LA FORMATION DES ENSEIGNANTS EN TUNISIE Etat des lieux et

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LA FORMATION DES ENSEIGNANTS EN TUNISIE Etat des lieux et
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
LA FORMATION DES ENSEIGNANTS EN TUNISIE
Etat des lieux et pistes d’amélioration
RAPPORT DE SYNTHÈSE
Préparé par Béchir ALLOUCH, Maître Technologue à l’Université Virtuelle de Tunis
Septembre 2014
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
SOMMAIRE
1.
Introduction .................................................................................................................................... 1
2.
Les enseignants dans le système éducatif tunisien ..................................................................... 2
3.
4.
2.1.
Les enseignants dans les écoles primaires, les collèges et les lycées .......................................... 2
2.2.
Les enseignants dans les universités .......................................................................................... 4
La formation initiale des enseignants........................................................................................... 6
3.1.
La formation initiale des enseignants des écoles primaires, des collèges et des lycées ................. 6
3.2.
La formation initiale des enseignants des universités ....................................................................... 12
La formation continue des enseignants ..................................................................................... 15
4.1.
La formation continue des enseignants des écoles primaires, des collèges et des lycées ............. 15
4.2.
La formation continue des enseignants des universités .............................................................. 20
5.
Pistes d’amélioration favorisant le perfectionnement professionnel des enseignants ......... 22
6.
Conclusion .................................................................................................................................... 28
7.
Références .................................................................................................................................... 29
DISCLAIMER
The views expressed in this report are those of the author and therefore in no way reflect
the official opinion of the European Commission.
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
1. Introduction
1. Le système éducatif tunisien est composé, au niveau structurel, de :
- L’enseignement de base obligatoire qui dure 9 ans et qui est constitué d’un premier
cycle primaire de 6 ans et d’un second cycle, ou cycle préparatoire, de 3 ans dispensé
dans des collèges.
- L’enseignement secondaire qui dure 4 ans et qui est sanctionné par le baccalauréat.
- L’enseignement supérieur sanctionné par les diplômes de licence, mastère et
doctorat.
- Le système de formation professionnelle qui délivre trois niveaux de diplômes suite
à l’enseignement de base (Certificat d’aptitude professionnelle, Brevet de technicien
professionnel et Brevet de technicien supérieur) ainsi qu’un ensemble de certificats
non diplômants. Le système de formation professionnelle n’étant pas traité dans le
présent rapport.
2. Les projets de réforme du système éducatif tunisien se sont succédé au cours des
dernières décennies que ce soit au niveau de l’enseignement de base, du secondaire ou
du supérieur engendrant de nouvelles obligations et de nouveaux défis pour les
enseignants.
Dans le cas de l’enseignement supérieur, à titre d’exemple, l’évolution accélérée qu’a
connue l’université tunisienne depuis les années 1970 a conduit à une multiplication des
défis concernant la fonction enseignante, caractérisée par des charges horaires
statutaires faibles, une sélection centralisée des nouvelles recrues, des critères de
recrutement et de promotion mal adaptés, une dévalorisation de la fonction
d'enseignement et l'absence d'évaluation et de formation académique en pédagogie de
l’enseignement supérieur. Le défi pédagogique est l’un des défis majeurs auxquels fait
face l’université tunisienne. En effet, la mutation de plus en plus nécessaire des
universités vers des méthodes interactives et motivantes, pour des étudiants appelés à
prendre en charge leur propre formation à court et long terme, requiert que les
enseignants ne soient plus perçus comme de simples agents chargés de transmettre des
connaissances, qu’ils maîtrisent les méthodes pédagogiques proches de la façon avec
laquelle l’étudiant apprend, qu’ils contribuent à développer les compétences génériques
et non seulement cognitives et qu’ils œuvrent pour une meilleure insertion sociale et
professionnelle de l’étudiant. Le défi pédagogique auquel font face les universités
tunisiennes requiert somme toute un professionnalisme accru de la part de l’enseignant
universitaire pour s’adapter aux changements continus dans les conditions d’exercice
de son métier. Le cas des enseignants universitaires ne fait pas l’exception. Les
instituteurs comme les enseignants des collèges et des lycées se trouvent eux aussi dans
des situations professionnelles, de plus en plus variées, les contraignant à exercer le
métier d’enseignant avec plus de professionnalisme.
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Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
La formation des enseignants, quel qu’en soit le niveau, est un impératif pour améliorer
les pratiques des enseignants. Dans un rapport récent de McKinsey, l’amélioration
continue des pratiques pédagogiques des enseignants et de l'animation pédagogique par
les chefs d'établissement a été identifiée comme l’une des trois clés de l’amélioration
des systèmes scolaires. Les deux autres clés étant la valorisation et l’attractivité du
métier d’enseignant permettant de recruter les meilleurs talents et le soutien renforcé
donné en priorité aux élèves et écoles les plus en difficulté.
La formation des enseignants est l’un des déterminants de la réussite des réformes
engagées dans le système éducatif tunisien.
3. Le présent rapport de synthèse est rédigé dans le cadre du projet Tempus Tetrai. Il a
pour objectif d’établir un état des lieux de la formation des enseignants en Tunisie.
Il se base sur les présentations effectuées dans le cadre de l’atelier du 27-28 mars
2014 organisé au CENAFFE à Carthage dans le cadre du projet Tempus Tetrai ;
sur des études empiriques basées sur des focus groups auprès des acteurs concernés
(enseignants, directeurs, inspecteurs), sur l’analyse de rapports des inspecteurs ; et
sur des études et rapports d’analyse de la littérature sur la formation des
enseignants et des tendances internationales dans le domaine.
4. Ce rapport de synthèse est organisé en quatre chapitres. Le premier chapitre fournit
une présentation quantitative succincte concernant les enseignants dans le système
éducatif tunisien. Les deuxième et troisième chapitres dressent successivement un
état des lieux concernant la formation initiale puis la formation continue des
enseignants. Le quatrième chapitre est dédié aux pistes d’amélioration identifiées.
2. Les enseignants dans le système éducatif tunisien
2.1.
Les enseignants dans les écoles primaires, les collèges et les lycées
5. Le premier cycle de l’enseignement de base (ou cycle primaire), d’une durée de 6 ans
subdivisés en trois degrés de deux ans chacun, est dispensé dans les écoles primaires.
Le cycle primaire a pour objectifs de doter l’élève des instruments d’acquisition du
savoir, des mécanismes fondamentaux de l’expression orale et écrite, de la lecture et du
calcul. Il lui permet de se doter des compétences de communication dans la langue arabe
et au moins dans deux langues étrangères. Il vise en outre, à aider l’apprenant à
développer de son esprit, son intelligence pratique, sa sensibilité artistique et ses
potentialités physiques et manuelles, ainsi qu’à son éducation aux valeurs de
citoyenneté et aux exigences du vivre ensemble. Il y a en Tunisie 4523 écoles primaires
accueillant 1 029 559 élèves dont 48,1% de sexe féminin en 2012-2013.
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Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
Des écoles préparatoires techniques ont par ailleurs été créées depuis 2007-2008 pour
les élèves qui ont terminé la septième année de l’enseignement de base et qui ont des
aptitudes scientifiques et des habilités techniques. La durée des études est de deux ans
conduisant à l’obtention du diplôme de fin d’études de l’enseignement de base
technique. Il y a 88 écoles préparatoires techniques. Elles accueillent de moins en moins
d’élèves puisque l’effectif d’élèves inscrits est passé de 20 710 en 2008-2009 à 12 864
en 2012-2013. Le nombre d’élèves par classe est de 22,1.
Le nombre d’instituteurs dans les écoles primaires est de 59 786. Le taux d’encadrement
est de 17,2 élèves par enseignant. Les instituteurs sont encadrés par 590 inspecteurs
encadrant chacun en moyenne 101 enseignants et par 856 assistants pédagogiques en
2012-2013.
74% des instituteurs sont âgés de 30 à 50 ans. Le corps enseignant dans le premier cycle
de l’enseignement de base est en effet constitué dans sa majeure partie d’enseignants
relativement jeunes ; ce qui constitue un facteur en faveur de l’investissement dans
l’amélioration des compétences des enseignants.
Le corps enseignant des écoles primaires a par ailleurs tendance à se féminiser. Depuis
une dizaine d’années le pourcentage des femmes étant devenu supérieur à celui des
hommes et atteint 55,7% en 2010-2011.
La majorité des enseignants des écoles primaires (74,9%) relèvent des deux catégories
maîtres d’application et maître d’application principal caractérisées par un niveau de
diplôme allant de bac à bac+2 et une ancienneté de plus de 6 ans pour la 1ère catégorie
et de plus de 10 pour la 2ème. Il s’agit d’une catégorie dont la formation initiale reste
faible au regard des normes internationales actuelles mais dotée d’une expérience
pédagogique appréciable. La catégorie des professeurs d’écoles primaires celle des
titulaires de la maîtrise (bac+4) reste minoritaire puisqu’elle ne représente que 0,8%.
S’agissant de la répartition géographique, 62,3% des enseignants exercent dans une
zone communale (urbaine) parmi lesquels 67% sont des femmes, dont près de 80%
relèvent des catégories de maître d’application et de maître d’application principal. Par
contre en zone non communale (rurale) ce sont les hommes qui sont majoritaires, ils
représentent 63,1%.
6. Le second cycle de l’enseignement de base (ou cycle préparatoire), d’une durée de trois
ans, est dispensé dans les collèges. Au terme de ce cycle, tout élève qui le désire peut
passer un examen national en vue de l’obtention du diplôme de fin d’études de
l’enseignement de base. Ce cycle préparatoire a pour objectifs de doter l’apprenant des
compétences de communication dans la langue arabe et au moins dans deux langues
étrangères et de lui faire acquérir les connaissances et les aptitudes requises dans les
domaines scientifiques, techniques, artistiques et sociaux permettant l’intégration dans
l’enseignement secondaire, la formation professionnelle ou l’insertion dans la société.
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Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
L’enseignement secondaire est ouvert à tous les titulaires du diplôme de fin d’études de
l’enseignement de base. Il a une durée de quatre ans. La première année représente le
tronc commun et a pour but de renforcer les pré-acquis de l’élève lors du cycle
préparatoire (collège) et de l’aider à choisir l’orientation qui lui correspond. La
deuxième année concerne l’une des filières suivantes proposées aux élèves (lettres,
sciences, économie et services et la filière technologies de la communication). La
troisième période, d’une durée de deux ans, concerne l’une des six sections proposées
aux élèves (lettres, mathématiques, sciences expérimentales, sciences techniques,
économie et gestion, sciences informatiques). La section sport est dispensée dans des
lycées spécialisés.
Il y a en Tunisie 1 386 collèges et lycées accueillant 908 600 élèves dont 53,9% de sexe
féminin en 2012-2013. Le nombre d’élèves par classe est de 25,4.
Le nombre d’enseignants est de 73 490. Chaque enseignant encadre en moyenne 12,4
élèves. Le nombre d’inspecteurs dans les collèges et les lycées est de 636 en 2012-2013
encadrant chacun en moyenne 115 enseignants.
Dans l’ensemble, le corps enseignant des collèges et lycées est plutôt jeune. 52,2 % des
enseignants ont moins de 40 ans et 61,8% ont moins de 15 ans d’ancienneté. Cette
donnée structurelle représente une opportunité pour un système éducatif qui veut se
transformer en intégrant des innovations en pédagogie et dans la vie scolaire.
Le pourcentage des femmes est supérieur à celui des hommes. En 2010-2011 il a atteint
51,8%.
83,6% des enseignants des collèges et lycées sont titulaires de la maîtrise. Cela signifie
que dans l’ensemble le niveau scientifique dans la spécialité, sauf exceptions, est a priori
assuré.
Les enseignants les plus qualifiés sur les plans académique (diplôme) et de la durée de
l’expérience pédagogique (ancienneté) exercent dans les zones dites favorisées.
2.2.
Les enseignants dans les universités
7. Il existe 13 universités publiques (dont 1 université virtuelle) en Tunisie. Le nombre
d’établissements publics d’enseignement supérieur s’élève à 198. 80% de ces établissements
ont une capacité d’accueil de moins de 3 000 étudiants.
Parmi les 198 établissements, il y 25 instituts supérieurs des études technologiques sont placés
sous la tutelle de la direction générale des études technologiques au Ministère de l’enseignement
supérieur et de la recherche scientifique.
La Tunisie se caractérise par un engagement fort en faveur des institutions universitaires
publiques. Le secteur privé est relativement récent. Il ne compte que 46 institutions dont
65% localisées dans la capitale et accueillant à peine 21 642 étudiants.
L’effectif des étudiants en Tunisie est de 315 513 en 2012-2013. Selon les prévisions
de l’Institut Tunisien de la Compétitivité et des Etudes Quantitatives, les effectifs
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d’étudiants demeureront au dessus de 300 000 au moins jusqu’en 2020. L’évolution des
effectifs d’étudiants s’explique par plusieurs facteurs. Le nombre de jeunes de la tranche
d’âge 20-24 ans a augmenté de 818 718 en 1994 à 1 043 600 en 2010. Le taux de
scolarisation dans l’enseignement supérieur est passé de 14% en 1994 à des niveaux
record au-dessus des 37% enregistrés en 2009. L’évolution du nombre d’étudiants est
aussi déterminée par le nombre des admis au concours national du baccalauréat. Ce
nombre a été boosté depuis le début des années 2000 grâce à la comptabilisation de la
moyenne annuelle des élèves à hauteur de 25% dans le calcul de la moyenne au concours
national de baccalauréat.
L’effectif des enseignants dans le supérieur a connu une évolution très importante
notamment au cours des vingt dernières années. Le nombre total d’enseignants est passé
de 4 941 en 1992 à 11 412 en 2001 puis à 22 878 en 2012-2013.
Dans les universités 1, on compte 17 066 enseignants chercheurs. Les enseignants
chercheurs représentent 80% des enseignants dans les universités. Les autres catégories
d’enseignants (professeurs de l’enseignement secondaire, experts, professeurs visiteurs,
artisans,…) représentent en moyenne 20% des enseignants dans les universités.
Les 17 066 enseignants chercheurs ne sont pas tous statutaires. 21% d’entre eux sont en
effet des contractuels et relèvent pour la quasi-totalité du grade d’assistant. Les
enseignants contractuels représentent toutefois une proportion conséquente du corps
enseignant de certains établissements (en particulier les nouveaux établissements et
ceux situés dans les jeunes universités), ce qui n’est pas sans impact négatif sur la qualité
de l’enseignement et de l’encadrement dans ces établissements vu que les enseignants
contractuels sont recrutés sur dossier sans une évaluation par les jurys de recrutement.
Malgré les efforts au niveau des recrutements des enseignants chercheurs, le taux
d’encadrement par les enseignants statutaires a beaucoup augmenté sous l’effet de la
très forte progression des effectifs d’étudiants. Ce taux demeure supérieur à 23 étudiants
par enseignant statutaire depuis 1995 sachant que le seuil de 30 étudiants a été franchi
à plusieurs reprises dans les années 2000. Une tendance de réduction du taux
d’encadrement a tout de même été enregistrée depuis 2008-2009 et devrait se poursuivre
dans l’avenir. Le taux d’encadrement devrait atteindre 19,2 étudiants par enseignant
statutaire en 2015 d’après les prévisions du ministère.
Ce problème de l’encadrement n’est pas uniquement quantitatif. Il est aussi qualitatif.
L’évolution du nombre d’enseignants du collège A n’a pas suivi le même rythme que
l’évolution de l’effectif des étudiants. La proportion des professeurs et des maîtres de
conférences parmi les enseignants chercheurs, hormis les hospitalo-universitaires, est
restée presque stable, variant entre 17% et 18%. Dans les universités de l’intérieur, les
enseignants du collège A ne représentant que 1,6% des enseignants à l’université de
Kairouan, 1,9% à l’université de Gafsa, 3,4% à l’université de Jendouba et 4% à
l’université de Gabès. L’essentiel de l’encadrement des étudiants dans les universités
tunisiennes est donc assuré par des enseignants du collège B (statutaires et dans une
1
Il n’est pas tenu compte ici des instituts supérieurs des études technologiques qui ne relèvent pas des universités
et dont les 2022 enseignants ont un statut particulier (enseignants technologues).
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Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
moindre mesure contractuels) ainsi que par d’autres catégories d’enseignants.
3. La formation initiale des enseignants
3.1.
3.1.1.
La formation initiale des enseignants des écoles primaires, des
collèges et des lycées
La formation initiale des instituteurs
8. La formation initiale des instituteurs, exerçant dans le premier cycle de
l’enseignement de base, s’effectue dans les instituts des métiers de l’éducation et
de la formation. Ces instituts ont remplacé depuis 2007 les instituts supérieurs de
formation des maîtres qui ont supplanté les écoles normales d’instituteurs en 1989.
De l’indépendance à 1989, l’orientation vers les écoles normales d’instituteurs se faisait
à la fin de la troisième année secondaire (neuvième année de l’enseignement de base
dans le système actuel). A l’issue d’une formation de trois années 1 et de l’obtention du
diplôme de fin d’études secondaires, les instituteurs normaliens nouvellement recrutés
devaient effectuer un stage d’une année avec la responsabilité d’une classe et suivre une
formation pédagogique théorique. Les instituteurs normaliens représentaient 27,3% de
l’ensemble du corps enseignant du primaire en 2008.
En 1989, les écoles normales d’instituteurs ont été remplacées par les instituts supérieurs
de formation des maîtres dans le cadre de la réforme de la formation des enseignants.
Avec la création des instituts supérieurs de formation des maîtres, le niveau scolaire
requis pour être instituteur est ainsi passé de l’équivalent du baccalauréat à un niveau
de Bac+2. La formation dans ces instituts durait en effet deux années après le
baccalauréat et était répartie en une composante académique dans les différentes
disciplines la première année suivie d’une composante didactique et pédagogique
articulée à un stage pratique préparant à l’intégration dans la profession l’année
suivante.
Il importe de souligner que la formation dans ces instituts a plusieurs atouts tels que
l’élaboration de programmes spécifiques ayant une orientation professionnalisante bien
qu’elle ait été limitée, l’introduction de disciplines nouvelles comme l’informatique et
l’anglais, la mise en place de noyaux de réflexion pédagogique.
Toutefois, les cursus et les programmes dans ces instituts, comme dans toutes les
institutions universitaires en Tunisie, sont demeurés en adéquation limitée avec
l’évolution de la profession notamment en lien avec les mutations au niveau de
l’enseignement de base (changements curriculaires, approche par les
compétences, nouvelles problématiques comme la violence à l’école et l’échec
scolaire, l’intégration des élèves à besoins spécifiques, la faible maîtrise de
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La durée de la formation est passée à 4 années à partir du début des années 1970.
6
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
l’arabe et du français,…). Une autre limite pointue des doigts par diverses études
et évaluations internes et externes de la formation dans les instituts de formation
des maîtres a trait à la faible préparation du corps enseignant dans ces instituts
pour assurer une formation professionnelle requérant une forte articulation entre
les aspects académiques et les aspects pédagogiques/didactiques.
En 2007, il a été décidé de remplacer ces instituts de formation des maîtres par les
instituts des métiers de l’éduction et de la formation. A l’époque, le nombre
d’instituteurs formés dans les instituts de formation des maîtres a atteint 14 985, ce qui
représente près du quart du corps enseignant du primaire.
Les instituts des métiers de l’éducation et de la formation ont été créés par le décret
n°2007-2116 du 14 août 2007 dans les villes de Korba, Sousse et Sfax.
Les missions confiées à ces instituts ne se limitent pas à former les instituteurs. Elles
consistent en ce qui suit :
- doter les candidats aux métiers de l’enseignement, de l’encadrement pédagogique et
de direction des établissements, dans l’enseignement de base, l’enseignement
secondaire et la formation professionnelle, des qualifications requises pour
l’exercice de ces métiers ;
- parachever la formation scientifique initiale des apprenants dans les domaines en
relation directe avec le métier ;
- contribuer à l’innovation pédagogique et au développement de la documentation
éducative ;
- initier les apprenants à la méthodologie de la recherche pédagogique, théorique et
appliquée, et de l’innovation en éducation.
L’accès aux cycles de formation dans ces nouveaux instituts se fait par voie de concours
sur épreuves, sur titres ou sur dossiers. Au terme de leur formation, les apprenants
reçoivent un certificat d’aptitude à l’exercice du métier pour lequel ils ont été formés. 1
Les instituts des métiers de l’éducation et de la formation ont été placés sous la tutelle
du ministère de l’éducation et de la formation. Depuis 2008, le Ministère de
l’enseignement supérieur n’est donc plus responsable de la formation des instituteurs.
Au-delà du changement de la tutelle sur les institutions chargées de la formation des
maîtres, la création des nouveaux instituts a été marquée par une absence de
coordination avec les universités et la non capitalisation sur l’existant au niveau des
instituts de formation des maîtres que ce soit au niveau du personnel enseignant ou au
niveau des infrastructures.
1
La formation dans les instituts des métiers de l’éducation est organisée en cycles selon les domaines de spécialisation :
1- Métiers dans le domaine de l’enseignement et de la formation : enseignant au cycle primaire ; enseignant au cycle
préparatoire et à l’enseignement secondaire ; et formateur à la formation professionnelle.
2 - Métiers dans le domaine de l’encadrement : inspecteur pédagogique et inspecteur de la vie scolaire ; conseiller en
information et en orientation scolaire et universitaire ; conseiller éducatif ; et surveillant.
3 - Métiers dans le domaine de la direction : directeur d’école primaire ; directeur d’école préparatoire ou de lycée ; et
directeur de centre de formation professionnelle.
D’autres cycles de formation - pour d’autres corps de métiers de l’éducation et de la formation - peuvent être créés par
décision du ministre de l’éducation et de la formation.
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Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
9. Les instituts des métiers de l'éducation et de la formation dispensent une formation
professionalisante qui assure aux instituteurs du cycle primaire diplômés de ces instituts
l'acquisition des compétences professionnelles suivantes :
- mettre en œuvre des techniques professionnelles dans différents contextes,
- respecter les règles professionnelles dans les pratiques quotidiennes,
- mettre en œuvre les connaissances requises pour enseigner,
- communiquer et collaborer avec les autres sur la base de règles de conduite et de
disposition affectives professionnellement et socialement acceptables.
Le cycle de formation des instituteurs dure deux semestres, durant lesquels, les
apprenants bénéficient de 1 200 heures au moins réparties sur trois types de savoirs
complémentaires pour réaliser les objectifs de la formation :
- le savoir enseigner : les langues, les sciences exactes et sociales, l'informatique, les
arts plastiques, la musique et l'éducation physique. Une commission technique,
supervisée par le directeur de l'institut, procédera à l'adaptation de la formation se
rapportant à cette partie aux besoins des apprenants selon que leurs diplômes
universitaires relèvent du domaine des langues ou de celui des sciences,
- le savoir requis pour enseigner : les connaissances pédagogiques transversales et
les méthodes d'enseignement des différentes matières (didactique),
- le savoir pratique : la pratique professionnelle dans les classes des écoles primaires
par l'observation de leçons et l'entraînement à l'enseignement et la réalisation de
travaux pratiques pour traiter différentes situations professionnelles.
Il est possible d’assurer une formation complémentaire en vue de renforcer les acquis
ou d'approfondir certains aspects en rapport avec le programme de la formation. Des
conférences, des colloques scientifiques, des voyages d'étude et des activités d'ordre
culturel ou sportif peuvent en effet être organisés dans ce cadre.
Les approches et les méthodes adoptées dans la formation des instituteurs doivent
respecter les fondements suivants :
- privilégier la dimension pratique par rapport à la dimension théorique afin d'assurer
une formation professionnalisante,
- développer les compétences susceptibles de rendre le stagiaire capable de traiter les
situations professionnelles courantes et inédites,
- centrer la formation, dans le domaine du savoir enseigner, sur les contenus du
programme du cycle primaire,
- développer chez l'apprenant la propension à l'autoformation et sa motivation à
adopter une stratégie de travail claire et à construire un projet personnel,
- adopter une approche méditative habituant l'apprenant à analyser et à critiquer ses
pratiques professionnelles afin de les améliorer,
- considérer l'évaluation formative comme une constante de la formation.
La formation des instituteurs est assurée pour des groupes de 20 apprenants sur la base
de la participation active des bénéficiaires et la diversification des modes d'intervention
et d'animation : cours, exposés, ateliers, travaux pratiques, visites sur le terrain, études,
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Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
échanges d'expériences, étude de cas, portfolio, observation de leçons et de séquences,...
Des visites en classes dans les écoles primaires sont effectuées chaque semestre par ces
apprenants.
10. Les évolutions enregistrées au niveau des institutions chargées de la formation initiale
des instituteurs et des caractéristiques de cette formation, malgré leur importance, n’ont
pas comblé certaines insuffisances persistantes et ont-elles mêmes généré de nouvelles
insuffisances qu’il convient de combler.
Parmi ces insuffisances, il ya lieu de citer les suivantes :
- La proportion d’instituteurs ayant un niveau universitaire se situe encore en deçà
des normes internationales actuellement en vigueur. En effet, le taux des enseignants
du primaire ayant reçu un enseignement universitaire positionne encore la Tunisie
dans les derniers rangs dans le domaine de la formation universitaire. Dans
l’ensemble la tendance au niveau international est d’exiger pour enseigner un niveau
de diplôme universitaire plus élevé de Bac+3 (Bachelor) ou même Bac+5 (Mastère)
au pré-primaire, au primaire et au secondaire inférieur. Elle est majoritairement de
Bac+5 au secondaire supérieur. La tendance générale au niveau international est
aussi de prévoir une année de qualification professionnelle rémunérée et assistée,
après le diplôme.
- Les évolutions successives au niveau institutionnel sont à l’origine d’une forte
hétérogénéité du corps des instituteurs en ce qui concerne leur niveau de formation
académique. Ainsi, lors de la création des instituts des métiers de l’éducation et de
la formation, les instituteurs formés dans les écoles normales d’instituteurs ne
représentaient que 27,3%. Ceux qui sont formés dans les instituts supérieurs de
formation des maîtres ne représentaient pour leur part que 23,9%.
- La formation initiale qualifiante des instituteurs n’a pas concerné tous les
instituteurs. Près de la moitié des instituteurs en exercice ont en effet accédé à ce
métier directement avec un diplôme universitaire ou avec un niveau de
l’enseignement secondaire : les instituteurs titulaires d’un diplôme de maîtrise
représentent 5,7% des instituteurs ; ceux qui sont titulaires d’un diplôme de premier
cycle de l’enseignement supérieur représentent 0,7% des instituteurs ; ceux qui sont
recrutés parmi les titulaires du baccalauréat représentent 36,4% des instituteurs. La
proportion d’instituteurs recrutés avec un niveau secondaire sans qu’ils ne soient
titulaires du baccalauréat est réduite.
- Il n’y a pas d’articulation de la formation initiale des instituteurs avec la formation
continue d’une part et avec la recherche en éducation d’autre part. Les instituts des
métiers de l’éducation et de la formation fonctionnent en effet d’une manière isolée
par rapport au Centre national de formation des formateurs en éducation et le Centre
national d’innovation pédagogique et de recherche en éducation. L’absence de
coordination se situe même entre les trois instituts des métiers de l’éducation et de
la formation.
- La coordination entre le ministère de l’éducation et le ministère de l’enseignement
supérieur depuis la création des instituts des métiers de l’éducation et de la formation
en 2008 est inexistante. Cette séparation est plus profonde que l’absence de
coordination institutionnelle puisqu’il n’y a plus d’articulation entre la formation
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Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
-
-
3.1.2.
universitaire et la formation au métier d’instituteur.
Le modèle de formation en vigueur est le modèle traditionnel ou "consécutif". La
formation professionnelle de l’enseignant est introduite après la formation
disciplinaire. En Europe, c’est plutôt le modèle "simultané", basé sur l’alternance
de formations disciplinaire et professionnelle, qui est de plus en plus privilégié.
Un bon fonctionnement d’une institution de formation des enseignants requiert une
bonne planification des besoins en enseignants. Or, celle-ci est aléatoire en Tunisie.
La formation initiale des enseignants des collèges et des lycées
11. Les enseignants du cycle préparatoire et de l’enseignement secondaire sont recrutés
parmi les titulaires du diplôme de maîtrise (Bac+4) ou plus et depuis l’introduction du
système LMD en Tunisie parmi les titulaires d’un diplôme de licence (Bac+3) ou plus.
Les titulaires d’une maîtrise représentaient 85% des enseignants en 2008.
Le recrutement est tributaire de la réussite au concours du CAPES qui comprend des
épreuves écrites à caractère académique et disciplinaire.
12. La formation initiale de base des candidats au concours est assurée à travers des
contenus de type académique dans les établissements universitaires (facultés et instituts
des sciences et techniques, des sciences humaines, des langues, des sciences
économiques,…). Certaines de ces formations comprennent un cours de didactique
intégré au second cycle de la maîtrise.
L’École normale supérieure forme des enseignants de haut niveau dans les diverses
disciplines pour répondre aux besoins des établissements d’enseignement secondaire et
les établissements d’enseignement supérieur et de recherche. Elle les prépare aussi au
concours d’agrégation. La formation académique à l’école normale devrait rendre les
futurs enseignants aptes à assumer un rôle d’avant-garde dans la promotion du niveau
de l’éducation, de l’enseignement et de la recherche dans les différentes institutions.
Elle développe leurs potentialités intellectuelles, leurs capacités professionnelles, leurs
dispositions et aptitudes à la pédagogie et à la recherche scientifique, leur culture
générale ainsi que leur formation sociale. Cette formation étant assurée à la fois par les
enseignants universitaires et par des inspecteurs. La qualité de cette formation est très
souvent mise en avant par les enseignants et les inspecteurs.
Les enseignants recrutés parmi les titulaires d’un diplôme de mastère ont suivi, pour
certains d’entre eux, un cours de pédagogie dans les conditions décrites ci-dessous.
Les instituteurs promus en tant qu’enseignants des collèges ou des lycées suite à des
études à distance à l’Institut supérieur de l’éducation et de la formation continue
bénéficient pour leur part d’une formation initiale conséquente en didactique des
disciplines.
13. Les nouvelles recrues admises au concours de recrutement des enseignants
bénéficient d’une session d’initiation professionnelle, d’une durée d’un trimestre,
comportant des cours de pédagogie générale et de didactique de la discipline ainsi
10
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
qu’un stage pratique dans un collège ou un lycée. Le décret de création des instituts
des métiers de l’éducation et de la formation stipule que cette formation soit assurée par
les dits instituts.
La formation professionnelle des enseignants des collèges et des lycées est ainsi
introduite après leur formation disciplinaire. Contrairement à l’Allemagne, la Tunisie
adopte en effet le modèle traditionnel dit "consécutif". En Allemagne, c’est plutôt le
modèle de formation « simultanée », basé sur l’alternance entre formations disciplinaire
et professionnelle, qui est privilégié dans les niveaux de l’enseignement primaire et
secondaire.
14. Il importe de mentionner que la formation initiale des enseignants des collèges et des
lycées dans le cadre de leurs études universitaires souffre d’insuffisances remarquables
qui ne se limitent pas à la prédominance de son caractère académique.
L’orientation des nouveaux bacheliers vers les maîtrises et actuellement les licences
fondamentales, qui débouchent pour la plupart d’entre elles au métier d’enseignant, ne
tient pas compte de critères liés au profil d’un futur enseignant.
Le contenu de ces maîtrises et licences fondamentales n’est pas déterminé par rapport à
un métier mais par rapport à une discipline. Lors de leur formation initiale à l’université,
les futurs enseignants sont donc indubitablement dotés en connaissances scientifiques
dans leurs disciplines. Mais, cela ne suffirait pas pour développer chez eux des aptitudes
à enseigner la discipline, à gérer des situations d’enseignement/apprentissage dont la
complexité et l’hétérogénéité se sont accrues, à adopter une approche réflexive par
rapport à leurs propres pratiques, à échapper à une application mécanique des méthodes
prescrites dans les programmes officiels,… La formation professionnelle initiale des
enseignants des collèges et des lycées gagnerait donc à être renforcée dans le cadre des
cursus universitaires débouchant principalement vers une carrière d’enseignement.
Par ailleurs, la durée de la formation d’initiation professionnelle dont bénéficient
les nouvelles recrues semble être courte pour développer la professionnalisation
souhaitée. Il est même certain qu’elle soit trop courte si l’on se réfère au nécessaire
développement de compétences professionnels transversales des nouveaux
enseignants et non pas uniquement des compétences professionnelles disciplinaires.
Ces compétences professionnelles transversales s’avèrent désormais indispensables
suite aux mutations et à l’émergence de besoins nouveaux accentués par les
réformes successives de l’enseignement. En effet, il est désormais difficilement
concevable qu’un enseignant dans un collège ou un lycée exerce convenablement
sa mission s’il n’a pas appris au préalable à travailler en équipe, à collaborer avec
l’administration, à s’impliquer fortement à la vie scolaire, à dialoguer et à coopérer
avec les parents, à réagir face à la problématique de l’échec scolaire, à gérer les
élèves en difficulté, à gérer les situations de violence, à exploiter les TIC dans
l’enseignement de sa discipline, à se former tout au long de sa carrière
professionnelle,…
11
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
3.2.
La formation initiale des enseignants des universités
15. Le recrutement des enseignants chercheurs dans les différents grades de
l’enseignement supérieur en Tunisie s’effectue à partir de concours qui prennent
en considération le diplôme académique, les travaux de recherche et les prestations
orales au cours des entretiens avec les membres des commissions de recrutement.
Une circulaire incite ces commissions à prendre en compte aussi les travaux ou
recherches à caractère pédagogique ainsi que la confection de CD à caractère
didactique ou autre. Mais, l’application de cette recommandation diffère d’une
commission à l’autre. Le recrutement au grade d’assistant de l’enseignement
supérieur requiert au minimum un diplôme de mastère (Bac+5) et l’avancement
dans les travaux de thèse.
Les candidats sont censés avoir bénéficié d’un encadrement pédagogique au
second semestre du mastère introduit depuis la réforme des mastères en 2004.
Néanmoins, la qualité de cette préparation est variable d’une université à l’autre
voire d’une formation à l’autre au sein d’un même établissement. Cela dépend en
effet de plusieurs facteurs dont le degré de conviction de l’équipe mobilisée pour
assurer cette préparation quant l’intérêt d’une formation de type pédagogique à
l’université, de la capacité du membre de l’équipe pédagogique du mastère à
assurer un tel cours, du nombre d’étudiants par classe,… L’atteinte des objectifs
d’apprentissage associés à cette partie de la formation n’est pas garantie dans
toutes les formations de mastères parfois faute d’enseignant habilité à le faire, dans
d’autres cas à cause d’une confusion de ce cours avec une préparation à la
méthodologie de la recherche,… Concrètement, la plupart des nouvelles recrues
s’insèrent dans les universités sans avoir le minimum de préparation
professionnelle et didactique préalable et appropriée bien qu’elles soient appelées
à exercer dans un contexte universitaire caractérisé par un phénomène de la
massification, l’hétérogénéité des profils et des performances chez les étudiants,
une détérioration continue du niveau des nouveaux étudiants et des changements
dans les structures et les contenus d’enseignement.
16. Les assistants universitaires nouvellement recrutés bénéficient d’une formation
d’initiation pédagogique instituée depuis 2006. Cette formation est assurée dans des
conditions institutionnelles variant d’une université à l’autre. Ces conditions sont
souvent difficiles : manque de formateurs confirmés, pléthore des effectifs, absence
d’analyse des besoins des assistants en début de formation, assistants fonctionnant
dans des situations souvent difficiles, caractère obligatoire et contraignant de la
formation, faible implication des assistants dans leur formation, déplacement des
assistants vers les chefs-lieux chaque fois qu’il y un séminaire de formation,…
La formation s’étale sur 140 heures réparties sur deux ans. Elle est assurée par des
universitaires volontaires dont une partie (la plupart selon certains) n’a reçu aucune
formation à l’andragogie, à l’animation de formation ni en ingénierie de la formation.
-
Le cas de la formation des assistants et maîtres-assistants nouvellement recrutés à
12
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
l’université de Sousse a été présenté lors de l’atelier du 27 et 28 mars 2014 organisé
au CENAFFE à Carthage dans le cadre du projet Tetrai. L’expérience de l’université
de Sousse dans ce domaine remonte à 2004. Les participants sont répartis en groupes
de 25 à 30 participants. Au cours de la période 2004-2011, les participants
poursuivaient une formation théorique la première année et une formation en petits
groupes basée sur les exposés la deuxième année. Parmi les thèmes abordés figurent
les suivants : le cours magistral, l’interaction avec les étudiants, la numérisation d’un
cours, l’évaluation de l’apprentissage et la méthodologie de la recherche.
A partir de 2012, des améliorations ont été apportées pour renforcer le dispositif de
formation en place. Un conseil pédagogique universitaire (Vice-recteur) a été institué.
Les thèmes retenus pour la formations des nouvelles recrues sont au nombre de huit :
planification des apprentissages, moyens d'Apprentissage, cours Magistral et moyens
audio-visuels, évaluation des apprentissages, scénarisation, numérisation d’un cours,
animation de groupe, motivation des apprenants et méthodologie de la recherche.
17. Une enquête a été réalisée par un groupe de recherche en 2009 auprès de 302 assistants
ayant participé à la formation, appartenant à toutes les spécialités et exerçant dans les
universités multidisciplinaires de Tunis, El Manar, Jendouba, Kairouan et Gabes. Elle
avait pour objectif d’évaluer l’implication des assistants dans la formation
pédagogique qu’on leur avait proposée, et de dégager les causes personnelles et
institutionnelles de cette implication. Les conclusions suivantes figurent parmi les
principaux résultats de cette enquête :
- Le cinquième des assistants interviewés trouve la formation pédagogique reçue
pertinente, par rapport à leur statut professionnel de novices. Les autres trouvent la
formation non pertinente, voire inutile et souhaiteraient la voir supprimée.
- Le quart des sujets interrogés trouve la formation pédagogique reçue, utile par
rapport aux problèmes qu’un assistant novice peut rencontrer quotidiennement dans
sa classe. Il importe de rappeler ici l’absence d’une analyse préalable des besoins
des assistants en matière de formation pédagogique.
- Presque la moitié des assistants déclare ne venir aux séminaires de formation que
par obligation professionnelle. Seul un cinquième déclare s’être impliqué réellement
dans les séminaires de formation (participation aux débats, lecture des documents
pédagogiques, questions posées aux formateurs…)
- Il y a un manque d’implication de la plupart des assistants interrogés dans la
formation suivie (4/5 des interviewés).
- La formation gagnerait à inclure une analyse des besoins en début de formation et
adapter les programmes de formation aux besoins réels des assistants. D’autres
recommandations devraient également être étudiées : instituer une formation
contractuelle et l’expliquer aux stagiaires ; initier les assistants à l’analyse de leurs
pratiques pédagogiques ; confier les assistants à des tuteurs au sein de leur institution
et les former à la tenue d’un portfolio.
Après plusieurs années d’expérimentation, cette formation devrait être évaluée pour en
dégager les mérites et les limites et pouvoir par conséquent en améliorer le rendement.
18. Il serait pertinent de présenter deux expériences particulières (bonnes pratiques ?)
de formation initiale d’enseignants universitaires dont le statut est distinct de celui
13
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
des enseignants chercheurs : les agrégés et les enseignants technologues.
Historiquement, l'agrégation a été créée pour pourvoir l'enseignement secondaire
en professeurs de haut niveau. En pratique, les agrégés sont rapidement apparus
comme indispensables au développement de l'université et particulièrement au
développement des instituts préparatoires aux études d'ingénieurs.
La préparation aux épreuves écrites et orales des concours d'agrégation dure deux
années. Cette préparation a pour objectif de donner aux étudiants une vision
transversale de leur discipline, de consolider leurs connaissances et de les préparer
à la transmission du savoir. Durant cette période, les enseignements suivis par
l'élève agrégatif sont de plusieurs types :
- Des enseignements "théoriques", ayant pour objet l'acquisition et la remise
en perspective des notions faisant partie du programme du concours.
L'enseignement comporte des cours, des leçons présentées par les étudiants
et commentées par les professeurs. Cette activité spécifique à la préparation
du concours d'agrégation permet d'évaluer le niveau scientifique des
candidats, leur capacité d'analyse et de synthèse et leurs qualités
pédagogiques.
- Une préparation à l'écrit, constituant en séances d'exercices et problèmes, en
devoirs assistés, devoirs à la maison et devoirs en temps limité.
- Une préparation pratique, aussi bien à l'oral qu'aux épreuves de montage
(pour les Sciences Physiques). La préparation à l'oral est une simulation,
devant la classe et un certain nombre d'enseignants, de la leçon d'agrégation:
l'élève agrégatif a une à deux semaines pour s'y préparer, en utilisant toutes
les ressources de la bibliothèque, et en s'appuyant sur les conseils des
enseignants chargés d'encadrer cette activité. La leçon a pour objectif de
développer d'une part la maîtrise synthétique du programme du concours,
d'autre part les qualités de communication. La préparation pratique
comporte, aussi un encadrement soutenu aux laboratoires de physique et de
chimie permettant aux étudiants d'acquérir un savoir faire expérimental,
d'être en relation directe avec l'expérience et d'être capable de faire le lien
entre théorie et expérience.
- Une préparation au métier d'enseignant, assurée par la participation
progressive des élèves agrégatifs à l'encadrement des élèves de
Mathématiques supérieur, en qualité de " colleurs ". Les épreuves orales et
en particulier, l'épreuve de montage de physique teste les qualités nécessaires
pour un futur enseignant de sciences physiques.
Pour répondre aux exigences du développement de l’enseignement technologique lors
de la création du réseau des instituts supérieurs des études technologiques (ISET), un
nouveau corps d’enseignants universitaires, celui des enseignants technologues, a été
créé. Contrairement aux enseignants chercheurs, les enseignants technologues vu qu’ils
sont appelés à assurer principalement une charge d’enseignement (plus conséquente par
rapport aux enseignants chercheurs), ont bénéficié d’un programme de formation initiale
et ayant pour objectif de développer leurs compétences théoriques, technologiques et
pédagogiques. Ce programme, dans sa première phase appuyée par la Banque mondiale
(5 promotions sur 10 soit 660 enseignants technologues concernés), est structuré autour
d’un cycle de formation réservé aux admis à un concours d’entrée parmi les titulaires
14
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
d’un diplôme de maîtrise ou d’ingénieur et est couronné par l’obtention d’un Certificat
d’Etudes Supérieures Spécialisées. Ce cycle de formation comporte quatre phases :
- Une formation générale et technologique (40 semaines étalées sur 3 semestres)
assurée en partie par des professeurs étrangers ayant une expérience confirmée
dans l'enseignement supérieur technologique. Cette formation, préparant au
concours d’agrégation, est conçue de manière à responsabiliser les étudiants
(futurs enseignants technologues) à travers la réalisation de projets, des travaux
pratiques, l’auto-formation, la préparation et l’animation de cours devant
l’enseignant et le groupe,…
- Une formation pédagogique pratique assurée par des spécialistes canadiens et un
stage pédagogique pratique de 3 mois dans un Cegep canadien ou un Institut
Universitaire de Technologie français ou une Haute école belge. Le stagiaire est
tenu de participer activement dans les enseignements dans le département
d’accueil (cours, séminaires, travaux pratiques, assistance lors de la rentrée
scolaire,…).
- Un stage de deux mois dans l’industrie.
- Un programme d’insertion progressive des nouveaux assistants technologues
dans l'environnement de l'institut d’affectation et de préparation de la prise de
fonctions d'enseignement (intégration dans l'équipe pédagogique, responsabilité
de préparation de cours et en particulier de travaux pratiques, participation à des
jurys de fin d'année et des jurys d'admission, visites internes, contacts avec
l'industrie,…) avec l’encadrement par un enseignant expérimenté ayant au moins
le grade de technologue.
4. La formation continue des enseignants
4.1.
La formation continue des enseignants des écoles primaires, des
collèges et des lycées
19. La formation continue est une obligation et un droit en Tunisie.
La loi d’orientation n°2002-80 du 23 juillet 2002, relative à l’éducation et à
l’enseignement scolaire, stipule dans son article n°46 que tous les membres du
personnel éducatif et administratif sont astreints, tout au long de leur carrière, à la
formation continue. La formation continue étant considérée dans cette loi comme
une nécessité dictée par les mutations qui affectent le savoir et la société et par
l'évolution des métiers. Elle doit être organisée selon les exigences dictées par
l'évolution des méthodes et des moyens d'enseignement et de son contenu, l'intérêt
des élèves et de l'école, et les besoins liés à la promotion professionnelle.
Les statuts particuliers du corps des enseignants relevant du ministère de
l’éducation, tels que fixés par le décret n°2013-2225 du 3 juin 2013 et le décret
n°2013-666 du 29 janvier 2013, prévoient une obligation de participer à la
formation des enseignants et de les assister pédagogiquement ; et ce en plus de
15
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
l’obligation de participer aux travaux, études, séminaires et leçons témoins
destinées à l’amélioration du niveau de l’enseignement.
L’existence de ce cadre réglementaire stipulant ce droit à la formation continue et
le caractère obligatoire de celle-ci est importante. Elle témoigne en effet d’une
volonté d’amélioration de la qualité de l’enseignement à travers la
professionnalisation du métier d’enseignant. Cependant, dans les faits,
l’enseignant qui ne se présente pas à un atelier de formation continue n’est passible
d’aucune sanction. Seuls les enseignants en phase de titularisation se trouvent
effectivement contraints à participer aux actions de formation continue.
20. Il convient de souligner de l’importance accrue accordée à la formation
continue et se manifestant dans la création récente d’une direction générale
au ministère de l’éducation dédiée à la formation continue.
Depuis le mois d’octobre 2011 (Décret n° 2011-2858 du 7 octobre 2011), une
direction générale spécifique, nommée direction générale des programmes et de la
formation, a été créée au ministère de l’éducation.
La direction générale des programmes et de la formation continue a pour mission,
dans le cadre de la politique éducationnelle et en coordination avec les directions
et établissements concernés, d'élaborer les programmes d'enseignement, les
manuels scolaires et les moyens didactiques et de concevoir, planifier, organiser et
suivre la formation continue et de recyclage des personnels du ministre de
l'éducation. En ce qui concerne le corps enseignant et la formation continue, cette
direction générale est chargée notamment de :
- définir et développer les normes et les référentiels organisant les différentes
professions et fonctions en relation avec l'enseignement scolaire ;
- concevoir, planifier et organiser les programmes de la formation continue
et recyclage des personnels du ministère de l'éducation ;
- suivre l'exécution des programmes de la formation continue et de mise à
niveau des personnels du ministère de l'éducation.
21. Plusieurs acteurs sont habilités à dispenser la formation continue mais avec
des modalités diversifiées.
Le conseil pédagogique des enseignants dans un établissement scolaire est chargé, entre
autres tâches listées dans le décret n° 2012-827 du 11 juillet 2012, de déterminer les
besoins des enseignants en matière d'encadrement et de formation continue. Les besoins
en formation continue devraient donc être établis dans l’établissement scolaire sur la
base d’une concertation entre les enseignants. Mais, cela n’est pas le cas dans tous les
établissements scolaires puisque le conseil pédagogique des enseignants reste peu actif,
particulièrement en ce qui concerne la formation continue de l’enseignant. Par ailleurs,
il n’est pas certain que les enseignants soient à même de formuler des demandes
16
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
objectives de formation au directeur de leur établissement ou à leur inspecteur tant qu’ils
sont peu préparés à réfléchir sur leur propre formation, à établir des liens de causes à
effets entre certaines faiblesses constatées dans les résultats scolaires de leurs élèves et
les lacunes existant dans leur propre formation.
La réponse aux besoins de formation identifiés dans l’établissement scolaire peut
s’effectuer en faisant appel à l’inspecteur de l’école. Les inspecteurs ainsi que les
assistants pédagogiques dans le cas du primaire ou les conseillers pédagogiques dans le
cas du secondaire, en plus d’évaluer les enseignants, sont en effet appelés à contribuer
à les former et sont dotés des compétences nécessaires pour accomplir cette mission.
D’après les statistiques officielles, le nombre d’instituteurs ne dépasserait pas 87 par
inspecteur et 71 par assistant pédagogique. Il y a dans le 2ème cycle de l’enseignement
de base et dans le secondaire en moyenne un inspecteur pour 112 enseignants.
Dans le cas où la formation n’est pas organisée en interne, l’établissement scolaire
transmet la commande de formation au Centre Régional de Formation Continue
(CREFOC) qui centralise les commandes de formation continue émanant des
établissements de la région.
Le CREFOC est notamment un lieu de rencontre, d’échange et de formation continue à
la carte pour les acteurs éducatifs. Les formations y sont assurées par les inspecteurs, les
conseillers pédagogiques et les enseignants formateurs au profit des instituteurs ou les
enseignants des collèges ou lycées. Il y a en tout 25 CREFOC en Tunisie. Chacun de
ces centres est non seulement appelé à concevoir des contenus et des outils de formation
en tenant compte des besoins exprimés par tous les établissements scolaires de la région
et à organiser des sessions de formation correspondantes, mais il est aussi contraint à
respecter les directives du ministère lors de la composition de son programme régional
de formation. La réponse aux besoins exprimés par un établissement scolaire n’est donc
pas garantie.
Outre les CREFOC, il existe un second opérateur officiel de la formation continue : le
Centre National de Formation de Formateurs en Education. Le CENAFFE est en effet
chargé des missions suivantes :
- Former les élèves inspecteurs du primaire et du secondaire en vue de les
professionnaliser pour une meilleure pratique d’inspecteur pédagogique ;
- Former les acteurs éducatifs dans des sujets d’actualités (formation continue) ;
- Piloter des modules de formations pour les acteurs éducatifs ;
- Assurer une formation à la carte pour les acteurs éducatifs étrangers ;
- Mise en place d’une formation à distance pour les enseignants et les inspecteurs et
les autres acteurs éducatifs.
- Lieu de rencontre, d’échange, de partage et de formation continue à vocation
internationale ;
- Le pilotage de l’évaluation de la qualité de l’enseignement et de l’apprentissage par
le biais de la réforme curriculaire dans les pays africains.
Le CENAFFE n’est pas en contact direct avec les établissements scolaires. Le centre a
déployé une stratégie prospective visant à développer une ingénierie de la
formation, en prenant appui sur la production de modules intégrant les dimensions
17
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
théoriques et pratiques. Il forme essentiellement les formateurs de formateurs (les
inspecteurs, les conseillers pédagogiques,…) et continue à élaborer les modules de
formation même s’il lui est reproché de ne pas assez coordonner avec les autres
structures pour décider des thèmes des modules à produire.
Au total, 493 inspecteurs de l’enseignement primaire et 449 inspecteurs des collèges et
lycées ont terminé leur formation au CENAFFE entre 2004 et 2013. Le nombre
d’actions de formation organisées au CENAFFE en 2012-2012 est de 133 sachant que
le nombre total d’actions de formation organisées entre 2004 et 2013 s’élève à 901
actions au profit de 26 311 participants.
Le CENAFFE fait appel aux inspecteurs ainsi qu’aux enseignants universitaires pour
assurer ses activités de formation destinées en bonne partie aux inspecteurs stagiaires de
l’enseignement primaire et secondaire. Ces formations se déroulent selon des
programmes officiels.
Depuis la révolution, les établissements scolaires peuvent faire aussi appel à la société
civile et coopérer avec les associations qui se sont créées et qui interviennent
gratuitement sur certaines thématiques transversales (droits de l’homme,
environnement,…).
Les enseignants en exercice dans les écoles primaires, les collèges et les lycées qui
souhaitent obtenir un diplôme universitaire peuvent par ailleurs suivre un enseignement
à distance à l’Institut supérieur de l’éducation et de la formation continue (ISEFC)
relevant de l’Université Virtuelle de Tunis. Ils bénéficient dans ce cas d’une formation
à la fois académique et pédagogique.
L’ISEFC est un établissement universitaire relevant de l’Université Virtuelle de Tunis.
Il a 30 ans d’expérience en formation continue. Parmi les multiples activités destinées
aux enseignants citons :
- L'organisation d'un certain nombre d'activités éducatives aussi bien au profit du
corps enseignant que pour les professionnels du Ministère de l'Education ;
- Le recyclage des enseignants du secondaire ;
- La préparation aux concours de recrutement des inspecteurs du secondaire et du
primaire ;
- La formation des techniciens de laboratoire de l'enseignement supérieur et
secondaire ;
- L'encadrement en psychopédagogie des étudiants des facultés qui se destinent à
l'enseignement ;
- L'étude doctorale en didactique des disciplines ;
- La préparation au CAPES ;
- La préparation aux maîtrises et désormais aux licences d'enseignement.
Depuis sa création en 1983, les activités de formation continue de l’ISEFC ont ciblé
principalement les fonctionnaires du ministère de l’éducation (les enseignants du
primaire et du secondaire, les inspecteurs, les surveillants, les préparateurs de
laboratoires,…). Au cours de la période 1992-2004, plus de 5000 instituteurs se sont
inscrits dans les différentes maîtrises à l’ISEFC dans le cadre de convention signée avec
le ministère de l’éducation. 1200 instituteurs ont obtenu un diplôme de l’ISEFC. Depuis
18
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
le mois de janvier 2014, l’ISEFC est engagé à former 6000 nouveaux instituteurs dans
les différentes licences à raison de 2000 instituteurs par an ; et ce conformément à une
convention signée avec le ministère de l’éducation. Outre la formation des enseignants
et des autres personnels du ministère de l’éducation, l’ISEFC assure la formation
continue au profit des salariés du milieu socio-économique dans le cadre de conventions
depuis 1998 ainsi que la formation en pédagogie universitaire et numérique au profit des
enseignants universitaires nouvellement recrutés à partir de 2006.
22. La formation continue des enseignants des écoles primaires, des collèges et des lycées
est l’objet de multiples critiques en raison des multiples points faibles dont elle souffre.
Voici une liste non exhaustive d’insuffisances souvent mises en avant par les
bénéficiaires mais aussi par les responsables d’encadrement des enseignants :
- Ambiguïté du cadre institutionnel ;
- Construction de la formation continue autour du paradigme de l’offre davantage
que de la demande et à partir de logiques de contenu ;
- Tendance à la centralisation de la formation continue ;
- La formation continue est modélisante et non professionnalisante ;
- La formation continue n’est pas abordée en termes de formation continuée par
rapport à la formation initiale ;
- Caractère ponctuel des formations ;
- Faible implication des enseignants que ce soit dans l’identification de leurs
besoins ou la définition des actions ;
- Faible engagement des parties prenantes ;
- Liens réduits avec l’université et la recherche pédagogique ;
- Programme imposé et répétitif ;
- Application de méthodes peu participatives et actives ;
- Absence de motivation pour les bénéficiaires (il n’y ni lien direct avec la promotion
ni évaluation certificative) ;
- Le problème de comptabilisation du temps de la formation (5 jours de formation
pris sur le temps d’enseignement mais 5 jours hors temps d’enseignement) ;
- Dissolution du corps d’enseignants sélectionnés et formés en ingénierie de
formation en Tunisie et à l’étranger pour être formateurs de leurs collègues et qui
étaient déchargés partiellement de leurs horaires d’enseignement pour prendre en
charge, en coopération avec les inspecteurs des différentes disciplines, une grande
partie des actions prévues dans le programme annuel de formation continue. La
formation continue des enseignants n’est donc plus assurée que par les inspecteurs
qui ne sont pas suffisamment disponibles pour cela étant donné leurs multiples
charges ;
- Surcharge des inspecteurs des régions intérieures en stagiaires (encadrement
intensif) ;
- Attitudes et compétences d’une partie des inspecteurs formateurs dont certains
réclament d’être mieux formés ;
- Le système de gestion et de suivi de la formation par les administrations centrale
et régionale s’est détérioré ;
- Les CREFOC ont beaucoup perdu de leur efficacité à cause de problèmes de locaux
ou de détérioration de leur matériel didactique.
19
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
Certaines de ces problématiques relevées depuis plus d’une décennie dans les
rapports de diagnostics de la stratégie de formation continue demeurent d’actualité
demeurent encore d’actualité aujourd’hui. Cela ne s’expliquerait pas par une
méconnaissance des défaillances et points faibles de l’existant, ou à une incapacité
à définir les stratégies et les actions appropriées aux contextes tout en tenant
compte des tendances internationales et des modèles performants, ni à concevoir
des dispositifs de formation continue adaptés. Mais, il s’agirait d’une nième preuve
de l’incapacité à réunir toutes les conditions requises pour une mise en œuvre
réussie des actions planifiées en vue de faire accéder les enseignants à la
professionnalisation et à poursuivre dans la durée les actions initiées.
4.2.
La formation continue des enseignants des universités
23. Il n’existe pas de structure dédiée à la formation continue des enseignants du supérieur
ni de programme national qui lui soit dédié à l’instar de celui qui existe au niveau
national dans le secteur de l’éducation.
24. Toutefois, il y a des initiatives engagées par le ministère de l’enseignement supérieur
ou dans les universités que ce soit en se basant sur leurs moyens propres ou dans le
cadre de projets ou de conventions de coopération internationale. Elles s’ajoutent à des
actions idoines mises en place à l’échelle des universités ou des établissements. Des
cas concrets, basés sur les présentations lors de l’atelier organisé les 27 et 28 mars
2014 à Tunis dans le cadre du projet Tetrai, seront présentés ci-dessous.
25. Le ministère de l’enseignement supérieur a mis en œuvre le programme intégré de
formation des formateurs (PRIFF) dans le cadre du deuxième programme d’appui à la
réforme de l’enseignement supérieur (PARESII) financé par un prêt de la Banque
mondiale. Le PRIFF vise la formation de formateurs "ressources" au profit de toutes
les universités tunisiennes dans les six domaines transversaux suivants :
l'entreprenariat, l'enseignement des langues, la pédagogie et la didactique universitaire,
l'ingénierie de la co-construction entre universitaires et professionnels de licences et
mastères professionnels, l'ingénierie de la formation en ligne et le développement
professionnel et personnel de l'étudiant. Le PRIFF part des besoins exprimés par
chaque université dans le cadre de la stratégie de celle-ci, particulièrement en termes
de pertinence des formations par rapport aux besoins du marché national et
international du travail. La première phase du PRIFF a en effet porté sur
l’établissement d’un état des lieux auprès des universités bénéficiaires en matière de
formation de formateurs dans les domaines précités et l’établissement d’un diagnostic
et d’une cartographie des besoins en formations et en formateurs à former au regard
du contexte actuel et à moyen terme.
Les six composantes du PRIFF ont été exécutées, selon les domaines de compétences,
par la direction générale de l'enseignement supérieur (en collaboration avec l’ISEFC)
et la direction générale de la rénovation universitaire au sein du Ministère et par
l'université virtuelle de Tunis. Le ministère de l'enseignement supérieur, à travers la
Cellule PAQ rattachée au cabinet du ministre, a été ultimement responsable de
l'atteinte des objectifs visés par le PRIFF et a assuré la supervision, le suivi et
20
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
l'évaluation du programme ainsi que l'assistance technique aux structures en charge de
l'exécution des composantes.
Les réalisations suivantes figurent parmi les résultats atteints grâce au PRIFF :
- Formation des formateurs en français et certification des évaluateurs-examinateurs
en certification DELF (diplôme d'études en langue française) et des coordinateurs
de centres d’examen et de certification.
- Formation des formateurs en anglais et des formateurs des formateurs en
collaboration avec AMIDEAST et certifications (TOIEC Propell et PCELT).
- Formation des formateurs en anglais en collaboration avec le British Council et
certifications (TKT, CELTA et TDC).
- Formation des formateurs en didactique et pédagogie.
- Mise à niveau et certification en pédagogie universitaire d’un noyau de référents
(une quinzaine d’enseignants universitaires spécialisés en didactique et en sciences
de l’éducation) de l’ISEFC
- Création à l’ISEFC d’un centre de didactique et de pédagogie universitaire certifié
ISO 29990.
- Formation de référents méthodologues et auditeurs en co-construction de licences
et masters professionnels.
- Formation des formateurs en entrepreneuriat et en soft skills.
- Formation de référents en coaching pédagogique, en andragogie et en techniques
d’animation de formations.
- Formation de référents formateurs en ingénierie de formation en ligne.
Au terme du PRIFF un plan de dissémination des résultats et de leur appropriation par
les universités a été établi et mis en œuvre.
26. A l’université de Sousse, un nouveau programme de formation pédagogique a été
conçu et sera ainsi proposé en parallèle au programme ciblant les assistants et maîtresassistants nouvellement recrutés décrit ci-dessus. Ce programme devant démarrer au
cours de l’année universitaire 2014-2015 cible les enseignants universitaires « en
exercice » quel qu’en soit le grade. L’université de Sousse capitalisera en particulier
sur ses compétences internes pour proposer ce nouveau programme de formation
continue. Une institution telle que la faculté de médecine de Sousse a en effet trente
ans d’expérience en matière de formation pédagogique et d’organisation de séminaires
pédagogiques. La faculté propose depuis 2010 un certificat d’études complémentaires
en pédagogie médicale ciblant les enseignants du domaine de la santé. Parmi les
thèmes régulièrement objet de séminaires pédagogiques à la faculté, il y a les thèmes
suivants : planification systémique des apprentissages et détermination des besoins
éducatifs, les moyens d’apprentissage, la leçon magistrale et les moyens audio-visuels,
les modules d’auto-apprentissage, l’animation de groupe, l’évaluation des
apprentissages, l’application de l’informatique à la pédagogie médicale,…
La mise en place d’un diplôme universitaire de pédagogie est également prévue à
l’université de Sousse.
27. La formation des formateurs est parmi les principales missions pédagogiques de
l’université virtuelle de Tunis. Les formations portent essentiellement sur les domaines
des TICE et des outils et techniques du e-learning. Leur niveau varie de l’initiation au
perfectionnement. Des sessions de formation à raison de dix ateliers par semestre sont
organisées au siège de l’université virtuelle ou dans les divers établissements
21
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
universitaires selon les demandes sur des thèmes tels que :
- L’informatique basique pour les enseignants qui ne sont pas initiés à l’utilisation
de l’outil informatique.
- La scénarisation et conception médiatique de cours pour les enseignants intéressés
par la médiatisation de leurs cours.
- L’initiation à l’utilisation de la plateforme Moodle pour les enseignants qui
souhaitent travailler sur les espaces de cours en ligne.
- Le tutorat et l’encadrement en ligne pour des enseignants qui s’initient à la
formation en ligne.
L’université virtuelle organise également des ateliers d’appropriation des contenus des
formations transversales (informatique & internet, anglais, entrepreneuriat).
28. Dans le cadre du programme Tempus V, les universités tunisiennes ont participé à 129
projets depuis 2008. Plusieurs de ces projets ont comporté des activités de formation
de formateurs. C’est à titre d’exemple le cas du projet « Innovation, Créativité en
Réseau : Action et Formation » auquel ont participé les universités de Sousse et l’Ecole
Nationale d’Ingénieurs de Tunis, les projets « Développer l’Employabilité dans les
Filières d’Ingénierie » et « Quality Assurance and Certification : Procedures in the
Higher Education System of Tunisia » auxquels a participé l’université de Gabés.
29. Malgré la diversité des initiatives d’actions professionnalisantes ciblées, la formation
continue des enseignants universitaires semble souffrir encore de certaines
insuffisances aux niveaux de la conception et de la mise en œuvre ou liées au nombre
très réduit de bénéficiaires en comparaison avec les effectifs d’enseignants.
5. Pistes d’amélioration favorisant
professionnel des enseignants
le
perfectionnement
30. L’état des lieux de la formation des enseignants en Tunisie révèle la nécessité
d’engager un certain nombre d’actions correctives pour résoudre les nombreuses
insuffisances diagnostiquées dans le cadre d’études empiriques basées sur des
focus groups auprès des acteurs concernés (enseignants, directeurs, inspecteurs),
sur l’analyse de rapports des inspecteurs ; de présentations dans le cadre de l’atelier
du 27-28 mars 2014 organisé au CENAFFE à Carthage dans le cadre du projet
Tetrai ; et d’études et rapports d’analyse de la littérature sur la formation des
enseignants et des tendances internationales, en particulier européennes, dans le
domaine. Les pistes d’amélioration citées ci-dessus n’ont pas pour objectif de faire
évoluer la formation des enseignants en Tunisie vers LE MODELE à suivre ni de
montrer la ONE BEST WAY. En effet, il n’existe pas de modèle de formation
unique et idéal et cela n’est pas l’ambition dans ce document. Les pistes d’amélioration
suivantes sont non seulement pertinentes par rapport à des insuffisantes avérées de la
formation des enseignants en Tunisie, par rapport au contexte local, par rapport aux
22
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
tendances internationales et par rapport aux enseignements de la littérature ; mais leur
mise en œuvre est aussi envisageable dans le cadre d’un projet de coopération
international tel que Tetrai en se limitant aux acteurs et aux ressources déjà réunis ou
en y adjoignant d’autres.
31. Une meilleure articulation entre la formation initiale et la formation continue est
indispensable afin que l’enseignant tunisien puisse se perfectionner
professionnellement tout au long de sa carrière. Le perfectionnement professionnel
des enseignants est un processus qui s’étend tout au long de la vie, de la formation
initiale de l’enseignant (voire beaucoup plus tôt pour certains auteurs) jusqu’à sa
retraite.
Au niveau international, la formation initiale est de plus en plus conçue comme un
tronçon dans le parcours de développement professionnel de l’enseignant tout au long
de sa carrière. Elle donne à l’enseignant la base qui lui permet de se perfectionner dans
le cadre de la formation continue et grâce à ses efforts personnels. Elle représente « le
socle inébranlable du développement professionnel continu des enseignants. »
Les programmes de formation initiale et continue pour les enseignants devraient
considérer le cursus de formation suivi par les enseignants dans son ensemble. Ils
devraient en effet considérer toutes les possibilités de formation qui leur sont offertes
dès le commencement de leurs études et tout au long de leur carrière. L’approche
devrait être intégrée pour répondre aux besoins de formation des enseignants tout en
tenant compte que l’étape dans laquelle ils se situeraient à un moment donné présente
des particularités en fonction des possibilités d’apprentissage présentes mais aussi des
acquis antérieurs de l’enseignant. L’approche devrait aussi ne pas se limiter aux
programmes formels de formation initiale et continue mais elle devrait aussi tenir
compte des nombreux paramètres informels qui influent sur le contenu de ce que les
enseignants apprennent à enseigner et la façon dont ils l’apprennent.
La faible articulation existant en Tunisie entre les acteurs très divers intervenant dans
la formation initiale et continue de l’enseignant en l’absence d’une politique nationale
commune et d’une structure de coordination effective est de nature à limiter l’efficacité
du perfectionnement professionnel de l’enseignant.
32. Il serait indispensable de rompre l’isolement existant entre les acteurs de la
formation des enseignants y compris ceux relevant d’un même ministère (celui de
l’éducation ou de l’enseignement supérieur) ou œuvrant dans le même domaine de
formation initiale (disciplinaire et professionnelle) ou de la formation continue.
L’adoption d’une stratégie de formation des enseignants en Tunisie et d’un
dispositif global couvrant la formation initiale et continue des enseignants des
écoles primaires, des collèges et des lycées et la formation initiale et continue des
enseignants universitaires n’étant pas à l’ordre du jour ni envisageable à moyen
terme dans ce projet, il serait pertinent de concevoir et de mettre en œuvre les
activités du projet Tetrai en ciblant un rapprochement entre tous les acteurs
tunisiens impliqués dans le projet à travers la concertation lors de la définition des
activités et une collaboration étroite lors de la conception et mise en œuvre de
celles-ci ; et ce quels qu’en soient le type, le niveau et le public. Ce rapprochement
entre les acteurs clés de la formation des enseignants en Tunisie représentés dans
23
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
le projet, dans des activités mettant à profit la complémentarité existant
nécessairement entre eux, favoriserait une évolution future vers l’adoption d’une
stratégie globale et d’un dispositif global et cohérent de formation des enseignants.
33. Un renforcement de la synergie entre les aspects académiques et pédagogiques de
l’offre de formation initiale et continue des enseignants proposée par les
institutions représentées dans le projet devrait être ciblé. L’expertise de l’Institut
de l’éducation et de la formation continue dans ce domaine devrait être mise à
profit.
Le renforcement des connaissances académiques des enseignants n’est pas sans
intérêt eu égard à la dégradation de la qualité de formation académique initiale,
aux procédures de recrutement des nouveaux enseignants du primaire et du
secondaire après la révolution axées sur des aspects sociaux au détriment du niveau
scientifique des candidats, au niveau scolaire atteint par une partie des enseignants
en exercice,…
34. La formation des enseignants gagnerait à être orientée vers une meilleure
professionnalisation en l’axant sur des référentiels de compétences, en prévoyant
systématiquement une étape d’adaptation aux besoins initiaux de formation
exprimés par les bénéficiaires et à leurs feedbacks ultérieurs et en généralisant
progressivement la certification pour favoriser une prise en compte éventuelle dans
les promotions des enseignants.
Cela requiert aussi l’élaboration de référentiels de métiers adaptés à chaque
catégorie d’enseignant précisant le profil d’entrée dans la formation et de sortie
sous la forme de compétences décrites avec précision et accompagnées
d’indicateurs mesurables. Les compétences décrites devraient baliser les
différentes étapes de la carrière des enseignants.
Cela requiert aussi l’adoption d’une logique d’ingénierie de la formation des
formateurs dans la conception et la mise en œuvre des formations en capitalisant
sur les acquis du CENAFFE dans ce domaine et sur l’existant en termes de
ressources et de compétences au niveau de l’ensemble des institutions.
35. La formation des enseignants gagnerait à être enrichie par une offre sous la forme
de mastère professionnel spécialisé et innovant dans le cadre d’une coopération
étroite entre les acteurs relevant du secteur de l’éducation et celui de
l’enseignement supérieur.
Un tel mastère professionnel proposerait aux futurs enseignants de tous les cycles
d’enseignement, une formation universitaire de qualité, intégrant la formation
professionnelle tout en étant couronnée par un diplôme universitaire. Le mastère
contribuerait ainsi à élever le niveau académique des enseignants du primaire et
du secondaire et de le rapprocher ainsi du niveau international tout en favorisant
la professionnalisation des enseignants. Un tel mastère permettrait également de
développer la formation pédagogique des enseignants du supérieur.
24
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
Le cursus pouvant être mis en place devrait fonctionner selon le modèle de la
formation simultanée permettant une interaction constante entre la formation
scientifique à l’université et la pratique professionnelle en situation, dans des
établissements et en classe. Cela permettrait à l’enseignant d’être pleinement
opérationnel.
Les acquis des universités tunisiennes en matière de co-construction de parcours
de formation sur la base de référentiels métiers, ceux de l’ISEFC en matière de
mastères en sciences de l’éducation et de formation en didactique et en pédagogie
et ceux du CENAFFE en matière d’ingénierie de formation de formateurs
devraient favoriser la mise en place d’un tel mastère professionnel conjoint en
collaboration avec des partenaires internationaux.
Les porteurs d’un tel projet devraient par ailleurs être en mesure de contribuer au
développement de la formation des enseignants en ciblant à travers ce mastère
professionnel, et/ou à travers d’autres activités, un développement des
compétences transversales chez les participants de manière à ce qu’ils soient à
même de traiter des situations éducatives nouvelles. Les domaines de compétences
transversales devraient couvrir, d’après les tendances au niveau international, des
domaines tels que ceux des relations humaines et de la communication, du travail en
équipe, de la prévention et de la gestion des conflits (d’adultes, d’adolescents ou
d’enfants), de la justice sociale, des droits de l’homme et de la citoyenneté, de la
réflexion sur ses propres pratiques pour mieux apprendre à apprendre et pour pouvoir
s’adapter et innover, des TIC.
Au-delà de la co-construction du mastère professionnel, l’intervention
complémentaire et concertée d’universitaires et de formateurs de l’éducation
devrait se poursuivre lors de sa mise en œuvre. En effet, cette intervention serait
indispensable pour compléter la formation scientifique, dans la ou les discipline(s)
à enseigner, par une formation professionnelle théorique et pratique répondant à
toutes les exigences de la profession d’enseignant (maîtrise de la langue
d’enseignement, de la communication, de la pédagogie, de la didactique,…).
36. L’expertise de l’université virtuelle de Tunis en e-learning devrait favoriser un
usage intensif et réfléchi des TIC en formation initiale et continue des enseignants.
Cela permettrait de garantir la maîtrise par les enseignants de ces outils
incontournables dans la vie quotidienne des enfants et des jeunes de la « génération
digitale ». Cela favoriserait par ailleurs l’organisation des enseignants en réseaux
d’entraide, d’échange des expériences et des documents pédagogiques ; ce qui est
particulièrement important pour les enseignants exerçant dans des zones isolées.
Cela permettrait également aux enseignants d’utiliser les TIC d’une manière plus
créative pour les activités d’apprentissage tout en étant conscients de leur impact
grandissant et de leurs limites. Ces outils faciliteront par ailleurs l’adoption de
modes de formation hybrides dans la formation initiale et continue des
enseignants ; ce qui favorisera l’exploitation des opportunités de collaboration
avec les partenaires internationaux du projet Tetrai dans la conception et la mise
25
Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
en œuvre d’actions de formation conjointes et facilitera l’élargissement de la cible
de bénéficiaires des actions de formation au-delà des villes côtières tunisiennes
représentées par les acteurs du projet. Il importe à ce niveau de souligner l’intérêt
à donner la priorité aux jeunes enseignants et aux enseignants dans des régions ou
des quartiers défavorisés comme cible potentielle des activités. Les analyses
démographiques relatives aux enseignants tunisiens font en effet état des
difficultés dont souffrent les jeunes et particulièrement les jeunes enseignants
affectés dans les régions défavorisées.
37. Outre la combinaison des connaissances propres aux matières enseignées, aux
connaissances et compétences relatives aux sciences pédagogiques, à la
méthodologie et à la didactique, les contenus des formations initiale et continue
des enseignants devraient être élargis de manière à inclure les méthodes actives de
formation, en les appliquant dans les formations de formateurs, ainsi que de
nouvelles thématiques comme le travail coopératif au sein de l’établissement, les
techniques de coaching, les pratiques réflexives, l’élaboration de projets de
formation ou l’éthique de l’enseignant professionnel. En effet, il est difficilement
envisageable que les établissements scolaires ou universitaires tendent vers des
organisations apprenantes tant que les enseignants n’auront pas appris à préparer
des leçons ou des évaluations en équipe ; à se concerter pour analyser les résultats
de leurs élèves ; à rechercher les causes des échecs dans l’enseignement et à
élaborer les moyens d’y remédier en coopérant, en s’entraidant, en organisant des
formations en interne de l’école ou en passant des commandes précises de
formation à l’extérieur ; et à se perfectionner professionnellement tout au long de
leur carrière.
Il convient à ce niveau de souligner l’intérêt à envisager des actions de recyclage
des formateurs selon des exigences fortes de qualité scientifique et pédagogique.
Les formateurs devraient être en mesure de répondre aux nouvelles nécessités et
attentes liées à leur métier. Ils devraient être entraînés à concevoir et animer leurs
formations en adoptant des méthodes favorisant le développement de l’autonomie
des futurs enseignants, à adapter les méthodes de formation au public d’adultes et
à faire en sorte que la formation se déroule dans une ambiance agréable, qu’elle
motive les participants en impliquant leur créativité, qu’elle mette en jeu la
dimension affective et le plaisir.
38. Le renforcement des compétences des formateurs exerçant dans les structures de
formation des enseignants à travers la participation à des stages et des sessions de
perfectionnement s’avère indispensable pour s’assurer qu’ils aient un profil
scientifique et didactique en adéquation avec les impératifs d’une structure de
formation professionnalisante.
Il y a besoin par ailleurs que les stages et les sessions de formation ciblent d’autres
publics, comme les directeurs, vu le rôle primordial qu’ils sont susceptibles de
jouer pour faire tendre les établissements vers des communautés apprenantes.
Outre les thèmes en lien direct avec le perfectionnement académique ou
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Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
pédagogique des enseignants, il conviendrait de dédier certaines actions à l’analyse
des résultats des études comparatives des systèmes éducatifs performants et des
évaluations internationales et à l’établissement de plans d’actions de remédiation
adaptés au contexte local et tenant compte du périmètre d’action de l’enseignant.
Cela ne peut que favoriser la rénovation du système éducatif tunisien et l’adoption
d’une approche réflexive et permettrait une ouverture sur les études et les
recherches relatives au métier d’enseignant, à la performance des systèmes
éducatifs,...
39. Les activités de formation des enseignants gagneraient à être soumises à
l’assurance qualité. L’absence de rigueur et de cohérence dans l’élaboration des
curricula et des outils de formation à tous les niveaux témoigne de cette
insuffisance liée à une culture peu soucieuse de la qualité. Les initiatives en matière
de conformité aux normes internationales dans le management des activités ou des
structures de formation sont souvent timides, tributaires du degré d’engagement et
de leadership des personnes qui les portent et sont rarement durables. Les
initiatives en matière d’amélioration de la qualité des curricula et des activités
d’enseignement et de formation sont rares voire limitées au stade de
l’établissement de référentiels et à la sensibilisation.
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Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
6. Conclusion
40. L’état des lieux concernant la formation des enseignants en Tunisie révèle l’existence
d’acquis importants et indéniables au niveau des acteurs, des programmes, des résultats,
etc. ; et ce au niveau de la formation initiale et de la formation continue.
Toutefois, de nombreuses insuffisances persistent. Elles sont diagnostiquées par rapport
au contexte local en tenant compte des tendances internationales et des enseignements
de la littérature sur la formation continue.
41. Des pistes d’amélioration sont identifiées. Les pistes privilégiées dans ce rapport de
synthèse sont celles dont la mise en œuvre est envisageable et réalisable dans le cadre
d’un projet de coopération international tel que Tetrai en se limitant aux acteurs et aux
ressources déjà réunis dans le projet ou, en cas de nécessité, y adjoignant d’autres. Ces
pistes d’amélioration n’ont pas pour ambition de faire évoluer la formation des
enseignants en Tunisie vers LE MODELE à suivre ni de montrer « THE ONE BEST
WAY » car il n’existe pas de modèle de formation unique et idéal.
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Structural Development and Institutionalization for Pre-Professional-Teacher Training in Tunisia
7. Références
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