Ballet du Grand Théâtre de Genève

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Ballet du Grand Théâtre de Genève
Danse
mardi 16 janvier 2007, 20h30, Théâtre Molière
Ballet du Grand Théâtre de Genève
Para-Dice - Saburo Teshigawara
Selon désir - Andonis Foniadakis
Loin - Sidi Larbi Cherkaoui
Para-Dice
Chorégraphie, décors, costumes et lumières : Saburo Teshigawara
Création sonore : Willi Bopp
Selon désir
Chorégraphie et costumes : Andonis Foniadakis / Musique : Jean-Sébastien Bach / Création
sonore : Julien Tarride / Lumières : Rémi Nicolas
Loin
Chorégraphie : Sidi Larbi Cherkaoui / Musique : Heinrich Ignaz Franz Biber / Scénographie
et lumières : Wim Van de Cappelle / Costumes : Isabelle Lhoas
Ballet du Grand Théâtre de Genève Directeur général : Jean-Marie Blanchard
Directeur du Ballet : Philippe Cohen
Depuis sa création en 1962, le Ballet du Grand Théâtre de Genève explore la pluralité de la
danse du 20ème et du 21ème siècle. Avec des collaborateurs aussi renommés que George
Balanchine, William Forsythe ou Rudolf Noureïev, la plus brillante compagnie de danse
helvétique s’est lancée dans une politique de création qui lui permet de conjuguer la sphère
néoclassique avec la galaxie contemporaine.
Trois créations de trois chorégraphes aux horizons différents. Quel lien peut-il y avoir entre
l’univers aérien de Saburo Teshigawara – avec Para Dice – la transe baroque d’Andonis
Foniadakis – avec Selon désir – et le métissage culturel de Sidi Larbi Cherkaoui – avec Loin – ?
Dans ces trois oeuvres, chez ces trois chorégraphes, il y a avant tout une esthétique où la
spiritualité tient une place prépondérante, où l’humain est au centre du processus de création.
Du tourbillon de virtuosité baroque de Foniadakis à la spiritualité légère et délicate de
Teshigawara, en passant par le monde fraternel suggéré par Cherkaoui, naît une trilogie
chorégraphique vitaminée et roborative. Une sarabande d’émotion et de beauté. Le Ballet du
Grand Théâtre de Genève - l’un des plus originaux et inventifs d’Europe - frappe fort !
Informations pratiques :
Tarifs abonnement : de 6 € à 18 €
Tarifs hors abonnement : de 7 € à 24 €
Pass’culture : 5 €
En résonance
• Rencontre
avec les danseurs à l’issue de la représentation
Foyer du Théâtre Molière
• Vidéo - danse
La Danse dans tous ses états
Danser l’Invisible de Saburo Teschigawara
une heure avant le spectacle, Foyer du Théâtre Molière. Entrée libre
En partenariat avec Arte et Choréïa
A propos du Ballet du Grand Théâtre de Genève
Actualité
Depuis deux ans, le Ballet du Grand Théâtre de Genève a entamé une refonte de son
répertoire sans s’interdire d’explorer des territoires inhabituels pour une compagnie de ce type.
Le Ballet de Genève s’est donc engagé avec conviction dans un projet artistique dont l’ambition
principale est de participer aux évolutions de la création chorégraphique tout en maintenant un
contact avec les fondements de la danse, sa source vivante.
Le programme que nous vous proposons est composé de trois créations mondiales. Ce
programme n’est pas une simple addition d’initiatives diverses, hétérogènes, indifférentes les
unes des autres, mais concourt à la réalisation d’un projet artistique fédérateur, structurant et
dynamique. Enfin, ce programme porte en lui l’esprit d’ouverture et de générosité qui animent
les artistes de la Compagnie.
Avec ce programme, danseurs et spectateurs sont transportés dans un tourbillon de virtuosité
baroque avec Foniadakis. Teshigawara nous élève vers une spiritualité légère, délicate et
suspendue dans les airs. Sidi Larbi Cherkaoui nous livre une réflexion sur l’identité, les préjugés
et s’engage dans une voie humaine, chaleureuse et, parfois drôle. « Loin », c’est de l’émotion à
l’état pur, que dépeint un monde fraternel lointain et pourtant si proche. En proposant à ces trois
créateurs de partager une même soirée, le Ballet de Genève entend prendre la parole sur un
mode majeur, pour ce qu’il est et sera dans les années à venir : un foyer d’énergie créatrice
essentiel, conscient de son devenir artistique et de la perspective historique dans laquelle il
s’inscrit.
Le Ballet du Grand Théâtre de Genève se veut porteur de cette profession de foi et donner de la
danse une image forte susceptible de déclencher d’autres imaginaires.
Philippe Cohen
Directeur du Ballet
Parcours des chorégraphes
Sidi Larbi Cherkaoui
L'art chorégraphique de Sidi Larbi Cherkaoui fusionne différentes techniques – y compris le hiphop, la danse moderne, le jazz, le ballet, les danses traditionnelles irlandaises et africaines et le
kathak. Ses œuvres sont théâtrales, dynamiques, portées par la musique.
Durant son enfance à Anvers, en Belgique, il s'est initié à la danse en autodidacte, en observant
des vidéo-clips. Né en 1976 d'une mère flamande et d'un père marocain, il affirme lui-même
s'être toujours senti « dans l'entre-deux ». Il a vite pris conscience que les rapports entre la
danse et la musique pouvaient refléter cet état particulier.
Il a commencé à danser pour la télévision et s'est produit dans un groupe de hip-hop, The Bang
Gang Dance Company, avant d'étudier à l'école de danse d' Anne Teresa De Keersmaeker,
PARTS (Professional Arts Research and Training Studios). Il a remporté son premier prix en
1995 pour le « meilleur solo belge » dans le cadre d'un concours à Gand initié par Alain Platel.
Deux ans plus tard, Alain Platel lui a demandé de collaborer à la création de Iets op Bach
(1998), une production des Ballets C. de la B., le collectif formé par Alain Platel. Iets op Bach a
récolté un succès planétaire et tourné sur la scène internationale de 1998 à 2001.
Sidi Larbi Cherkaoui a récolté de nombreux prix, y compris le Fringe First Award au Festival
d'Édimbourg en 1999, le Barclay Theatre Award en 2000 et le prix Movimentos de la meilleure
chorégraphie à Wolfsburg (Allemagne) en 2003. Il a monté d'autres pièces avec Les Ballets C.
de la B., notamment Rien de Rien (2000) et Foi (2003).
Saburo Teshigawara
Originaire de Tokyo, Saburo Teshigawara entame sa carrière de chorégraphe en 1981, après
avoir étudié les arts plastiques et la danse classique. En 1985, il fonde KARAS avec la
danseuse Kei Miyata. Depuis, KARAS est régulièrement invitée en Europe, Asie, Amérique, et
Océanie. Outre ses créations en solo, il chorégraphie pour d’autres grandes compagnies. De
1994 à 1995, il crée deux pièces pour le Ballet de Francfort, White Clouds Under the Heels Part
I et Part II. Il signe sa version du Sacre du Printemps pour le Ballet National de Bavière en 1999,
crée Modulation pour le Nederlands Dans Theater en 2000, Para-Dice pour le Ballet du Grand
Théâtre de Genève en 2002 et AIR pour le Ballet de l’Opéra de Paris en 2003.
Saburo Teshigawara s’intéresse également aux différentes formes d’arts visuels. Dans chacune
de ses créations, il conçoit l’oeuvre dans sa globalité, aussi bien les costumes, les éclairages, le
dispositif scénique que la chorégraphie.
Parallèlement il crée des installations (dernièrement Light Behind Light, 2004), réalise des
vidéos (dont le remarqué T-City en 1993), participe à des films et met en scène l’opéra Turandot
de Puccini en 1999 (coproduit par Bunkamura, Tokyo et le Festival international d'Edimbourg.)
Son intérêt pour la musique et ses recherches sur l'espace le conduisent à monter des oeuvres
in situ. Ainsi en 1995, il crée NOIJECT, association de noise (bruit) et object (objet) dans un
entrepôt désaffecté, puis In: Edit (1996), dans une centrale électrique. En 1999, il présente Triad
à la Hayward Gallery et plus récemment OXYGEN (2002). Il dirige également des ateliers
permanents au studio de KARAS à Tokyo, dans lesquels il encourage et inspire de nombreux
jeunes danseurs. En 1995, il lance à Londres, un projet pédagogique appelé S.T.E.P. (Saburo
Teshigawara Education Project), avec plusieurs partenaires anglais. De ce programme sont
issues les pièces Invisible Room (1997) et Flower Eyes (2000). En 2004, The Rolex Mentor and
Protege Arts Initiative lui demandent d'être l'un de leurs mentors pour travailler pendant un an
avec un jeune danseur de son choix. A partir de 2006, Saburo Teshigawara sera professeur au
Department of Expression Studies de l'Université St Paul's (Rikkyo) au Japon.
Andonis Foniadakis
Andonis Foniadakis suit les cours de l’Ecole de danse nationale de Grèce de 1988 à 1990, puis
l’Ecole Rudra à Lausanne de 1990 à 1992. Au Béjart Ballet Lausanne, il danse notamment King
Lear, The Art of Pas de Deux, Shéhérazade, Ballade de la rue Athina, Variation pour porte et un
soupir, Messe pour un temps présent, L’Oiseau de feu, Igor et Moi, Wagner.
Danseur au Ballet de l’Opéra National de Lyon de 1996 à 2002, il interprète, entre autres, les
reprises de : Cendrillon, Grosland, Contraste et Coppelia de Maguy Marin, Second Detail et
Quartette de William Forsythe, Petite Mort et Sechs Tanz de Jiri Kylian, Remansos et
Rassemblement de Nacho Duato, Carmen de Mats Ek, E JM2 de Frédéric Flamand, Tabula
rasa et Black Milk d’Ohad Naharin, Green and Blue et Love Defined de Bill T. Jones. Il danse les
créations suivantes : Casse-Noisette (rôle-titre) de Dominique Boivin, Sini de Terro Saarinen,
Concerto et Petrouchka de Joachim Slohmer, Origami de la chair de Lionel Hoche, Double Face
de John Jaspers, Final Lecture de Pascal Touzeau, Perspective depuis les ruines d’Allesio
Silvestrin et Arbre noir de Jo Kanamori.
Sa première chorégraphie date de 1994, In Between, suivie en 1996 par Court Métrage pour le
Béjart Ballet Lausanne. Il crée Fila Filon au Festival de Danse de Cannes (1997), Aurore
Boréale au Festival international de Copenhague et Lava Nama pour le Lyon Opéra Ballet
(1999). Plus récemment, il chorégraphie Pénombre au Festival international de Copenhague et
In Memoriam Suberbiae à l’OMMA, Concert Hall d’Athènes en 2001 et, en 2002, Solo pour
EMAIL.COMédie musicale de Dominique Boivin, Pièce inconnue au Conservatoire National
Supérieur de Danse de Lyon et Handle With Care au Théâtre National du Nord de la Grèce.
En octobre 2004, Andonis Foniadaki crée le ballet Use pour sa jeune compagnie, la Compagnie
Apotos_ma, dans le cadre de la 11e Biennale de la Danse de Lyon.
A propos des pièces chorégraphiques
Loin, création mondiale de Sidi Larbi Cherkaoui pour le Ballet du Grand Théâtre, s’interroge sur
la distance entre les êtres, les époques et les cultures. Cherkaoui place ainsi sa danse dans un
univers visuel et sonore composé d’éléments qui sont (apparemment) loin de nous. Pourtant, on
peut aisément imaginer, connaissant le plaisir qu’a le chorégraphe à «frotter» les cultures dans
un même espace-temps, que les décors arabisants constitués de moucharabiehs et de voiles,
les costumes orientaux évoquant les arts martiaux et la musique instrumentale européenne du
XVIIe siècle vont former un tout disparate, mais que de ce métissage va émerger un appel au
rapprochement. Les mains et les bras des danseurs s’entrecroisent, et de ces mouvements
surgissent de nouvelles formes, de nouveaux corps. Les limites de chaque corps se fondent et
les danseurs eux-mêmes perdent leurs repères. Par le travail de transposition, le chorégraphe
met aussi en lumière les points de convergence et de divergence, tout en nous permettant de
les relativiser ; selon les variations d’intonations employées pour dire une même phrase,
l’impression ressentie par l’interlocuteur sera différente. De la même façon, un même
mouvement réalisé par différentes parties du corps va provoquer pour le danseur comme pour le
spectateur une sensation très différente. En demandant aux danseurs de raconter une histoire,
puis d’isoler les mouvements de mains et des bras qui illustrent leur propos, et de réaliser ces
mouvements à plusieurs, le chorégraphe, là encore, frotte les individus aux récits d’autres
individus et laisse émerger la rencontre qui naît des variations entre les uns et les autres.
Para-Dice, création de Saburo Teshigawara pour le Ballet du Grand Théâtre de Genève, donne
l’occasion au chorégraphe japonais, véritable virtuose du mouvement, de poursuivre ses
explorations sur la dynamique, entre la vitesse effrénée de ses plus fameuses pièces et
l’immobilisme absolu de ses récentes créations. Le titre de sa chorégraphie, Para-Dice, repose
sur un jeu de mots. Entre les allusions au paradis et à l’idée de hasard (« dice » veut dire « dé »
en anglais), elle répond à la définition qu’il donne de son art : « La danse est une sculpture,
sculpture de l’air, sculpture de l’espace, sculpture du temps. Je danse pour faire disparaître le
temps, je danse pour créer le temps ».
Le temps et la danse, par Saburo Teshigawara
« La danse existe depuis l’aube de l’humanité. Peu importe comment on essaie de la situer dans
l’histoire ; tout ce que je peux dire c’est que la danse vient du « présent ». Quand je danse, cela
ne peut être que maintenant, sans le poids de l’histoire. Et je danse, tendu vers un temps qui
n’est pas encore arrivé. J’ai le sentiment que ce nouveau temps n’est pas encore arrivé. J’ai le
sentiment que ce nouveau temps est constamment près de moi, qu’il y a encore plus de temps
au-delà de la conscience immédiate. Le temps n’est pas quelque chose qui s’écoule, mais qui
jaillit, et c’est tourné vers cette sorte de temps-là que je danse. Danser donne naissance au
temps et contient la réalité de la vie.
La notion du temps que possède le corps s’exprime pour moi dans le fait que celui-ci, délimité
par des contours nets, absorbe l’air qui l’entoure. Quand je dis corps, je ne me réfère pas
seulement à l’entité physique, mais aussi à l’air qui l’environne. En bougeant, le corps dépasse
ses propres limites et brouille la frontière entre lui-même et l’air. Ce qui rend la danse
intéressante, c’est qu’elle inclut toujours l’air. Cela signifie qu’elle est l’hôte de la conscience.
Il me faut écarter ce que la danse a tenté de faire au corps, par le passé, la perception millénaire
d’une enceinte de temps gravitationnelle. Lorsque je songe à la danse, je perçois clairement
qu’en diverses circonstances, des corps et des formes invisibles, comparables à de faibles
reflets, apparaissent. Ils obéissent au paradoxe en vertu duquel au lieu de constituer un foyer
unique et circonscrit au corps, l’endroit où une multitude d’éléments se fondent – corps, air,
gravité, légèreté, pression, musique, son, conscience, lettres, langues, formes, nature, nombres,
lumière, poids, vitesse, température, humidité, matière, solvants, vapeurs – est parfaitement
perceptible. Je vois donc le mouvement se perdre dans le temps. C’est en cela, je le crois, que
de plus larges possibilités s’offrent à la danse.
« Ressens l’air.
L’air change de forme sans cesse.
Sa transformation n’a pas de fin.
Une sensation vaporeuse émerge de la forme de questions sans fin.
Merci et Bonjour s’échappent lentement dans l’air comme un jeu de dés qui se dissolvent.
Le rythme intérieur vient d’un futur lointain.
C’est le lien entre de fragiles vies.
Et cela donne forme au futur pressenti.
Respirez davantage, fragiles vies. »
Saburo Teshigawara
Selon désir, présenté en première mondiale par le Ballet du Grand Théâtre de Genève en
février 2004, tente de puiser dans ces grands portiques que sont les chœurs d’entrée des
Passion selon Saint Matthieu et selon Saint Jean l’inspiration pour des mouvements et des
échanges entre les corps. L’idée du ciel et de la terre, ainsi que les représentations picturales de
la foi, du martyre, leur volupté dans la douleur, amènent Andonis Foniadakis à opposer
l’élévation vers l’esprit céleste, synonyme de légèreté et de glissement, à l’énergie terrienne,
représentée par des corps entremêlés les uns aux autres.
« Dans de nombreux tableaux de la Renaissance, on trouve des formes somptueuses pour
illustrer la souffrance. On assiste à une certaine volupté dans la douleur. Mon ballet oppose
donc ces notions : élévation vers l’esprit céleste, synonyme de légèreté et de glissement ;
descente vers l’énergie terrienne, synonyme de corps entremêlés les uns aux autres, et peutêtre d’enfer. »
Andonis Foniadakis