre le
pouvoir en place et l’opposition qui se rejettent les responsabilités. Les membres de la CENI,
16
l’institution en charge des élections, ne sont pas encore nommés pour entreprendre les travaux
devant aboutir au scrutin.
14. Caractéristiques des matériels et documents électoraux: urnes, isoloir, bulletins de vote,
encre indélébile, procès-verbaux, imprimés électoraux, kits électoraux
La CENI est chargée de l’organisation matérielle du scrutin. Le matériel électoral par bureau de
vote comprend notamment : une urne transparente sur un côté au moins avec deux (02) cadenas,
un ou plusieurs isoloirs, deux (02) lampes tempêtes, l’encre indélébile, le cachet « A voté »,
l’encreur, la liste électorale du bureau de vote, la liste d’émargement, le procès verbal en
plusieurs exemplaires, les fiches de dépouillement, le bulletin unique de vote.
Les procès verbaux sont signés par le président et le rapporteur du bureau de vote, les délégués
des candidats et remis à chaque signataire et aux observateurs électoraux présents dans le bureau
de vote au moment du dépouillement.
Le bulletin unique de vote comporte les éléments d’identification notamment : nom et prénoms
des candidats, la photo du candidat en ce qui concerne l’élection présidentielle ou l’emblème du
parti politique, du regroupement de partis politiques ou de candidat indépendant, le sigle du parti,
le couleur du parti, du regroupement de partis ou de candidat indépendant.
La révision de la liste électorale à l’issue de laquelle une carte d’électeur biométrique et non
falsifiable est délivrée fait appel à des kits informatique et bureautique. Le matériel roulant
permet de faire les liaisons entre les différentes localités pour le transport du matériel et des
agents électoraux.
15. Opérations électorales : carte électorale, situation et établissement de la liste électorale,
mode de publication de la liste électorale, gestion du contentieux de la liste électorale,
gestion des résultats, gestion du contentieux des résultats, éducation civique de l’électorat,
genre et élections
L’inscription sur la liste électorale est un droit pour tout citoyen togolais remplissant les
conditions requises par loi. Les listes électorales sont permanentes et les élections sont faites sur
la base de la liste révisée pendant toute l’année qui suit la clôture de cette révision. Toutefois,
avant chaque élection générale, une révision exceptionnelle peut être décidée par décret en
conseil des ministres sur proposition de la CENI. La liste électorale nationale est constituée par
le rassemblement des listes communales et préfectorales. Les inscriptions sur les listes
électorales sont faites auprès des comités des listes et cartes qui sont des démembrements de
l’administration électorale (CENI). Ces listes sont publiées dans les conditions fixées par décret.
Tout citoyen radié de la liste où dont l’inscription est refusée peut faire recours dans les cinq (05)
jours qui suivent la publication. La Commission Electorale Locale Indépendante (CELI) rend sa
décision dans un délai de soixante-douze (72) heures. La partie non satisfaite de la décision de la
CELI peut former un recours devant la CENI dans un délai de quarante-huit (48) heures suivant
la notification. La CENI rend sa décision dans un délai de soixante-douze (72) heures à compter
de sa saisine.
La CENI est chargée de l’impression et de l’établissement de la carte d’électeur. La carte
d’électeur est imprimée selon des modalités et des spécifications techniques définies par
17
la CENI. Elle est infalsifiable et sécurisée. C’est le comité des listes et cartes qui procède à la
délivrance individuelle des cartes à chaque électeur. Les cartes doivent être entièrement délivrées
au plus tard soixante-douze (72) heures avant l’ouverture de la campagne électorale.
A l’issue du vote, le dépouillement se fait publiquement. Au vu de tous les procès-verbaux des
bureaux de vote de la préfecture ou de la commune de Lomé, la Commission Electorale Locale
Indépendante effectue le recensement des votes de la préfecture à son siège et en publie les
résultats. Il en est dressé procès-verbal dont copie est immédiatement adressée au président de la
CENI et au représentant de chaque candidat ou liste de candidats. La CENI au terme du
recensement national des votes, proclame les résultats provisoires des élections.
Les contentieux électoraux sont du ressort de la Cour constitutionnelle. Tout candidat ou toute
liste peut contester la régularité des opérations électorales sous forme de plainte adressée à la
Cour constitutionnelle. La plainte est adressée è la Cour constitutionnelle dans un délai de
quarante-huit (48) heures pour l’élection présidentielle, et de soixante-douze (72) heures pour les
élections législatives, à compter de la publication des résultats. La plainte doit contenir les griefs
du plaignant.
La Cour Constitutionnelle proclame solennellement l’ensemble des résultats définitifs des
opérations référendaires, des élections présidentielles, législatives et sénatoriales après règlement
des cas de contentieux pour lesquels elle a été saisie.
Cette procédure de proclamation et de transmission des résultats n’a pas été vraiment suivie lors
de la présidentielle de mars 2010. Les résultats qui devraient être proclamés au niveau de chaque
préfecture ont été transportés sur Lomé pour être proclamés alors que, les procès verbaux de ces
résultats devraient être transmis à la CENI par VSAT (transmission satellitaire). Cette disposition
n’étant pas suivie, les candidats ont bien évidemment contesté les résultats et ont reproché à la
CENI de ne pas respecter sa directive selon laquelle la transmission des résultats des CELI à la
CENI se ferait par système VSAT
16. Analyse des défis et perspectives
16.1. Les défis
Un double défi à relever pour les togolais dans la perspective des législatives et des locales qui
seront tenues au même moment.
Le découpage électoral adopté en mai 2012 par l’Assemblée nationale prévoit pour le prochain
parlement 91 sièges contre 81 jusqu’ici. C’est dans ce cadre juridique qualifié d’injuste et de non
consensuel par les partis de l’opposition que les acteurs politiques vont s’affronter aux
législatives pour le renouvellement d’un parlement que l’on doit tout faire pour rendre égalitaire,
représentatif de l’aspiration politique du peuple.
Le Togo connaît une administration centralisée. Depuis 1981, le pays n’a plus organisé
d’élection locale. Le processus de décentralisation suit son cours pour le transfert définitif des
compétences aux collectivités locales. Depuis lors les communes sont dirigées par des
18
délégations spéciales nommées par le pouvoir. La population ne se sent pas impliquer dans cette
gestion qui, visiblement se fait remarquer dans l’état de développement des communes qui
manquent de ressources. Il s’avère donc nécessaire d’organiser ces élections locales, pour
permettre aux populations de désigner leurs élus en qui elles se retrouvent pour donner ainsi des
moyens aux communes de se développer.
16.2. Les facteurs de risque et de conflits
Au Togo, les élections riment avec violences et violation massive de droits humains. L’histoire a
démontré que toutes les consultations électorales qui ont été organisées depuis 1958 jusqu’à
2010, n’ont pas été tout à fait paisibles. Ces violences ont atteint leur paroxysme lors de la
présidentielle d’Avril 2005, qui a porté Faure GNASSINGBE à la tête du pouvoir avec des
centaines de victimes et des milliers de déplacés à l’issue des contestations selon un rapport de
l’ONU.
Les facteurs de conflits pendant les périodes électorales au Togo peuvent être liés au cadre
juridique des élections, à la campagne électorale où les candidats tiennent des propos diviseurs et
au clivage ethnique très poussé dans le pays.
Les périodes électorales sont un moment de fortes tensions politiques et d’exacerbation des luttes
politiques. Depuis la poussée démocratique de 1990, les acteurs politiques vont aux élections sur
un désaccord total autour du cadre électoral (Textes électoraux non consensuels, une
Commission électorale et une cour constitutionnelle majoritairement composés des proches du
pouvoir). Ceci crée une contestation des résultats des élections. Survient ainsi la violence à la
suite des contestations réprimées par les forces de l’ordre.
A côté de cette lutte politique, il est important de souligner le rôle de l’armée dans le processus
électoral. La vie politique togolaise est fortement marquée par l’armée. Une armée que d’aucuns
qualifient de non républicaine parce que étant à la solde du régime en place à qui elle assure le
monopole de la violence surtout en périodes électorales où elle se retrouve au devant de la scène
pour réprimer les contestataires.
Les élections au Togo, constituent des périodes de rupture du tissu social. Les partis politiques
dans leurs manœuvres pour conquérir le pouvoir tiennent des discours de nature à renforcer les
clivages sociaux, le tribalisme, les litiges fonciers …Tous ces problèmes sont réveillés à
l’approche des élections où des individus de même famille se règlent des comptes à cause de leur
divergence d’opinion. Tous ces conflits latents au sein des populations, ajoutés aux différentes
frustrations des élections occasionnent ces violences que l’on peut enregistrer pendant les
périodes électorales au Togo.
19
16.3.
Les perspectives : mesures et actions à entreprendre pour réduire les risques et
conflits liés aux élections
Les élections constituent des processus continuels dans la vie d’une nation démocratique. Pour ce
faire, il faudra œuvrer à ce qu’elles soient pacifiques, crédibles, reflétant l’aspiration des
citoyens.
Les périodes électorales au Togo constituent des moments sombres que nul ne voudrait revivre.
Le bilan des victimes enregistrées surtout à la suite de la présidentielle de 2010, a réveillé
l’opinion quant au travail à faire afin de réduire les risques de violence. Ainsi, plusieurs missions
et conclusions d’études ont mis l’accent sur un certain nombre d’actions pour une élection
paisible et transparente telles que :
- Un cadre électoral qui impose des garde-fous rigoureux aux structures
institutionnelles au sein d’un système politique,
- Un ensemble de normes électorales sur la base des principes démocratiques
largement acceptés par les acteurs politiques,
- Des mécanismes de protection des droits humains solidement ancrés, y compris la
surveillance de l’élection par des observateurs indépendants, la société civile et
des médias libres
- Une administration juste, transparente et équitable des élections
16.4.
Les institutions/organisations nationales susceptibles de jouer un rôle de prévention
des conflits ?
A l’issue de la présidentielle de 2005, marquée par des violences sans précédent et, une violation
massive des droits humains, beaucoup d’acteurs étatiques ou non se sont investis dans
l’éducation à la non violence et à la paix sur toute l’étendue du territoire. Au nombre de ceux-ci,
nous pouvons citer : la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH), le réseau ouest
africain pour l’édification de la paix (WANEP-Togo), la Concertation Nationale de la Société
civile togolaise (CNSC-Togo), le Centre d’Observation pour la Promotion de l’Etat de Droit
(COPED), le Groupe de Femme D’action et de Développement (GF2D), Réseau des Femmes
Anciens Ministres et Parlementaires (REFAMP/T) etc. La plupart de ces organisations ont formé
et déployé des agents pour le monitoring de la violence électorale afin de prévenir les incidents à
travers un mécanisme d’alerte précoce.
Ces organisations ont sillonné le pays pour semer des messages de paix au sein des populations.
CONCLUSION
Le Togo, s’achemine vers de nouvelles élections sans un véritable consensus autour des textes
électoraux. Pourtant le pays dispose d’un cadre juridique appréciable notamment une constitution
et un code électoral pouvant garantir le droit fondamental à des élections libres, régulières,
périodiques et non discriminatoires ; à un mode de scrutin respectueux du choix de l’électeur, de
même que le droit d’élire, d’être élu et d’accéder librement aux fonctions publiques dans des
conditions d’égalité. Il dispose d’un arsenal juridique impressionnant garantissant la jouissance
de toutes ces libertés auquel se sont ajoutés des mécanismes internationaux en matière électorale.
Toute fois ce cadre légal souffre d’imprécision et d’ambigüité rendant difficile les
interprétations et une compréhension unique au sein des acteurs politiques.
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La composition de l’administration électorale et des autres institutions intervenant dans les
processus électoraux, objet de récurrentes contestations par les partis de l’opposition qui trouvent
en elles des institutions a priori favorable au pouvoir en place, doit susciter l’adhésion de tous et,
élargie à d’autres acteurs de la société non politiques pouvant mettre à leur disposition des
compétences. Ceci fait appel à tous les autres acteurs intervenant dans le processus et à leur
responsabilité pour des élections réussies.
Le climat socio politique souvent délétère en période électorale nécessite que la classe politique
s’engage dans de sérieuses discussions pour entrevoir des approches partagées par tous afin de
consolider le cadre juridique des élections pour ainsi assainir la vie politique togolaise et rompre
définitivement avec le cycle de la violence et des élections contestées au Togo.
Annexes
1. Constitution du pays
2. Code électoral
3. Autres textes règlementaires
4. Composition de l’administration électorale
5. Liste des partis politiques
6. Liste des partenaires internationaux
7. Liste des organisations de la société civile impliquées
8. Spécimens de documents électoraux
9. Carte administrative du pays
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