Les risques naturels en montagne et leur prise en compte dans l

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Les risques naturels en montagne et leur prise en compte dans l
LES RISQUES
NATURELS EN
MONTAGNE
et leur prise en compte dans l’aménagement
INTRODUCTION :
Nous allons traiter aujourd’hui des risques naturels en montagne et de leur prise en compte
dans l’aménagement : de quels risques parle-t-on ? quelles sont à l’heure actuelles les mesures
mises en place (règlements et aménagements) et les moyens d’actions qui existent afin de
prévenir une catastrophe naturelle, d’en amoindrir l’impact, ou d’en empêcher l’occurrence ?
En France, selon la Délégation aux risques majeurs, plus de 17 000 communes, pratiquement
toutes rurales, seraient menacées par un ou plusieurs risques naturels, dont 40% des
communes de montagne au moins par l’un d’eux. Le coût annuel moyen des dommages
indemnisés par les compagnies d'assurance est de plusieurs milliards de francs par an.
En milieu de montagne, les 2 plus grands risques sont liés aux avalanches et aux inondations
compte tenu des dégâts et des pertes qu’elles peuvent occasionner. Les glissements de
terrains, souvent lourds en pertes matériels, sont plus exceptionnels en zone habités et ont un
impact plus limité.
Nous allons nous efforcer de présenter succinctement les risques naturels qui existent dans le
milieu de montagne, les facteurs aggravants, la vulnérabilité et la réaction des autorités
compétentes.
Pour illustrer ces données nous allons présenter deux cas :
- Les inondations torrentielles à Vaison-la-Romaine
- La gestion du risque « avalanche » à Chamonix
Pourquoi avoir choisi ces cas concrets ? Ces deux exemples ont été des cas déclencheurs et
révélateurs de la prise de conscience des risques naturels en milieu de montagne, et plus
spécifiquement dans des lieux urbains, là où les dommages sont les plus importants, autant sur
le point de vue humain que matériel. Ils marquent également deux temps distincts dans la
prise de conscience des autorités et leurs réactions. Il s’agit des 2 exemples de risques qui
nous paraissent les plus représentatifs du risque dans les montagnes Françaises que sont les
inondations torrentielles et les avalanches.
L’actualité récente (même en plaine) a souligné la nécessité de renforcer et d’améliorer le
zonage, la cartographie et les ouvrages de protection contre les avalanches, les crues, les
séismes et autres menaces, mais finalement les réponses matérielles et réglementaires sontelles adaptées en France face au danger ?
1. Prendre en compte les risques, c’est avant tout
les connaître :
1-Aléa et vulnérabilité : définition.
La définition du risque correspond à la conjonction de deux phénomènes, l’aléa et la
vulnérabilité. L’aléa correspond à un facteur non prévisible et à sa probabilité d’avoir lieu. La
vulnérabilité est l’ensemble des paramètres qui font qu’un lieu est plus ou moins exposé à un
moment précis donné (paramètres démographique, économique, fréquence de l’aléa… ex :
plus un espace est peuplé et plus le milieu est vulnérable).
Les implantations humaines en milieu de montagne, sont à la fois vulnérable aux risques
naturels du fait de la topographie, qui entraîne 2 conséquences aggravantes : la rapidité d’un
événement et sa puissance.
Les fortes pentes, les habitats humains concentrés en vallées, la topographie ainsi que les
conditions climatiques font de cet espace de vie ou d’exploitation économique et touristique,
un espace de risques pour les implantations et les activités humaines.
Chaque catastrophe a un coût, aussi bien en vie humaine que sur l’économie locale, et parfois
même sur l’ensemble de l’économie du pays au travers d’impacts directs (les dégâts) et
indirects (les assurances et les taxes professionnelles non payé pour cause d’outil de travail
hors d’usage). C’est pourquoi il est nécessaire de prévenir ces risques, donc de les connaître
pour mieux les prévoir.
Aménager c’est à terme réduire les impacts des aléas, et s’armer de moyens techniques et de
gestion de crise pour limiter les coûts en vie humaine et en matériel.
2-Législation et réglements.
La convergence de ces préoccupations socioéconomique et des impératifs concernant une plus
grande sécurité des personnes et la sauvegarde de l’environnement ont conduit le législateur,
en France, à intervenir progressivement face aux risques naturels à partir des années 60. Mais
c’est la loi du 13 juillet 1982 sur les PER (Plan d’Exposition aux Risques) qui organise un
système de réponse aux pertes dues aux risques naturels, fondé sur un principe de solidarité
nationale pour l’indemnisation. Cette loi est renforcée et adaptée par la loi du 22 juillet 1987
relative à la sécurité civile et aux risques majeurs ( technologiques) puis par la loi du 2 février
1995 sur les Plan de Prévention des Risques ( PPR) orientée vers une plus grande protection
de l’environnement, des hommes et des biens (voir feuille). Cela dénote une volonté d’agir à
la source, avant que la catastrophe n’ai lieu et s’inscrit dans la notion de développement
durable, initié dans ces mêmes années par les conférences sur la TERRE ( Rio 1992, Kyoto
1997, Johannesburg 2001) et validé en France par les lois LAURE de 1996 et les lois Voynet
sur le Développement Durable en 1998.
Techniquement ces lois vont mettre en place des outils cartographiques pour délimiter les
secteurs inconstructibles ou soumis à ces risques, mais également mettre en place des mesures
de prévention, d’action et de gestion de crise pour limiter l’impact des ces catastrophes sur la
société. C’est aux administrations centrale ( l’Etat par le préfet ) et locales ( les communes par
leur maire ) que revient la responsabilité d’établir ces mesures préventives et d’action sur le
terrain. Nous présenterons ces mesures par la suite.
3-Les différents risques en montagne.
Nous allons donc présenter succinctement les différents types de risques naturels que l’on
retrouve fréquemment en milieu de montagne ainsi que pour chaque cas un événement
d’illustration qui lui est rattaché.
1. Les mouvements de terrain
En montagne, les pentes et la topographie entraînent fréquemment des mouvements de
terrains. Ceux-ci peuvent se produire avec plus ou moins de violence et de rapidité
(éboulement, coulée de boue) et les facteurs aggravants sont liés aux conditions climatiques et
plus particulièrement les intempéries : l’eau est le moteur principal dans le déclenchement des
mouvements de terrains. Ainsi, l’automne et le printemps sont les saisons les plus propices
aux éboulements avec des épisodes pluvieux marqués et la fonte des neiges. Ces mouvements
de terrains sont d’autant plus nombreux que les pentes sont raides, c’est pourquoi cela
concerne avant tout les Alpes et les Pyrénées (montagnes jeunes).
En 1985 par exemple le mouvement de versant de la Séchilienne (+ la clapière dans le
Mercantour bourrée de distancemètres, extensomètres, géodimètres,
inclinomètres…surveillant 50 millions de m3 de terre dont certaines parties ont parfois
perdues 80 mètres d’altitude en une dizaine d’année) s’est réactivé et a menacé la voie
d’accès de la vallée de la Romanche, obligeant les autorités à évacuer la zone et à déplacer la
circulation automobile (texte inscrit dans les PPR).
Cependant ces risques ne sont pas les plus meurtriers et les plus destructeurs (routes coupées),
c’est pourquoi leur prise en compte est moindre. En effet, leur occurrence est fréquente, mais
touche le plus souvent des zones non urbanisés ou des secteurs de voirie peu fréquentés. Les
dommages sont donc réduits et l’impact est moindre car il est en plus très difficile de prévoir
une zone ou un glissement de terrain peut avoir lieu.
Outil cartographique d’analyse, sorte de répertoire des mouvements de terrains en France : les
cartes zermos qui cartographie le risque de mouvement du sol et du sous-sol.
2. Les séismes
Ce risque naturel est très peu présent en France et ne concerne qu’une zone limitée.
Cependant il est nécessaire de le mettre en lumière, car séismes et zones de montagne sont
étroitement liés, du fait des conditions géologiques à la base. Si en France les séismes sont
rares et de magnitude négligeables, dans d’autres pays du monde le risque sismique est le
risque majeur des zones de montagne comme dans la Cordillère des Andes au Pérou ou même
plus proche de nous en Azerbaïdjan dans le Caucase (ou en Iran = 40000 morts).
En France seules les Alpes peuvent être concernées par ce risque, et c’est avant tout les Alpes
maritimes qui seraient les plus exposées.
La fréquence de cet aléa est faible (du moins pour les événements de magnitude importante)
mais effective. En effet, le 11 janvier 1999, un tremblement de terre de magnitude 4 s’est
produit à Laffrey, au sud de Grenoble. Il n’a pas provoqué de dégâts mais il a été ressenti
jusqu’à 40 km de son épicentre. Un autre s’est déroulé le 15 juillet 1996, à Annecy, de
magnitude 5,3 et a causé près de 450 millions de francs de dégâts matériels (cheminées,
vitres, structures du bati) sans provoquer de victimes.
Le dernier tremblement de terre meurtrier dans les Alpes françaises remonte à 1909 à
Lambesc, au nord-ouest d’Aix-en-Provence.
On estime qu’il y a en moyenne un tremblement de terre de magnitude 6 par siècle, un
tremblement de terre de magnitude 5 par décennie et un tremblement de terre de magnitude 4
par an...
Les constructions parasismiques sont encore très rares et la réglementation instaurée depuis
1994 ne concerne que les bâtiments neufs, et surtout ceux qui ont les moyens de la respecter.
C’est pourquoi les aménagements relatifs à ce risque sont encore rares, à la fois par la faible
vulnérabilité mais aussi par le coût que cela engendre.
3. Les inondations
Les inondations sont de loin le risque majeur pour les personnes et les biens en France. L’eau
est en effet un facteur essentiel dans le déclenchement et la propagation de nombreux aléas
naturels. Apporté par des pluies persistantes, des orages brusques ou la fonte des neiges, en
torrent ou mélangé aux gravats, un excès d’eau peut entraîner, inondations, crues éclair,
risques torrentiels et mouvements de terrain. Il existe ainsi plusieurs type d’inondations, dont
les plus violentes se déroulent en milieu de montagne, aggravé par l’encaissement et les
pentes de cet espace.
L’inondation de plaine est l’inondation la plus fréquente mais la moins grave en terme de
risques humains, car il s’agit d’un phénomène lent, souvent prévisible ou du moins qui permet
aux autorités de déclencher des plans d’alerte (plan ORSEC ou SDIS). C’est aussi
l’inondation qui crée le plus de dommages matériels du fait de sa zone d’impact et de sa
fréquence récurrente dans certains bassins de vie (sud-est de la France, Affluents de la Seine).
L’autre type d’inondation est l’inondation violente, rapide, dite torrentielle ou crue éclair. Il
s’agit d’un type de crue plus rare, mais dont les effets sont beaucoup plus dévastateurs.
Les inondations torrentielles en montagne
2 exemples :
Le 14 juillet 1987, le camping du Grand-Bornand en Haute-Savoie, a été dévasté par une crue
torrentielle qui a provoqué la mort de 23 personnes.
En 1998, à Sarno, dans le sud de l’Italie, des laves torrentielles ont tué 161 personnes.
Que s’est-il passé exactement et qu’appelle-t-on écoulements torrentiels ?
De fortes pluies sont à l’origine des écoulements torrentiels. Elles entraînent le long des
versants montagneux des matériaux solides comme de l’argile, des cailloux, des arbres ou
selon la géologie, des dépôts volcaniques comme à Sarno. Ce sont ces dépôts solides qui
causes énormément de dégâts et sont caractéristiques des crues torrentielles (phénomène
d’embâcles… voitures en milieu urbain). La pente est un facteur très important à prendre en
compte dans le déclenchement d’un écoulement torrentiel car, c’est au delà de 25 à 30 % de
pente que se forment les laves torrentielles.
L’importance de la couverture végétale, des essences et de l’entretien forestier
Aujourd’hui le meilleur moyen d’agir contre ce type d’inondation, c’est d’assurer le
boisement des contreforts rocheux, d’entretenir une végétation sur les lieux à risques et de
reboiser les zones qui devraient l’être car il faut être conscient que la végétation est à ce
niveau de phénomène le meilleur rempart de rétention des éléments solides, mais également
un facteur qui peut amoindrir la vitesse et la violence d’un phénomène.
D’autres aménagements dit « actifs » comme les barrages dans le lit des torrents et les
banquettes sur les versants pour casser la pente agissent en ce sens. Cependant même avec ce
type de protection, c’est avant tout la localisation des activités humaines qui met les personnes
et les biens en danger. C’est là une des limites des aménagements préventifs ou passifs surtout
quand on sait que ceux-ci sont à double tranchant, provoquant creusement et encaissement des
rivières en amont, donc des vitesse d’écoulement encore plus rapides ou ces aménagements
sont aussi soumis à des risques de rupture (ex : bassins écreteurs de crue qui cède lors de trop
fortes précipitations).
Les crues éclair de montagne (voir p. suivante catastrophe de Vaison)
2. La Catastrophe de Vaison-La-Romaine: le cas
d’école.
1. La catastrophe du 22/09/1992
La catastrophe de Vaison-la-Romaine en septembre 1992 est encore présente dans la mémoire
des Français choqués par le nombre de victimes et par l’ampleur des dégâts causés par la crue
éclair d’une banale rivière de montagne. C’est l’un des 2 cas que nous allons développer.
Si le contexte général est posé, la catastrophe de Vaison-la-Romaine est apparue pour
beaucoup comme l’événement déclencheur, et qui a été à l’initiative de la modification des
PER en PPR.
Vaison est une petite ville du Vaucluse, à faible altitude et traversée par l’Ouvèze. Cette ville
n’est pas considérée comme une ville de montagne, mais le type de crue que peut connaître
l’Ouvèze est considéré en ce lieu comme étant une crue de montagne, du fait de la violence de
ses paramètres et de sa rapidité.
Le 22 Septembre 1992 s’abat une nouvelle fois dans le Vaucluse et les contreforts alpins un
nouvel orage de type cévenole, de très forte intensité, même si l’intensité demeure somme
toute « ordinaire » pour ce type de précipitations ( on est pas au record de pluviométrie). La
Terre gorgée d’eau depuis plus d’une semaine par des pluies non stop et un été maussade ne
peut retenir plus d’eau : un fort ruissellement de surface dévale les pentes et va se canaliser
sur les cours d’eau qui quelques jours auparavant ne mesurait pas plus de deux mètres de
large. L’Ouvèze, cours d’eau connu pour ces crues violentes et rapides va alors engranger une
puissance hydraulique phénoménale : l’eau dévalant les pentes va s’accumuler par onde de
crues mais également par vagues d’embâcles et de ruptures de barrages artificielles. Le relief
est responsable du déclenchement ou du renforcement des pluies sur les versants de montagne
où les eaux peuvent se concentrer très rapidement. Les crues éclair sont dues à de fortes
pluies, de 50 à 60 mm/h qui vont persister pendant 6 à 12 heures sur une surface de plusieurs
centaines de km2. Elles se produisent dans des bassins versants de 100 à 1000 km2 dans le
cas général, une 50 de km2 dans ce cas précis…
On savait que ce type de crues frappaient ces régions qui chaque années déplorent des
inondations grave, mais rarement un phénomène a cristallisé tant de facteurs : les débits de
crues ont atteint 5 à 7 m3/s par km2 1000 fois plus que ceux de la Seine à Paris, ce qui s’est
traduit sur place par une élévation de plus de 16 mètres du cours d’eau au niveau du pont
romain ( lui même placé à cette hauteur peut être en mémoire d’une crue ancestrale). De telles
crues frappent environ une fois par an un bassin de la région. Les volumes d'eau produits
constituent une menace à la fois pour des cibles ponctuelles telles que des villes ou des
ouvrages hydroélectriques mais aussi pour des cibles plus diffuses telles que l'habitat dispersé,
les réseaux de transport, le tourisme vert, les sports nautiques…
A Vaison-la-Romaine, non seulement les débits ont dépassé toutes les cotes connues, mais en
plus le cours d’eau a formé en de nombreux endroits des barrages, ce qui a accentué le
phénomène de vagues torrentielles. Ces barrages artificielles se sont formées sous des ponts
ou en traversant des maisons elles mêmes situé à des endroits irréalistes. Car si les
précipitations n’ont pas été record, l’aggravation a été avant tout humaine : Un camping situé
sur une zone inondable, surélevé d’à peine 4 mètres s’est fait engloutir par les vagues
successives, causant non seulement des pertes matérielles mais également humaines.
L’urbanisation clairsemé sur les berges ont créé un canal concentré d’écoulement et ainsi une
élévation accentué du niveau des eaux chargées en éléments solides et dévastateurs.
L’urbanisation sauvage, la torrentialité, les canaux de drainage déjà comblés par les pluies
précédentes, un système d’alerte trop lent ou inefficace, une météo imprévisible pour ce type
d’événement très localisé ont fait de Vaison-la-romaine la catastrophe qui a cristallisé toutes
les lacunes des politiques d’aménagement, de prévention et de réaction. Le pic de crue n’a pas
du durer plus de 15 minutes, mais les dégâts qu’il a occasionné se sont chiffré à plusieurs
milliards de dégâts et 42 morts ( 39 morts et 3 disparus). Des quartiers entiers, s’ils n’ont pas
été rasés, sont devenus des zones non constructible poussant ainsi des dizaines de famille à se
reloger dans une situation précaire. De plus l’intensité du cours d’eau a arraché les digues et
contreforts d’ouvrages ou de berges, mettant à mal des ouvrages déjà en sous effectifs dans
cette région. Si le Gard et le Vaucluse sont les régions les plus exposées, des catastrophes de
type Vaison ne sont pas à exclure dans les Alpes Maritimes ou dans le Var, d’autant plus que
ces crues torrentielles débouchent généralement sur une crue lente du cours d’eau majeur, et
ont donc un double impact dévastateur.
2-Enseignements tirés de la catastrophe : la prise de conscience après
Vaison
Trois grandes catégories d’actions complémentaires permettent de lutter contre les effets des
inondations, que ce soit au niveau de l’aléa ou de la vulnérabilité : la culture du risque
(sensibilisation des populations, cartes informatives), les actions en temps réel (gestion
d’ouvrages, annonce et prévision des crues, évacuation), et les actions en temps différé
(gestion du territoire et urbanisme, travaux sur la rivière, indemnisations).
La création des Plans de Prévention des Risques par la loi Barnier de 2 février 1995, va tenter
de donner des réponses concrètes pour lutter contre les inondations et l’ensemble des risques
auxquels les activités humaines sont exposées. Les communes exposées vont devoir établir un
PPR, le plus souvent en collaboration avec d’autres communes par effet de bassin versant ou
de bassin de vie. Les PPR sont dans la continuité des PER, la réponse par la planification aux
risques naturels dans un milieu donné. L’impact médiatique (car c’est souvent par l’influence
des médias que se passe une évolution des mentalités et donc des actions entreprises) de
Vaison-la-Romaine est à l’origine de ces PPR.
Et aujourd’hui ?
Les protections actuelles contre les crues, et particulièrement les crues éclair sont-elles
efficaces ?
Les stratégies trop spécialisées sont vouées à l’échec : endiguer de façon systématique les
rivières aggrave la situation en aval et peut augmenter le niveau des dégâts en cas de crue
forte ; proposer uniquement des actions en temps réel n’est pas toujours efficace (délai très
court en cas de crue éclair) et n’entraîne pas de réduction à long terme de la vulnérabilité en
zone inondable.
De plus une approche par Bassin doit être réalisée afin de ne pas déplacer les problèmes de
l’amont vers l’aval et d’agir sur la continuité du cours d’eau de façon efficace et rationnelle.
C’est le rôle des SAGE et SDAGE.
Enfin pour mieux prévoir les crues éclair, des outils météorologiques sont mis en place afin de
donner l’alerte le plus rapidement possible sur un lieu très précis, souvent concerné par la
violence des intempéries. D’un point de vue technologique, le développement des réseaux de
radars météorologiques capables de détecter la pluie permet d’envisager une surveillance
continue du territoire. Actuellement, le réseau de radars français n’est pas encore
complètement établi dans le sud de la France. Il compte une trentaine de radars répartis sur
toute la France alors qu’il en faudrait un par département. L’investissement nécessaire
représente 10 millions de francs par radar installé.
3. Les Avalanches : Le cas de Chamonix
Les avalanches font en France une trentaine de victimes par an. Ce chiffre apparaît sans doute
modeste si on le compare à d’autres types de catastrophes telles que les séismes mais il s’agit
d’un risque beaucoup plus représentatif des aléas dans les montagnes françaises. 355
communes sont menacées sur le sol français par ce risque.
Avalanche = déplacement rapide d’une masse de neige sur une pente de 30 à 55°
généralement, suite à une rupture du manteau neigeux.
3 types d’avalanches : de neiges fraîches poudreuse (lorsqu’il a neigé abondamment), de
plaque ou de neige humide de fonte… et 2 effets : avalanches coulante plaquée au sol ou
aérosol (nuage de neige qui peut aller jusqu’à 10 mètres de haut).
Comme on peut s’y attendre le risque avalanche est évidemment localisé sur les massifs
montagneux, surtout les jeunes massifs et les avalanches peuvent mettre en péril des biens et
des hommes (en noir sur la carte de France). Avant que le tourisme ne se développe, les
victimes d’avalanches étaient essentiellement des habitants de villages de montagne mais
aujourd’hui il s’agit surtout de skieurs, randonneurs qui déclenchent eux-mêmes les
avalanches qui les tuent.
Le risque avalanche n’était que très peu étudié avant 1970, tout juste les municipalités de
montagne devaient établir une déclaration d’avalanche lorsque l’une d’elle touchait un
hameau ou une habitation. L’intérêt pour les avalanches n’a d’abord été suscité que par les
premières lois RTM de 1882, mais la volonté principale était de limiter les inondations dans
les vallées… on s’est rendu très vite compte que le reboisement permettait une stabilisation du
manteau neigeux et donc évitait le déclenchement d’avalanches. Ensuite plus rien n’est
entrepris… C’est en fait une catastrophe, celle de Val d’Isère en 1970 (38 morts, tous des
citadins en vacances… chalet UCPA) qui provoquera une prise de conscience de ce risque :
dès lors il y a eu une réelle volonté de combler les manques en matière de
protection/prévention/gestion. Avec la montée en puissance du tourisme en milieu
montagnard, à l’image de Chamonix, le souci a très vite été de maîtriser l’urbanisme pour ne
pas assister à nouveau à une catastrophe meurtrière.
1-Outils réglementaires en prévention du risque.
En 1971, donc après la catastrophe, est lancée la mission « saunier » qui a pour but de
sécuriser les stations de montagne du risque avalanche => premières cartographies sont
entreprise d’abord avec l’aide des locaux car les données recueillies sont des infos auprès des
montagnards eux-mêmes (on parle de mémoire du risque). La cartographie marque ainsi le
début des connaissances en matière d’avalanche : on établit ainsi les Cartes de Localisation
Probable des Avalanches (CLPA) vers 1972 (entre le CEMAGREF et l’IGN) et on créée le
Centre d’Etude de la Neige chargé d’opérer une enquête permanente et observe les zones
sensibles (par exemple 110 couloirs d’avalanches qui sont à surveiller l’hiver) par des
mesures des relevés… (EPA Enquête Permanente Avalanche) On créée aussi l’ANENA
(Association Nationale d’Etude de la Neige et des Avalanches) véritable laboratoire d’étude
visant à comprendre la neige, ses mécanismes et ses caprices.
Ces créations successives au milieu des années 70 marque le début du combat des
collectivités et de l’Etat contre les avalanches tant en ce qui concerne la prévision, la
compréhension, la localisation. C’est d’abord un long travail cartographique et de recherches
basées sur des événements passés qui a commencé. Le contexte est un développement
touristique important de la montagne : il y a donc urgence.
En 1974, les CLPA (document qui est en fait un rassemblement d’infos mais qui n’a pas une
portée réglementaire) est complété par les PZEA (Plan de Zones Exposées aux Avalanches)
qui lui est un texte réglementaire. Il est intégré au POS et est entrepris par le ministère de
l’Equipement => contraintes en matières de zonage, d’urbanisme et contraintes sécuritaires
(pour lesquelles les communes doivent se plier).
En 1982 est venu se rajouter les PER en ce qui concerne les avalanches MAIS
FINALEMENT le risque n’est que peu pris en compte dans l’aménagement avec le
développement dans le même temps des UTN (facteur éco plus important au niveau national
mais aussi au niveau local).
2-Prévision, alerte et aménagements techniques de lutte…
1. Les paravalanches
Il existe de nombreux types de paravalanches, que l'on peut décomposer en deux parties
principales, la défense anti-avalanches active, et la défense anti-avalanches passive.
A-La défense active :
Elle vise à interdire le départ d'une avalanche grâce à des constructions qui sont des ouvrages
anti-vent ou empêche les départs de neige
Exemple de défense actives contre le vent:
- Le panneau vire-vent.
- La barrière à vent
- Paravents
Tout ces ouvrages empêchent plus ou moins l'action du vent sur le manteau neigeux, la
formation de corniches, de surépaisseurs... Ces ouvrages sont étudiés en soufflerie afin
d'optimiser au mieux leur aérodynamisme.
Contre le départ de plaques :
-Le râtelier paravalanches
-Les filets (mailles 15-20cm, acier ou fibre synthétique)
Ces deux types d'ouvrages permettent de fixer la neige en haut des couloirs en augmentant la
résistance des couches neigeuses.
Enfin, un dernier exemple de défense passive est, purement et simplement, le reboisement. En
effet, la forêt est une défense naturelle qui fut malheureusement trop souvent négligée du fait
de la surexploitation des massifs montagneux. Mais ce n'est pas le seul exemple, en effet, le
maintien de l'activité agricole en montagne est primordial, en effet, celui ci garanti, l'entretien
des pâturages (ou s'accumule la neige l'hiver) et donc, un meilleur "accrochage" de la neige
sur le sol.
B-Défenses passives :
Comme son nom l'indique, la défense passive est... passive, c'est à dire qu'elle subit
l'avalanche, et n'agit qu'au moment ou celle ci est en action. Ce type de défenses permet de
réduire les conséquences des avalanches.
En opposant un obstacle, le but peut être de dévier l'avalanche, afin d'éviter habitations, etc.
mais également, de diminuer la vitesse, et donc, l'énergie cinétique dégagée par l'avalanche. Il
en existe différents types, cela va de la galerie, du tunnel paravalanche (visant à faire passer
une avalanche au dessus d'une route, etc.) à l'étrave, modifiant la trajectoire de l'avalanche en
la divisant en 2 coulées.
Exemples :
L’Etrave :
L'étrave permet de dévier la coulée en 2 coulées distinctes. Construite, le plus souvent,
comme ici, devant une "habitation", elle permet de protéger celle ci, mais permet aussi de
diviser la puissance de l'avalanche par deux, en la divisant en 2 avalanches.
La tourne :
La tourne permet de dévier une avalanche, hautes et construites en béton, elles peuvent
protéger un endroit précis en déviant une avalanche de sa trajectoire.
Tas, dent freineuse et digue d'arrêt :
Ces trois ouvrages de défense passive permettent de réduire considérablement l'énergie
cinétique d'une avalanche. Derrière la dent et le tas, une zone de stockage de la neige est
prévue. En effet, si une autre avalanche repasse par dessus ces deux ouvrages, l'efficacité
est quasi nulle.
La digue d'arrêt (béton, haute de plusieurs mètres), intervient pour stopper totalement la
coulée, après un ralentissement causé par tas et dents. La sécurité de ces systèmes est
faible, ils sont donc peut employés.
Afin de se protéger contre l'avalanche, les montagnards construisaient généralement leur
maison à l'abri de rocher morainiques (gros blocs transportés par les glaciers, qui restent en
place après le repli du glacier). Encore une fois, l'utilisation de la nature peut être le meilleur
moyen de défense.
Des mesures de renforcement des habitations sont également prise, mais, ces mesures sont
presque illusoires compte tenu de l'énergie cinétique dégagée par les avalanches.
Défense passive et défense active vont de pair, plus la défense active est efficace, moins la
défense passive à de risque d'être mis en échec.
2. Les dispositifs d’alerte
Le BRAM (Bulletin du Risque Avalanche en Montagne) émis de manière journalière par
Météo-France qui suivant les conditions atmosphériques et de neige (étude des couches et
cristaux) peut établir un zonage du risque avec une échelle de 1 à 4. Des centres de
surveillance locaux (+ services RTM + ONF) sur le terrain permettent de surveiller en
permanence l’état du manteau neigeux.
Information sur les pistes : 3 drapeaux permettent de connaître le danger donc 3 palliers du
risque (le maire ou le préfet, si le risque est très fort, peuvent fermer l’accès aux pistes ou à
des accès de circulation). Drapeau jaune : risque localisé, drapeau à damier jaune et noir :
risque élevé, drapeau noir : risque très fort d’avalanche.
Autre échelle du risque : 5 palliers pour l’échelle européenne du risque… Une harmonisation
est à faire pour que le public ne soit pas perdu entre ces différentes échelles.
Dans le cas d’un risque fort imminent, un départ préventif d’avalanche peut être opéré par
dynamite en hélicoptère lors de PIDA (Plan d’Intervention pour le Déclenchement
d’Avalanches décidé par la commune), par câble (catex), par déflagration (Gazex… poche de
gaz qui s’enflamme)
Il existe donc un arsenal à la fois technique et des dispositifs d’alerte assez complets que l’on
retrouve dans la vallée de Chamonix mais qui n’ont pas empêchés la catastrophe du 9 février
1999… on verra pourquoi.
3-…Et pourtant une catastrophe meurtrière.
Chamonix, Haute-Savoie, vallée de l’Arve… endroit le plus surveillé de France en matière
d’avalanches, fait figure d’ex en matière de zonage, de cartographie du risque et de respect
des règlements urbanistiques…
Le théâtre de la catastrophe : hameau de Montroc à 10 kms au Nord-Est de Chamonix,
hameau historiquement bâti et soumis à une modeste pression humaine et touristique
(constructions toutes acceptées par les services de l’Etat lorsque la commune n’avait pas de
POS puis par la commune). Le hameau est entièrement situé en zone blanche ou en zone bleu
du PPR donc vraisemblablement soumis que très légèrement au risque.
1. L’épisode neigeux
A 2500 mètres au dessus du hameau sur la montagne du Peclerey, on a enregistré une couche
de neige de 2 mètres 25 tombée les 5 jours précédent la catastrophe (chiffre qui apparaît
énorme mais habituel = revient tous les 5 ans environ). Le 9 février vers 14h, ce manteau
craque à la même altitude (2500 m). On estime de 6 à 10 mètres de haut la vague blanche qui
été engendré et à 200 mètres sa largeur. L’avalanche dévale les pentes à près de 200 km/h,
parvient à passer un ressaut que l’on pensait infranchissable par une avalanche et replonge
directement sur le hameau où elle engloutie 20 habitations et fait 12 morts (20 personnes
sauvées). La force de l’avalanche est telle que la coulée remontra même le versant opposé sur
20 mètres de dénivellé (distance de 200 mètres environ) = La force engendrée est celle d’une
avalanche qui a lieu tous les 300 ans. Dans la même journée, 12 autres avalanches seront
détectées, le risque annoncé était maximal, le maire avait déjà prévu la fermeture d’accès et
avait invité les habitants au confinement (hameau du Tour). Les plans « Rouge » et « Secours
en Montagne » ont été déclenchés l’après-midi du drame sur les lieux de la catastrophe.
2. Pourquoi la catastrophe ?
Alors que pourtant la commune est équipé d’un PPR (Élaboré dès 1987 et approuvé par le
préfet le 14 mai 1992, le PPR de Chamonix — premiers à avoir été mis en place en France—
couvre un tiers de son territoire urbanisable, soit quelque 300 hectares, et fait désormais partie
du plan d'occupation des sols (POS depuis 1984) de la commune, comme l'exige la loi.
Autrement dit, toute nouvelle urbanisation en dépend).
Une enquête a été mise en place pour déterminer qui était en faute : le maire responsable du
zonage du POS ou l’Etat qui est chargé de l’élaboration des PPR via ses services
techniques ? ? ?
On a aussi apparemment oublié qu’une avalanche du même type s’était produite sur le même
espace 150 ans plus tôt mais que la mémoire n’a pas été perpétuée au fil des années : un guide
l’a évoqué lors de l’établissement des cartes du risque, il a subi une véritable pression par des
locaux pour que les faits qu’il décrivait soient oubliés…
Aurait-on pu prévenir la catastrophe ? Un retour d’expérience a été commandé par l’état sur la
catastrophe mais à la lecture du rapport on reste septique : amélioration des cartes CLPA,
révision de PPR, volonté de poursuivre dans la voie de la connaissance des avalanches par
modélisation… les 70 PER de Haute-Savoie ont donc été tous révisés suite à la catastrophe et
une redéfinition du zonage et du risque encouru.
On peut regretter toutefois l’absence de document d’info le DCS (Document Communal
Synthétique) et du DICRIM (Document d’Info Communale sur les RIsques Majeurs) qui sont
en cours et qui doivent informer les populations sur les précautions à prendre et les réactions à
tenir en cas de catastrophe.
Sur le terrain, en tout cas, on n’exclue pas d’avoir recours à l’expropriation de certains chalets
désormais dans le hameau. Des relevés sont en cours dans toute la vallée pour affiner le
zonage du risque. L’état souhaite aussi appuyer les services RTM dans leur action en
montagne (reboisement pour couper couloirs d’avalanches et relevés de terrain pour
compléter les connaissances des avalanches.
On envisage aussi un vaste programme : SIRVA. Il s’agit d’un projet de système d'information
sur les risques de la vallée de l'Arve (Haute-Savoie). L'objectif est de réunir une base de
données avec toutes les sources d'informations sur les risques. Ainsi, SIRVA associe aux
plans cadastraux, les cartes de localisation probables des avalanches (CLPA), les enquêtes
permanentes sur les avalanches (EPA), les archives RTM, les plans d'occupation des sols
(POS) ainsi que les plans de prévention des risques (PPR). Le système SIRVA a été élaboré
pour être accessible en réseau. A terme, il suffira de cliquer sur une parcelle pour avoir toutes
les informations liées aux risques sur cette zone. Les bases de données pourront être
consultées par les services techniques comme les services RTM ou l'urbanisme, par les
experts scientifiques et par le grand public. Un tel système sera très utile aux services RTM
qui ont environ 500 avis à donner tous les ans. Ces services auront la possibilité de consulter
SIRVA, mais aussi de compléter et d'actualiser les bases de données.
Ce projet, prévu sur 2 ans, s'inscrit dans le contrat de plan état-région. Il a été élaboré par
Gérard Brugnot, qui en est aussi le coordinateur avec Roland Burnet au Cemagref à Grenoble.
Il regroupe en partenariat scientifique le service RTM 74 et l'Institut de mathématiques
appliquées de Grenoble (IMAG). L'IMAG apporte ses compétences sur les bases de données
et d'informations alors que le service RTM 74 offre ses compétences de terrain et de futur
utilisateur. Le Cemagref, quant à lui, intervient comme maître d'œuvre de la base de données.
Il fournit en outre les informations qui permettent d'établir les CLPA et les EPA. Les
compétences spécifiques des scientifiques du Cemagref sont aussi mises à contribution sur
tous les risques gravimétriques, tels les avalanches et les risques torrentiels, mais aussi sur sa
compétence de gestion informatique de la cartographie.
3. Un exemple savoyard qui pourrait s’étendre.
Jusqu'ici tout le cadastre de la Haute-Savoie a été numérisé par une régie départementale
financée par le conseil général. Des informations sur le risque attribué à chaque parcelle
peuvent alors lui être superposées. Tout cela est possible grâce aux EPA et CLPA
précédemment établies en collaboration avec le Cemagref.
Les CLPA couvrent 600 000 hectares du territoire français touché par les avalanches. Les
avalanches sont ainsi reportées sur des cartes à l'échelle du 1/25 000e. Depuis les années 1990,
toutes ces cartes sont réactualisées et numérisées en utilisant un Système d'information
géographique.
Les EPA couvrent tout le territoire national avec 4 500 couloirs d'avalanches observés. 80 000
événements ont été répertoriés depuis 1882, ce qui correspond de 1000 à 2000 avalanches par
an. Les EPA intègrent la notion de fréquence des avalanches que n'ont pas les CLPA.
Actuellement, SIRVA est appliqué à 4 communes de la vallée de l'Arve où les risques naturels
sont importants. Il s'agit de Vallorcine, de Chamonix, des Houches et de Servoz.
Le cahier des charges du projet intègre aussi un volet sur l'estimation en temps et en coût, de
l'extension du système sur toutes les communes du département puis d'autres départements.
Vaste programme.
4. Que nous montre la catastrophe : les limites de la
cartographie…
En fait dès l’établissement du zonage, celui-ci est apparu problématique car d’un coté ou d’un
autre d’un trait de crayon, un terrain pouvait valoir plus de 20 fois son prix (car peut-être en
terrain inconstructible). Nombreux conflits donc d’autant plus que les experts cartographie
des risques probables et donc incertains. Le rôle des experts au début est mis en doute… Les
conflits fonciers et les enjeux des collectivités en matière de développement éco sont tels
qu’on s’est rendu compte qu’une cartographie des risques majeurs (c’est-à-dire dans leur
ampleur maximale) s’est révélée impossible. On a voulu contenter tout le monde
(propriétaires terriens, municipalités…) en choisissant la modération.
A cela deux fait :
Fait 1 : le zonage peut être modifié si des aménagements sont faits. Exemple : si on se situe
dans une zone rouge (où le risque est fort) et qu’on souhaite y faire un aménagement, il suffit
de trouver une parade technique aux avalanches pour faire passer le terrain en zone
constructible.
Fait 2 : puisque des intérêts économiques sont en jeu pour les collectivités (le développement
serait ralenti si on cartographiait les risques dans leur état majeur c-à-d amplitude maximale
de la catastrophe), on négocie le zonage en prenant en compte des aspects économique,
financiers, sociaux… ce qui fait d’ailleurs dire à un expert du CEMAGREF qui était chargé
de mettre en place les premières cartes de localisations des avalanches que « le zonage ne
représente pas les avalanches les plus extrêmes qui se puissent concevoir sur le site mais une
avalanche déduite d’un compromis entre un niveau de dommage inacceptable par la
collectivité menacée et les coûts de prévention qu’elle est concrètement susceptible de
supporter. Le choix fait donc droit à des considérations étrangères à la science, d’ordre social
et économique » (Claude CHARLIER). En d’autres termes et plus simplement, le risque est
sous-estimé y compris par des documents cartographiques à portée réglementaire et tout le
monde le sait (scientifique, politique, élus locaux, acteurs de la vie économique… sauf peutêtre la population).
5. …Et des outils techniques.
Les grands aménagements paravalanches sont-ils la solutions alors pour sauver ce qui peut
l’être ? on peut en douter lorsqu’on sait que le jour de la catastrophe 12 autres avalanches se
sont produites… la DDE a affirmé que tous les paravalanches ont joué leur rôle mais que si il
y avait eu une coulée par dessus une autre, on aurait eu d’autres catastrophes car les
aménagements auraient été inutiles…
Avec l’accroissement des activités en montagne, le besoin d’une cartographie précise du
risque, d’une prévision d’avalanche et d’une gestion locale du risque est important. Il est
nécessaire de définir les priorités, fermeture de pistes ou de routes, déclenchement artificiel,
information du public..., en développant les réseaux de mesure, en mettant au point de
nouveaux instruments, en utilisant des modèles et des outils pour une prévision locale et en
définissant des systèmes d’alerte. Mais ceci est-il suffisant ? Faut-il se fier aux cartographies
ainsi négociées et à la science (modélisation) sur des phénomènes incertains dans une
dimension temporelle et spatiale ?
Philippe LAMOUR de la DATAR (et maire de Ceillac station du Queyras) est sans doute
l’homme de poids qui a le plus critiqué cet état de fait en disant (en 1978) que de toute façon
« les avalanches tombent où elles veulent » et il parle « d’ assurance chimérique » et du
caractère illusoire apporté par de prétendue science des avalanches ».
CONCLUSION :
L’application stricte des PPR sur les territoires montagnards conduirait tout simplement à
l’expropriation et à raser des zones les plus exposées qui seraient déjà construites car on
estimera le risque humainement inacceptable dans les zones très exposées, ou à imposer
simplement, dans d'autres régions, des prescriptions d'urbanisme pour limiter l'extension des
constructions en zones à risques. Cependant, la politique de prévention conduite par les
acteurs publics se heurte à une difficulté majeure : la communication et l'information envers
les acteurs de la vie privée.
Pour les élus locaux tels que les maires, la politique de prévention des risques pour la
protection de leurs administrés est en contradiction avec leurs perspectives de développement
communal. Faire ce devoir d'information ne risque-t-il pas de favoriser le départ de certains
habitants vers d'autres communes hors des zones inondables ?
La solution technique n’est toutefois pas non plus la meilleure solution pour contrer les
risques : derrière une digue, on n’est pas à l’abri d’une inondation. Il en va de même pour tout
type d’ouvrage dont la fiabilité peut-être remise en cause lors de phénomènes exceptionnels
(tels que Vaison ou Montroc) et qui, par définition, sont imprévisibles tant sur l’espace qu’ils
concernent, leur ampleur, leur récurence…etc. (= l’aléa).
Nous entrevoyons ici un des maillons faibles de la politique de prévention, un des maillons
qui fait aussi que ce qui s’est déjà produit peur se reproduire, malgré l’arsenal de dispositions
techniques ou législatives existantes.
Les montagnards ont, semble-t-il, une culture du risque et lorsque l’on met côte à côte des
intérêts privés financiers et l’intérêt général de sécurité, on a tendance à minimiser le risque.
Un autre secteur déterminant, et essentiel de la prévention, de l'évaluation et de la répartition
des dommages est l'assureur. Finalement, tout le monde (et pas seulement les montagnards)
sont concernés par ces risques lorsque l’on sait que le système assurantiel fonctionne sur le
principe de la mutualisation (instauré par la loi du 13 juillet 1982 sur l'indemnisation des
victimes face aux catastrophes naturelles) : tous les assurés en France paient une prime
additionnelle (9 % depuis 1983) qui alimente un fonds destiné à l'indemnisation des victimes.

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