Journal du Textile du 17 avril 2012, N° 2124
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Journal du Textile du 17 avril 2012, N° 2124
INDUSTRIE Le dentellier Solstiss renforce sa fibre créative En se dotant pour la première fois d’une directrice artistique, en la personne d’Adeline Sapin, le dentellier de Caudry s’ouvre de nouvelles pistes. G RAND sourire et yeux pétillants, Adeline Sapin exprime par son apparence comme dans son discours une belle énergie. A 28 ans, elle est devenue en septembre dernier la nouvelle directrice artistique du dentellier caudrésien Solstiss. Elle s’est lancée dans l’aventure de la dentelle avec une soif d’apprendre et surtout une envie (et une mission) de faire valoir cette leavers qui fait le renom de la maison. Son credo : «Tout est possible». Rien ne doit limiter la création. «Quand une envie s’avère difficile à réaliser, j’essaie de réorienter, de passer par les ennoblissements, par exemple, pour arriver à un résultat proche de ce que je cherche à faire», explique la jeune femme. Et c’est sans doute ce trait de caractère qui a séduit la famille Machu, à la tête de Solstiss. Cela et son parcours déjà bien rempli qui lui a permis de côtoyer l’autre versant du décor mode. Un atout pour mieux comprendre les attentes des clients qu’elle rencontre aujourd’hui et avec lesquels elle établit notamment des projets personnalisés. Diplômée de l’école Duperré, Adeline Sapin a poursuivi ses études en Art Déco, dont elle est sortie major en vêtement. Elle a rejoint rapidement le studio de Gaspard Yurkievich, qui fut son professeur. Un an plus tard, en 2008, elle intégrait la maison Christian Lacroix, où elle avait déjà effectué un stage. Là, elle s’occupait des broderies pour le prêt-à-porter et des ornements dédiés à la Couture. Elle y restera jusqu’aux difficultés rencontrées par la griffe en 2009. Après quelques autres collaborations avec le créateur, la jeune femme rejoignait pour un temps donné la maison Lesage. «J’ai saisi là l’opportunité de passer du temps et d’apprendre avec un autre grand monsieur», dit-elle. Elle aura ainsi l’occasion de côtoyer diverses grandes maisons, d’en connaître les équipes, de saisir les nuances de l’une et de l’autre. C’est au terme de cette expérience qu’elle est contactée par Solstiss pour occuper la fonction de directrice artistique, une création de poste. «Dans mon parcours, en fait, je suis remontée du vêtement jusqu’à la matière.» plus avant encore dans cette créativité qui fait déjà son identité via une offre riche de centaines de références travaillées, brodées, peintes. «Donner à voir la dentelle différemment, voire la détourner, voilà les termes employés par Adeline Sapin pour décrire son objectif. Il ne faut pas avoir peur de présenter des choses qui ne sont pas commerciales en apparence mais qui, finalement, vont faire leur bonhomme de chemin. Il faut avoir la liberté d’explorer des pistes et de présenter aux clients des choses qui ne leur plairont peut-être pas tout de suite mais qui seront retenues la saison suivante, le temps que l’idée mûrisse. Et cette liberté, les dirigeants de Solstiss me la donnent.» La jeune femme ne dit rien sur ses actuelles recherches, préférant ne révéler ses nouvelles créations que lors du prochain Salon Première Vision, où elle présentera sa deuxième collection. Un Salon qui est une étape obligatoire pour ce dentellier, dont la majorité du chiffre d’affaires se fait dans le secteur du prêt-à-porter (créateur, haut de gamme, mariée, luxe), même s’il possède une activité dans la lingerie. En sus de ces deux secteurs, Solstiss entend désormais entrer dans de nouveaux territoires grâce aux nouveaux développements initiés par Adeline Sapin. STÉPHANIE ATHANÉ ● ADELINE SAPIN, LA DIRECTRICE ARTISTIQUE DE SOLSTISS ET L’UNE DE SES CRÉATIONS. «Il faut oser réaliser des choses non commerciales en apparence, mais qui peuvent permettre d’explorer de nouvelles pistes». DR ler jusqu’au bout», dit-elle, tout en concédant : «J’essaie aussi que les choses avancent au plus vite, parce que, pour avoir été dans un studio, je sais quel est le rythme.» Pas de contraintes de temps et autant que possible pas de contraintes de matières. De fait, l’autre mission d’Adeline Sapin est de porter la dentelle signée Solstiss Ecoute et proximité Cette connaissance de la filière, la jeune femme s’en sert aujourd’hui. Elle lui permet de «créer une grande proximité avec les grandes maisons», de stimuler leurs envies de dentelle pour robe, de donner vie à celles-ci. Se partageant entre le showroom parisien et l’usine de Caudry, où elle accompagne les équipes qui mettent en dentelle les directives de son inspiration («c’est véritablement un travail d’équipe», précise-t-elle), Adeline Sapin a d’abord tenu à rencontrer chaque créateur et acteur du luxe. Ceci afin d’apporter sa sensibilité et sa vision du produit. Un rôle d’écoute et de proximité auquel elle accorde beaucoup d’importance. «C’est une façon de dire aux clients : “Nous sommes là.” Pour être allée de l’autre côté, je sais que c’est très important d’avoir un fournisseur qui est à l’écoute.» La jeune femme a un autre leitmotiv, «n’avoir aucune contrainte de temps». «Quand une idée est là, il faut la saisir et alN°2124 / 17 avril 2012 Journal du Textile 19