LE FACTEUR DE TRANSCRIPTION SOX10 :

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LE FACTEUR DE TRANSCRIPTION SOX10 :
Université Paris XII – Val de Marne
Ecole Doctorale : Sciences de la Vie et de la Santé
Discipline : Génétique Humaine
Thèse présentée le 29 juin 2005
LE FACTEUR DE TRANSCRIPTION SOX10 :
Fonction au cours du développement
Dysfonctionnement dans les malformations congénitales
Mathilde Girard
Composition du jury :
Pr. Bernard Grandchamp
Rapporteur
Pr. Nicolas Lévy
Rapporteur
Dr. Pascal de Santa Barbara
Examinateur
Pr. Michel Goossens
Directeur de thèse
SOMMAIRE
INDEX DES FIGURES
-4-
ABBRÉVIATIONS
-5-
I. INTRODUCTION
-6-
II. LA CRETE NEURALE
- 11 -
1.
DEFINITION ET ORIGINE EMBRYOLOGIQUE
- 11 -
2.
FORMATION DE LA CRETE NEURALE
- 12 -
A. INDUCTION
- 12 -
o
Sources des signaux d’induction
- 12 -
o
Le modèle « par défaut » : implication de la voie BMP
- 13 -
o
Le modèle à deux signaux : implication de la voie Wnt
- 13 -
o
Les autres signaux : émergence d’un modèle à plusieurs étapes
- 14 -
o
Les gènes de la crête neurale
- 15 -
B. MIGRATION
- 17 -
o
Initiation de la migration
- 17 -
o
La crête neurale troncale
- 18 -
o
La crête neurale craniale
- 20 -
C. DIFFERENCIATION
- 21 -
o
Les dérivés de la crête neurale
- 21 -
o
Prédestination versus pluripotence
- 22 -
o
Les facteurs de différenciation de la crête neurale
- 23 -
3.
LES NEUROCRISTOPATHIES
- 26 -
III. LA FAMILLE DES FACTEURS SOX
- 27 -
1.
- 27 -
GENERALITES
A. DEFINITION
- 27 -
B. CLASSIFICATION
- 27 -
C. PROPRIETES
- 29 -
-1-
2.
LES FACTEURS SOX AU COURS DU DEVELOPPEMENT
- 30 -
A. EXPRESSION
- 30 -
B. SPECIFICITE : LES PARTENAIRES DES SOX
- 30 -
o
Modèle
- 32 -
o
Les familles partenaires des SOX
- 33 -
C. REDONDANCE VERSUS COOPERATION
- 42 -
3.
- 44 -
LES FACTEURS SOX IMPLIQUES EN PATHOLOGIE
IV. SOX10
- 47 -
1.
- 47 -
GENERALITES
A. CLONAGE ET STRUCTURE
- 47 -
B. EXPRESSION
- 48 -
C. MODELES ANIMAUX
- 48 -
o
Mutants spontanés
- 48 -
o
Mutants induits
- 50 -
2.
FONCTION AU COURS DU DEVELOPPEMENT
- 53 -
A. DEVELOPPEMENT DE LA CRETE NEURALE
- 53 -
B. DIFFERENCIATION DES DERIVES DE LA CRETE NEURALE
- 54 -
o
Les cellules gliales
- 54 -
o
Le système nerveux entérique
- 56 -
o
Les mélanocytes
- 56 -
C. SOX10, FACTEUR DE MAINTIEN DES CELLULES SOUCHES DE LA CRETE NEURALE
- 57 -
3.
- 58 -
DYSFONCTIONNEMENT DANS LES MALFORMATIONS CONGENITALES
A. LE SYNDROME DE SHAH-WAARDENBURG
- 58 -
o
Définition
- 58 -
o
Implication de SOX10
- 59 -
B. LES VARIANTS PHENOTYPIQUES
- 60 -
o
Le syndrome Yéménite
- 61 -
o
Les pseudo-obstructions intestinales chroniques
- 61 -
o
Le syndrome PCWH
- 64 -2-
C. EFFET FONCTIONNEL DES MUTATIONS
- 65 -
D. LES AUTRES PATHOLOGIES
- 67 -
4.
- 68 -
FONCTIONNEMENT MOLECULAIRE
A. EXPRESSION
- 68 -
B. GENES CIBLES
- 69 -
o
La crête neurale
- 70 -
o
Les cellules gliales
- 70 -
o
Les mélanocytes
- 80 -
o
Le système nerveux entérique
- 82 -
C. PARTENAIRES
- 85 -
o
Double hybride : stratégie et résultats
- 85 -
o
La SUMOylation : qu’est-ce que c’est ?
- 88 -
o
SOX10 et SUMOylation
- 91 -
V. CONCLUSIONS – PERSPECTIVES
- 102 -
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
- 105 -
-3-
INDEX DES FIGURES
Crête neurale
Figure 1 :
Formation du tube neural et de la crête neurale. ...........................................................- 11 -
Figure 2 :
Profils d’expression Wnt et BMP lors de la neurulation chez le xénope et le poulet ...- 14 -
Tableau 1 : Les gènes de la crête neurale. .......................................................................................- 16 Figure 3 :
Migration de la crête neurale troncale. .........................................................................- 18 -
Tableau 2 : Molécules de guidage de la première vague de migration des cellules de crête neurale
troncale. .....................................................................................................................................- 19 Figure 4 :
Migration de la crête neurale craniale chez le poulet....................................................- 20 -
Figure 5 :
Les différents types de crête neurale et leurs dérivés....................................................- 21 -
Tableau 3 : Les types cellulaires dérivés de la crête neurale chez les vertébrés..............................- 22 Facteurs SOX
Figure 6 :
Représentation schématique des protéines SOX chez les mammifères. .......................- 28 -
Tableau 4 : Classification et localisation des gènes SOX chez les mammifères. ............................- 31 Figure 7 :
Modèle d’interaction entre un facteur SOX et son partenaire.......................................- 33 -
SOX10
Figure 8 :
Structure génomique et protéique de SOX10. ..............................................................- 47 -
Figure 9 :
Anomalies phénotypiques caractéristiques de la souris dominant megacolon. ............- 49 -
Figure 10 : Bilan des mutations SOX10..........................................................................................- 66 Figure 11 : Régulation du promoteur PLP par SOX10 et EGR2. ...................................................- 78 Figure 12 : Effet de mutations de SOX10 sur l’activation de PLP. ................................................- 78 Figure 13 : Recherche des séquences responsables de la régulation de PLP par SOX10. ..............- 79 Figure 14 : Principe du crible double hybride. ................................................................................- 86 Figure 15 : Protéine SOX10-appât utilisée pour réaliser le crible double hybride..........................- 86 Figure 16 : Comparaison des processus d’ubiquitination et de SUMOylation. ..............................- 89 Figure 17 : SOX10 interagit avec UBC9 et est SUMOylé in vivo. .................................................- 93 Figure 18 : Les trois protéines SUMO peuvent être conjuguées à SOX10. ....................................- 93 Figure 19 : SOX10 possède trois sites potentiels de SUMOylation................................................- 94 Figure 20 : Les sites de SUMOylation 1 et 3 sont responsables de l’interaction SOX10-UBC9 en
levure. ......................................................................................................................................- 95 Figure 21 : La SUMOylation de SOX10 ne modifie pas sa localisation cellulaire.........................- 97 Figure 22 : La SUMOylation réprime la fonction transcriptionnelle de SOX10. ...........................- 98 Figure 23 : Modèle de fonctionnement de SOX10 sur le promoteur GJB1. ...................................- 99 -
-4-
ABBRÉVIATIONS
ADN
Acide désoxyribonucléique
ARN
Acide ribonucléique
PCR
Polymerase Chain Reaction
RT-PCR
Reverse Transcription and Polymerase Chain Reaction
pb
paires de bases
kb
kilo-paires de bases
Wnt
Wingless-type MMTV integration site
BMP
Bone Morphogenic Protein
FGF
Fibroblast Growth Factor
HMG
High Mobility Group
SRY
Sex-determining region on the Y chromosome
SOX
SRY-related HMG box
Lef/TCF
Lymphoid enhancer-binding factor / T-cell transcription factor
MATA
Yeast mating-type protein A
UBF
Upstream binding transcription factor
PAX
Paired box
POU
Pit/Oct/Unc
WS1, 2, 3, 4
Syndrome de Waardenburg de type I, II, III, IV
POIC
Pseudo-obstruction intestinale chronique
PCWH
Peripheral demyelinating neuropathy, central dysmyelinating leukodystrophy,
Waardenburg syndrome and Hirschsprung disease
CMT
Maladie de Charcot-Marie-Tooth (CMTX : liée à l’X)
PMD
Maladie de Pelizaeus-Merzbacher
SNC
Système nerveux central
SNP
Système nerveux périphérique
SNE
Système nerveux entérique
UBC9
ubiquitin-conjugating enzyme 9
SUMO
small ubiquitin-like modifier
-5-
I. Introduction
Le développement et la survie de tous les organismes vivants dépendent de la différenciation et de la
fonction de divers types cellulaires. Au cours du développement des vertébrés, un certain nombre de
types cellulaires distincts dérivent d’une population particulière de précurseurs issus d’une structure
embryonnaire transitoire, nommée la « crête neurale ». Cette structure apparaît lors de la neurulation
de l’embryon, au moment de la formation de la plaque neurale, puis après la fermeture du tube neural
les cellules de la crête neurale quittent la partie dorsale du tube neural et migrent à travers l’embryon
en suivant des chemins stéréotypés, jusqu’à des sites définis où elles s’arrêtent et se différencient en
une variété de types cellulaires incluant les neurones et cellules gliales du système nerveux
périphérique, les mélanocytes, certaines cellules endocrines et, au niveau de la tête, des os et cartilages
du squelette facial, du tissu conjonctif et des muscles lisses. La spécification des cellules de crête
neurale et l’induction de leur différenciation vers différents lignages dépendent à la fois de facteurs
intrinsèques à ces cellules et d’interactions avec leur environnement. L’étude de mutants murins
présentant des défauts de la crête neurale a permis l’identification et l’analyse de gènes essentiels au
développement de cette structure et de ses dérivés. En particulier, un certain nombre de facteurs de
transcription exercent un rôle critique dans la formation et la différenciation de la crête neurale. Le
travail présenté ici s’intéresse à l’un de ces facteurs de transcription, SOX10, exprimé au moment de
l’induction et de la migration des cellules de crête neurale, puis impliqué dans la différenciation de
certains de leurs dérivés.
Les protéines SOX appartiennent à la superfamille des protéines à domaine HMG (High Mobility
Group) et sont des facteurs de transcription très conservés au cours de l'évolution. La sous-famille des
facteurs SOX réunit les protéines dont le domaine HMG comporte plus de 50% d’homologie avec
celui du facteur de détermination du sexe SRY (Sex-determining Region on the Y chromosome), d’où
le nom SOX pour SRY-box. La famille compte actuellement 20 membres chez l’homme et la souris,
incluant SRY. Elle est subdivisée en 8 groupes (A à H, le groupe A étant réservé à SRY), en fonction
des homologies entre les différents membres au niveau et en dehors de la boîte HMG.
Le domaine HMG confère aux protéines SOX la capacité à lier l’ADN au niveau d’une séquence
consensus heptamérique, et cette fixation induit une courbure de l’ADN, ce qui a amené l’hypothèse
que les protéines SOX peuvent exercer une fonction de protéines architecturales en organisant
localement la chromatine de façon à permettre l’association d’autres facteurs de transcription euxmêmes liés à l’ADN, et ainsi assembler des complexes protéiques biologiquement actifs. Les protéines
SOX sont ainsi impliquées dans la régulation d’un grand nombre de processus au cours du
développement, à la fois par leur fonction de facteur de transcription, et par un rôle d’organisation
locale de la chromatine. Cette fonction s’exerce via l’interaction avec de multiples partenaires
protéiques, qui confèrent aux facteurs SOX leur spécificité d’action et leur permet d’exercer des
-6-
fonctions complexes dans différents tissus et à différents stades du développement. Plusieurs membres
de la famille SOX sont impliqués dans diverses pathologies humaines.
Le facteur de transcription SOX10 est, avec SOX8 et SOX9, le troisième membre du groupe E des
facteurs SOX. Le gène Sox10 a dans un premier temps été identifié et étudié chez la souris, le rat et
l’homme, puis des orthologues ont été identifiés chez le poulet, le poisson zèbre et le xénope.
L’étude de l’expression de Sox10 dans ces différents organismes a montré une grande conservation de
son profil d’expression chez les vertébrés. Sox10 est exprimé dans les cellules de crête neurale peu
après leur émergence, est maintenu lors de leur migration puis se restreint à certains dérivés de la crête
neurale contribuant au système nerveux périphérique, et notamment les ganglions crâniens, les
ganglions spinaux, et les ganglions sympathiques et entériques. Sox10 est également exprimé plus
tardivement dans le système nerveux central, et jusque chez l’adulte. Dans tous les cas, l’expression de
Sox10 est corrélée à la présence de cellules myélinisantes. Par ailleurs Sox10 est exprimé dans
d’autres tissus qui ne dérivent pas de la crête neurale, comme la vésicule otique puis l’oreille interne,
plus précisément au niveau des canaux semi-circulaires et des cellules supportrices de l’organe de
Corti, et on le retrouve aussi dans le pancréas et le testicule. Son expression au niveau des mélanocytes
a plus été déduite de l’étude des modèles animaux que de son observation directe.
Différents modèles animaux, de diverses espèces, naturels ou induits, ont permis d’étudier
l’expression et la fonction de Sox10 in vivo. L’étude des modèles murins, tels que le mutant spontané
Dom ou la souris knock-in Sox10LacZ, a permis de définir le profil d’expression de Sox10 et d’établir
les anomalies associées à un défaut d’expression de Sox10. Cependant ces études ont été limitées par
la létalité embryonnaire associée aux mutations de Sox10 à l’état homozygote. L’étude de la fonction
de Sox10 dans d’autres modèles tels que le poulet, le xénope et le poisson zèbre a permis de
contourner cet obstacle via l’utilisation de techniques spécifiques de ces organismes comme
l’électroporation des œufs de poulet ou l’injection d’ARN messagers sens et antisens (morpholino)
chez le xénope et le poisson zèbre. L’analyse conjointe de ces différentes études a ainsi redéfini les
propriétés de Sox10 et apporté des informations sur sa fonction au cours du développement
embryonnaire, en particulier sur les types cellulaires dans lesquels il est nécessaire et/ou suffisant pour
le développement embryonnaire normal.
L’étude de la fonction de Sox10 a ainsi établi son rôle prépondérant au cours du développement. Il
apparaît aujourd’hui comme essentiel à la survie, la migration et la différenciation des cellules de crête
neurale. En particulier, l’absence de Sox10 induit une apoptose importante de ces cellules, alors que sa
présence est essentielle au maintien du caractère pluripotent des cellules souches de la crête neurale,
car il maintient la capacité de ces cellules à se différencier en neurones et en cellules gliales. Sox10
apparaît donc comme un facteur essentiel au maintien des cellules souches de la crête neurale.
Cependant sa fonction ne s’arrête pas à ce rôle précoce et se poursuit au cours du développement, lors
-7-
de la différenciation des différents lignages issus de la crête neurale pour lesquels l’expression de
Sox10 est maintenue. Sa fonction est particulièrement bien décrite au niveau de la différenciation
gliale du système nerveux central et périphérique, où son expression est absolument indispensable à la
différentiation correcte des oligodendrocytes (SNC) et des cellules de Schwann (SNP). De récentes
études suggèrent une importance tout aussi cruciale dans les lignages mélanocytaire et entérique.
Sox10 possède donc, en plus de sa fonction précoce de maintien des cellules souches de crête neurale,
une fonction dans la différenciation des lignages issus de cette structure.
Du fait de son rôle dans le développement des cellules de la crête neurale et dans leur différenciation,
des défauts de la fonction de Sox10 engendrent des anomalies de ces cellules et se manifestent chez
l’homme comme chez l’animal par différentes neurocristopathies. La souris Dom est, depuis son
identification, un modèle murin du syndrome de Waardenburg de type IV (WS4), une pathologie
associant les défauts pigmentaires et la surdité du syndrome de Waardenburg aux anomalies
intestinales de la maladie de Hirschsprung. La mise en évidence d’une mutation de Sox10 chez ce
modèle a donc naturellement suggéré que l’homologue humain pouvait également être muté chez des
patients atteints de WS4. Effectivement, de façon quasi-simultanée à la description de la mutation
Dom, des mutations hétérozygotes du gène SOX10 humain ont été identifiées dans quatre cas de WS4
classique. SOX10 était ainsi le troisième gène impliqué dans le WS4, après ceux codant l’endothéline
3 (EDN3) et son récepteur, le récepteur B aux endothélines (EDNRB). A l’heure actuelle, plus de 20
mutations de SOX10 ont été décrites, et sont associées à des phénotypes très variables. Nous avons
ainsi participé à l’affinement de la description des phénotypes associés à des mutations de SOX10 en
décrivant plusieurs patients porteurs de mutations de SOX10 et présentant une pseudo-obstruction
intestinale chronique, qui se distingue de la maladie de Hirschsprung par la persistance de cellules
ganglionnaires au niveau du côlon. Des mutations de SOX10 ont également été retrouvées chez des
patients présentant un phénotype neurologique périphérique et/ou central associé au WS4. Le
syndrome résultant a été nommé PCWH, pour Peripheral demyelinating neuropathy, Central
dysmyelinating leukodystrophy, Waardenburg syndrome and Hirschsprung disease.
Les phénotypes les plus graves correspondant au syndrome PCWH peuvent être expliqués par un
échappement des ARN mutants au système de dégradation des ARN « non-sens » (NMD, non-sens
mediated decay) et par la production de protéines mutantes ayant un fort potentiel dominant négatif,
alors que dans les cas plus modérés correspondant au WS4, les ARN mutants sont dégradés par le
système de surveillance des ARN et le phénotype résultant s’apparente donc à un cas
d’haploinsuffisance.
La fonction de SOX10 au cours du développement et son implication dans divers processus
pathologiques étant établies, la question s’est alors posée des mécanismes impliquant SOX10 et
-8-
permettant l’expression de sa fonction au niveau de la crête neurale et de ses dérivés. La recherche
s’est alors tournée vers les systèmes de régulation de SOX10, ses gènes cibles et ses partenaires.
De la bonne expression de Sox10 dépend le bon déroulement de sa fonction. L’identification des
facteurs régulant son expression est donc essentielle pour la compréhension des cascades de régulation
impliquant Sox10 au cours du développement. Cependant cette entreprise s’avère compromise par le
fait que le promoteur de Sox10 n’est toujours pas décrit à l’heure actuelle. Aucun régulateur direct de
Sox10 n’a donc pu être identifié, bien que différents facteurs modulant son expression in vivo et/ou in
vitro ont été décrits.
Par ailleurs, Sox10 étant un facteur de transcription, l’expression de sa fonction passe par la régulation
de ses gènes cibles. Des cibles de Sox10 ont ainsi été identifiées dans chacun des lignages où il est
exprimé, et permettent de mieux comprendre le mécanisme physiopathologique responsable des
défauts associés à une mutation de SOX10. Peu de gènes cibles de Sox10 sont décrits au niveau de la
crête neurale malgré son implication dans le développement de cette structure, probablement en raison
de la difficulté à établir les cascades moléculaires mises en place à ce stade si précoce du
développement. En revanche, de nombreux gènes impliqués dans le développement et la myélinisation
des cellules gliales du système nerveux central et périphérique sont des cibles de Sox10, en accord
avec le rôle de ce facteur dans le développement des cellules de Schwann et des oligodendrocytes.
Nous avons participé à cette recherche en décrivant la régulation par SOX10 du gène GJB1, codant la
connexine 32, une protéine membranaire intégrale essentielle au fonctionnement des cellules de
Schwann et dont les mutations sont à l’origine de la forme liée à l’X de la maladie de Charcot-MarieTooth (CMTX). De plus, nous avons montré que des mutations du promoteur GJB1 associées à des
cas de CMTX affectent la liaison de SOX10 sur le promoteur, suggérant qu’une dérégulation de
l’expression de GJB1 par SOX10 pouvait être à l’origine du phénotype pathologique chez les porteurs
de ces mutations. Le fait que nous ayons observé ce type de mutation dans plusieurs familles suggère
que ce mécanisme est régulièrement impliqué dans des cas de CMTX. L’étude du promoteur de GJB1
pourrait donc être incluse dans l’analyse génétique de cas de CMTX où aucune mutation de la
séquence codante du gène n’a pu être décelée.
D’autres cibles de SOX10 ont également été identifiées dans les lignages mélanocytaire et entérique.
L’étude des gènes régulés par SOX10 dans divers types cellulaires permet de récapituler son rôle dans
chacun des lignages où il est exprimé, de mieux comprendre son fonctionnement moléculaire et
d’expliquer les phénotypes associés à son dysfonctionnement.
Les protéines SOX sont connues pour interagir avec de multiples partenaires permettant de réguler
leur fonction. L’identification de ces partenaires permettra donc de mieux comprendre la fonction de
SOX10. Plusieurs facteurs capables d’interagir avec SOX10 ont déjà été identifiés, tous sont des
facteurs de transcription capables d’agir en synergie avec lui. Cependant il est très probable que
d’autres facteurs sont capables d’interagir avec SOX10 et de réguler sa fonction à différents stades du
-9-
développement. La recherche de ces partenaires protéiques est donc un point essentiel pour la
détermination de la place occupée par SOX10 dans les différentes voies de régulation l’impliquant.
Dans cette optique, nous avons mis en place une stratégie de crible double hybride afin de rechercher
de façon systématique de nouveaux partenaires de SOX10. Nous avons ainsi identifié une protéine
interagissant avec SOX10 : UBC9 (ubiquitin-conjugating enzyme 9). Contrairement à ce que son nom
semble indiquer, cette enzyme n’est pas impliquée dans l’ubiquitination, mais dans la sumoylation des
protéines cibles. L’ubiquitination et la sumoylation sont basées sur le même principe de conjugaison
d’un petit peptide sur une protéine substrat. Cependant les enzymes impliquées dans cette conjugaison,
ainsi que la fonction de cette conjugaison, sont totalement différentes dans ces deux processus. UBC9
est l’unique enzyme de conjugaison de la protéine SUMO, et c’est à cette protéine que l’on attribue la
fonction de reconnaissance de la protéine substrat. UBC9 est donc responsable de la spécificité de la
sumoylation, et interagit directement avec la protéine cible. A l’inverse de l’ubiquitination, la
sumoylation est plutôt un processus de protection des protéines cibles. Les substrats soumis à la
sumoylation sont également très variés et incluent, entre autres, de nombreux facteurs de transcription.
En particulier, la sumoylation semble affecter la stabilité, l'activité et la localisation des facteurs de
transcription spécifiques, se dégageant comme un régulateur important de la fonction de transcription.
Nous avons confirmé l’interaction entre SOX10 et UBC9, et avons montré que SOX10 est
effectivement sumoylé in vivo. La mutation des sites potentiels de sumoylation de SOX10 n’affecte
pas sa localisation cellulaire, en revanche la sumoylation semble réprimer l’effet transactivateur de
SOX10, phénomène fréquemment observé lorsque la sumoylation concerne un facteur de
transcription. La mutation des sites de sumoylation de SOX10 induit une augmentation de l’activation
du promoteur de GJB1 par SOX10, et surtout une augmentation significative de la synergie avec son
cofacteur EGR2.
La réalisation d’un crible double hybride nous a donc permis de mettre en évidence un aspect
insoupçonné de la régulation de SOX10 : la sumoylation. Cette modification post-traductionnelle
hautement dynamique de la protéine SOX10 permettrait ainsi une régulation fine de sa fonction, ce qui
serait en accord avec les multiples rôles attribués à ce facteur.
SOX10 étant un facteur essentiel au développement de la crête neurale, nous débuterons ce manuscrit
par une description détaillée de cette structure et de sa formation. Nous présenterons ensuite la famille
des facteurs SOX et les propriétés qui caractérisent les membres de cette famille. Enfin nous
détaillerons plus précisément l’état actuel des connaissances sur SOX10, objet de notre étude.
- 10 -
II. La crête neurale
1. Définition et origine embryologique
La crête neurale est une population transitoire et migratoire de cellules qui se forme au cours du
développement de tous les embryons vertébrés. Cette structure apparaît lors de la neurulation de
l’embryon, au moment de la formation de la plaque neurale (figure 1). La crête neurale est induite aux
frontières entre la plaque neurale et l’ectoderme non neural, et chacune de ces deux structures participe
à sa formation. Lorsque la plaque neurale se replie pour former le tube neural, les bords latéraux de la
plaque, appelés bourrelets neuraux, se rapprochent puis fusionnent en suivant une progression craniocaudale. Pendant ou après la fermeture du tube neural, selon l’espèce considérée, les cellules de la
crête neurale quittent la partie dorsale du tube neural et migrent à travers l’embryon en suivant des
chemins stéréotypés, jusqu’à des sites définis où elles s’arrêtent et se différencient en une variété de
types cellulaires incluant les neurones et cellules gliales du système nerveux périphérique, les
mélanocytes, certaines cellules endocrines, et au niveau de la tête, des os et cartilages du squelette
facial, du tissu conjonctif et des muscles lisses (pour une revue, voir Le Douarin and Kalcheim 1999).
Figure 1 : Formation du tube neural et de la crête neurale.
Les bords de la plaque neurale (verts) se replient pour former
les bourrelets neuraux, puis se rapprochent et fusionnent pour
fermer le tube neural (violet). La crête neurale constitue la
partie dorsale du tube neural, sous l’épiderme (bleu), et les
cellules de crête neurale vont alors s’en détacher et migrer
dans l’embryon.
Adapté de Gammill and Bronner-Fraser 2003.
- 11 -
2. Formation de la crête neurale
a. Induction
La spécification de la crête neurale est intimement liée à la formation de la plaque neurale et à son
interaction avec l’ectoderme au moment de la neurulation. Cependant toutes les cellules des bourrelets
neuraux ne donneront pas des cellules de crête neurale. En effet, lorsque des cellules d’un bourrelet
neural sont marquées par fluorescence avant la fermeture du tube neural, elles peuvent donner
naissance à la fois à des cellules de la crête neurale, du tube neural, et de l’épiderme (Selleck and
Bronner-Fraser 1995). Il est toutefois généralement admis que les cellules de la crête neurale forment
déjà une population à part au niveau dorsal du tube neural. Bien qu’aucun marqueur n’ait été décrit qui
permet de marquer ces cellules de façon exhaustive avant le début de leur migration, le facteur de
transcription à doigts de zinc Slug est devenu l’un des marqueurs les plus fiables des cellules de crête
neurale pré-migratoires chez le poulet et les amphibiens. L’apparition de ce marqueur est donc
communément considérée comme l’indicateur de l’induction de la crête neurale.
o Sources des signaux d’induction
Au moment de son apparition, la crête neurale est en contact avec la plaque neurale, l’ectoderme
voisin, et le mésoderme sous-jacent, ou mésoderme paraxial, qui formera les somites (figure 1). Du
fait de leur position par rapport à la crête neurale, chacun de ces trois tissus a été impliqué dans son
induction.
L’une des plus anciennes expériences de transplantation chez les amphibiens a montré que le
mésoderme paraxial peut induire l’ectoderme pour former une crête neurale (Raven and Kloos 1945).
Depuis, plusieurs groupes ont démontré un rôle potentiel du mésoderme paraxial dans l’induction de la
crête neurale chez le poulet (Selleck and Bronner-Fraser 1995) et chez le xénope (Bonstein et al. 1998;
Marchant et al. 1998). Cependant de récents travaux suggèrent que le mésoderme paraxial n’est pas
indispensable à l’induction de la crête neurale chez le poisson zèbre (Ragland and Raible 2004), et les
données disponibles sur ce sujet chez la souris restent très imprécises.
Une autre source de signaux d’induction est l’interaction entre la plaque neurale et l’épithélium. Chez
les amphibiens et le poisson zèbre, des expériences de transplantation d’épiderme ou de plaque neurale
ont montré la formation de cellules de crête neurale partout où de nouvelles frontières étaient créées
entre des tissus neuraux et non neuraux (Moury and Jacobson 1989; Woo and Fraser 1998). Chez le
poulet et le xénope, des greffes de plaque neurale dans l’ectoderme non neural adjacent induisent
l’expression de Slug à la frontière entre ces deux tissus, et les cellules exprimant Slug sont issues à la
fois de la greffe et du tissu hôte (Selleck and Bronner-Fraser 1995; Mancilla and Mayor 1996).
La principale préoccupation de la recherche de ces dix dernières années a cependant surtout concerné
l’identification des facteurs et molécules constituant les signaux d’induction de la crête neurale.
- 12 -
o Le modèle « par défaut » : implication de la voie BMP
La formation de la crête neurale passe par l’induction de la plaque neurale. Les premières expériences
réalisées chez les amphibiens ont suggéré l’existence d’un « centre organisateur » d’où partiraient les
signaux d’induction de la plaque neurale, impliquant la voie de signalisation BMP. De ces études est
ressorti un modèle d’induction neurale, le modèle « neural par défaut » (Wilson and HemmatiBrivanlou 1997). Selon ce modèle, le devenir par défaut de l’ectoderme est de former un tissu neural.
Cependant, avant l’induction neurale, tout l’ectoderme produit le facteur de croissance BMP4, qui
inhibe la formation de tissu neural et induit la formation d’épiderme à partir de l’ectoderme. Pour
générer la plaque neurale, le centre organisateur secrète des antagonistes des BMP, parmi lesquels la
noggine, la chordine, ou la follistatine qui, en se liant aux facteurs BMP, empêchent le déclenchement
de la voie de signalisation via les récepteurs aux BMP. Les différents tissus formés lors de la
neurulation (épiderme, crête neurale, plaque neurale) seraient alors induits par un gradient de
signalisation BMP, la plaque neurale étant induite par l’absence de BMP, l’épiderme par une
concentration élevée, et la crête neurale par une concentration intermédiaire de BMP. De nombreuses
expériences chez le xénope et le poisson zèbre confirment ce modèle.
Cependant, chez le poulet et la souris, le modèle ne semble plus s’appliquer de façon aussi évidente.
Chez le poulet, bien qu’une réduction de la signalisation BMP soit concomitante à l’induction neurale
(Faure et al. 2002), l’action de la voie BMP semble être relayée indirectement par la voie de
signalisation FGF plutôt que par des antagonistes de BMP (Streit and Stern 1999; Streit et al. 2000). Il
apparaît donc que si la voie BMP est impliquée dans la neurulation à la fois chez les amphibiens et les
oiseaux, les mécanismes et effecteurs moléculaires impliqués dans ce processus sont différents.
o Le modèle à deux signaux : implication de la voie Wnt
Les résultats de différents groupes obtenus chez le poulet indiquent que la voie BMP n’est pas
suffisante pour induire la formation de la plaque neurale chez cette espèce, suggérant que l’importance
de cette voie de signalisation diffère entre les amniotes et les anamniotes. D’autre part, chez toutes les
espèces, d’autres signaux induisant la crête neurale ont été identifiés qui suggèrent un mécanisme plus
complexe que le modèle par défaut.
De nombreux travaux ont impliqué la voie de signalisation Wnt dans la formation de la crête neurale
chez la souris, le poulet, le xénope et le poisson zèbre (référencés par Huang and Saint-Jeannet 2004).
Chez le poulet, les effecteurs de la voie Wnt produits par l’ectoderme non neural paraissent
nécessaires et suffisant pour l’induction de la crête neurale (Garcia-Castro et al. 2002), et la voie BMP
serait alors requise à un stade plus tardif, pour le maintien, la prolifération, et par la suite la migration
des cellules de crête neurale. Chez le xénope, le promoteur de Slug est directement régulé par des
facteurs de transcription de la famille Lef/TCF, impliqués dans la régulation des gènes cibles de la
voie Wnt (Vallin et al. 2001). Ces résultats indiquent donc qu’un modèle à deux signaux impliquant
- 13 -
les voies Wnt et BMP pourrait correspondre au mécanisme d’induction chez ces deux espèces.
Toutefois les profils d’expression des effecteurs Wnt et BMP suggèrent une fois de plus une
divergence entre les espèces, indiquant soit la mise en place d’un mécanisme totalement différent mais
basé sur les mêmes effecteurs, soit une adaptation différente du même mécanisme au cours de
l’évolution (figure 2).
Figure 2 : Profils d’expression Wnt et BMP lors de la neurulation chez le xénope et le poulet.
Les effecteurs des voies Wnt et BMP s’expriment différemment chez ces deux espèces au niveau de la plaque
neurale (pn), des bourrelets neuraux et de l’ectoderme non neural (ect). Bien qu’impliquées dans les mêmes
mécanismes d’induction, les profils d’expression suggèrent une action différente de ces deux voies dans le
processus de neurulation chez ces espèces.
Adapté de Knecht and Bronner-Fraser 2002.
o Les autres signaux : émergence d’un modèle à plusieurs étapes
La voie de signalisation FGF a également été impliquée dans l’induction de la crête neurale chez le
xénope, mais il apparaît que son action requiert la présence d’un second facteur, qui pourrait
appartenir aux voies Wnt et/ou BMP. Chez le poulet, la voie FGF est nécessaire à l’inhibition de BMP
et à l’induction de la plaque neurale. Cependant chez ces deux espèces, l’action des effecteurs FGF
semble être relayée par la voie Wnt, et nécessite toujours l’inhibition de la voie BMP, ce qui ramène
au modèle à deux signaux.
Le système de signalisation Notch/Delta a également été impliqué dans la formation de la crête
neurale chez le poisson zèbre, les amphibiens et le poulet. Chez le xénope et le poulet, il est toutefois
suggéré que cette action passe par la régulation du taux de BMP au niveau de la crête neurale.
L’acide rétinoïque a également été impliqué dans l’induction de l’expression de Slug chez le xénope,
mais le mécanisme de son action reste inconnu.
- 14 -
La glycoprotéine secrétée Noelin-1 est exprimée au niveau des bourrelets neuraux chez le poulet, mais
son action semble consister à maintenir la compétence des cellules du tube neural à former la crête
neurale, plutôt qu’à induire directement sa formation.
Pour une revue de ces signaux, voir Knecht and Bronner-Fraser 2002; Huang and Saint-Jeannet 2004.
L’identification, au cours des dernières années, de différents signaux pouvant participer à la formation
de la crête neurale, ainsi que la constatation de différences significatives dans les fonctions et les
profils d’expression de ces signaux chez les différentes espèces étudiées, ont rendu difficile
l’établissement d’un modèle exhaustif prenant en compte tous ces signaux et applicable à l’ensemble
des vertébrés. Il est encore aujourd’hui difficile d’affirmer l’existence d’un tel modèle. Cependant la
prise en compte du paramètre « temps » dans la vision du processus de formation de la crête neurale,
permet l’émergence d’un modèle à plusieurs étapes qui, bien qu’encore imparfait, serait plus adapté
que les modèles précédemment proposés. Dans ce modèle, la formation de la crête neurale ne serait
plus un phénomène discret mais un processus continu, faisant intervenir différents signaux à
différentes étapes. Ce processus commencerait au moment de l’induction de la plaque neurale et de ses
bordures, impliquant au moins en partie l’inhibition de la voie BMP par le centre organisateur. Les
bords de la plaque neurale pourraient alors acquérir le potentiel de devenir la crête neurale grâce à
l’addition d’autres signaux (par exemple les voies Wnt et/ou FGF, ou l’acide rétinoïque) produits par
l’ectoderme non neural et/ou le mésoderme paraxial. A cette étape, il ne s’agit encore que de la
compétence des cellules à former la crête neurale, et cette compétence doit alors être maintenue, par
exemple par la Noelin-1. Ces précurseurs pourraient alors proliférer et choisir de devenir des cellules
de crête neurale plutôt que du tube neural, grâce par exemple à la signalisation Notch/Delta.
Finalement, la crête neurale ne sera clairement identifiée qu’au moment de la migration de ses cellules.
Ce modèle présente l’avantage de prendre en compte tous les signaux identifiés, et ce chez toutes les
espèces, bien que ces signaux et leurs étapes d’intervention puissent varier d’une espèce à l’autre. Il
est également proposé que ces différents mécanismes d’induction participent à l’hétérogénéité de
population au sein de la crête neurale, la diversité des signaux permettant la spécification des
différents types de progéniteurs constituant la crête neurale. Ce dernier point représente à l’heure
actuelle l’un des sujets les plus brûlants de la recherche sur la crête neurale.
o Les gènes de la crête neurale
La liste des gènes exprimés au niveau de la crête neurale en réponse aux différents signaux d’induction
s’allonge chaque année. Ces gènes codent des facteurs de transcription, qui eux-mêmes vont activer
des gènes responsables des changements génétiques et phénotypiques permettant de distinguer les
cellules de crête neurale du reste de l’embryon. La liste de ces facteurs de transcription est présentée
dans le tableau 1, et référencée par Huang and Saint-Jeannet 2004. Ces facteurs peuvent être classés en
- 15 -
quatre groupes en fonction de leur expression par rapport à la crête neurale : soit leur expression est
restreinte à la crête neurale présomptive, soit elle s’étend à l’ectoderme non neural, ou à la plaque
neurale, soit elle couvre ces trois domaines. La fonction de certains de ces gènes a été étudiée chez
différentes espèces (pour une revue, voir Huang and Saint-Jeannet 2004). La fonction des gènes SOX
exprimés au niveau de la crête neurale (SOX-8, 9, 10) sera détaillée dans un paragraphe de ce
manuscrit. Cependant la fonction de la plupart des facteurs listés ici n’est pas connue.
Il est probable que l’étude du réseau de régulation mis en place lors de l’induction de la crête neurale
permettra à l’avenir de mieux comprendre les mécanismes de ce processus. Il est toutefois frappant de
noter, déjà à l’heure actuelle, le nombre de gènes partageant le même domaine d’expression, que ce
soit en terme spatial ou temporel, au niveau de la région présomptive de la crête neurale. La question
majeure qui se pose aujourd’hui est de savoir si toutes les cellules de cette région expriment les mêmes
gènes, ou si des sous populations de progéniteurs de crête neurale peuvent être distinguées en fonction
de l’expression différentielle de certains gènes. Les avancées sur cette question devraient apporter de
précieuses informations sur la constitution de la crête neurale.
Tableau 1 : Les gènes de la crête
neurale.
Liste des gènes exprimés dans la
région de la crête neurale peu après
son induction. L’expression de ces
gènes est soit limitée à la crête
neurale elle-même (rouge), soit elle
s’étend à l’ectoderme non neural
(orange), soit elle s’étend à la
plaque neurale (violet), soit elle
couvre les trois domaines (vert).
L’expression de ces gènes chez la
souris (S), le poulet (P), le xénope
(X) ou le poisson zèbre (PZ) est
indiquée lorsque les données sont
disponibles.
Adapté de Huang and Saint-Jeannet
2004.
- 16 -
b. Migration
Une fois que la crête neurale est induite, les cellules qui la constituent doivent se détacher du tube
neural, et pour cela elles vont effectuer une transition épithélio-mésenchymateuse qui s’accompagne
de modifications à la fois morphologiques et moléculaires. Ces cellules perdent alors la morphologie
du neuroépithélium qu’elles constituaient jusque là, et acquièrent des capacités migratoires
caractéristiques de cellules mésenchymateuses. Leur migration s’effectue en suivant une vague craniocaudale.
On considère alors deux types de crête neurale, en fonction de la position antéropostérieure par rapport
à l’axe neural, et en fonction du comportement de migration et de différenciation des cellules qui la
composent : on distingue la crête neurale craniale, au niveau de la « tête » de l’embryon, et la crête
troncale, dans la partie postérieure. L’interface entre ces deux types de crête neurale, longtemps
placée entre les somites 5 et 6 chez le poulet, à la frontière occipito-cervicale, a récemment été
déplacée entre les somites 3 et 4, ceci après l’étude fine du comportement des cellules à ce niveau de
l’embryon (Ferguson and Graham 2004).
o Initiation de la migration
La migration des cellules de crête neurale a été essentiellement étudiée chez le poulet. C’est donc chez
cet animal qu’il a été démontré que la voie BMP, en plus d’être impliquée dans l’induction de la crête
neurale, est également requise pour l’initiation de la migration des cellules de crête troncale. Dans
l’embryon de poulet, BMP4 est exprimé uniformément le long du tube neural, alors que la Noggine,
un de ses antagonistes, est exprimée selon un gradient allant d’une concentration élevée au niveau
caudal, à faible au niveau cranial. L’expression de BMP4 induisant le détachement des cellules de
crête du tube neural, l’action antagoniste de la Noggine explique alors que la migration des cellules de
crête neurale se produise selon une vague cranio-caudale (Sela-Donenfeld and Kalcheim 1999).
D’autres travaux effectués chez la souris suggèrent que la voie BMP est également requise pour la
formation de cellules de crête craniale migratoires, bien qu’ils n’indiquent pas si cette voie intervient
pour l’induction ou la migration des cellules de crête neurale, ou pour les deux. Dans ces travaux, il est
suggéré que c’est BMP2 qui est impliqué au niveau cranial (Kanzler et al. 2000).
L’un des éléments de réponse à l’induction de la migration par BMP est la protéine rhoB, impliquée
dans la transition épithélio-mésenchymateuse des cellules de crête pré-migratoires (Liu and Jessell
1998). Le facteur de transcription Slug a également été impliqué dans le détachement des cellules de
crête neurale, mais il a été démontré que cette fonction se limite aux cellules de crête craniale (del
Barrio and Nieto 2002).
La transition épithélio-mésenchymateuse s’accompagne d’une modification du répertoire de protéines
d’adhésion exprimé par les cellules de crête neurale : les cellules cessent d’exprimer NCAM, Ncadhérine et la cadhérine 6B, et expriment à la place les cadhérines 7 et 11. Si l’inhibition de
- 17 -
l’expression des premières, ou l’expression des secondes est perturbée, les cellules de crête neurale ne
peuvent se détacher du tube neural (Nakagawa and Takeichi 1998).
Une fois que les cellules de crête neurale ont quitté le tube neural, elles vont migrer dans l’embryon en
suivant des chemins spécifiques extrêmement conservés chez les vertébrés. On observe alors que la
migration s’effectue en deux vagues, une vague précoce segmentée et une vague tardive uniforme, et
l’appartenance à chacune de ces deux vagues est corrélée avec la différenciation en différents types
cellulaires.
Ce schéma général est applicable à toute la crête neurale, en revanche la migration se passe
différemment au niveau des crêtes craniale et troncale.
o La crête neurale troncale
Lorsque les cellules de crête neurale quittent le tube neural dans la partie troncale de l’embryon, les
premières structures qu’elles rencontrent sont les somites. Les cellules de crête migratoires
entretiennent alors une relation très précise avec la compartimentation des somites : les premières
cellules qui migrent suivent une voie ventro-médiane, en traversant le sclérotome (la partie des
somites qui donnera le squelette axial), mais elles passent exclusivement à travers la moitié antérieure
du sclérotome de chaque somite (figure 3A). Ces cellules ont une destinée neurale. Une partie de ces
cellules migrera jusqu’à proximité de la notocorde et génèrera les neurones et les cellules gliales des
ganglions sympathiques, alors que le reste des cellules s’arrêtera au niveau antérieur du sclérotome, et
donnera naissance aux neurones sensoriels et aux cellules gliales des ganglions de la racine dorsale.
Une conséquence de la migration segmentée de ces cellules est la compartimentation de leurs dérivés,
qui correspondra plus tard à celle des muscles et du squelette.
Une seconde vague de cellules migre plus tardivement, en suivant une voie dorso-latérale entre le
dermomyotome des somites (qui donnera les muscles et le derme) et l’ectoderme. Ces cellules
donneront naissance aux mélanocytes (figure 3B). Contrairement à la première vague, la migration
tardive s’effectue de façon uniforme et non segmentée.
Figure 3 : Migration de la crête neurale troncale.
(A) Schéma d’une coupe longitudinale du tronc. Les
cellules de crête migratoires de la première vague,
représentées en jaune, migrent exclusivement à travers
la moitié antérieure du sclérotome de chaque somite.
(B) Schéma d’une coupe transversale du tronc. Les
flèches indiquent les chemins migratoires empruntés
par les cellules de crête neurale. Les cellules qui
migrent précocement le font ventralement et vont
jusqu’à la notocorde (chemin n°1) ou s’arrêtent dans
la partie antérieure du sclérotome (chemin n°2). Les
cellules qui migrent plus tardivement le font
dorsalement (chemin n°3).
Adapté de Graham 2003.
- 18 -
La migration segmentée de la première vague, ainsi que le délai de migration de la deuxième vague,
s’expliquent essentiellement par la production par la matrice extracellulaire de molécules de guidage
exerçant un rôle soit attractif, soit répulsif pour les cellules. Le tableau 2 présente une synthèse de ces
molécules, référencées par Krull (2001).
Molécule
Type de
signal
Site d’expression
Fibronectine / Laminine
Général
Sclérotome somitique
Tenascine C
Général
Expression dynamique par le mésoderme somitique
F-Spondine
Répulsif
Sclérotome postérieur
Mésenchyme périnotocordien
Glycoconjugués de chondroïtine
sulfate (collagène IX, …)
Répulsif
Sclérotome postérieur
Thrombospondine
Attractif
Sclérotome antérieur
T-cadhérine
Répulsif
Sclérotome postérieur
Glycoprotéines liant l’agglutinine
Répulsif
Sclérotome postérieur
Ephrines / Eph-RTK
Répulsif
Sclérotome postérieur + dermomyotome /
Cellules de crête neurale
Sema3A / Neurophiline 1 *
Répulsif
Sclérotome postérieur / Cellules de crête neurale
Tableau 2 : Molécules de guidage de la première vague de migration des cellules de crête neurale troncale.
Les sites d’expression de ces molécules sont ceux constatés au moment de la migration des cellules de crête
neurale.
RTK = récepteur à activité tyrosine kinase
* (Eickholt et al. 1999)
On peut noter que la grande majorité des signaux de guidage reçus par les cellules de crête neurale en
cours de migration est de type répulsif, suggérant que la migration se produit plus par une interdiction
d’entrer dans certains territoires que par une réelle attraction vers le territoire de destination.
L’exemple des éphrines est particulièrement intéressant. En effet, ces molécules sont doublement
impliquées dans la migration des cellules de crête troncale. Au début de la migration des cellules de
crête neurale, le sclérotome somitique postérieur ainsi que le dermomyotome expriment des éphrines
de type B. Les cellules de crête, elles, expriment les récepteurs à ces éphrines, les EphB-RTK et
l’interaction ligand-récepteur exerce un effet répulsif sur les cellules, les empêchant ainsi de suivre la
voie de migration dorso-latérale, et les obligeant à ne pénétrer que la moitié antérieure du sclérotome
somitique. Lorsque débute la deuxième vague de migration, 12 à 24 heures plus tard selon les espèces,
le dermomyotome exprime toujours des éphrines B et les cellules de crête des EphB-RTK, mais cette
fois l’interaction ligand-récepteur exerce un effet attractif sur les cellules et favorise leur migration
suivant la voie dorso-latérale (Santiago and Erickson 2002). Le mécanisme responsable de cette
inversion d’effet des éphrines est encore inconnu, mais le fait que les cellules de la vague tardive sont
- 19 -
déjà engagées dans la voie de différenciation en mélanoblastes a probablement un rôle à jouer dans ce
phénomène.
Les interactions cellulaires entre les cellules en cours de migration semblent également jouer un rôle
dans l’organisation de la migration. Le facteur permettant ces interactions serait la cadhérine 7,
exprimée spécifiquement par les cellules de crête ne cours de migration (Krull 2001).
o La crête neurale craniale
Au niveau de la tête de l’embryon, les cellules de crête neurale quittent le cerveau en cours de
développement et migrent dans un environnement dépourvu de somites. Les premières cellules qui
migrent suivent une voie ventro-latérale et colonisent les arcs pharyngiens où elles génèreront des
dérivés ectomésenchymateux, c’est-à-dire les os, le cartilage et le tissu connectif de la face. Les
cellules migrant plus tardivement resteront près du tube neural et donneront naissance aux neurones et
aux cellules gliales des ganglions craniaux.
Ici comme dans la crête troncale, la vague de migration précoce est segmentée. Les cellules migrent en
trois courants, nommés trigéminal, hyoïde et post-otique. A ce stade de développement, le cerveau
postérieur de l’embryon est segmenté en rhombomères. Les courants de migration des cellules de crête
craniale vont se calquer sur cette segmentation. Les cellules du courant trigéminal émanent du cerveau
moyen et des rhombomères 1 et 2, le courant hyoïde est issu du rhombomère 4, et le courant postotique des rhombomères 6 et 7 (figure 4).
Figure 4 : Migration de la crête neurale craniale
chez le poulet.
Le courant trigéminal (rouge) est issu du cerveau
moyen (cm) et des rhombomères (r) 1 et 2, le
courant hyoïde (vert) du rhombomère 4, et le
courant post-otique (bleu) des rhombomères 6 et 7.
AP = arc pharyngien.
Adapté de Graham et al. 2004.
Les rhombomères 3 et 5 produisent bien des cellules de crête migratoires, mais celles-ci ne migrent
pas latéralement mais se déplacent de façon antérieure ou postérieure pour rejoindre les courants de
cellules migrant des rhombomères pairs adjacents. Les mécanismes à l’origine de ce phénomène
semblent être différents selon les espèces. Chez le poulet, celui-ci met en jeu l’apoptose des cellules
des rhombomères 3 et 5, alors que chez les mammifères il n’ y a pas d’apoptose mais plutôt des
- 20 -
signaux de guidage des cellules issues de ces rhombomères. On retrouve parmi ces signaux Sema3A
et les éphrines, déjà impliquées dans la segmentation de la crête neurale troncale. Plus spécifique de la
crête craniale, le récepteur aux neurégulines ErbB4 exprimé au niveau du cerveau postérieur serait
également impliqué dans la segmentation de la crête neurale craniale. Il apparaît de façon générale que
la ségrégation des cellules de crête craniale en trois courants est en partie due à des événements se
produisant dans le cerveau postérieur, et en partie à l’action supplémentaire de facteurs exprimés par
l’environnement qui renforcent et stabilisent cette ségrégation.
Pour une revue sur la crête neurale craniale, voir Graham et al. 2004; Kulesa et al. 2004.
c. Différenciation
o Les dérivés de la crête neurale
Le devenir des cellules de crête neurale diffère selon la position des cellules par rapport à l’axe neural.
On distingue alors quatre types de crête neurale en fonction de la position cranio-caudale : craniale,
vagale, troncale, sacrée. Ces subdivisions de la crête neurale sont présentées dans la figure 5 ainsi que
les principaux types cellulaires qui en dérivent. Le tableau 3 présente le détail des types cellulaires
dérivés de la crête neurale.
Figure 5 : Les différents types de crête neurale et leurs dérivés.
Vue latérale d’un embryon de xénope, montrant les subdivisions de la crête neurale en fonction de la position par
rapport à l’axe antéropostérieur, et certains de leurs dérivés.
Adapté de Huang and Saint-Jeannet 2004.
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Types cellulaires
Dérivés de crête neurale
Cellules neuronales
Neurones sensoriels des ganglions craniaux V, VII, IX, X
Ganglions spinaux
Ganglions du système nerveux autonome
Cellules supportrices du
système nerveux
Cellules gliales des ganglions périphériques (autonomes et sensoriels)
Cellules de Schwann des nerfs périphériques
Méninges du cerveau antérieur
Cellules pigmentaires
Mélanocytes de la peau et des follicules pileux
Mélanocytes de la couche coroïde de l’œil
Mélanocytes de la stria vascularis de l’oreille interne
Cellules endocrines et
paraendocrines
Cellules neuroendocrines des voies digestives et respiratoires
Médulla de la surrénale
Cellules parafolliculaires de la thyroïde, sécrétrices de calcitonine
Cellules de type I du corps carotidien
Dérivés mésectodermiques
(crête neurale craniale)
Os et cartilages du squelette facial
Parois des grandes artères
Tissu conjonctif du thymus, de la thyroïde et des glandes
parathyroïdiennes
Derme de la face et du cou
Tableau 3 : Les types cellulaires dérivés de la crête neurale chez les vertébrés.
o Prédestination versus pluripotence
Il existe un lien très important entre la migration des cellules de crête neurale et leur différenciation.
La majorité des cellules commence sa migration dans un état peu ou pas différencié, et migre jusqu’à
sa destination où elle se différencie. Cependant, dans le cas particulier des mélanocytes, ce sont des
cellules déjà spécifiées qui migrent en suivant la voie dorso-latérale, et seules des cellules ayant une
identité de mélanoblaste peuvent suivre cette voie (Santiago and Erickson 2002). Il est également à
noter que bien que ces cellules commencent leur migration plus tardivement, ce sont celles qui ont la
plus grande capacité à migrer puisqu’elles vont coloniser tout l’embryon.
La grande variété des dérivés de la crête neurale pose la question des mécanismes sous-jacents à la
différenciation des cellules de crête neurale. Comment les cellules choisissent-elles de se différencier
en tel ou tel type cellulaire ? Sont-elles prédestinées avant ou au moment de leur migration, ou leur
environnement est-il responsable de leur différenciation ?
Les études in vivo, en particulier grâce aux expériences de greffe chimère caille-poulet, et in vitro, par
l’analyse de cultures clonales de cellules de crête neurale, ont permis de mieux comprendre une partie
de ces mécanismes (pour une revue de ces études, voir Le Douarin and Dupin 2003; Le Douarin et al.
2004). Cependant l’intégration des éléments ainsi identifiés dans une vision spatio-temporelle du
développement embryonnaire reste encore difficile à l’heure actuelle.
- 22 -
Ces travaux ont établi que les cellules de crête neurale constituent une population de progéniteurs
pluripotents, dont le devenir est déterminé par des signaux rencontrés dans leur environnement au
cours de leur migration. Il a d’ailleurs été démontré que des cellules multipotentes existent et peuvent
être isolées à partir de dérivés de crête neurale après la fin de la migration et même jusque chez
l’adulte. Ces cellules sont capables de s’auto-renouveler, ce qui leur confère un statut de type « cellule
souche », bien que ce terme ne soit pas parfaitement adapté à ce type de cellules, puisqu’elles restent
limitées dans le nombre de types cellulaires qu’elles peuvent générer et que leur capacité d’autorenouvellement est limitée. Le modèle actuellement reconnu suggère donc que la différenciation des
cellules de crête neurale se fait en plusieurs étapes, par restrictions successives des capacités d’un
progéniteur à générer plusieurs types cellulaires. A partir d’une cellule multipotente, capable de
générer tous les dérivés de crête neurale (neurones, cellules gliales, mélanocytes, dérivés
mésenchymateux), vont ségréger différents progéniteurs pluripotents plus restreints dans leurs
possibilités de différenciation, puis différents précurseurs intermédiaires pouvant donner naissance à
seulement deux types cellulaires, et enfin des précurseurs unipotents qui ne pourront se différencier
qu’en un seul type cellulaire. Ces restrictions successives se font au cours de la migration, induites par
des signaux issus des tissus traversés par les cellules, et la différenciation terminale se fait à l’arrivée
au site de destination des cellules. Cependant les cellules de crête neurale conservent toujours une
relative plasticité, car il a été démontré que certains dérivés de la crête neurale comme les mélanocytes
et les cellules gliales du système nerveux périphérique peuvent se dédifférencier pour redonner un
progéniteur bipotent pouvant à nouveau générer des mélanocytes et des cellules gliales (Dupin et al.
2000; Dupin et al. 2003).
o Les facteurs de différenciation de la crête neurale
Pour chaque lignage dérivé de la crête neurale, les facteurs induisant la différenciation seront
spécifiques du type cellulaire spécifié.
Les mélanocytes :
Contrairement aux autres cellules de la crête neurale, les cellules du lignage mélanocytaire sont déjà
assignées à ce destin avant leur émergence du tube neural (voir plus haut). Cette spécification précoce
du destin mélanocytaire est induite par des facteurs de la voie Wnt produits par la partie dorsale du
tube neural. Les cellules de la première vague de migration sont insensibles à ce signal car elles
produisent un antagoniste de Wnt, ce qui leur permet de migrer selon la voie ventro-latérale et de
suivre un destin neural (Jin et al. 2001).
La différenciation mélanocytaire est stimulée au niveau de la peau par la production des cytokines
SCF (pour stem cell factor) et endothéline 3 (ET3) qui activent respectivement les récepteurs c-kit et
- 23 -
ETRB/B2 exprimés à la surface des cellules de crête neurale. Ces signaux sont relayés au niveau
génomique par l’expression du facteur de transcription MITF, spécifique des mélanocytes.
Le système nerveux autonome :
Le système nerveux autonome est constitué des systèmes nerveux sympathique, parasympathique et
entérique. Les facteurs de la voie BMP sont nécessaires et suffisants pour le développement des
neurones sympathiques, et sont également impliqués dans la différenciation des lignages
parasympathique et entérique.
Les facteurs BMP induisent la différenciation des cellules en neurones en activant des gènes
proneuraux, comme le gène Mash1 codant un facteur bHLH, ou les gènes codants les facteurs de
transcription Phox2a et Phox2b. Un réseau de régulation liant ces différents gènes entre eux permet la
différenciation en différents types de neurones du système nerveux autonome.
Dans le cas du système nerveux entérique, la différenciation implique une étape de migration
supplémentaire. Les cellules de crête neurale vagale doivent en effet coloniser la totalité de l’intestin
en suivant une direction rostro-caudale, avant de se différencier en neurones entériques. Ceci nécessite
des signaux forts de prolifération et de migration afin d’assurer une gangliogénèse entérique complète.
Le facteur de croissance GDNF (pour glial cell-derived neurotrophic factor), produit par le
mésenchyme intestinal, induit la migration, la prolifération et la différenciation des neurones
entériques en se liant à son récepteur Ret, exprimé par les cellules de crête neurale en cours de
migration dans l’intestin. Par ailleurs, l’endothéline 3, produite également par le mésenchyme
intestinal, s’oppose à l’effet neurogénique de GDNF en inhibant la différenciation neuronale et en
favorisant la prolifération des précurseurs non différenciés exprimant son récepteur ETRB. De l’action
combinée de ces deux facteurs résulte un juste dosage entre prolifération et différenciation, permettant
ainsi la colonisation et donc l’innervation complète de l’intestin. Le mécanisme d’action coordonnée
de ces facteurs reste cependant encore inconnu.
Le système nerveux sensoriel :
Le lignage sensoriel ségrége plus tôt que le lignage autonome, bien que des précurseurs communs à
ces deux lignages du système nerveux périphérique ont été identifiés. Le facteur induisant la restriction
vers un destin sensoriel est encore inconnu, mais semble être produit par le tube neural. On sait en
revanche qu’au niveau cellulaire l’engagement dans la voie sensorielle correspond à l’expression de
facteurs de transcription de type bHLH de la famille des neurogénines, Ngn1 et Ngn2. Il a été montré
que des précurseurs sensoriels exprimant Ngn2 sont insensibles aux signaux de la voie BMP, ce qui
explique comment certaines cellules de crête neurale peuvent rencontrer des signaux d’induction
autonome et se différencier malgré tout en neurones sensoriels.
On peut noter que dans les deux grands types de neurones, autonome vs sensoriel, l’engagement dans
la voie de différenciation est relayée par un facteur bHLH, Mash1 pour les neurones autonomes, Ngn
- 24 -
pour les neurones sensoriels. L’engagement vers un type neuronal exclut l’autre, l’expression de Ngn
empêche l’induction vers la voie autonome par Mash1 et inversement.
Les cellules gliales :
La crête neurale génère trois types de cellules gliales périphériques : les cellules de Schwann des nerfs
périphériques, les cellules satellites des ganglions sensoriels et sympathiques, et les cellules gliales des
ganglions entériques. Toutes se différencient après les neurones dans les sites correspondants.
Au niveau des nerfs périphériques, des cellules de crête neurale à destinée gliale s’associent aux
projections axonales des neurones et leur différenciation est induite par des facteurs dérivés des
axones, les neurégulines qui se lient à des récepteurs ErbB exprimés par les cellules de crête neurale.
Au niveau des ganglions autonomes, les cellules de crête peuvent donner séquentiellement des
neurones puis des cellules gliales, bien que l’environnement reste le même et a un fort caractère
neurogénique. Il a été montré que le choix entre ces deux types cellulaires se fait alors via l’activation
du système Notch d’inhibition latérale. Les cellules engagées dans une voie neuronale expriment le
ligand de Notch, Delta, alors que les cellules non encore différenciées expriment Notch. Si la voie
Notch est activée dans une ces cellules par contact avec une cellule neuronale, alors cette cellule ne
pourra plus se différencier en neurone et s’engagera plutôt dans la voie de différenciation gliale. Cet
effet de Notch est dominant sur l’effet neurogénique des facteurs BMP. Ce mécanisme permet ainsi
une parfaite adéquation des proportions de cellules gliales et neuronales dans les ganglions.
Les dérivés mésenchymateux de la tête :
La caractéristique qui distingue la crête neurale craniale de la crête neurale troncale est la capacité à
générer des dérivées mésenchymateux, et en particulier des os et cartilages. Cependant la capacité à
former des tissus squelettiques n’est pas uniformément répartie au sein de la crête craniale. En effet,
seule la partie la plus antérieure de la crête craniale qui s’étend du cerveau moyen au rhombomère 2
(cf. figure 4) participe à la formation du squelette facial et du crâne. De façon intéressante, cette
propriété a été reliée à l’expression des gènes de la famille Hox par la crête neurale craniale. Seule la
partie postérieure au rhombomère 3 de la crête craniale exprime des gènes Hox, indiquant ainsi que
l’expression des gènes Hox restreint le potentiel de différenciation des cellules de crête craniale, et que
seule les cellules n’exprimant pas de gène Hox peuvent participer au squelette facial.
D’autres travaux indiquent également que la survie, la prolifération et la différenciation des cellules de
crête craniale dépendent de facteurs de la voie FGF produits par l’endoderme pharyngien.
Tous les résultats cités ici sont référencés par Le Douarin and Dupin 2003; Le Douarin et al. 2004.
- 25 -
3. Les neurocristopathies
On regroupe sous le terme « neurocristopathies » toutes les malformations congénitales dues à un
défaut de développement de la crête neurale. Celles-ci ont pour origine une anomalie de migration,
prolifération, survie ou différenciation de la crête neurale ou de ses dérivés. L’anomalie d’un ou
plusieurs dérivés de la crête neurale engendrera des dismorphologies et des syndromes tels que la
maladie de Hirschsprung, le syndrome de DiGeorge ou le syndrome de Waardenburg. Une anomalie
de prolifération d’un ou plusieurs dérivés de la crête neurale engendrera des tumeurs telles que la
neurofibromatose, les phéochromocytomes et les carcinomes médullaires de la thyroïde.
Certaines de ces neurocristopathies seront évoquées dans ce manuscrit.
- 26 -
III. La famille des facteurs SOX
1. Généralités
a. Définition
La famille des facteurs SOX a été définie chez les mammifères en 1990, sur la base de la conservation
de la boîte HMG par rapport au facteur de détermination du sexe SRY (Sex-determining Region on the
Y chromosome) (Gubbay et al. 1990).
La boîte HMG, pour High Mobility Group, est un domaine protéique de liaison à l’ADN de 79 acides
aminés, identifié à l’origine chez un groupe de protéines ayant une mobilité élevée en gel de protéine,
qui leur a valu ce nom. Par convention, les protéines SOX doivent posséder un domaine HMG
homologue au moins à 50% à celui de SRY, d’où le nom SOX pour SRY-box.
b. Classification
La boîte HMG caractérise la superfamille des protéines à domaine HMG qui se divise en deux
grandes familles : la famille TCF/SOX/MATA, composée de protéines qui ne possèdent qu’un seul
domaine HMG, ont un profil d’expression restreint et se lient à l’ADN en reconnaissant une séquence
spécifique ; la famille HMG/UBF, dont les protéines possèdent plusieurs domaines HMG, ont une
expression ubiquitaire et sont moins spécifiques dans leur liaison à l’ADN. Peu d’acides aminés sont
conservés entre les boîtes HMG des membres de la superfamille à domaine HMG. En revanche, dans
chaque sous-famille il existe une forte conservation du domaine HMG (Laudet et al. 1993; Soullier et
al. 1999).
Parmi la sous-famille des facteurs SOX, la classification prend en compte l’homologie de la boîte
HMG avec celle de SRY, et également entre les différents membres de la famille. Les gènes SOX ont à
l’origine été identifiés par PCR à partir du domaine HMG, et ont été numérotés dans l’ordre de leur
identification, ce dans différentes espèces, ce qui a engendré de nombreuses confusions et l’attribution
de plusieurs noms à des séquences correspondant au même gène. Après de nombreux recoupements et
alignements de séquence, études de phylogénie, réattributions de noms, une classification définitive
semble avoir été établie (Bowles et al. 2000; Schepers et al. 2002).
La famille compte actuellement 20 membres chez l’homme et la souris, incluant SRY. Elle est
subdivisée en 8 groupes (A à H, le groupe A étant réservé à SRY), en fonction des homologies entre
les différents membres au niveau et en dehors de la boîte HMG (Schepers et al. 2002) (figure 6).
- 27 -
Figure 6 : Représentation schématique des protéines SOX chez les mammifères.
Les motifs, domaines fonctionnels et régions conservées au sein de chaque groupe sont indiqués. Les protéines
SRY de l’homme et la souris sont présentées, illustrant la grande variabilité de séquence de ce facteur entre les
différentes espèces.
Adapté de Bowles et al. 2000.
- 28 -
Depuis la définition de la famille chez les mammifères, des gènes orthologues ont été identifiés chez
d’autres vertébrés et chez les invertébrés, incluant divers marsupiaux, reptiles, ascidiens, la drosophile
et le nématode. Ces orthologues correspondent le plus souvent à l’un des gènes identifiés chez les
mammifères, cependant deux gènes SOX, identifiés chez le xénope et le nématode ne semblent
pouvoir être associés à aucun groupe et ont donc été placés dans les groupes I et J, respectivement
(Bowles et al. 2000).
L’étude des séquences des différents membres de la famille et de leurs domaines d’homologie a amené
une modification de la définition de la famille. En particulier l’identification de SOX30 (Osaki et al.
1999) pose problème car son domaine HMG présente une homologie avec celui de SRY inférieure à
50% (48%). La définition jusque là utilisée ne semble donc plus être appropriée. De fait, la référence à
la séquence de SRY est un choix historique, arbitraire, et rétrospectivement peu adapté, étant donné
qu’il est maintenant reconnu que SRY n’est apparu que tardivement dans le règne animal, uniquement
chez les mammifères et qu’il est clairement divergent entre les différentes espèces. Bowles et al.
(2000) ont proposé de distinguer les facteurs SOX sur un critère alternatif, utilisant une séquence
protéique de 9 acides aminés (RPMNAFMVW), incluse dans le domaine HMG, présente uniquement
chez les protéines SOX autres que SRY, mais absente chez les facteurs des familles sœurs
MATA/LEF/TCF. Cette séquence serait donc la « signature » de la famille SOX.
c. Propriétés
Les protéines SOX sont capables de lier l’ADN via leur domaine HMG, et ce de façon spécifique : le
motif
consensus
reconnu
par
ces
facteurs
est
une
séquence
heptamérique
de
type
5’-(A/T)(A/T)CAA(A/T)G-3’. Le domaine HMG est constitué de trois hélices alpha organisées en
forme de L, maintenue par un cœur hydrophobe. Les protéines SOX se fixent au niveau du petit sillon
de l’ADN, et cette fixation induit une courbure de l’ADN de façon à ce que celui-ci s’adapte à la
forme concave du domaine HMG. En conséquence, la fixation des protéines SOX ou de SRY induit un
angle de courbure moyen de 70 à 85° de l’ADN, un élargissement du petit sillon et une déformation de
l’hélice par rapport à la forme B de l’ADN (Wegner 1999).
La capacité à lier le petit sillon de l’ADN est caractéristique des protéines SOX, et relativement
inhabituelle car la majorité des facteurs de transcription lie l’ADN au niveau du grand sillon. Cette
caractéristique, associée à la capacité à courber l’ADN, laisse supposer que les protéines SOX peuvent
exercer une fonction de protéines architecturales en organisant localement la chromatine de façon à
permettre l’association d’autres facteurs de transcription eux-mêmes liés à l’ADN, et ainsi assembler
des complexes protéiques biologiquement actifs. Les protéines SOX pourraient également recruter
dans ces complexes d’autres protéines qui n’ont pas la capacité de lier l’ADN par elles-mêmes. Il a par
exemple été démontré que plusieurs protéines SOX peuvent interagir avec la β-caténine, suggérant
- 29 -
une fonction de ces protéines dans la cascade de signalisation Wnt (Zorn et al. 1999; Akiyama et al.
2004; Kan et al. 2004; Sinner et al. 2004).
L’étude fonctionnelle de plusieurs protéines SOX a par ailleurs permis de montrer que certaines
d’entre elles exercent également un rôle de facteur de transcription classique, en se liant au niveau du
promoteur de certains gènes et en régulant l’expression de ces gènes. Cette régulation peut être
négative ou positive, des domaines de transactivation et de répression ayant été identifiés chez
différents membres de la famille SOX (figure 6). La fonction des protéines SOX serait donc double, à
la fois facteurs de transcription et protéines architecturales de la chromatine.
2. Les facteurs SOX au cours du développement
a. Expression
Tous les gènes SOX sont exprimés très précocement au cours du développement. Ils présentent des
profils d’expression divers, dynamiques au cours de l’embryogenèse et pour certains l’expression est
maintenue dans divers tissus chez l’adulte (tableau 4). Pratiquement tous les tissus embryonnaires
expriment au moins un gène SOX à au moins un stade, et il n’est pas rare que plusieurs SOX soient
exprimés dans le même tissu et au même stade.
L’expression précoce et dynamique des protéines SOX, ainsi que l’étude fonctionnelle de certains
d’entre eux, a depuis longtemps suggéré que ces facteurs sont impliqués dans la spécification précoce
du devenir cellulaire (Wegner 1999). Cependant, l’expression concomitante de plusieurs SOX dans le
même tissu, associée au fait que les protéines SOX sont exprimées dans plusieurs tissus différents et
reconnaissent le même site de fixation sur l’ADN, a posé la question d’une part de la spécificité, et
d’autre part de la possible redondance des facteurs SOX.
b. Spécificité : les partenaires des SOX
Une même protéine SOX est dans la plupart des cas exprimée dans différents tissus. Cependant, dans
chacun des tissus où elle est exprimée, elle régulera l’expression de différents gènes afin d’induire la
spécification des cellules vers une voie donnée. Comment expliquer qu’une même protéine ait une
action différente selon le lignage où elle est exprimée, alors qu’elle reconnaît un site consensus
nucléotidique présent en des milliers de copies sur le génome ? L’étude fonctionnelle et moléculaire de
plusieurs facteurs SOX a amené la suggestion que les SOX acquièrent leur spécificité en interagissant
avec des protéines partenaires qui sont le plus souvent également des facteurs de transcription
(Kamachi et al. 2000; Wilson and Koopman 2002).
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Groupe
Gène
Localisation
génomique
Sites d’expression
A
SRY
Yp11.3
B1
SOX1
SOX2
SOX3
13q34
3q26.3-27
Xq26.3
B2
SOX14 (=SOX28)
SOX21 (=SOX25)
3q23
13q31-32
- SNC, thymus
- SNC
C
SOX4
SOX11
SOX12 (=SOX22)
6p22.3
2p25
20p13
- SNC, cœur, pré-lymphocytes B et T, gonades
- SNC, nombreux sites de remodelage embryonnaire
- SNC, nombreux tissus embryonnaires et adultes
D
SOX5
SOX6
SOX13
12p12.1
11p15.3-15.2
1q32
8q21.1
E
SOX5P pseudogène
(=SOX29)
SOX8
SOX9
SOX10
Embryon : SNC, chondrocytes
Adulte : testicule
- Embryon : artères, thymus
Adulte : nombreux tissus dont rein et pancréas
- pas d’expression
F
SOX7
8p22
SOX17
8q11.23
SOX18
20q13.33
G
H
SOX15
26, 27)
SOX30
Chez les mâles uniquement
Embryon : crête génitale
Adulte : testicule, hypothalamus, cerveau moyen
Embryon : SNC, crête urogénitale, cristallin
Adulte : SOX1 et 2 : cerveau
SOX1 et 3 : testicule
16p13.3
17q24.3-25.1
22q13
(=SOX20, 17p12.3
5q33
SOX8, 9, 10 : crête neurale, SNC, SNP, oreille
interne, cœur, cartilage
SOX8, 9 : chondrocytes, testicule, rein
SOX8 : muscle, cristallin
SOX10 : SNE, mélanocytes
- Embryon : nombreux tissus, dont cœur, poumon
Adulte : cœur, poumon
- Embryon : endoderme
Adulte : nombreux tissus, dont testicule, cœur,
tractus gastro-intestinal
- système cardio-vasculaire, follicule pileux, tractus
gastro-intestinal
myoblastes, gonades (plus fortement exprimé dans le
testicule)
testicule
Tableau 4 : Classification et localisation des gènes SOX chez les mammifères.
La localisation chromosomique est indiquée pour le génome humain.
Les données d’expression sont issues de l’homme et de la souris.
SNC = système nerveux central
SNP = système nerveux périphérique
SNE = système nerveux entérique
- 31 -
o Modèle
Toutes les protéines SOX ont été impliquées dans la régulation de la transcription et pour la plupart
d’entre elles, à l’exception du cas particulier du groupe D, un domaine d’activation ou de répression de
la transcription a été localisé sur la protéine même (figure 6), impliquant leur action directe dans cette
régulation. Les protéines SOX apparaissent donc comme des facteurs de transcription classiques,
capables de lier l’ADN au niveau des promoteurs de leurs gènes cibles et d’activer ou réprimer la
transcription de ces gènes. Cependant l’étude des séquences promotrices reconnues par les différentes
protéines SOX n’a pas permis d’identifier de motif particulier discriminant telle ou telle protéine SOX
par rapport à une autre. De fait, les domaines HMG, permettant de lier l’ADN au niveau de ces
promoteurs, sont le plus souvent interchangeables entre les protéines SOX in vitro et in vivo, indiquant
que la spécificité de chaque protéine n’est pas relayée par ce domaine (Kamachi et al. 1999;
Bergstrom et al. 2000; Kamachi et al. 2000). Par ailleurs, des expériences de dissociation ont montré
que l’association SOX-ADN était relativement faible, et probablement peu stable in vivo. Enfin, bien
que différentes protéines SOX possédant un domaine de régulation de la transcription sont capables de
lier les mêmes séquences nucléotidiques in vitro, in vivo seul le facteur SOX impliqué dans la
régulation des gènes associés est capable de contrôler leur expression. Ceci implique que les séquences
protéiques hors du domaine HMG sont impliquées dans la fonction régulatrice des facteurs SOX. Il a
donc été proposé que les protéines SOX interagissent avec d’autres protéines, et que cette interaction
leur confère leur spécificité.
Suivant ce principe, Kamachi et al. (2000) ont proposé un modèle de fonctionnement des protéines
SOX au niveau moléculaire (figure 7) : lorsque l’ADN est structuré en chromatine in vivo, le domaine
HMG de la protéine SOX n’est pas suffisant pour assurer la formation d’un complexe ADN-protéine
stable, bien que sa capacité à lier l’ADN soit démontrable in vitro ; la protéine SOX ne peut alors se
stabiliser sur l’ADN cible qu’en présence d’un facteur partenaire qui sera capable d’interagir avec elle
et de lier l’ADN au niveau d’un site proche de celui du facteur SOX. Le partenaire d’un SOX au
niveau d’une séquence cible serait ainsi déterminé d’une part par sa capacité à interagir avec le facteur
SOX, et d’autre part par la présence de son site de liaison à proximité du site SOX et dans une
configuration permettant sa fixation. La mise en place d’un complexe de régulation dépendrait alors
d’un équilibre très délicat entre la liaison à l’ADN des deux facteurs, la courbure de l’ADN par le
facteur SOX, les interactions entre les deux facteurs, et le changement de conformation permettant le
démasquage des régions régulatrices de la transcription.
Selon ce modèle, la spécificité des facteurs SOX dépendrait donc à la fois de la disponibilité de son
cofacteur dans la cellule et de la bonne configuration du promoteur régulant l’expression du gène
cible. La capacité à interagir avec différents partenaires permettrait ainsi aux protéines SOX d’exercer
différentes fonctions et de réguler différents types de gènes selon le tissu et le stade d’expression.
- 32 -
Figure 7 : Modèle d’interaction entre un
facteur SOX et son partenaire.
Lorsque la protéine SOX se fixe à son site de
liaison via son domaine HMG seul, la liaison est
probablement instable. Lorsque le facteur
partenaire interagit avec le facteur SOX et lie
l’ADN à proximité du site SOX, alors la liaison
de la protéine SOX à l’ADN est stabilisée, et le
complexe permet l’activation ou répression de
l’expression du gène cible. Le domaine
d’interaction entre le facteur SOX et son
partenaire implique à la fois le domaine HMG et
d’autres régions de la protéine SOX.
Adapté de Kamachi et al. 2000.
o Les familles partenaires des SOX
L’expérience montre que les protéines SOX sont effectivement capables d’interagir avec différents
partenaires et que ceux-ci modulent leur fonction. L’identification de ces partenaires a mis en évidence
le fait que certains d’entre eux appartenaient à des familles de facteurs également impliqués dans les
événements précoces du développement. Certaines familles de protéines sont donc des partenaires
privilégiés des facteurs SOX.
La famille POU
La famille des facteurs POU appartient à la superfamille des protéines à homéodomaine. Leur nom
vient de l’observation que quatre protéines, Pit-1, Oct-1et -2, et Unc-86 contenaient le même domaine
de 75 à 82 acides aminés (nommé domaine spécifique POU ou POUS), relié par une séquence de
liaison à un homéodomaine (POUH). Le module constitué de ces deux domaines a donc été défini
comme le domaine POU, et toutes les protéines comportant ce domaine sont classifiées dans la famille
des facteurs POU. Ce domaine est un domaine de liaison à l’ADN, reconnaissant une séquence
nucléotidique octamérique, dont 4 bases sont reconnues par le domaine POUS, et les 4 autres par le
domaine POUH. Du fait de cette particularité, beaucoup des protéines de la famille POU ont également
été nommées Oct, pour octamer-binding proteins. Les 15 protéines POU connues chez les
mammifères sont classées en 6 classes (I à VI), en fonction des homologies au sein du domaine POU,
incluant la séquence de liaison entre les domaines POUS et POUH. Parmi les membres de la famille
POU, seul Oct-1 (POU2F1) est exprimé ubiquitairement, les autres membres présentent un profil
d’expression spécifique, régulé selon le tissu et le stade de développement. Ces facteurs sont impliqués
dans divers processus de régulation de la transcription au cours du développement et leur fonction
essentielle est la régulation de la progression des cellules vers un certain type cellulaire (pour une
revue de la famille POU, voir Ryan and Rosenfeld 1997). Pour exercer leur fonction de façon
spécifique, les facteurs POU doivent interagir avec des partenaires protéiques. Toutes ces
- 33 -
caractéristiques, associées au fait que les protéines POU semblent être restreintes au règne animal, sont
reminiscentes des facteurs SOX. De fait, il est fréquent de constater que des facteurs SOX sont
exprimés dans les mêmes tissus et au même moment que certains facteurs POU, et plusieurs
interactions entre ces deux familles sont maintenant décrites.
Le cas le mieux étudié est celui de l’interaction entre Sox2 et Oct-3 (POU5F1/Oct-4) (Dailey and
Basilico 2001). Cette interaction a initialement été identifiée au niveau de l’enhancer du gène FGF4,
responsable de son expression dans le blastocyste. Sox2 et Oct-3 sont tous deux capables de se lier au
niveau de cet enhancer, et agissent en synergie pour activer la transcription du gène FGF4. De façon
intéressante, la liaison des deux facteurs à l’ADN est absolument nécessaire, car aucune activation
transcriptionnelle n’a été observée lorsqu’un seul des deux facteurs est exprimé, ou lorsque l’un des
deux sites de liaison est muté. Cette observation est en accord avec le modèle proposé pour le
fonctionnement des protéines SOX : les deux facteurs doivent lier l’ADN, et c’est l’interaction
protéine-protéine qui stabilise cette fixation et permet la mise en place d’un complexe stable de
régulation de la transcription. Par ailleurs, il a été montré que d’autres protéines de la famille POU
sont capables de lier l’enhancer de FGF4 et d’interagir avec Sox2 in vitro, pourtant seul Oct-3 est
capable d’activer la transcription du gène en synergie avec Sox2 dans le contexte de cet enhancer in
vivo.
L’interaction Sox2/Oct-3 a également été identifiée dans le contexte de l’enhancer du gène UTF1. De
la même façon, les deux facteurs lient l’ADN au niveau de cet enhancer et activent en synergie la
transcription du gène UTF1, et d’autres protéines POU ne peuvent pas se substituer à Oct-3. Dans le
cas de l’enhancer de l’ostéopontine, Sox2 semble réprimer la fonction activatrice de Oct-3 in vitro,
mais sa fonction in vivo n’a pas été établie (Botquin et al. 1998).
De façon intéressante, Sox2 est également capable d’interagir avec la protéine POU de classe III Brn-2
(POU3F2) sur le promoteur de la Nestine, alors que cette interaction ne peut pas se produire sur
l’enhancer de FGF4 (Tanaka et al. 2004). Ceci indique donc qu’une même protéine SOX peut
interagir avec des protéines POU de classes différentes, donc ayant des domaines POU différents, mais
que cela ne peut se produire que dans un contexte nucléotidique particulier. Il apparaît donc que la
séquence liée par les deux facteurs joue un rôle très important dans la coopération de ces facteurs, et
donc dans leur capacité à réguler la transcription du gène cible associé. La spécificité de l’interaction
tient donc autant à la capacité à lier des séquences nucléotidiques voisines qu’à la capacité à générer
des interactions protéine-protéine entre les deux facteurs impliqués. Les autres facteurs SOX du
groupe B1, Sox1 et Sox3 peuvent également interagir avec les mêmes protéines POU, suggérant que
les domaines impliqués dans cette interaction sont conservés entre les membres de ce groupe. De la
même façon, Sox2 est capable de lier un élément de son propre promoteur, et dans ce contexte il peut
interagir aussi bien avec Oct-3 qu’avec Oct-6 (POU3F1/Tst-1/SCIP), qui appartiennent à des classes
différentes (Tomioka et al. 2002).
- 34 -
Enfin, une interaction entre Sox2 et Oct-1 a été suggérée pour la régulation de l’enhancer de Hoxb1, et
serait responsable de son expression spécifique dans le rhombomère 4 au cours du développement (Di
Rocco et al. 2001).
D’autres cas de partenariat spécifique SOX/POU ont été décrits. Le facteur de transcription Sox10 est
capable d’interagir avec la protéine Oct-6 pour activer en synergie la transcription à partir d’un
promoteur artificiel portant des sites de liaison des deux facteurs. Comme dans le cas de Sox2 et Oct3, Sox10 peut interagir avec d’autres protéines POU in vitro, en l’occurrence Brn-1 (POU3F3), mais
seule l’association Sox10/Oct-6 permet l’activation transcriptionnelle du promoteur. De la même
façon également, la liaison des deux facteurs au promoteur est indispensable à leur action coordonnée
(Kuhlbrodt et al. 1998b). Enfin, Sox11 est capable d’interagir avec Brn-1 et Brn-2 pour activer la
transcription à partir du même promoteur, mais pas avec Oct-6 ou Brn-3.0 (POU4F1) (Kuhlbrodt et al.
1998a). SOX11 peut également interagir avec Brn-2 sur le promoteur de la Nestine, bien qu’il ne soit
pas déterminé si cette interaction se produit in vivo (Tanaka et al. 2004).
Bien que, dans le cas de Sox10, l’interaction SOX/POU n’ait pas été confirmée sur des promoteurs
cibles naturels, les différentes observations de coopération entre ces deux familles de protéines
suggèrent l’existence d’un code spécifique de combinaison SOX/POU permettant une régulation
différentielle de cibles distinctes en fonction de l’expression des différents facteurs, de la disponibilité
de leurs sites de liaison à proximité, et de leur capacité à agir en synergie.
Cependant, comment expliquer que différentes protéines SOX et POU peuvent former des complexes
ternaires ADN-protéines in vitro, mais ne peuvent pas coopérer pour activer la transcription in vivo ? Il
a été proposé que l’interaction protéine-protéine entre les deux facteurs permet un changement de
conformation, démasquant alors sur chaque facteur les domaines responsables de l’activation de la
transcription (Dailey and Basilico 2001). Seule une interaction spécifique entre deux facteurs définis
permettrait ce changement de conformation, et le remplacement de l’un ou l’autre des facteurs
permettrait certes la liaison à l’ADN, éventuellement une interaction entre les protéines, mais ne
générerait pas la configuration protéique nécessaire à l’activation de la transcription. La spécificité
d’interaction entre les facteurs SOX et POU dépend de différents domaines protéiques, incluant les
domaines HMG et POU.
La famille PAX
Les protéines de la famille PAX sont définies par la présence dans leur partie amino-terminale d’un
domaine de liaison à l’ADN de 128 acides aminés, permettant la fixation de ces protéines à une
séquence nucléotidique spécifique. Ce domaine est homologue au domaine de liaison à l’ADN (autre
que l’homéodomaine) de la protéine Paired chez la drosophile, d’où le nom Pax pour Paired-box.
Chez les mammifères, les 9 facteurs PAX connus sont classés en 4 groupes (I à IV) en fonction des
homologies de structure, de séquence et de fonction entre les différents membres. Les membres des
- 35 -
groupes I à III possèdent un motif peptidique conservé de 8 acides aminés en aval du domaine paired,
impliqué dans la répression transcriptionnelle. Les membres du groupe II possèdent un homéodomaine
incomplet, ne comportant que la première hélice, et les membres des groupes III et IV possèdent un
homéodomaine complet. La complexité de structure du domaine paired autorise plusieurs
conformations et donc plusieurs types d’interaction protéine-ADN, rendant difficile la définition d’un
motif nucléotidique consensus reconnu par les protéines PAX. Ceci devient presque impossible dans le
cas des protéines PAX des groupes III et IV car celles-ci possèdent en plus du domaine paired un
homéodomaine qui, en coopérant avec les autres domaines de liaison à l’ADN, permet la
reconnaissance de motifs complexes sur l’ADN. L’étude des séquences de liaison à l’ADN est donc
généralement restreinte à une protéine PAX, ou éventuellement à un groupe, et ne peut pas être
appliquée par extrapolation à l’ensemble de la famille (pour une revue sur la famille PAX, voir Dahl et
al. 1997; Chi and Epstein 2002).
Toutes les protéines PAX sont impliquées dans des étapes cruciales du développement, et elles
exercent ce rôle en régulant la transcription de gènes responsables de différentes étapes de
l’embryogenèse. Une fois de plus cette fonction est modulée par l’interaction avec différents
partenaires, parmi lesquels on trouve des membres de la famille SOX.
L’exemple le mieux décrit de coopération SOX/PAX implique à nouveau SOX2. Les trois membres
du groupe B1, SOX1/2/3, sont impliqués dans l’induction et le développement du cristallin. De fait,
les trois facteurs peuvent lier DC5, un enhancer du gène de la δ1-cristalline spécifique du cristallin,
SOX2 ayant la plus forte affinité pour cette séquence. Cependant pour exercer une activation
transcriptionnelle du gène, SOX2 nécessite la présence d’une séquence nucléotidique adjacente à son
site de liaison, et surtout la liaison à cette séquence de son partenaire, qui a été identifié plus
tardivement comme étant PAX6 (Kondoh et al. 2004). De façon très intéressante, des expériences
d’immunoprécipitation de la chromatine ont montré que SOX2 et PAX6 ne sont associés à DC5 que
lorsqu’ils sont exprimés ensemble, alors qu’aucun des deux n’est capable de lier DC5 lorsqu’il est
exprimé seul (Kamachi et al. 2001). L’interaction entre les deux protéines est donc indispensable à la
fixation stable du complexe à l’ADN. Cette interaction est spécifique entre les SOXB1 et PAX6, car
d’autres protéines SOX telles que SOX9 ou SOX11 ne peuvent se substituer à SOX2. La séquence
nucléotidique de l’enhancer DC5 est également importante pour la coopération des deux facteurs. En
effet, le site de fixation de PAX6 sur DC5 est seulement partiellement conforme au site consensus de
liaison du domaine paired de PAX6. Ceci explique le fait que PAX6 ne peut pas se lier seul à DC5.
Cependant, de façon particulièrement intéressante, lorsque le site de fixation de PAX6 sur DC5 est
remplacé par son site consensus, PAX6 se lie de façon beaucoup plus efficace à cette séquence, mais il
n’est plus capable de coopérer avec SOX2, qui par conséquent ne se lie plus à son site. Dans ce cas
l’activation de la transcription est considérablement diminuée et surtout ne dépend plus de la présence
de SOX2. D’autre part, il a été démontré que les domaines d’activation respectifs de SOX2 et PAX6
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ne fonctionnent pas individuellement mais s’associent plutôt pour constituer un domaine hybride
d’activation de la transcription (Kondoh et al. 2004). Ainsi, la structure nucléotidique particulière de
l’enhancer DC5 induit la formation d’un complexe ternaire entre SOX2, PAX6 et l’ADN, générant
une structure stable capable d’induire l’activation du gène de façon concertée. Il apparaît donc que,
comme dans le cas du partenariat SOX/POU, la spécificité de la coopération dépend autant des
interactions entre les deux facteurs que de la structure nucléotidique de la séquence cible.
La coopération SOX2/PAX6 est impliquée à différents stades de développement du cristallin. En effet,
l’interaction des deux facteurs a également été démontrée pour la régulation de l’expression de PAX6
lui-même, ainsi que celle des protéines Maf, impliquées dans la différenciation du cristallin (Kondoh
et al. 2004).
SOX2 représente donc le modèle des protéines SOX, capable d’interagir avec différentes familles de
partenaires, avec différents membres de la même famille, afin de réguler de façon extrêmement
spécifique un répertoire de gènes selon le type cellulaire et le stade de développement. Il est
intéressant de noter que la même région de la protéine SOX2 est impliquée dans son interaction à la
fois avec Oct-3 sur l’enhancer de FGF4, et avec PAX6 sur l’enhancer DC5 (Remenyi et al. 2003). Les
séquences et structures de ces deux partenaires étant très différentes, on peut supposer que des
changements de conformation de la protéine SOX lors de sa liaison à sa séquence cible permettent son
interaction avec ses différents cofacteurs.
La coopération SOX/PAX a également été décrite pour le couple SOX10/PAX3. Les profils
d’expression de ces deux facteurs se superposent au moment de la différenciation des lignages
entérique et mélanocytaire. Les deux protéines agissent alors en synergie pour activer la transcription
de deux de leurs gènes cibles, MITF et RET, indispensables au développement des mélanocytes et du
système nerveux entérique, respectivement. Dans les deux cas, des sites de liaison adjacents pour les
deux facteurs sont indispensables à leur coopération, et l’interaction directe des deux protéines a été
démontrée par co-immunoprécipitation (Bondurand et al. 2000; Lang et al. 2000; Potterf et al. 2000;
Lang and Epstein 2003).
A l’heure actuelle, il n’existe pas d’autre cas de coopération SOX/PAX connu. Pourtant, la description
de deux couples SOX/PAX dans des contextes très différents, et le fait qu’il arrive fréquemment que
des membres des familles SOX et PAX soient exprimés dans le même tissu au même moment,
suggèrent que d’autres associations entre ces deux familles peuvent exister, et que comme dans le cas
des couples SOX/POU, il existe un code combinatoire entre les différents membres des deux familles,
permettant la régulation différentielle de gènes cibles selon l’association des facteurs. Une telle
association est par exemple très fortement soupçonnée pour les facteurs SOX4 et PAX5. En effet, tous
deux sont co-exprimés au cours de l’hématopoïèse dans les précurseurs lymphoïdes engagés vers une
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voie de différenciation de type lymphocyte B. Or, dans les modèles murins déficients pour l’un ou
l’autre de ces deux facteurs, on constate un arrêt du développement des cellules B au même stade
(Urbanek et al. 1994; Schilham et al. 1996), suggérant une fonction commune des deux protéines. Il
reste à déterminer si SOX4 et PAX5 peuvent coopérer pour réguler la transcription de gènes du
lignage lymphocytaire B.
De la même façon, l’expression concomitante de SOX13 et PAX4 dans les cellules β des îlots de
Langherans du pancréas (Sosa-Pineda et al. 1997; Kasimiotis et al. 2000) laisse imaginer une possible
interaction entre les deux facteurs, bien qu’actuellement aucune étude ne vienne corroborer cette
hypothèse.
La famille SOX
Plusieurs cas de coopération entre deux, voire trois protéines SOX ont été décrits. On peut distinguer
deux cas de figure : l’homodimérisation d’une même protéine SOX ; ou la coopération de plusieurs
protéines SOX différentes.
L’homodimérisation a été décrite pour les protéines du groupe D, SOX5, SOX6 et SOX13, et pour les
protéines du groupe E, SOX8, SOX9 et SOX10, cependant les mécanismes impliqués sont différents
dans les deux groupes. Les facteurs du groupe D constituent une entité à part au sein de la famille
SOX. En effet, bien que certains de ses membres ont été impliqués dans la régulation de l’expression
génique, aucun d’entre eux ne comporte de domaine de régulation de la transcription. Ces protéines
présentent en revanche la particularité de s’homodimériser, et ce sans la nécessité de liaison à l’ADN.
L’homodimérisation « en solution », c’est-à-dire sans liaison à l’ADN, a été démontrée pour les trois
membres du groupe D. L’interaction protéique est relayée par leur domaine leucine zipper (LZ),
caractéristique des facteurs du groupe D (figure 6) (Takamatsu et al. 1995; Lefebvre et al. 1998;
Kasimiotis et al. 2000). Dans le cas de SOX5, deux formes ont été décrites, une forme dite « longue »
(L-SOX5) et une forme « courte » (SOX5). Seule la forme longue comporte le domaine LZ, et est
donc capable de se dimériser. C’est la forme spécifique des chondrocytes, alors que la forme courte est
plus spécifique du testicule (Lefebvre et al. 1998). Les études de liaison à l’ADN menées in vitro sur
des sites de liaison artificiels ont tout d’abord suggéré que l’homodimérisation de protéines SoxD
inhibait leur fixation à l’ADN (Takamatsu et al. 1995; Kasimiotis et al. 2000). Cependant l’étude de la
liaison de L-SOX5 et SOX6 à une séquence naturelle correspondant à un de leurs gènes cibles a
démontré que leur homodimérisation permet au contraire une plus forte liaison à l’ADN lorsque deux
sites de liaison SOX sont présents sur la séquence cible dans une configuration adéquate. Cette
coopération nécessite à la fois la liaison de deux protéines à l’ADN via leur domaine HMG, et leur
interaction via leur domaine LZ (Lefebvre et al. 1998). Il en résulte que les facteurs du groupe D lient
l’ADN avec une très grande affinité dans le contexte d’un double site de liaison SOX, mais ne lient
pas, ou peu, un site unique car elles ne peuvent rester sous forme monomérique.
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Dans le cas du groupe E, l’homodimérisation implique un mécanisme différent. Les facteurs SOX du
groupe E sont en effet incapables de s’homodimériser « en solution », leur interaction nécessitant
impérativement leur liaison à l’ADN. Les deux facteurs doivent chacun lier l’ADN au niveau d’un site
SOX, et la configuration de la séquence cible doit répondre à des règles très strictes afin de permettre
l’interaction entre les deux protéines : les deux sites SOX doivent être orientés l’un vers l’autre et
espacés de 2 à 8 pb, l’espacement optimal semblant être de 3 à 4 pb (Peirano and Wegner 2000;
Schlierf et al. 2002; Bridgewater et al. 2003). Lorsque ces conditions sont réunies, les protéines lient
l’ADN sous forme dimérique, ce qui leur confère une plus grande affinité que la liaison sous forme
monomérique. Cependant, contrairement aux protéines du groupe D, les facteurs SOX du groupe E
peuvent également lier l’ADN sous forme monomérique. De fait, l’étude des séquences reconnues par
SOX9 et SOX10 au niveau des régions régulatrices de leurs gènes cibles a permis l’identification des
deux types de sites, simples et doubles, ce qui induit des mécanismes de régulation différents.
Néanmoins, lorsque la régulation passe par la dimérisation d’un facteur SoxE, l’intégrité des deux sites
est absolument indispensable à leur action, la mutation de l’un des deux sites induisant la quasi-totale
abolition de l’activation de la transcription par le facteur concerné, bien qu’il reste un site de liaison à
l’ADN intact. Dans ce cas, la protéine SOX est son propre cofacteur, et respecte donc le modèle
d’action des facteurs SOX qui impose la liaison des deux protéines pour stabiliser le complexe de
régulation de la transcription. Ceci a particulièrement bien été étudié pour SOX9 et SOX10, pour
lesquels plusieurs gènes cibles ont été identifiés, et pour les deux facteurs les deux types de régulation,
via une liaison monomérique ou dimérique ont été décrits, parfois sur la même région régulatrice.
Dans le cas de SOX8, la dimérisation a été démontrée in vitro sur une séquence régulatrice du gène
MBP identifiée à l’origine pour SOX10 (Stolt et al. 2004). De plus, le fait que les deux facteurs ont un
profil d’expression commun dans le SNC, et la démonstration que l’expression de MBP est
effectivement affectée chez des souris mutantes pour SOX8 indiquent qu’il s’agit bien d’un gène cible
de SOX8, et suggèrent que son mode de régulation est identique à celui de SOX10. SOX8 est
également capable de se dimériser in vitro sur le promoteur du gène de l’AMH, hormone essentielle au
développement testiculaire dont l’expression est régulée par SOX9 (Schepers et al. 2003), mais la
légitimité de cette interaction n’a pas été étudiée in vivo. La dimérisation des facteurs SOX du groupe
E est relayée par une région protéique de 40 acides aminés adjacente à la partie NH2-terminale du
domaine HMG, très conservée au sein du groupe E mais absente des autres protéines SOX, indiquant
qu’il s’agit bien là d’une particularité du groupe E. De façon particulièrement intéressante, des
mutations ponctuelles affectant cette région de la protéine SOX9 humaine abolissent sa capacité à se
dimériser sans affecter ses autres fonctions (liaison à l’ADN, transactivation), et sont responsables
chez les porteurs de ces mutations de cas de dysplasie campomélique, un syndrome affectant les os et
cartilages du squelette provoqué par des mutations de SOX9 (cf. chapitre III-3) (Sock et al. 2003).
Ceci démontre l’implication physiologique de la dimérisation de SOX9, qui lorsqu’elle est affectée
entraîne des anomalies de régulation suffisamment importantes pour générer cette pathologie. La
- 39 -
fixation à l’ADN de deux protéines SoxE et leur coopération induit un angle de courbure à l’ADN plus
important que lorsqu’une seule protéine SOX est fixée (Peirano and Wegner 2000), ce qui suggère que
la conformation de la chromatine ainsi créée permet la mise en place d’un complexe de régulation
dépendant d’une configuration particulière de l’ADN.
La coopération entre les protéines SOX peut également impliquer plusieurs protéines différentes. Il est
d’ailleurs remarquable que les protéines SOX capables de telles interactions sont les mêmes que les
protéines capables de s’homodimériser. En effet, le cas le mieux décrit de coopération entre facteurs
SOX implique les protéines L-SOX5, SOX6 et SOX9, sur un enhancer du gène Col2a1, codant le
collagène II, composant essentiel de la matrice extracellulaire du cartilage. Un enhancer de 48 pb,
situé dans le premier intron du gène, est suffisant pour induire son expression au niveau des
chondrocytes. Cet enhancer comporte 4 sites de fixation SOX, induisant une régulation complexe par
différents facteurs SOX. Il a été démontré que L-SOX5, SOX6 et SOX9 sont chacun capables de
s’homodimériser sur cet enhancer (Lefebvre et al. 1998; Sock et al. 2003). Une hétérodimérisation
L-SOX5/SOX6 est également possible et requiert les mêmes conditions que pour l’homodimérisation
de ces protéines, à savoir la liaison à l’ADN via le domaine HMG et l’interaction protéine-protéine via
le domaine LZ. Par ailleurs, Lefebvre et al. (1998) ont démontré que l’activation de l’enhancer est
optimale lorsque les trois facteurs SOX sont exprimés simultanément, à la fois in vitro et in vivo.
Toutefois l’activation est comparable lorsque SOX9 est exprimé simultanément avec L-SOX5/SOX6
ou seulement avec l’un des deux facteurs, suggérant que la fonction de L-SOX5 et SOX6 est
redondante. D’autres tests indiquent cependant que les trois facteurs sont effectivement présents dans
le complexe lié à l’enhancer, et l’ensemble de ces résultats démontre une coopération entre les trois
facteurs SOX, cette coopération étant nécessaire au fonctionnement de l’enhancer. L’interaction
directe entre SOX9 et L-SOX5/SOX6 n’est pas prouvée, mais on peut imaginer que l’association de
ces trois facteurs avec l’ADN, en monomères et/ou en dimères, modifie la structure de l’enhancer et
permet la mise en place d’un complexe protéique régulateur de la transcription, éventuellement via
l’interaction avec d’autres partenaires non encore identifiés. Il a également été suggéré que ce
complexe pourrait aller interagir avec une autre séquence liant SOX9 au niveau du promoteur du gène
Col2a1, 2,2 kb en amont de l’enhancer. La coopération de L-SOX5/SOX6 et SOX9 a également été
impliquée dans la régulation de l’expression du gène de l’aggrécane, un autre composant de la matrice
extracellulaire du cartilage (Lefebvre et al. 1998).
L’hétérodimérisation de SOX8 et SOX10 a également été décrite in vitro sur le promoteur de MBP,
sur les mêmes sites permettant leur homodimérisation (Stolt et al. 2004). Etant donné que ces deux
facteurs ont un profil d’expression commun au niveau du SNC, et sont tous deux capables de lier le
promoteur de MBP et d’activer la transcription du gène in vitro, il est difficile de déterminer le
mécanisme qui se produit réellement in vivo. Des expériences d’immunoprécipitation de la chromatine
permettraient de déterminer les proportions d’homodimères SOX8 ou SOX10 et d’hétérodimères liés
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au promoteur, afin d’identifier si un mécanisme est favorisé par rapport aux autres, ou si les trois types
de dimères sont utilisés indifféremment pour réguler la transcription de ce gène, voire d’autres gènes
cibles décrits pour SOX10 et pour lesquels SOX8 pourrait également être impliqué. De la même
façon, l’hétérodimérisation SOX8/SOX9 peut théoriquement se produire sur le promoteur de l’AMH,
mais son occurrence in vivo reste à démontrer.
Les autres facteurs partenaires
D’autres protéines, n’appartenant pas à une famille, ou pour lesquels un seul membre a été décrit pour
interagir avec un facteur SOX, sont des partenaires des SOX. Dans la plupart des cas, il s’agit d’autres
facteurs de transcription qui, comme les partenaires POU, PAX ou SOX, lient l’ADN au niveau d’un
site à proximité du ou des sites SOX, interagissent avec le facteur SOX concerné et régulent en
synergie avec lui l’expression du gène cible. Parfois ces facteurs sont également capables de réguler
l’expression du gène cible indépendamment de leur interaction avec le facteur SOX, mais leur action
est potentialisée par la coopération avec le partenaire SOX. C’est le cas lors de l’interaction entre
SOX9 et le récepteur nucléaire orphelin SF1, qui coopèrent pour activer en synergie l’expression du
gène AMH (de Santa Barbara et al. 1998). De la même façon, SOX10 et EGR2, un facteur de
transcription à doigts de zinc, activent en synergie l’expression du gène codant la connexine 32, une
protéine essentielle à la myélinisation du SNP (Bondurand et al. 2001). Dans ces deux cas, il est
intéressant de noter que SOX9 et SOX10 peuvent s’homodimériser, voire s’hétérodimériser avec
SOX8, sur le promoteur cible, ce qui indique que la dimérisation n’est pas incompatible avec
l’interaction avec d’autres partenaires. Ceci va dans le sens du modèle qui suggère que les protéines
SOX interagissent avec divers partenaires afin de constituer des complexes multi-protéiques
régulateurs de la transcription. Cette fonction est par ailleurs potentialisée par la capacité des protéines
SOX à courber l’ADN, permettant le rapprochement de protéines et leur interaction directe.
Les facteurs SOX peuvent également interagir avec des partenaires qui ne sont pas des facteurs de
transcription. Le cas de la β-caténine a déjà été cité précédemment (cf. chapitre III-1-c). SRY, et par
extrapolation tous les facteurs SOX, interagit avec l’importine β, responsable de son adressage au
noyau (Forwood et al. 2001). SOX4 interagit avec la synténine, membre de la famille des protéines à
domaine PDZ, considérées comme des protéines « adaptatrices », permettant l’interaction indirecte
entre deux protéines. De fait, la synténine interagit également avec la sous-unité α du récepteur à
l’interleukine 5, et l’association des trois protéines en complexe ternaire stimule l’activation de la
transcription par SOX4 (Geijsen et al. 2001). SRY est également capable d’interagir avec une protéine
à domaine PDZ, suggérant un mécanisme commun au sein de la famille SOX (Poulat et al. 1997), bien
que la troisième protéine impliquée dans ce cas ne soit pas identifiée.
- 41 -
Cette liste d’exemples, bien que non exhaustive, illustre la grande variété des interactions que peuvent
supporter les facteurs SOX. Les études moléculaires des différentes protéines SOX semblent donc
confirmer le modèle proposé pour justifier la spécificité d’action des facteurs SOX. Ils peuvent ainsi
établir différents types d’interaction protéique : l’interaction avec des partenaires eux-mêmes liés à
l’ADN qui stabilisent leur liaison et potentialisent leur fonction régulatrice ; le recrutement d’autres
protéines en complexes multi-protéiques au niveau de sites de liaison à l’ADN ; l’interaction avec des
protéines participant à leurs propriétés intrinsèques, comme l’importine β pour leur transport nucléaire.
La complexité émergeante des interactions protéiques impliquant des facteurs SOX suggère que
beaucoup de mécanismes restent à identifier.
c. Redondance versus coopération
La redondance fonctionnelle est un thème récurrent dans l’étude des facteurs SOX, suggérée par la coexpression de plusieurs protéines SOX dans un même tissu au même stade du développement.
Pourtant des cas de coopération entre différentes protéines SOX ont été identifiés, comme exposé dans
le paragraphe précédent. Comment alors peut-on discriminer la redondance de la coopération ? Le
débat reste encore ouvert à l’heure actuelle. Cependant des cas de redondance fonctionnelle entre
protéines SOX ont déjà été décrits, essentiellement par l’étude de modèles murins délétés d’un facteur
SOX, et pour lesquels le phénotype s’avère être beaucoup moins marqué que ce à quoi l’on pouvait
s’attendre au vu de son profil d’expression. Dans la plupart des cas, la redondance semble être assurée
par des facteurs SOX du même groupe. C’est par exemple le cas des facteurs du groupe B1, SOX1,
SOX2 et SOX3. Leur profil d’expression est partiellement superposable et ils peuvent exercer les
mêmes fonctions au niveau du cristallin et au cours de la neurogenèse (Kamachi et al. 1998; Bylund et
al. 2003). Les souris mutantes porteuses d’une délétion de SOX1 ne présentent qu’un phénotype
atténué au niveau du SNC, probablement dû à une compensation par SOX2 (Nishiguchi et al. 1998).
En revanche, les souris déficientes pour SOX2 au niveau du SNC présentent un phénotype plus sévère,
suggérant un rôle plus important de SOX2 dans le SNC (Ferri et al. 2004), bien que son absence
puisse être compensée par la surexpression de SOX1, soulignant la redondance fonctionnelle des deux
facteurs (Graham et al. 2003).
La redondance fonctionnelle a également très souvent été évoquée pour SOX5 et SOX6. Les souris
déficientes pour l’un ou l’autre de ces deux facteurs ne présentent qu’un phénotype osseux léger, alors
que les doubles mutants présentent une chondrodysplasie sévère, indiquant que chez les simples
mutants l’absence d’un facteur est compensée par la présence de l’autre (Smits et al. 2001). Ceci
indique que dans ce cas, les deux facteurs ont la même importance pour la chondogenèse. Cependant
la présence de SOX5 et SOX6 ne permet pas de compenser l’absence de SOX9 dans les chondrocytes,
en partie parce que SOX9 régule également l’expression de SOX5 et SOX6 (Akiyama et al. 2002;
Mori-Akiyama et al. 2003). Inversement, la présence de SOX9 dans les chondrocytes ne compense
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pas l’absence simultanée de SOX5 et SOX6. Dans le cas de SOX5/SOX6 et SOX9, la co-expression
dans les chondrocytes correspond donc bien à une coopération et non à une redondance fonctionnelle.
La redondance a également été évoquée pour les facteurs SOX du groupe E. En effet, malgré un profil
d’expression très large et très précoce de SOX8, l’absence totale de ce gène chez la souris ne provoque
pas de phénotype majeur, les souris étant parfaitement viables et fertiles (Sock et al. 2001). Le profil
d’expression de SOX8 est très proche de la superposition des profils de SOX9 et SOX10, il a donc été
suggéré que ces deux autres facteurs compensent l’absence de SOX8 chez les souris mutantes.
Cependant cette compensation est unilatérale, puisque l’absence d’une copie de SOX9 ou SOX10
génère des phénotypes graves, malgré la présence de SOX8 (Bi et al. 2001; Britsch et al. 2001). La
fonction de SOX8 paraît donc être redondante avec celles de SOX9 et SOX10, et ce facteur apparaît
plutôt comme un modulateur de la fonction des deux autres.
Le fait que différents facteurs SOX peuvent être exprimés dans le même tissu est à l’origine de
l’hypothèse de redondance et/ou coopération. Cependant cette hypothèse ne peut être évoquée que
lorsque les facteurs sont exprimés dans les mêmes cellules, et y exercent la même fonction. L’exemple
de SOX5/SOX6 et SOX9 est en ce sens très représentatif des précautions à prendre lorsque l’on parle
de redondance ou coopération fonctionnelle. La coopération et la redondance fonctionnelle de ces trois
facteurs sont démontrées au niveau des chondrocytes, comme cela a été exposé précédemment. Par
ailleurs, SOX5/SOX6 et SOX9 sont également exprimés dans le testicule, laissant supposer que ces
trois facteurs peuvent également coopérer au niveau de ce site d’expression. Or l’étude plus poussée
de leur expression montre que les trois facteurs ne sont pas exprimés par les mêmes cellules : SOX5 et
SOX6 sont exprimés par les cellules germinales post-méiotiques, SOX9 est exprimé par les cellules de
Sertoli (Connor et al. 1994; Connor et al. 1995; Kent et al. 1996). Les trois facteurs ne sont donc pas
en contact, et si la redondance SOX5/SOX6 peut encore être évoquée, la coopération avec SOX9 ne
peut pas se produire dans ce cas.
La question peut également se poser pour les facteurs du groupe E. SOX9 et SOX10 sont exprimés
très précocement par les cellules de crête neurale et ont été impliqués dans la migration et la
différenciation de ces cellules (Southard-Smith et al. 1998; Cheung and Briscoe 2003). Cependant les
cellules de crête neurale constituent une population hétérogène, et les profils d’expression divergents
adoptés par la suite par SOX9 et SOX10 peuvent laisser penser qu’ils appartiennent à des groupes
cellulaires différents au sein de la crête neurale, destinés à se différencier en des lignages distincts.
SOX8 est également exprimé au niveau de la crête neurale (Sock et al. 2001). Etant donné que sa
redondance et sa coopération avec SOX9 et SOX10 ont déjà été décrites dans d’autres lignages, il
serait intéressant de déterminer si ces situations se produisent également au niveau de la crête neurale.
Le seul véritable cas de redondance « complète » concerne SOX5 et SOX6 : leurs profils d’expression
sont parfaitement superposables, et leurs fonctions entièrement partagées. Dans les autres cas, si une
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redondance peut effectivement être constatée entre plusieurs SOX dans un même tissu, dans d’autres
tissus ces mêmes SOX pourront être les seuls représentants du groupe, et exercer alors une fonction
majeure dans le développement de ce tissu. C’est le cas par exemple de SOX3, qui exerce une fonction
redondante avec SOX1 et SOX2 dans le cristallin, mais essentielle dans le développement pituitaire.
Par ailleurs, lorsque plusieurs SOX semblent avoir une fonction redondante dans le même tissu, il
s’avère souvent que l’un d’entre eux est plus important pour le développement de ce tissu que les
autres. C’est par exemple ce qui a déjà été décrit pour SOX8 et SOX9 ou SOX10. Ces fonctions et
importances relatives des SOX sont révélées dans les cas de mutations, soit dans les modèles murins,
soit dans les cas identifiés de pathologies humaines associées à une mutation d’un facteur SOX.
3. Les facteurs SOX impliqués en pathologie
Malgré la grande variété des facteurs SOX et de leurs sites d’expression, et leur rôle dans divers
processus du développement embryonnaire, peu d’entre eux sont impliqués en pathologie humaine.
- SRY, le fondateur de la famille SOX, est associé à des réversions de sexe : des mutations du gène
SRY sont retrouvées chez des femmes ayant un caryotype XY ; à l’inverse, des individus XX porteurs
du gène SRY, déplacé par translocation, présentent un phénotype mâle. La plupart des individus XY
portant une mutation de SRY présentent une dysgénésie gonadique complète, ce qui engendre un
phénotype parfaitement féminin, incluant les organes génitaux internes et externes, et dans ces cas le
diagnostique clinique n’est généralement effectué qu’après l’adolescence, dû à une aménorrhée
primaire. Quelques cas de mutations de SRY sont également associés à un hermaphrodisme vrai
(OMIM #235600). La plupart des mutations touchent le domaine HMG de SRY et affectent sa liaison
à l’ADN. Pour une revue sur SRY, voir Harley et al. 2003.
- SOX9 fut le premier facteur SOX hors SRY à être impliqué en pathologie humaine. Des mutations
du gène SOX9 sont à l’origine du syndrome de dysplasie campomélique (OMIM #114290), associé
dans 75% des cas à une réversion de sexe. La dysplasie campomélique est une maladie autosomique
dominante létale, associant de sévères malformations squelettiques comme les os longs cintrés, l’os
iliaque étroit, une fente palatine, une cage thoracique étroite, à l’absence de voies olfactives, des
malformations cardiaques et rénales, des poumons hypoplasiques. Les patients atteints de dysplasie
campomélique décèdent généralement de défauts respiratoires. Les mutations identifiées sont de tout
types et réparties sur tout le gène, il n’existe donc pas de corrélation génotype-phénotype. Pour une
revue sur SOX9, voir Harley et al. 2003. Plus récemment, deux études ont suggéré que des anomalies
chromosomiques altérant des séquences régulatrices de SOX9 pourraient être à l’origine d’une
dysplasie squelettique (OMIM #602196), qui serait alors une forme atténuée de dysplasie
campomélique. Cette dysplasie associe syndrome de Pierre Robin (hypoplasie mandibulaire, fente
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palatine, défauts de la mâchoire), pectus excavatum (déformation du thorax caractérisée par un
enfoncement de la partie inférieure du sternum) et anomalies des côtes et de la scapula (omoplate).
L’effet de position résultant de la cassure chromosomique au niveau de séquences régulatrices de
SOX9 affecterait uniquement son expression chondrocytaire, d’où le phénotype essentiellement
squelettique atténué (Hill-Harfe et al. 2005; Velagaleti et al. 2005).
- SOX10 est impliqué dans les syndromes de Waardenburg de type 4, Yemenite, et PCWH (peripheral
neuropathy, central leukodystrophy, Waardenburg syndrome and Hirschsprung disease). Il est
également associé à certains cas de vitiligo, et il a été identifié comme marqueur antigénique dans des
cas de mélanomes, où son expression s’avère apporter une valeur diagnostique. Ceci sera détaillé dans
le prochain chapitre.
- SOX3 est associé au retard mental lié à l’X avec déficit en hormone de croissance isolé (OMIM
#300123). Les deux mutations de SOX3 associées à ce syndrome affectent un domaine à poly-alanines
de la protéine, une mutation étant une duplication ajoutant 11 alanines à ce domaine, l’autre étant une
délétion en retirant 9. Le retard mental est léger, le déficit en hormone résulte en une taille réduite des
hommes, parfois des femmes, bien que la plupart des femmes porteuses de la mutation soient
asymptomatiques. Dans une famille des anomalies faciales ont également été constatées associées à la
mutation (Laumonnier et al. 2002).
- SOX2 est impliqué dans des cas d’anophtalmie (OMIM #206900), la forme la plus sévère de
malformation structurelle de l’œil. Des mutations faux-sens du gène SOX2 ont été identifiées chez des
patients présentant soit une anophtalmie bilatérale, soit une anophtalmie unilatérale et une
microphtalmie controlatérale (Fantes et al. 2003). Des anomalies extra-oculaires variables ont
également été constatées, incluant des anomalies du tractus génital mâle, une myopathie et une
diplégie spastique. La relation de ces anomalies à la mutation n’est pas clairement établie.
- SOX18 est muté dans des cas de syndrome HLT (OMIM #607823), associant hypotrichose (déficit
ou arrêt, localisé ou généralisé, du développement du système pileux), lymphœdème (œdème dû à une
obstruction des vaisseaux lymphatiques) et télangiectasie (dilatation pathologique et permanente de
certains petits vaisseaux de la peau et des muqueuses). Deux mutations faux-sens, affectant le domaine
HMG à l’état homozygote, et une mutation non-sens à l’état hétérozygote ont été identifiées (Irrthum
et al. 2003). Le phénotype est plus grave dans le cas de la mutation faux-sens, suggérant une
corrélation entre le type de mutation, le mode de transmission (récessif ou dominant) et le phénotype.
SOX18 est également exprimé dans plusieurs lignées cellulaires cancéreuses humaines,
essentiellement issues du tractus gastro-intestinal (Saitoh and Katoh 2002), mais la pertinence
physiologique de cette observation n’est pas établie.
- 45 -
- SOX13, dans un registre légèrement différent, est un autoantigène exprimé dans des cas de diabète
de type 1. Il correspond à l’autoantigène précédemment identifié ICA12 (islet cell antigen 12) et son
expression, associée à celle d’autres antigènes, est responsable de la destruction des cellules β des îlots
pancréatiques, engendrant le diabète (Kasimiotis et al. 2000).
- SOX8 a été impliqué dans le syndrome ATR-16 (OMIM #141750), associant une α-thalassémie à un
retard mental, et causé par une délétion sur le bras court du chromosome 16. Ce syndrome est un
syndrome « gènes contigus » et il a été suggéré que la délétion de SOX8, normalement fortement
exprimé dans le cerveau, contribuerait au retard mental associé au syndrome (Pfeifer et al. 2000).
- 46 -
IV. SOX10
1. Généralités
Le facteur de transcription SOX10 est, avec SOX8 et SOX9, le troisième membre du groupe E des
facteurs SOX. Identifié en 1998, la mise en évidence de son implication dans le syndrome de
Waardenburg de type IV et l’étude de son expression ont rapidement suggéré son importance dans
divers processus du développement embryonnaire précoce.
a. Clonage et structure
Le nom de SOX10 avait initialement été attribué à l’une des boîtes HMG identifiées lors d’un criblage
systématique par RT-PCR cherchant à identifier de nouveaux gènes SOX exprimés au cours du
développement embryonnaire chez la souris (Wright et al. 1993). Quelques années plus tard, la
séquence complète du gène Sox10 a été clonée presque simultanément chez la souris (Herbarth et al.
1998; Southard-Smith et al. 1998), le rat (Kuhlbrodt et al. 1998b) et l’homme (Pingault et al. 1998).
Des orthologues ont ensuite été identifiés chez le poulet (Cheng et al. 2000), le poisson zèbre (Dutton
et al. 2001b) et le xénope (Aoki et al. 2003; Honore et al. 2003). Chez la drosophile, le gène Sox100B
a un profil d’expression qui résume la somme des profils des membres du groupe E chez les vertébrés,
c’est donc l’orthologue à la fois de SOX8, SOX9 et SOX10 (Hui Yong Loh and Russell 2000).
Le gène Sox10 est constitué de 5 exons chez le rat et la souris, 4 chez l’homme, le premier exon
n’ayant pas été retrouvé dans la séquence humaine (Pingault et al. 1998; Pusch et al. 1998; SouthardSmith et al. 1999). Le codon initiateur de la traduction se situe dans l’exon 3, le codon stop dans
l’exon 5. La protéine produite comporte 466 acides aminés chez l’homme. La structure génomique et
protéique de SOX10 est détaillée dans la figure 8.
A
A
Exon 3
Exon 2 512 pb
5’
kb
?
Exon 5
1730 pb
Exon 4
269 pb
5,2 kb
0,5
Exon 1 ?
3,7 kb
3’
Séquence codante
B
B
NH2
COOH
HMG
1
60
102
182
TA
232
308
376
466
Domaine de dimérisation
Domaine conservé au sein du groupe E
Figure 8 : Structure génomique et protéique de SOX10.
A : Structure du gène SOX10 humain. Les exons sont représentés par des rectangles, les introns par des lignes,
les distances génomiques sont indiquées en paires de bases et kilo-paires de bases. La structure 5’ du gène
n’étant pas déterminée chez l’homme, la taille de l’exon 2 est inconnue et l’existence de l’exon 1 est seulement
supposée à partir des données de la souris.
B : Structure de la protéine SOX10 humaine. Les différents domaines décrits de la protéine sont indiqués. Les
positions des acides aminés frontières pour chacun de ces domaines sont indiquées sous la protéine.
TA = domaine de transactivation
- 47 -
b. Expression
L’étude de l’expression de Sox10 dans les différents organismes cités a montré une grande
conservation de son profil d’expression chez les vertébrés.
Sox10 est exprimé dans les cellules de crête neurale peu après leur émergence, ce qui correspond à 8,5
jours de développement embryonnaire chez la souris. Chez le poulet, son expression apparaît juste
après celle de Slug, le marqueur de crête neurale (Cheng et al. 2000). L’expression de Sox10 est
maintenue lors de la migration des cellules de crête neurale, et pour cette raison son expression est
souvent utilisée pour distinguer ces cellules au cours de l’embryogenèse. L’expression de Sox10 est
ensuite restreinte à certains dérivés de la crête neurale qui contribuent au système nerveux
périphérique, et notamment les ganglions crâniens, les ganglions spinaux, et les ganglions
sympathiques et entériques. Sox10 est également exprimé plus tardivement dans le système nerveux
central, à partir de 13,5 jours de développement chez la souris et jusque chez l’adulte. Dans tous les
cas, l’expression de Sox10 est corrélée à la présence de cellules myélinisantes. Par ailleurs Sox10 est
exprimé dans d’autres tissus qui ne dérivent pas de la crête neurale, comme la vésicule otique puis
l’oreille interne, plus précisément au niveau des canaux semi-circulaires et des cellules supportrices de
l’organe de Corti, et on le retrouve aussi dans le pancréas et le testicule. Son expression au niveau des
mélanocytes a plutôt été déduite de l’étude des modèles animaux (cf. paragraphe suivant) que de son
observation directe, ce profil d’expression étant délicat à distinguer au niveau embryonnaire par les
techniques d’hybridation in situ.
Expression chez la souris : Herbarth et al. 1998; Pusch et al. 1998; Southard-Smith et al. 1998;
Southard-Smith et al. 1999; Watanabe et al. 2000.
Chez le rat : Kuhlbrodt et al. 1998b.
Chez l’homme : Bondurand et al. 1998; Pusch et al. 1998; Southard-Smith et al. 1999; Touraine et al.
2000.
c. Modèles animaux
Différents modèles animaux, de diverses espèces, naturels ou induits, permettent d’étudier
l’expression et la fonction de Sox10 in vivo. La souris étant la plus belle conquête du chercheur, les
plus étudiés sont murins.
o Mutants spontanés
La souris Dom
Le modèle naturel le plus connu et le plus étudié de mutation de Sox10 est la souris Dom, pour
dominant megacolon (Lane and Liu 1984). La mutation Dom est survenue spontanément dans une
lignée hybride (C57BL/6JLe X C3HeB/FeJLe-a/a, B6C3) au Jackson Laboratory (Bar Harbor, Maine,
USA). Des lignées porteuses de la mutation ont ensuite été dérivées dans chacune de ces deux
- 48 -
souches, C57BL/6 et C3HeB/Fe. La transmission de la mutation est autosomique semi-dominante. Les
individus homozygotes meurent dans la période pré- ou périnatale, selon le contexte génétique. La
cause de leur mort reste encore inexpliquée. Les animaux porteurs de la mutation à l’état hétérozygote
présentent une aganglionose intestinale d’étendue variable se traduisant par un mégacôlon, ainsi que
des anomalies de pigmentation se manifestant par une tache blanche ventrale de taille variable, et des
pattes blanches (figure 9). Ces phénotypes présentent cependant une pénétrance incomplète et une
expressivité variable selon le fond génétique.
+/+
Dom /+
A
A
A
Mégacôlon
B
B
B
Figure 9 : Anomalies phénotypiques caractéristiques
de la souris dominant megacolon.
A : Intestins d’une souris sauvage (+/+) et hétérozygote
Dom (Dom/+). Le mégacôlon est provoqué par
l’accumulation de selles dans le côlon.
B : Anomalies de pigmentation d’une souris
hétérozygote Dom.
Une stratégie de clonage positionnel a permis d’identifier le gène Sox10 comme responsable du
phénotype Dom (Herbarth et al. 1998; Southard-Smith et al. 1998). La mutation est une insertion
d’une guanine après le nucléotide 579 de la séquence codante de Sox10, générant un décalage du cadre
de lecture juste après le domaine HMG. La protéine produite possède donc les 193 premiers acides
aminés correspondant à ceux de la protéine sauvage, incluant le domaine HMG, puis le décalage
engendre l’ajout de 99 acides aminés sans relation avec la séquence sauvage, et la terminaison
prématurée de la protéine. Une mutation ponctuelle provoquant le remplacement d’un glutamate en
valine en position 11 de la protéine a également été décrite, mais celle-ci ne semble pas avoir d’effet
fonctionnel (Herbarth et al. 1998). En revanche, le décalage du cadre de lecture engendre la perte de la
partie carboxy-terminale de la protéine, contenant le domaine de transactivation, et son remplacement
par une séquence protéique plus courte de fonction indéterminée. Cette protéine est effectivement
produite in vivo, a conservé sa capacité à lier l’ADN, au moins in vitro, mais a perdu sa capacité de
transactivation et sa capacité à agir en synergie avec certains de ses cofacteurs in vitro (Herbarth et al.
- 49 -
1998; Bondurand et al. 2000). Le mécanisme induisant le phénotype Dom peut être de trois types : il
peut s’agir d’un mécanisme d’haploinsuffisance, la disparition de la moitié ou de la totalité de
l’expression normale de Sox10 générant un effet de dose qui ne permettrait plus à la protéine d’assurer
sa fonction normale et déréglerait les cascades de régulation l’impliquant ; il peut également s’agir
d’un gain de fonction, le nouveau domaine ajouté en carboxy-terminal ayant une fonction donnant de
nouvelles capacités à la protéine, et induisant la dérégulation de certains gènes au niveau des sites
d’expression de Sox10 ; enfin la protéine produite peut avoir un effet dominant négatif, se fixant aux
promoteurs des cibles de Sox10 grâce à sa capacité à lier l’ADN, mais n’ayant plus sa capacité de
transactivation, elle entre en compétition avec la protéine sauvage dans le cas d’un hétérozygote, et/ou
avec d’autres protéines partenaires, et les empêche d’exercer leur fonction régulatrice au niveau des
cibles de régulation.
Le poisson zèbre colourless
Le mutant colourless (cls) du poisson zèbre a été identifié lors d’un crible de nouveaux mutants par
mutagenèse non dirigée. Son nom est dû à l’absence de coloration visible de l’animal mutant, par
opposition à l’animal sauvage normalement caractérisé par ses rayures. Il existe plusieurs allèles de ce
mutant, ayant tous en commun des défauts de plusieurs dérivés de la crête neurale, incluant les
neurones entériques, les cellules gliales, et les trois types de cellules pigmentaires normalement
présentes chez le poisson zèbre : les xanthophores, les iridophores et les mélanophores (Kelsh and
Eisen 2000). Ce phénotype étant très proche de celui de la souris Dom, Sox10 apparaissait comme un
très bon candidat pour expliquer les défauts du poisson cls. De fait, plusieurs mutations du gène sox10
du poisson zèbre ont été identifiées chez différents mutants cls (Dutton et al. 2001b). Quatre allèles cls
ont été étudiés, deux d’entre eux présentent une mutation faux-sens dans le domaine HMG, un autre
une mutation non-sens qui tronque la protéine juste avant le domaine de transactivation, et le dernier
porte une insertion de type transposon qui interrompt la séquence codante juste avant le domaine
HMG. Le phénotype cls peut être sauvé par l’injection de l’ARN messager codant sox10 sauvage,
indiquant que ce phénotype est bien dû à un défaut de la fonction de sox10. Le profil d’expression de
sox10 étudié chez le poisson zèbre à cette occasion est extrêmement proche de celui décrit chez
l’homme, la souris et le rat, démontrant la grande conservation de ce profil au cours de l’évolution.
o Mutants induits
La souris « knock-in » Sox10LacZ
Chez cette souris, la séquence codante de Sox10 a été intégralement remplacée par la séquence codante
du gène de la β-galactosidase, LacZ. En conséquence, les individus hétérozygotes Sox10LacZ/+ ne
possèdent plus qu’une copie fonctionnelle de Sox10, et expriment la β-galactosidase selon le profil de
Sox10 (Britsch et al. 2001). A la différence de la mutation Dom, qui engendre la production d’une
- 50 -
protéine mutante, la mutation induite dans le cas de la souris Sox10LacZ correspond à un allèle mutant
nul. Les animaux hétérozygotes pour cette mutation présentent néanmoins les mêmes défauts que les
animaux hétérozygotes Dom, et les animaux homozygotes présentent la même létalité embryonnaire et
les mêmes anomalies que les homozygotes Dom. Aucune différence majeure n’a été constatée entre les
deux mutants. L’expression de la β-galactosidase selon le profil de Sox10 fournit un outil
extrêmement simple et utile pour affiner l’étude du profil d’expression de Sox10. Ceci a ainsi
confirmé son expression au niveau des cellules de crête neurale émergeant du tube neural puis migrant
vers et dans l’intestin, dans les ganglions sensoriels de la tête et du tronc, dans les chaînes de ganglions
sympathiques et dans les précurseurs de cellules myélinisantes, cellules de Schwann et
oligodendrocytes. Le marquage de l’expression β-galactosidase a également permis de visualiser
l’expression de Sox10 au niveau des mélanoblastes, jusque là difficile à mettre en évidence.
Les mutants inductibles
De façon relativement surprenante, aucun modèle murin conditionnel, qui permettrait d’induire la
délétion de Sox10 à un stade choisi, et ainsi de contourner la létalité embryonnaire des homozygotes,
n’a été décrit jusqu’à présent. En revanche, cette approche a été utilisée chez le xénope et le poisson
zèbre, grâce à la technique de morpholino applicable spécifiquement à ces organismes. Cette
technique repose sur l’injection d’ARN messagers antisens dans l’embryon, de façon à réduire voire
éteindre localement l’expression d’un gène cible à partir d’un stade donné, en empêchant sa
traduction. Si l’injection est réalisée au moment où l’embryon est au stade à une cellule, l’effet
morpholino concernera alors tout l’embryon dans la suite du développement. Si l’injection est réalisée
dans une seule cellule alors que l’embryon en comporte plusieurs, alors l’effet morpholino ne se fera
sentir que dans les cellules descendant de cette cellule injectée. Cette dernière possibilité présente
l’avantage de donner un contrôle positif interne permettant de mesurer l’effet morpholino, les cellules
non injectées se comportant toujours comme des cellules sauvages.
Cette technique, appliquée à sox10 chez le poisson zèbre, a permis de reproduire le phénotype du
mutant colourless (Dutton et al. 2001a), validant d’une part le fait que sox10 est bien le gène affecté
chez ce mutant, et montrant d’autre part la robustesse de cette technique. Le principal intérêt de cette
phénocopie par rapport au mutant naturel est la possibilité de doser l’effet morpholino, générant ainsi
divers mutants hypomorphes qui permettront d’étudier la fonction de sox10 de façon à la fois
qualitative et quantitative. Il a par ailleurs été constaté que différentes doses de morpholino
reproduisent les phénotypes correspondant à différents allèles cls, ce qui permet également
d’interpréter la relation unissant le type de mutation au phénotype.
La technique morpholino a également été employée chez le xénope afin d’étudier la fonction de Sox10
chez cet organisme via l’analyse de mutants déficients pour Sox10 (Honore et al. 2003). Ceci permet
d’identifier les structures embryonnaires et les cascades de régulation affectées par l’absence de
l’expression de Sox10. L’approche inverse, qui constitue à surexprimer Sox10 par injection de son
- 51 -
ARN messager dans l’embryon (Aoki et al. 2003), apporte d’autres informations et permet de
déterminer quelles structures et quelles cascades moléculaires peuvent être induites par l’expression
ectopique ou à un niveau anormalement haut de Sox10. Un autre type d’étude consiste à nouveau à
surexprimer Sox10, mais cette fois de façon inductible : Sox10 est fusionné au domaine de liaison aux
hormones du récepteur aux glucocorticoïdes ; la protéine de fusion ainsi générée peut alors être activée
par l’addition de dexaméthasone, un corticostéroïde artificiel, à des temps définis au cours de
l’embryogenèse (Aoki et al. 2003). Ce procédé permet de déterminer la fonction et les propriétés de
Sox10 à différents stades du développement en examinant les conséquences de sa surexpression dans
un embryon qui jusque là présentait des conditions normales de développement. Ceci amène en
particulier à déterminer à quels stades Sox10 peut modifier le devenir de certaines cellules et à quel
moment il ne le peut plus.
Chez le poulet, la technique d’électroporation in ovo permet d’induire et d’étudier la surexpression de
Sox10 de façon localisée et à un stade précis (McKeown et al. 2005).
L’analyse de ces différentes études (morpholino, surexpression, complète ou induite) définit les
propriétés de Sox10 dans différents cas de figure et apporte des informations sur sa fonction au cours
du développement embryonnaire, en particulier sur les types cellulaires dans lesquels il est nécessaire
et/ou suffisant pour le développement embryonnaire normal.
Le mutant Sox10-rtTA
Ce mutant constitue une catégorie à part parmi les mutants de Sox10. Chez ce mutant, la séquence
codante de Sox10 a été intégralement remplacée, comme dans le cas de la souris Sox10LacZ, mais cette
fois la séquence qui la remplace code le facteur rtTA (reverse tetracycline-controlled transactivator)
(Ludwig et al. 2004b). Ce facteur, en s’associant à la tétracycline ou à son équivalent la doxycycline,
induit l’activation de gènes portant au niveau de leur séquence régulatrice un élément de réponse à la
tétracycline, la séquence TRE (tetracycline-response element). L’apport de doxycycline induira alors
l’expression des gènes contrôlés par cet élément exclusivement au niveau des sites d’expression de
rtTA. Le facteur rtTA étant exprimé selon le profil d’expression de Sox10 chez ce modèle, il permet
donc l’expression ciblée de gènes dans les lignages d’expression de Sox10, et ce dans un fond mutant
pour Sox10, puisque cette souris présente le même phénotype que la souris Sox10LacZ. Ce modèle
permettra par exemple de déterminer la hiérarchie des facteurs impliqués dans les mêmes cascades de
développement que Sox10, en testant si l’expression conditionnelle de facteurs au niveau des sites
d’expression de Sox10 peut sauver le phénotype mutant, totalement ou partiellement.
- 52 -
2. Fonction au cours du développement
a. Développement de la crête neurale
Dès l’identification de Sox10, l’étude de son expression et de sa fonction chez l’homme et le mutant
Dom a mis en évidence son rôle essentiel au cours du développement de la crête neurale. Les études
menées par la suite chez les différents modèles animaux ont confirmé cette observation et ont permis
de définir plus précisément la fonction de Sox10 dans l’induction, la migration, et la différenciation
des cellules de la crête neurale.
Sox10 ne semble pas indispensable à l’induction de la crête neurale, puisque la formation de cette
structure paraît normale dans les embryons mutants Sox10-/-, et des structures dérivées de la crête
neurale sont toujours présentes chez ces mutants (Herbarth et al. 1998; Southard-Smith et al. 1998;
Britsch et al. 2001). Cependant l’inhibition de la fonction de Sox10 à un stade très précoce par la
méthode morpholino chez le xénope perturbe fortement la formation de la crête neurale, indiquant un
rôle de Sox10 dans ce processus chez cette espèce (Honore et al. 2003).
Sox10 est exprimé dans les cellules de crête neurale en cours de migration. Chez le poulet, c’est même
le seul gène SOX à être exprimé dans ces cellules. L’expression ectopique de Sox10, et également des
autres facteurs SOX du groupe E, peut induire les cellules du tube neural à réaliser une transition
épithélio-mésenchymateuse et quitter le tube neural, et ce quelle que soit leur position dorso-ventrale
par rapport au tube neural. Sox10 est donc capable de convertir les cellules du tube neural en cellules
de type crête neurale et d’induire leur migration. Bien que légèrement différent, le chemin suivi par les
cellules ainsi induites est très proche de celui emprunté par les cellules de crête neurale au cours du
développement embryonnaire normal, et respectent en particulier la segmentation au niveau des
somites, et la zone d’exclusion au niveau de la notocorde (McKeown et al. 2005). Toutes ces données
indiquent que Sox10 est impliqué dans la migration des cellules de crête neurale. Cependant, la
migration de ces cellules ne semble pas être affectées chez les mutants murins Sox10-/-, au moins aux
stades les plus précoces (Britsch et al. 2001). Sox10 n’est donc pas indispensable à la migration des
cellules de crête neurale chez la souris. En revanche chez le poisson zèbre colourless la migration des
cellules de crête neurale est affectée (Dutton et al. 2001b), suggérant que la fonction de Sox10 à ce
niveau est variable selon les espèces.
Malgré son expression dès l’émergence de la crête neurale, la fonction de Sox10 se révèle
prépondérante après la migration des cellules de crête neurale. En effet, bien que des cellules
pluripotentes se soient formées et aient migré en l’absence de Sox10, ces cellules entrent en apoptose
avant d’avoir atteint leur stade de différenciation finale. Plusieurs études ont ainsi révélé chez des
mutants Sox10 l’apoptose de cellules au niveau des structures dérivées de la crête neurale exprimant
normalement Sox10, et ce dans différentes espèces (Southard-Smith et al. 1998; Kapur 1999; Dutton
- 53 -
et al. 2001b; Paratore et al. 2001; Sonnenberg-Riethmacher et al. 2001; Honore et al. 2003). Ceci
suggère un rôle de Sox10 dans la survie de ces cellules, supporté par l’observation que Sox10 est
également impliqué dans la prolifération des cellules des bourrelets neuraux chez le xénope (Honore et
al. 2003) et des ganglions de la racine dorsale chez la souris (Sonnenberg-Riethmacher et al. 2001).
Cette fonction de Sox10 a été étudiée in vitro, grâce à un système de culture de cellules souches de
crête neurale. Ces cellules se comportent in vitro comme des progéniteurs neuraux du SNP capables de
s’auto-renouveler, et peuvent être induites à se différencier en neurones autonomes, cellules gliales, ou
cellules de muscle lisse selon les conditions de culture (Kim et al. 2003). Il a été démontré dans ces
cellules que la surexpression de Sox10 bloque l’arrêt de prolifération induit par le TGFβ, confirmant
un rôle de Sox10 dans le maintien des capacités prolifératives des cellules dérivées de la crête neurale.
L’apoptose massive des cellules de crête neurale ayant perdu l’expression de Sox10 chez les mutants
Sox10-/- permet donc d’expliquer les anomalies morphologiques de plusieurs structures du SNP
constatées chez ces mutants, en particulier au niveau des ganglions sensoriels et sympathiques
(Herbarth et al. 1998; Southard-Smith et al. 1998; Kapur 1999; Sonnenberg-Riethmacher et al. 2001).
Cependant, certaines cellules survivent dans ces structures, mais ne se différencient pas. Ceci indique
que Sox10 joue également un rôle dans la différenciation des dérivés de la crête neurale.
b. Différenciation des dérivés de la crête neurale
o Les cellules gliales
La fonction de Sox10 est particulièrement bien décrite dans la différenciation gliale du système
nerveux central et périphérique. Au moment de la différenciation des cellules de crête neurale dans le
système nerveux, l’expression de Sox10 est éteinte dans les neurones, mais maintenue dans les cellules
gliales.
Le système nerveux périphérique
Dans le système nerveux périphérique des mutants Sox10-/-, aucune cellule gliale n’est détectée ni dans
les ganglions sensoriels de la racine dorsale, ni le long des nerfs spinaux, ni dans les ganglions
sympathiques cervicaux. L’analyse de l’expression de la β-galactosidase chez les souris Sox10LacZ/LacZ
indique que des cellules exprimant la β-galactosidase sont bien présentes dans ces structures dans les
premiers stades de développement, toutefois elles n’expriment aucun marqueur de différenciation
gliale, pas même les plus précoces comme B-FABP (brain-specific fatty acid binding protein),
marqueur des progéniteurs gliaux du SNP. Ces cellules n’expriment par ailleurs aucun marqueur
neuronal, indiquant que malgré leur incapacité à se différencier en cellules gliales elles n’ont pas
dérivé vers un devenir neuronal. Elles semblent plutôt être des cellules de crête neurale restées à l’état
indifférencié (Britsch et al. 2001; Sonnenberg-Riethmacher et al. 2001). Cette observation a été
confirmé in vitro : des cellules de crête neurale issues d’embryons Sox10-/- sont incapables de se
- 54 -
différencier en cellules gliales lorsqu’elles sont cultivées dans un milieu favorisant la différenciation
gliale. Cependant elles n’adoptent pas non plus un destin neuronal, mais évoluent vers un phénotype
non neural de type muscle lisse (Paratore et al. 2001). Ces cellules vont par la suite subir une apoptose
massive dans les ganglions périphériques des mutants Sox10-/-.
Au niveau neuronal, des neurones sensoriels et sympathiques et des motoneurones se différencient
dans les ganglions du SNP, mais ils dégénèrent ensuite rapidement (Britsch et al. 2001; SonnenbergRiethmacher et al. 2001). Toutefois ceci semble être secondaire à l’absence de cellules gliales, car la
survie des neurones est dépendante de leurs contacts avec les cellules gliales environnantes.
Le système nerveux central
Dans le système nerveux central, l’expression de Sox10 est limitée aux oligodendrocytes et à leurs
progéniteurs. Cependant, contrairement à ce qui est observé dans le SNP, l’apparence, la distribution,
ou le nombre de progéniteurs des oligodendrocytes ne sont nullement affectés dans le SNC des
embryons Sox10-/-, à aucun stade considéré. En revanche, aucun marqueur tardif de différenciation
gliale n’a pu être détecté jusque après la naissance des mutants, et ce en l’absence de phénomène
remarquable d’apoptose des cellules du SNC (Stolt et al. 2002). Toutefois, le pic de différenciation
terminale des oligodendrocytes se produisant plusieurs jours après la naissance, celui-ci n’a pas pu être
étudié chez ces mutants du fait de leur létalité périnatale. Des expériences de transplantation ont donc
été réalisées pour contourner ce problème : des cellules souches issues de la moelle épinière
d’embryons Sox10LacZ/LacZ ont été réimplantées dans la rétine de souris sauvages. Ce procédé permet de
tester la capacité des cellules injectées à produire un feuillet de myéline au contact des axones
intrarétinaux. Les cellules issues de mutants Sox10 se sont avérées incapables de myéliniser les fibres
nerveuses de l’hôte. De la même façon, ces cellules réinjectées dans le cerveau de souris présentant un
défaut de myélinisation du SNC n’ont pas exprimé de marqueur de différenciation gliale terminale,
malgré le contexte permissif à cette différenciation, indiquant que ce défaut de différenciation
terminale est autonome cellulaire. Les cellules injectées se développent pour donner des progéniteurs
d’oligodendrocytes, mais ne parviennent pas à poursuivre leur différenciation et à exprimer des gènes
de myélinisation, et subsistent à l’état indifférencié longtemps après l’injection.
L’absence d’expression de Sox10 semble donc avoir des conséquences moins graves dans le
développement des cellules gliales du SNC que dans le SNP. Les cellules migrent et se développent
normalement, ne subissent pas d’apoptose, mais ne parviennent pas à achever leur différenciation
finale en cellules myélinisantes. La co-expression d’autres protéines SOX comme Sox4 ou Sox11 dans
le SNC et leur redondance possible avec Sox10 ont été proposées pour expliquer cette différence dans
la fonction de Sox10 (Mollaaghababa and Pavan 2003).
- 55 -
o Le système nerveux entérique
L’aganglionose observée chez les mutants Sox10 murins affecte la partie distale du côlon sur une
longueur variable chez les hétérozygotes, mais concerne la totalité de l’intestin chez les homozygotes
(Herbarth et al. 1998; Kapur 1999). Ceci souligne le rôle essentiel joué par Sox10 au niveau du SNE.
Toutefois le mécanisme impliqué dans ce cas semble être différent de celui identifié dans les ganglions
sensoriels et sympathiques car les ganglions entériques ne se forment pas chez les mutants Sox10, et
aucun neurone ou progéniteur entérique n’est détecté le long de l’intestin dans la partie aganglionnaire
(Kapur 1999; Paratore et al. 2002). Dans les embryons sauvages, les cellules de crête neurale vagale,
la source majeure de cellules du SNE, migrent dans la partie la plus proximale de l’intestin au niveau
de l’œsophage, puis colonisent progressivement l’intestin sur toute sa longueur, jusqu’à la partie la
plus distale du côlon. Sox10 n’étant pas exprimé par les cellules engagées vers un devenir neuronal,
l’absence de précurseurs neuronaux dans le SNE chez les mutants est probablement due à un défaut de
survie, prolifération et/ou migration des progéniteurs entériques dérivés de la crête neurale. L’apoptose
constatée chez les mutants homozygotes permet d’expliquer l’absence de colonisation de l’intestin par
les cellules de crête neurale (Kapur 1999). En revanche chez les hétérozygotes, les cellules du SNE ne
semblent pas être touchées par cette mort cellulaire (Paratore et al. 2002). L’étude plus approfondie du
devenir des cellules exprimant Sox10 dans le SNE chez la souris et le poisson zèbre a montré que,
chez les animaux hétérozygotes, les progéniteurs entériques commencent leur différenciation
prématurément. Les cellules engagées dans la voie de différenciation neuronale ayant des capacités de
prolifération et de migration limitées, le nombre total de progéniteurs disponibles est réduit, et par
conséquent la « réserve » de progéniteurs est épuisée avant que ceux-ci aient atteint la partie la plus
distale du côlon, d’où l’apparition d’une zone aganglionnaire. La fonction de Sox10 au niveau du SNE
consiste donc à maintenir les capacités prolifératives des progéniteurs et à retarder leur différenciation
neuronale (Paratore et al. 2002; Elworthy et al. 2005).
o Les mélanocytes
L’implication de Sox10 dans le développement des mélanocytes peut être déduite de l’observation des
défauts de coloration des phanères chez la souris Dom et le poisson zèbre cls. Au niveau
embryologique, le développement des mélanocytes est sévèrement réduit chez les mutants Sox10,
suite à une perte précoce des mélanoblastes (Britsch et al. 2001). Aucun marqueur des mélanoblastes
ne peut être détecté chez les embryons Sox10-/-, et les cellules de crête neurale issues de ces embryons
ne sont pas capables de se différencier en mélanocytes in vitro (Britsch et al. 2001; Potterf et al.
2001). Des études réalisées chez le xénope suggèrent que sox10 peut induire la spécification de
cellules de crête neurale en mélanocytes, mais seulement à un stade donné du développement (Aoki et
al. 2003). Ce résultat est en accord avec le fait que Sox10 n’est exprimé que transitoirement dans les
mélanoblastes, son expression est éteinte lorsque ceux-ci s’engagent dans la voie de différenciation
- 56 -
mélanocytaire. La fonction de Sox10 dans le lignage mélanocytaire semble donc consister
essentiellement à la mise en place du programme de différenciation des mélanoblastes en mélanocytes.
Il ne semble toutefois pas requis pour le maintien de ce processus de différenciation.
c. Sox10, facteur de maintien des cellules souches de la crête neurale
Récemment, différentes équipes s’intéressant à la fonction de Sox10 dans la crête neurale ont suggéré,
en s’appuyant sur des études essentiellement réalisées in vitro, que les cellules souches de la crête
neurale requièrent l’expression de Sox10 pour maintenir leur fonction au cours du développement.
Ce rôle précoce de Sox10 était déjà évoqué par le fait que ce facteur est impliqué dans la prolifération
de certains progéniteurs dérivés de la crête neurale, et que l’absence de son expression conduit à
l’apoptose massive de ces progéniteurs (cf. paragraphe précédent). Des études in vitro de cellules
souches de crête neurale ont alors montré que Sox10 est impliqué dans la survie d’une population de
cellules pluripotentes et non différenciées, mais également dans la capacité de ces cellules à se
différencier en cellules gliales. Toutefois il ressort de ces études que ces deux fonctions sont
différenciables et dépendent du dosage de l’expression de Sox10 : chez les mutants Sox10
homozygotes, la survie et la différenciation de ces cellules souches sont pareillement affectées ; chez
les hétérozygotes en revanche, seule leur différenciation est altérée, leur capacité de survie étant
maintenue (Paratore et al. 2001). Des études de surexpression de Sox10 dans ces mêmes cellules ont
alors apporté de nouvelles informations sur le fonctionnement de Sox10. Ces études confirment que
l’expression de Sox10 préserve la capacité des cellules souches de crête neurale à se différencier en
cellules gliales. Ceci est en accord avec le fait que l’expression de Sox10 est maintenue dans les
progéniteurs des cellules gliales du SNP, mais est éteinte lorsqu’un processus de différenciation non
gliale est enclenché. De façon plus surprenante en revanche, les auteurs démontrent également que
l’expression forcée de Sox10 maintient la capacité des cellules à se différencier par la suite en
neurones. Néanmoins l’expression de Sox10 doit être éteinte pour que la différenciation neuronale
puisse se produire (Kim et al. 2003). Sox10 préserve donc la pluripotence des cellules souches de crête
neurale. Des études de surexpression de Sox10 réalisées in vivo par électroporation d’œufs de poulet
supportent ces conclusions en montrant que les cellules surexprimant Sox10 restent dans un état
indifférencié dans les embryons transfectés (McKeown et al. 2005). Par ailleurs la surexpression de
Sox10 dans les cellules souches de crête neurale permet d’empêcher l’arrêt de croissance induit par le
TGF-β in vitro, indiquant un effet prolifératif important de ce facteur dans ce système (Kim et al.
2003). Sox10 apparaît donc comme un facteur de maintien des cellules souches, capable de préserver à
la fois leurs capacités prolifératives et leur pluripotence.
De ces études ressort un modèle dans lequel Sox10 exerce plusieurs fonctions au cours du
développement embryonnaire. Sox10 est exprimé au moment de l’émergence de la crête neurale. Au
cours de leur migration, son expression permet le maintien de leur qualité de cellules souches, incluant
- 57 -
leur capacité d’auto-renouvellement et leur pluripotence. La fonction de Sox10 peut toutefois être
modulée à la fois par des facteurs de croissance et par le contact avec d’autres cellules, comme cela a
été constaté in vitro (Paratore et al. 2001; Kim et al. 2003). L’environnement rencontré par les cellules
de crête neurale au cours de leur migration et au moment de leur arrivée sur leur site de différenciation
va ainsi modifier l’expression et/ou la fonction de Sox10 dans ces cellules : il sera alors éteint dans les
cellules à devenir neuronal, et participera à la différenciation terminale des cellules gliales.
Lorsque la fonction de Sox10 est altérée, les cellules de crête neurale perdent leurs propriétés de
cellules souches trop rapidement, migrent moins loin, et vont commencer à se différencier trop
précocement. Les cellules différenciées ainsi générées se retrouveront alors dans un environnement qui
ne leur correspond pas, et entreront par conséquent en apoptose. Les cellules qui auront malgré tout
survécu ne pourront toutefois pas se différencier correctement et resteront à l’état indifférencié.
3. Dysfonctionnement dans les malformations congénitales
Du fait de son rôle dans le développement des cellules de la crête neurale et dans leur différenciation,
des défauts de la fonction de Sox10 engendrent des anomalies de ces cellules et se manifestent chez
l’homme comme chez l’animal par différentes neurocristopathies.
a. Le syndrome de Shah-Waardenburg
o Définition
Le syndrome de Shah-Waardenburg (OMIM #277580), également nommé syndrome de
Waardenburg-Hirschsprung ou syndrome de Waardenburg de type IV, associe les signes cliniques du
syndrome de Waardenburg (OMIM #193500) et de la maladie de Hirschsprung (OMIM #142623).
Le syndrome de Waardenburg est une pathologie autosomique dominante caractérisée d’une part par
des anomalies de pigmentation affectant les cheveux et les sourcils (mèche blanche, blanchiment
prématuré), les iris (hétérochromie irienne complète ou partielle, hypoisochromie) et la peau (taches
non pigmentées), et d’autre part par une surdité neurosensorielle congénitale non progressive. Ces
deux anomalies sont la conséquence d’un défaut de développement des mélanocytes dérivés de la crête
neurale. A ces phénotypes « de base » du syndrome de Waardenburg, peuvent s’ajouter d’autres
anomalies, et en fonction de l’association de caractéristiques cliniques supplémentaires on distingue
quatre types de syndrome de Waardenburg :
- Le syndrome de Waardenburg de type I (WS1) présente une dystopie des canthus, c’est-àdire un éloignement des canthus (région anatomique de l’œil où se fait la fusion du bord de la paupière
inférieure avec celui de la paupière supérieure) internes par rapport à la ligne médiane du visage.
- Le syndrome de Waardenburg de type II (WS2) ne présente pas d’anomalies supplémentaires
par rapport aux caractéristiques cliniques communes aux quatre types de WS.
- 58 -
- Le syndrome de Waardenburg de type III (WS3), ou syndrome de Klein-Waardenburg, est
un variant du WS1 caractérisé par des anomalies musculo-squelettiques des membres.
- Le syndrome de Waardenburg de type IV (WS4) est associé à la maladie de Hirschsprung.
La prévalence du syndrome de Waardenburg est de 1/40000 naissances.
Pour une revue sur le syndrome de Waardenburg, voir Read 2000; Newton 2002.
La maladie de Hirschsprung, ou mégacôlon congénital, se traduit par une anomalie congénitale de la
mobilité recto-intestinale, engendrant une activité péristaltique insuffisante d’une partie du côlon et
une obstruction intestinale chronique. Histologiquement cette pathologie est caractérisée par l’absence
de cellules ganglionnaires dans le système nerveux entérique (SNE) au niveau des plexus de Meissner
(plexus sous-muqueux) et d’Auerbach (plexus myentériques). La partie aganglionnaire est de taille
variable, et l’on distingue les formes longue et courte de la maladie en fonction de la longueur du
segment aganglionnaire : la limite inférieure de l’atteinte est constante, au niveau du sphincter annal
interne, et la limite supérieure se situe au niveau rectal ou sigmoïdien dans les formes dites courtes
(80% des cas), ou au niveau colique et jusqu’au grêle dans les formes longues (20%). La prévalence de
cette maladie est de 1/5000 naissances, les garçons étant 4 fois plus atteints que les filles. Ce
déséquilibre du rapport entre les sexes n’est à l’heure actuelle toujours pas expliqué. La plupart des cas
sont sporadiques, mais il existe également des cas familiaux, 10% des patients ayant une histoire
familiale de la maladie, particulièrement dans les cas de formes longues. Il existe également des cas
syndromiques de la maladie, comme c’est le cas dans le syndrome de Shah-Waardenburg.
La maladie de Hirschsprung est traitée par chirurgie, l’intervention consistant à réséquer le segment
aganglionnaire selon un protocole opératoire très précis. Cependant ceci pose un problème dans les cas
de formes longues, la partie aganglionnaire étant trop importante.
Lors du développement embryonnaire les cellules de crête neurale vagale migrent dans l’intestin en
suivant un chemin cranio-caudal avant de se différencier en neurones entériques (cf. chapitre II-2c). La
maladie de Hirschsprung résulte d’une anomalie de multiplication, migration, survie ou différenciation
des neuroblastes entériques dérivés de la crête neurale.
Pour une revue sur la maladie de Hirschsprung, voir Amiel and Lyonnet 2001; Dasgupta and Langer
2004.
o Implication de SOX10
La souris Dom est, depuis son identification, un modèle murin du syndrome de Waardenburg de type
IV (Tachibana et al. 2003). La mise en évidence d’une mutation de Sox10 chez ce modèle a donc
naturellement suggéré que l’homologue humain pouvait également être muté chez des patients atteints
de WS4. Effectivement, de façon quasi-simultanée à la description de la mutation Dom, des mutations
du gène SOX10 humain ont été identifiées dans quatre cas de WS4 classique (Pingault et al. 1998).
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SOX10 était ainsi le troisième gène impliqué dans le WS4, après ceux codant l’endothéline 3 (EDN3)
et son récepteur, le récepteur B aux endothélines (EDNRB). De nombreuses autres mutations de
SOX10 ont par la suite été identifiées dans des cas de WS4. Dans tous les cas, la mutation est
retrouvée à l’état hétérozygote chez les individus affectés. La plupart des mutations de SOX10 sont
apparues de novo, peu de cas familiaux ont été décrits (Pingault et al. 1998; Southard-Smith et al.
1999; Touraine et al. 2000; Pingault et al. 2002). Dans ces cas familiaux, le mode de transmission est
dominant mais l’expressivité du phénotype est extrêmement variable car on observe différents
syndromes exprimés par les individus porteurs de la même mutation dans la même famille. Toutefois
la pénétrance semble être complète puisqu’il n’existe pas de cas de porteurs sains d’une mutation de
SOX10, à l’exception de cas probables de mosaïcisme (Southard-Smith et al. 1999; Touraine et al.
2000). Le mode de transmission autosomique dominant est notable par rapport au mode récessif
associé aux mutations de EDN3 et EDNRB dans les cas de WS4.
A l’heure actuelle, plus de 20 mutations de SOX10 ont été décrites. La grande majorité d’entre elles
représente des mutations non sens ou des décalages du cadre de lecture aboutissant à un codon stop
prématuré. Il est frappant de constater que toutes ces mutations sont tronquantes, seule une mutation
faux sens (S135T), affectant le domaine HMG, a été décrite et elle correspond à un phénotype
particulier qui sera décrit dans le prochain paragraphe. Une autre mutation non tronquante correspond
à l’insertion de deux acides aminés au niveau du domaine HMG à nouveau, et deux autres touchent le
codon stop, résultant en l’allongement de la protéine. Ceci pose la question du phénotype qui pourrait
être associé à des mutations faux sens situées ailleurs que dans le domaine HMG, si toutefois cela se
produit. Cette question a stimulé la recherche d’autres syndromes ou pathologies pouvant être
associées à des mutations de SOX10. Le gène SOX10 a par exemple été testé dans les cas de maladie
de Hirschsprung isolée, ou de syndrome de Waardenburg de type II, sans succès. La question reste
donc encore ouverte aujourd’hui.
L’expressivité variable constatée dans les quelques cas familiaux suggère l’importance du contexte
génétique dans lequel s’exprime la mutation et l’existence de gènes modificateurs déjà suggérés par
l’étude des modèles animaux.
b. Les variants phénotypiques
Bien que les premières mutations de SOX10 ont été mises en évidence dans des cas de WS4 classique,
et que d’autres mutations de ce type ont été identifiées par la suite, SOX10 a rapidement été impliqué
chez des patients présentant un phénotype ne cadrant pas totalement avec les caractéristiques cliniques
du WS4.
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o Le syndrome Yéménite
Ce syndrome (OMIM #601706) a été décrit pour la première fois en 1990 chez un frère et une sœur
yéménites présentant des défauts de pigmentation de la peau (taches hypo et hyperpigmentées sur le
tronc et les extrémités), et des cheveux (cheveux gris, cils et sourcils blancs), une surdité
neurosensorielle sévère, des affections des yeux (colobome, microcornée, anomalies de la chambre
antérieure) et des anomalies dentaires (Warburg et al. 1990). Un autre cas a ensuite été décrit chez une
enfant présentant une forme plus modérée du syndrome, sans les affections des yeux. Un syndrome de
Waardenburg avait d’abord été diagnostiqué, mais la présence d’anomalies dentaires et la
ressemblance des défauts pigmentaires avec ceux du syndrome Yéménite ont suscité le changement de
diagnostic (Hennekam and Gorlin 1996). Une mutation de SOX10 a été identifiée à l’état hétérozygote
chez la patiente présentant la forme modérée du syndrome. Cette mutation est de type faux-sens
(S135T) et se situe dans le domaine HMG (Bondurand et al. 1999). L’acide aminé modifié est
conservé chez tous les membres de la famille SOX et fait partie des sept résidus du domaine HMG
impliqués dans le contact direct avec la double hélice lors de la liaison à l’ADN. Une mutation de ce
même résidu dans le domaine HMG de SRY est associée à une réversion de sexe. L’effet délétère de
cette mutation sur la protéine SOX10 a été démontré par des études in vitro : la protéine mutée est bien
produite et adressée au noyau, mais elle a perdu sa capacité à lier l’ADN et par conséquent n’est plus
capable d’activer la transcription de façon autonome ou en synergie avec d’autres facteurs.
Cette mutation est la seule mutation faux-sens décrite pour SOX10. L’effet probablement moins
délétère de ce type de mutation par rapport à une mutation tronquante apporte un début d’explication
au fait qu’aucun phénotype intestinal n’a été observé chez la patiente porteuse de cette mutation.
Par ailleurs, le fait qu’aucune mutation n’a été retrouvée chez les patients atteints de la forme la plus
sévère du syndrome suggère qu’il s’agit là en fait de deux syndromes distincts, et que la forme
modérée peut être assimilée à un variant allélique du syndrome de Waardenburg.
o Les pseudo-obstructions intestinales chroniques
Au cours d’une étude de patients, notre équipe a identifié une mutation de SOX10 chez une patiente
présentant un phénotype atypique ne répondant pas aux critères du WS4. Son syndrome combine une
surdité, mais pas de défauts de pigmentation, des lésions nerveuses avec hypomyélinisation, et surtout
une pseudo-obstruction intestinale chronique (POIC) sévère au lieu d’une maladie de Hirschsprung
(Pingault et al. 2000). La POIC est définie par des épisodes répétés ou des symptômes continus
d’obstruction intestinale en l’absence d’occlusion mécanique. Ce syndrome se distingue de la maladie
de Hirschsprung par la persistance de cellules ganglionnaires et de plexus nerveux au niveau du SNE.
Elle peut être primaire (congénitale ou dégénérative) ou secondaire à une maladie extragastrointestinale.
- 61 -
Afin d’établir la relation entre le WS et les POIC, nous avons étendu notre recherche de mutations aux
cas de WS présentant une POIC au lieu d’une maladie de Hirschsprung. Le recrutement des patients a
été réalisé sur les critères suivants : un phénotype intestinal diagnostiqué Hirschsprung ou POIC sur la
base d’analyses histopathologiques, et au moins une caractéristique du WS chez le patient ou un des
membres de sa famille. Les patients ainsi sélectionnés ont été testés pour les trois gènes du WS4,
EDN3, EDNRB et SOX10. Deux nouvelles mutations de SOX10 ont ainsi été retrouvées chez des
patients présentant des POIC.
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SOX10 MUTATIONS IN CHRONIC INTESTINAL PSEUDO-OBSTRUCTION
SUGGEST A COMPLEX PHYSIOPATHOLOGICAL MECHANISM
Human Genetics – 2002 – 111(2): 198-206
- 63 -
Cette étude a permis l’identification de mutations de EDN3, EDNRB et SOX10 dans sept familles.
Parmi les cinq mutations de SOX10 décrites, trois sont associées à un WS4 classique. Les deux autres
patients porteurs de mutations SOX10 présentaient tous les signes cliniques d’un WS4 classique,
toutefois l’analyse histopathologique a montré que le défaut intestinal relevait d’une POIC et non
d’une maladie de Hirschsprung. Cette observation, reliée au cas précédemment décrit (Pingault et al.
2000), indique que les POIC peuvent être associées à toutes les caractéristiques du syndrome de
Waardenburg. Ceci pose la question du mécanisme sous-jacent à ce phénotype. Dans les cas de
maladie de Hirschsprung, l’absence de cellules ganglionnaires du SNE explique le défaut occasionné.
Dans les cas de POIC en revanche, les cellules sont bien présentes, et le défaut doit alors être attribué à
un défaut de fonctionnement du SNE dont le mécanisme n’est pas déterminé.
o Le syndrome PCWH
La description de mutations de SOX10 dans des cas non typiques de WS4 est à mettre en parallèle
avec le fait que des phénotypes neurologiques sont fréquemment observés en plus des caractéristiques
cliniques du WS4 chez plusieurs patients porteurs de mutations de SOX10. En 1999, une mutation de
SOX10 a été décrite pour la première fois chez une patiente présentant un WS4 avec dystopie des
canthus, associé à une leucodystrophie sévère compatible avec un syndrome de Pelizaeus-Merzbacher
(OMIM #312080) et une neuropathie périphérique démyélinisante réminiscente d’une maladie de
Charcot-Marie-Tooth de type I (OMIM #118200) (Inoue et al. 1999). La description de ce phénotype
faisait pour la première fois le lien entre le profil d’expression de SOX10 au niveau des cellules gliales
du système nerveux central et périphérique, et des anomalies de myélinisation chez un patient. La
mutation n’altère pas la séquence codante du gène, mais une délétion de 12 nucléotides emportant le
codon stop entraîne l’allongement de la protéine de 82 acides aminés. Afin d’expliquer la différence
de phénotype par rapport aux cas précédemment décrits, les auteurs avaient proposé un mécanisme de
dominant négatif, la protéine mutante conservant tous les domaines de la protéine sauvage et
comportant en plus un domaine dont on ne connaît pas la fonction éventuelle. Pourtant, suite à ce
rapport, d’autres cas de WS4 présentant des anomalies neurologiques ont été associés à des mutations
de SOX10 (Pingault et al. 2000; Touraine et al. 2000; Sham et al. 2001; Inoue et al. 2002; Pingault et
al. 2002; Toki et al. 2003; Inoue et al. 2004). Or ces mutations s’avèrent être des mutations
tronquantes du même type que celles identifiées chez des patients WS4 classiques. Les atteintes
neurologiques observées sont très variables, et affectent le système nerveux central (spasticité, ataxie,
nystagmus, hypotonie, retard mental modéré à sévère) et/ou le système nerveux périphérique
(neuropathie périphérique démyélinisante), avec un cas présentant un défaut cardiaque dû à une
anomalie du système nerveux autonome (Korsch et al. 2001). Plus de la moitié des mutations de
SOX10 connues sont en fait associées à différents défauts neurologiques, mais aucune mutation de
SOX10 n’a été identifiée dans des cas isolés de neuropathies (Pingault et al. 2001), ce qui a amené la
- 64 -
définition d’un nouveau syndrome prenant en compte ces caractéristiques. Ce syndrome a été appelé
PCWH (OMIM #609136) pour Peripheral neuropathy, Central leukodystrophy, Waardenburg
syndrome and Hirschsprung disease (Inoue et al. 2004). Sont également inclus dans ce syndrome les
cas de POIC, qui sont alors assimilés à une maladie de Hirschsprung, bien que le mécanisme
pathologique soit différent. Ce syndrome a donc été défini sur la base d’une unité moléculaire, et non
d’une unité phénotypique puisqu’on observe une grande variabilité phénotypique parmi les patients
atteints de ce syndrome.
c. Effet fonctionnel des mutations
Le fait que la grande majorité des mutations de SOX10 sont des mutations tronquantes a tout d’abord
suscité la suggestion que la protéine mutante est non fonctionnelle et que le phénotype résulte d’une
haploinsuffisance. Cette hypothèse est corroborée par l’analyse de la souris Sox10LacZ, qui porte un
allèle nul et présente les mêmes phénotypes que les patients WS4, et par la démonstration que certains
de ces mutants perdent leur activité transcriptionnelle et la capacité à interagir avec leurs cofacteurs
(Kuhlbrodt et al. 1998c; Bondurand et al. 2000; Bondurand et al. 2001; Chan et al. 2003). Cependant,
l’observation que les mutants portant une mutation au-delà du domaine HMG conservent leur capacité
à lier l’ADN, voire d’autres propriétés, a suggéré que ces mutants pouvaient également exercer un rôle
de dominant négatif. Cette hypothèse parut être corroborée par l’observation que, bien que les
mutations de SOX10 sont réparties sur tout le gène, les mutations portées par les patients PCWH sont
toutes situées dans l’exon 5 du gène, c’est-à-dire le dernier exon (figure 10). Il a donc été suggéré que
plus la mutation était située en 3’ du gène, plus la protéine mutante avait de domaines en communs
avec la protéine sauvage, et donc plus elle pouvait exercer un effet négatif sur la fonction de la
protéine sauvage. Cependant, malgré la pertinence de cette hypothèse, une étude in vitro a démontré
que les protéines SOX10 tronquées avaient toutes une activité transcriptionnelle réduite mais une
liaison à l’ADN accrue et un effet dominant négatif, qu’elles soient associées indifféremment au WS4
ou au PCWH (Inoue et al. 2004). En conséquence, l’effet dominant négatif est probablement à
l’origine du phénotype mais ne permet pas de discriminer les deux syndromes. Les auteurs de cette
étude ont alors identifié de façon très élégante le mécanisme à l’origine de cette différence entre les
deux syndromes. En se basant sur l’observation que les mutations associées au WS4 sont situées dans
les exons internes (exons 3 et 4) du gène alors que les mutations associées au PCWH sont dans le
dernier exon (exon 5) du gène, Inoue et al. ont démontré que la différence d’expression phénotypique
entre les deux types de mutations était due à un échappements des ARN mutants PCWH au système
NMD de surveillance des ARN. Le système NMD, pour Non-sense Mediated Decay, est un
mécanisme de surveillance des ARN qui dégrade spécifiquement les ARN messagers porteurs d’un
codon stop suivi d’un intron. Ce système permet ainsi d’éliminer les ARN messagers porteurs d’une
mutation induisant l’apparition d’un codon stop prématuré, mais ne détecte pas les codons stop
prématurés lorsque ceux-ci sont situés dans le dernier exon du gène. Les mutations tronquantes situées
- 65 -
dans les exons 3 et 4 de SOX10 sont donc détectées par ce système, et les ARN messagers
correspondants sont dégradés, alors que les ARN messagers porteurs de mutations dans l’exon 5
échappent au système et sont normalement traduits. Les mutations WS4 correspondent donc à une
haploinsuffisance puisque les protéines mutantes sont peu ou pas produites et n’exercent pas leur
potentiel effet négatif. En revanche, les protéines mutantes PCWH sont produites à un niveau
équivalent à celui de la protéine sauvage et exercent leur effet dominant négatif, qui résulte en
l’expression d’un phénotype beaucoup plus sévère. Inoue et al. ont également constaté une polarité
dans les mutations PCWH : plus la protéine mutante est longue, moins le phénotype est sévère (figure
10). Les auteurs suggèrent que ceci est dû au fait que les protéines les plus courtes ont la plus forte
affinité pour l’ADN in vitro, et vont donc potentiellement exercer une compétition plus forte avec la
protéine sauvage in vivo au niveau des cibles transcriptionnelles de SOX10. Cette étude ouvre ainsi de
nouvelles perspectives pour l’analyse des mutations de SOX10 et d’autres gènes impliqués dans des
pathologies humaines, et démontre le mécanisme moléculaire permettant de distinguer le WS4 du
PCWH.
Figure 10 : Bilan des mutations SOX10.
Les trois exons codants de SOX10 sont signalés par un dégradé de bleu. Le domaine HMG et le domaine de
transactivation (TA) sont indiqués. Les mutations sont symbolisées selon leur nature et leur nom est indiqué sous
le symbole correspondant. Les symboles blancs et mutations en vert indiquent une mutation associée à un WS4.
Les symboles noirs et mutations en rouge indiquent une mutation associée à un PCWH. Le graphique indique la
sévérité de la maladie et le diagnostic clinique associé à chaque mutation, ainsi que le gradient de sévérité
associé aux différentes mutations PCWH.
Adapté de Inoue et al. 2004.
- 66 -
d. Les autres pathologies
Des défauts de SOX10 ont également été décrits dans d’autres cas pathologiques que les syndromes
WS4, Yéménite, ou PCWH. SOX10 a par exemple été identifié à plusieurs reprises comme marqueur
antigénique dans des cas de mélanomes (Khong and Rosenberg 2002; Segal et al. 2003). Segal et al.,
en particulier, ont constaté par analyse de différents types de cancers par puces à ADN que SOX10
était très fréquemment surexprimé dans la plupart des cas de mélanomes, et systématiquement dans un
sous-type particulier, le sarcome CCS/MSP (clear-cell sarcoma / melanoma of the soft parts).
L’expression de SOX10 s’avère apporter une valeur diagnostique dans ce type de mélanome, car il
permet de le distinguer d’un sarcome de type STS (soft tissue sarcoma), distinction qui ne peut pas
toujours être faite sur des données purement cliniques et anatomopathologiques. De façon intéressante,
ERBB3/HER3 et TYRP2/DCT, deux autres gènes impliqués dans le développement des mélanocytes et
la mélanogenèse, décrits comme étant des gènes cibles de SOX10, sont également surexprimés dans le
sarcome CSS/MSP. Par ailleurs, SOX10 régule l’expression de MITF, un gène essentiel au
développement et à la différenciation des mélanocytes, en synergie avec PAX3, un autre facteur
crucial pour le développement de la crête neurale (cf. chapitre IV-4b). MITF et PAX3 sont tous deux
impliqués dans le syndrome de Waardenburg au même titre que SOX10, mais également dans des cas
de mélanomes. L’intrication de ces gènes dans les mêmes voies de régulation et leur implication dans
des mécanismes pathologiques et cancéreux semblables laissent deviner la complexité du processus
oncogénique qui peut se mettre en place lorsque l’un ou plusieurs de ces gènes sont altérés. La
surexpression anormale de SOX10 fait de lui un autoantigène, contre lequel des autoanticorps sont
dirigés. L’observation de tels anticorps a été faite dans des cas de vitiligo (Hedstrand et al. 2001) et de
mélanomes (Khong and Rosenberg 2002), suggérant que SOX10 pourrait être une cible pour une
stratégie d’immunothérapie anticancéreuse dans certains cas de mélanomes.
Actuellement, aucun phénotype associé à une mutation gain de fonction de SOX10 n’a été décrit. Or,
SOX10 induit l’apoptose lorsqu’il est absent des cellules où il devrait normalement être exprimé, et
maintient un caractère prolifératif et pluripotent de ces cellules lorsqu’il est correctement exprimé.
Plus encore, la surexpression de SOX10 dans un système de culture primaire de cellules de crête
neurale permet d’empêcher l’arrêt de croissance induit par le TGF-β (Kim et al. 2003). Toutes ces
données suggèrent un rôle prolifératif et anti-apoptotique très important de SOX10. On peut alors
supposer que des mutations du gène de type gain de fonction pourraient conduire à la production d’une
protéine induisant une prolifération anormale, voire une non différenciation/dédifférenciation des
cellules, et empêchant leur apoptose, déclenchant ainsi un processus tumoral au niveau de ces cellules.
Un mécanisme du même type a été identifié pour le proto-oncogène RET, dont les mutations sont
responsables de la moitié des cas de maladie de Hirschsprung. Le facteur RET est essentiel au
développement du SNE, en permettant en particulier la migration des cellules de crête neurale le long
de l’intestin. Les mutations perte de fonction du gène induisent la production d’une protéine inactive
- 67 -
et, par un mécanisme d’haploinsuffisance ou de dominant négatif, provoquent une maladie de
Hirschsprung chez les patients porteurs de ces mutations (Manie et al. 2001). En revanche, les
mutations gain de fonction entraînent la production d’une protéine constitutivement active, à fort
pouvoir oncogénique, déclenchant chez les patients des tumeurs de type MEN2 (multiple endocrine
neoplasia type 2, A et B) ou FMTC (familial medullary thyroid carcinoma) (Jhiang 2000). RET est
également un des gènes cibles décrits de SOX10 (cf. chapitre IV-4b).
4. Fonctionnement moléculaire
La fonction de SOX10 au cours du développement et son implication dans divers processus
pathologiques étant établies, la question s’est alors posée des mécanismes du développement
impliquant SOX10 et permettant l’expression de sa fonction au niveau de la crête neurale et de ses
dérivés. La recherche s’est alors tournée vers les systèmes de régulation de SOX10, ses gènes cibles et
ses partenaires.
a. Expression
De la bonne expression de Sox10 dépend le bon déroulement de sa fonction. L’identification des
facteurs régulant son expression est donc essentielle pour la compréhension des cascades de régulation
impliquant Sox10 au cours du développement. Cependant cette entreprise s’avère compromise par le
fait que le promoteur de Sox10 n’est toujours pas décrit à l’heure actuelle. Beaucoup d’équipes
s’intéressant à Sox10 se sont heurtées à ce problème. Nous n’avons pas échappé à la règle, et malgré le
déploiement de diverses techniques in vitro (RACE-PCR de divers types, protection à la RNAse, …)
et in silico, nous n’avons pas réussi à établir de façon certaine la position du site de démarrage de la
transcription pour Sox10. Des essais réalisés par d’autres équipes dans divers modèles animaux ne se
sont pas avérés plus fructueux (données non publiées).
Cependant des facteurs agissant sur l’expression de Sox10 ont été identifiés. Il a par exemple été
observé que les voies Wnt et FGF induisent l’expression de Sox10 au niveau de la crête neurale chez
le xénope (Aoki et al. 2003; Honore et al. 2003). Par ailleurs, l’expression ectopique de Sox9 induit
l’expression de Sox10 chez le poulet et le xénope (Aoki et al. 2003; Cheung and Briscoe 2003). Cette
régulation par Sox9 a été confirmée in vitro par un système « Tet-on » Sox9 dans les cellules N2A, où
l’expression de Sox10 est augmentée par l’induction de l’expression de Sox9 (Stolt et al. 2003).
Cependant il a également été décrit que FoxD3, un marqueur précoce de la crête neurale, induit
l’expression de Sox10, et FoxD3 est aussi induit par Sox9 (Cheung and Briscoe 2003; Cheung et al.
2005; McKeown et al. 2005). L’expression de Sox10 étant maintenue chez les mutants Sox9, il est
probable que son induction par Sox9 passe par des voies indirectes, notamment via FoxD3. Par
ailleurs il a également été suggéré que Sox10 réprime l’expression de FoxD3 (McKeown et al. 2005).
- 68 -
De la même façon, des interrelations ont été décrites entre Sox10 et Slug, l’expression ectopique de
l’un induisant l’expression de l’autre, bien que des résultats contradictoires aient été obtenus dans
différentes études chez le xénope (Aoki et al. 2003; Honore et al. 2003) et le poulet (McKeown et al.
2005). Enfin Snail, facteur cousin de Slug également impliqué dans le développement de la crête
neurale, induit l’expression de Sox10, mais aussi de Slug (Honore et al. 2003). Tous ces facteurs sont
exprimés très précocement au niveau de la crête neurale, et sont considérés comme des marqueurs de
ces cellules. Il apparaît donc que d’une part le réseau de régulation qui les lie est extrêmement
complexe, et d’autre part l’interprétation des résultats est compliquée par le fait que selon les études
chacun de ces facteurs peut être considéré soit comme facteur d’induction de la crête neurale, soit
simplement comme marqueur des cellules de crête neurale. Or selon le rôle qu’on leur fait tenir, actif
(inducteur) ou passif (marqueur), les expériences ne sont pas menées de la même façon et les résultats
peuvent prêter à différentes interprétations. Actuellement aucune relation claire n’a donc pu être
établie entre ces facteurs, et a fortiori aucun régulateur direct de l’expression de Sox10 n’a été
clairement identifié.
Il a également été montré dans un système de culture in vitro de cellules souches de crête neurale que
la surexpression de Mash1 et de Phox2b, deux facteurs proneuraux du système nerveux autonome (cf.
chapitre II-2c) réprime l’expression de Sox10 (Kim et al. 2003). Cette observation est en cohérence
avec le rôle répresseur de la différenciation neuronale attribué à Sox10. Mash1 et Phox2b ayant pour
rôle d’induire la différenciation neuronale, ils doivent donc lever l’inhibition exercée par Sox10 afin
de permettre ensuite l’expression de gènes spécifiques des neurones. Mash1 et Phox2b étant des
facteurs de transcription ils seraient en théorie capables de réguler directement l’expression de Sox10,
mais cela n’a pas pu être testé, toujours en raison de la non disponibilité des régions régulatrices de
Sox10.
Un autre candidat à la régulation de Sox10 est le facteur bHLH Olig2. Ce facteur joue un rôle essentiel
dans la différenciation des oligodendrocytes et est exprimé juste avant Sox10. Chez les souris
mutantes Olig2-/-, l’expression de Sox10 est abolie au niveau des oligodendrocytes mais pas dans le
SNP (Lu et al. 2002; Zhou and Anderson 2002). D’autre part l’expression de Sox10 peut être induite
par l’expression ectopique de Olig2 (Zhou et al. 2000). Là encore cependant, aucune relation directe
n’a pu être établie entre les deux facteurs.
b. Gènes cibles
SOX10 étant un facteur de transcription, l’expression de sa fonction passe par la régulation de ses
gènes cibles. L’identification de ces cibles permettrait donc de mieux comprendre les cascades de
régulation impliquant SOX10. Dans cette optique, la première et la plus fructueuse approche pour
identifier les cibles de SOX10 fut une approche par gène candidat. Des cibles de SOX10 ont ainsi été
- 69 -
identifiées dans chacun des lignages où il est exprimé, et permettent de mieux comprendre le
mécanisme physiopathologique responsable des défauts associés à une mutation de SOX10.
o La crête neurale
Mis à part Slug et FoxD3, dont la régulation par Sox10 n’est pas clairement établie, une seule cible de
Sox10 a été décrite au niveau de la crête neurale non différenciée. Il s’agit de Krox20 (EGR2 chez
l’homme), un facteur impliqué dans la segmentation de la crête neurale craniale chez l’homme au
niveau des rhombomères r3 et r5, puis plus tard dans la différenciation des cellules de Schwann du
SNP. Un élément de régulation spécifique de la crête neurale a été identifié à 26kb en amont du gène
Krox20 chez la souris, et l’étude détaillée de cet élément a montré qu’il comportait des sites de liaison
pour Krox20 lui-même et pour des facteurs SOX. Des études in vitro ont alors démontré que Sox10
pouvait activer en synergie avec Krox20 la transcription d’un gène rapporteur à partir de cet élément
régulateur. Sox10 serait donc impliqué dans l’expression spécifique de Krox20 au niveau de la crête
neurale craniale. Des études in vivo, montrant d’une part que Sox10 et Krox20 sont bien co-exprimés
au niveau de la crête neurale craniale, et d’autre part que l’expression de Krox20 est réduite chez les
souris homozygotes Dom, ont confirmé cette hypothèse (Ghislain et al. 2003). Les auteurs de cette
étude ont également suggéré que Sox9 pouvait lui aussi être impliqué dans la régulation de Krox20 à
partir de cet élément car il est exprimé au même moment dans la crête neurale craniale. Enfin, bien
que cela n’ait pas été testé dans ce cas, il est à noter que les deux sites de fixation SOX sont dans une
configuration qui permettrait la dimérisation des facteurs SoxE au niveau de cette séquence. Par
ailleurs, EGR2 est impliqué dans plusieurs types de neuropathies périphériques chez l’homme (Warner
et al. 1998). La réduction de son expression chez les porteurs de mutations de SOX10 expliquerait
donc une partie du phénotype de démyélinisation périphérique observé chez certains de ces patients.
o Les cellules gliales
Etant donné le profil d’expression de SOX10 au niveau des cellules gliales du système nerveux central
et périphérique, les gènes cibles candidats étaient recherchés parmi les gènes essentiels à la
myélinisation. La fonction de SOX10 étant prépondérante au niveau du SNP, les gènes de myéline des
cellules de Schwann s’avérèrent être des candidats particulièrement intéressants.
MPZ
Le gène MPZ (myelin protein zero), codant la protéine zéro (P0), fut le premier gène cible de SOX10
décrit. La myéline est un organelle spécialisé constitué d'un petit nombre de protéines très abondantes.
Parmi celles-ci, P0 est une protéine essentielle à la myélinisation par les cellules de Schwann,
représentant 50% des protéines de la myéline des cellules de Schwann matures. Par ailleurs, des
mutations du gène MPZ sont impliquées dans des cas de maladie de Charcot-Marie-Tooth de type I
- 70 -
(CMT1), or en 2000 une mutation de SOX10 venait d’être décrite chez une patiente présentant un
phénotype neurologique compatible avec une CMT1 (Inoue et al. 1999). Toutes ces indications
suggéraient que MPZ pouvait être une cible de régulation de SOX10.
Peirano et al. (2000) ont démontré que SOX10 régulait directement l’expression de MPZ en se liant à
son promoteur. L’induction de l’expression de MPZ a tout d’abord été détectée par RT-PCR dans la
lignée de neuroblastome N2A exprimant Sox10 de manière inductible par un système « Tet-on ».
L’expression de MPZ est nettement augmentée lorsque l’expression de Sox10 est induite, mais pas
lorsque l’expression de Krox20 ou POU3F1, deux autres facteurs essentiels au développement des
cellules de Schwann, est induite. Cette augmentation de l’expression de MPZ était perdue lorsque les
mutants Dom et 1076delGA étaient induits à la place de Sox10 sauvage. L’induction spécifique de
l’expression de MPZ par Sox10 a ensuite été confirmée par des tests luciférase dans ces mêmes
cellules. Au cours de ces tests, un vecteur comportant le gène rapporteur luciférase sous contrôle de
1kb du promoteur MPZ était transfecté dans les cellules N2A-Tet-Sox10, et l’activité luciférase était
mesurée avec et sans induction de l’expression de Sox10. Cette approche présente l’avantage de
permettre une cartographie précise des régions de régulation d’un promoteur en réalisant des délétions
successives de segments du promoteur puis en mesurant l’activité résiduelle de chacune des
constructions testées. Ceci a permis de localiser les régions du promoteur réactives à Sox10 dans la
partie la plus proximale du promoteur MPZ, c’est-à-dire dans les 500pb avant le site de démarrage de
la transcription. L’analyse plus détaillée de cette région et l’étude de sites potentiels de fixation SOX
ont permis de montrer que l’activation du promoteur MPZ par Sox10 est dépendante d’un site, nommé
F, situé à -450pb par rapport au site de démarrage de la transcription, et de deux sites, nommés B et C,
situés entre -230 et -115pb. Sox10 lie ces sites in vitro dans des expériences de retard sur gel, et la
mutation de ces sites abolit la régulation du promoteur MPZ par Sox10 dans les tests luciférase. C’est
en cherchant à analyser de plus près les sites B et C que les auteurs ont constaté que le site C était en
fait constitué de deux sites de fixation SOX (C/C’) qui permettaient la dimérisation de deux protéines
SOX et leur coopération pour réguler de façon synergique l’expression à partir du promoteur MPZ.
L’étude plus poussée de ces sites a par la suite permis de poser les bases de ce mécanisme (Peirano
and Wegner 2000; Schlierf et al. 2002) (cf. chapitre III-2b). Enfin les auteurs ont confirmé in vivo les
résultats obtenus in vitro, en montrant par des expériences de RT-PCR et d’hybridation in situ que les
transcrits de MPZ étaient fortement réduits en quantité chez les souris hétérozygotes Sox10Dom/+, et
totalement absents chez les homozygotes.
Ce travail présentait donc pour la première fois un gène cible de SOX10, et donnait les premières
bases pour comprendre son mécanisme de fonctionnement au niveau moléculaire. Aucun cofacteur
pouvant agir en synergie avec Sox10 n’avait été décrit dans cette étude, mais l’existence probable d’un
tel facteur était fortement suggérée. Ce facteur a par la suite été identifié grâce à un système de crible
simple hybride utilisant comme appât une séquence située entre les sites de fixation SOX C’ et B.
Cette séquence paraissait indispensable à l’activation du promoteur MPZ par Sox10. Le cofacteur de
- 71 -
Sox10 sur le promoteur MPZ ainsi identifié est donc le facteur ZBP99, un facteur de transcription à
doigts de zinc dont la fonction est peu connue. Il est capable d’activer la transcription à partir du
promoteur MPZ seul et en synergie avec Sox10. La pertinence de cette régulation in vivo n’a pas été
testée (Slutsky et al. 2003).
GJB1
L’identification de MPZ comme une cible transcriptionnelle de SOX10 a apporté les premières
indications sur le rôle de ce facteur au cours du processus de myélinisation dans le SNP. Cependant, la
grande variabilité phénotypique constatée chez les patients porteurs d'une mutation de SOX10 suggère
un rôle régulateur plus global pour SOX10. En particulier, des défauts neurologiques affectant la
myéline observés chez certains patients PCWH laissaient à penser que SOX10 pouvait contrôler
l'expression d'autres gènes impliqués dans le processus de myélinisation. C’est pourquoi nous avons
cherché à identifier de nouveaux gènes cibles de Sox10 dans les cellules de Schwann. Dans cette
optique, nous nous sommes intéressés au gène GJB1 (gap junction beta 1), codant la connexine 32
(Cx32), une protéine membranaire intégrale essentielle au fonctionnement des cellules de Schwann.
La Cx32 appartient à la famille des protéines de jonction communicante, dont le rôle est de former des
canaux entre deux cellules couplées permettant le transport rapide d'ions et de nutriments d'une cellule
à l'autre. Dans les cellules de Schwann, la Cx32 forme des jonctions communicantes intracellulaires au
niveau des boucles paranodales et des incisures de Schmidt-Landerman, permettant la diffusion rapide
de molécules de petite taille à travers les feuillets de myéline. Des mutations affectant la production,
l’adressage à la membrane ou la structure de la Cx32 sont à l’origine de la forme liée à l’X de CMT
(CMTX, OMIM #302800). Toutes ces caractéristiques, associées à l’observation chez une de nos
patientes (Pingault et al. 2000) de défauts de la myéline réminiscents de ce qui est observé chez des
souris GJB1KO (Neuberg et al. 1999), nous ont amenés à considérer ce gène comme une cible
potentielle de SOX10. Nous avons alors démontré que SOX10 régule directement l’expression de
GJB1 en se liant à son promoteur.
- 72 -
HUMAN CONNEXIN 32, A GAP JUNCTION PROTEIN ALTERED IN THE
X-LINKED FORM OF CHARCOT-MARIE-TOOTH DISEASE, IS DIRECTLY
REGULATED BY THE TRANSCRIPTION FACTOR
SOX10
Human Molecular Genetics – 2001 – 10(24): 2783-95
- 73 -
Nous avons démontré grâce à cette étude que SOX10 régule directement l’expression de GJB1 en se
liant à son promoteur spécifique de la myéline, et active sa transcription en synergie avec EGR2,
facteur essentiel du développement des cellules de Schwann. Il est à noter que des mutations du gène
EGR2 ont également été décrites dans plusieurs cas de CMT de type I (Warner et al. 1998). La
régulation du gène GJB1 par EGR2 fait donc apparaître une relation épistatique entre deux gènes
impliqués dans la même pathologie. Nous avons également démontré que, de façon comparable à
MPZ, le promoteur de GJB1 comporte deux sites de fixation SOX associés permettant la dimérisation
de SOX10 sur le promoteur et par conséquent une activation renforcée de la transcription.
De façon particulièrement intéressante, nous avons étudié une mutation du promoteur GJB1
précédemment décrite et avons déterminé qu’elle affectait l’un des deux sites de fixation de SOX10.
Cette mutation avait été associée au phénotype CMTX par des études de liaison, mais aucune étude
fonctionnelle n’avait permis de démontrer sa causalité dans la pathologie (Ionasescu et al. 1996). Nous
avons montré que cette mutation diminuait la capacité de SOX10 à se lier au promoteur, et par
conséquent diminuait mais n’abolissait pas sa capacité à activer le promoteur, suggérant qu’une
dérégulation de l’expression de GJB1 par SOX10 pouvait être à l’origine du phénotype pathologique
chez le porteur de la mutation. Il s’agissait de la première démonstration de l’effet fonctionnel d’une
mutation touchant la région régulatrice de GJB1.
Suite à cette publication, nous avons établi une collaboration avec l’équipe du Dr Mary M. Reilly
(Londres), afin d’étudier une nouvelle mutation du promoteur GJB1 associée à un cas de CMTX.
- 74 -
CONNEXIN 32 PROMOTER P2 MUTATIONS:
A MECHANISM OF PERIPHERAL NERVE DYSFUNCTION
Annals of Neurology – 2004 – 56(5): 730-4
- 75 -
La mutation identifiée dans cette étude se trouve 2pb en aval de celle décrite dans notre première
étude, et affecte le même site de fixation de SOX10 sur le promoteur. L’effet fonctionnel est le même,
à savoir une diminution de l’affinité de SOX10 pour le promoteur et une dérégulation du promoteur.
D’autres mutations du promoteur GJB1 touchant un site de fixation SOX10 ont été identifiées
(données non publiées), suggérant que ce mécanisme est régulièrement impliqué dans des cas de
CMTX. L’étude du promoteur de GJB1 pourrait donc être incluse dans l’analyse génétique de cas de
CMTX où aucune mutation de la séquence codante du gène n’a pu être décelée.
ErbB3
ErbB3 code un récepteur aux neurégulines, facteurs de différenciation des cellules de crête neurale en
cellules gliales (cf. chapitre II-2c). C’est un récepteur à activité tyrosine kinase, qui a besoin de ErbB2
comme corécepteur pour déclencher la voie de signalisation des neurégulines. Son expression est
initiée dans les cellules de crête neurale lorsqu’elles se détachent du tube neural, puis est maintenue
dans les cellules gliales mais disparaît dans les autres dérivés de la crête neurale. Les souris ErbB3-/présentent des défauts de développement des cellules de crête neurale et de leurs dérivés gliaux, et en
particulier une absence totale de cellules de Schwann (Riethmacher et al. 1997). Ces phénotypes étant
réminiscents de ceux observés au niveau du SNP des souris mutantes Sox10, ErbB3 apparaissait
comme une cible potentielle de Sox10. En effet, l’expression de ErbB3 est sévèrement réduite chez les
souris homozygotes Dom. Son expression est bien initiée au niveau de la crête neurale, mais n’est
toutefois pas maintenue après la migration (Britsch et al. 2001). L’effet régulateur de Sox10 sur
l’expression de ErbB3 a été confirmé in vitro dans le système N2A-Tet-Sox10, où l’induction de
l’expression de Sox10 entraîne une augmentation de l’expression de ErbB3. Cependant l’action directe
de Sox10 dans cette régulation n’a pas pu être démontrée car aucune séquence régulatrice de ErbB3
sensible à l’action de Sox10 n’a pu être identifiée dans 40kb de séquence génomique contenant le
gène. Il est également intéressant de noter que cette régulation est restreinte aux cellules gliales du
SNP, puisque l’expression de ErbB3 n’est pas affectée au niveau du SNC chez les mutants Sox10,
malgré une fonction commune de ces deux gènes dans la différenciation des oligodendrocytes (Stolt et
al. 2002). Cette observation est révélatrice de la fonction différentielle exercée par Sox10 au niveau du
SNC et du SNP.
MBP
Le gène MBP (myelin basic protein) code des protéines constitutives de la myéline représentées à la
fois dans le SNC et le SNP. Chez les souris mutantes Sox10LacZ, l’expression de MBP est totalement
abolie au niveau des oligodendrocytes, indiquant une influence de Sox10 dans la régulation de ce
gène. Cette influence est confirmée dans le système N2A-Tet-Sox10, où l’induction de Sox10
augmente l’expression de MBP. Une étude plus poussée de cette régulation a montré que Sox10 se lie
directement au promoteur de MBP et ce au niveau de trois sites d’importance égale, dont l’un s’avère
- 76 -
être un site double permettant la dimérisation de Sox10 sur le promoteur (Stolt et al. 2002). De façon
intéressante, la configuration de ces sites de dimérisation s’avère être légèrement différente de celle
décrite pour les promoteurs de MPZ et GJB1, indiquant une certaine plasticité dans ce mécanisme de
régulation. Une autre étude a par la suite décrit que Sox10 interagit avec Sp1 sur le promoteur de MBP
et active la transcription du gène en synergie avec ce facteur (Wei et al. 2004).
PLP
Le gène PLP1 (proteolipid protein) code, grâce à un épissage alternatif, deux protéines
transmembranaires, PLP et DM20 qui à elles seules représentent presque 50% des protéines
constitutives de la myéline dans le SNC. Des mutations de ce gène causent la maladie de PelizaeusMerzbacher (PMD, OMIM #312080), une pathologie liée à l’X affectant la myéline du SNC, et la
paraplégie spastique de type 2 (SPG2, OMIM #312920), correspondant à une forme plus modérée du
même syndrome (Yool et al. 2000). Certains patients PCWH présentent des défauts du SNC rappelant
le syndrome PMD (Inoue et al. 1999; Inoue et al. 2002). En accord avec cette observation,
l’expression de PLP est abolie chez les souris mutantes Sox10LacZ (Stolt et al. 2002).
Afin de mieux comprendre le mécanisme de régulation liant Sox10 à PLP, nous avons établi un
protocole d’étude du même type que celui que nous avions utilisé pour l’étude de la connexine 32.
Dans un premier temps, nous avons testé l’expression de PLP dans le système N2A-Tet-Sox10. Nous
avons ainsi constaté que l’expression de PLP était augmentée par l’induction de Sox10 (figure 11A).
Nous avons également réalisé le même test avec Krox20, l’homologue murin de EGR2, et avons
observé le même résultat. EGR2 n’est pas exprimé dans les oligodendrocytes et ne peut donc pas être
un régulateur de PLP in vivo. En revanche, EGR1 (NGF1A/Krox24), un facteur de la même famille,
est bien exprimé dans les oligodendrocytes et peut donc théoriquement réguler PLP (Wegner 2000).
Les deux facteurs reconnaissant les mêmes séquences nucléotidiques (Swirnoff and Milbrandt 1995),
il est probable que dans le système inductible N2A-Tet-Krox20 Krox20 se substitue à Krox24 pour
activer l’expression de PLP. Afin de confirmer ces résultats, nous avons cloné environ 1kb du
promoteur de PLP en amont du gène rapporteur luciférase et avons testé son activation par des tests de
co-transfection en cellules HeLa. SOX10 et EGR2 sont tous les deux capables d’activer la
transcription à partir de ce promoteur, cependant nous n’avons pas pu observer de synergie entre les
deux facteurs, seul un effet additif correspondant à la somme des activations indépendantes des deux
facteurs a pu être constaté lorsqu’ils sont co-transfectés avec le promoteur (figure 11B).
- 77 -
B
KROX20
+
10
9
8
PLP
DM20
SOX10
Taux d’induction
SOX10
+
Ce
rve
a
u
A
SOX10
EGR2
SOX10+EGR2
7
6
5
4
3
KROX20
2
β-actin
1
0
pGL3 vide
pGL3-PLP
Figure 11 : Régulation du promoteur PLP par SOX10 et EGR2.
A : L’expression des deux transcrits alternatifs de PLP a été testée par RT-PCR sur des ARN extraits de cellules
N2A Tet-on avant (-) ou après (+) induction de l’expression de Sox10 ou Krox20 par la tétracycline. Des ARN
de cerveau ont servi de contrôle positif. L’expression de la β-actine permet de contrôler la normalisation des
PCR.
B : SOX10 et EGR2 activent le promoteur de PLP en test luciférase. Le vecteur de clonage pGL3 (porteur du
gène rapporteur luciférase) vide n’est pas induit par ces deux facteurs.
Nous avons testé trois mutants SOX10 en essai luciférase : le premier, 482ins6, est associé à un cas de
WS4 classique (Pingault et al. 1998) ; les deux autres, 795delG et 1400del12 sont associés à des cas de
PCWH dont les phénotypes neurologiques sont différents (Inoue et al. 1999; Pingault et al. 2000).
Dans tous les cas, nous avons observé une perte de l’activation du promoteur par SOX10, seul et avec
EGR2 (figure 12).
A
Domaine de
transactivation
SOX10
HMG
482ins6
B
795delG
12
SOX10
EGR2
SOX10+EGR2
10
Taux d’induction
1400del12
8
6
4
2
0
SOX10
sauvage
482ins6
795delG
1400del12
- 78 -
Figure 12 : Effet de mutations de
SOX10 sur l’activation de PLP.
A : Représentation schématique de la
protéine SOX10, et positions des
mutations 482in6, 795delG et 1400del12.
B : Conséquences des mutations de
SOX10 sur la régulation du promoteur
PLP. Les taux d’induction de la protéine
sauvage sont indiqués pour référence.
Afin d’identifier la région du promoteur sensible à la régulation par SOX10, nous avons dans un
premier temps retiré 780pb de la partie 5’ du promoteur. La construction résultante présente le même
profil d’activation par SOX10 et EGR2 que la construction complète en test luciférase (pPLPdel dans
la figure 13A). Dans la séquence nucléotidique restante, nous avons identifié trois sites potentiels de
fixation SOX (S1, S2, S3, figure 13B). Nous avons donc testé si ces sites étaient responsables de
l’activation du promoteur par SOX10 en les mutant séparément et collectivement. Cependant à
nouveau nous n’avons pas observé de modification de l’activation du promoteur avec aucune des
constructions mutantes (pPLPmut S1/S2/S3 dans la figure 13A et données non présentées).
A
12
SOX10
EGR2
Taux d’induction
10
SOX10+EGR2
Figure 13 : Recherche des séquences
responsables de la régulation de PLP
par SOX10.
A : L’activation du promoteur PLP n’est
modifiée ni par la délétion de sa partie la
plus distale (pPLPdel) ni par la mutation
des trois sites potentiels de fixation SOX
(pPLPmut S1/S2/S3).
B : Représentation schématique de la
construction pPLPdel. Les positions des
trois sites potentiels de fixation SOX
(S1, S2, S3) et du site de fixation de Sp1
sont indiquées.
8
6
4
2
0
pGL3
pPLP
pPLP del
B
pPLP mut
S1/S2/S3
+1
-118
+160
luc
Sp1
pPLP del
S1
S2 S3
GACAAAG
AACAAAGtcagcCACAAAG
Ce dernier résultat peut avoir deux interprétations. La première est que la régulation de l’expression de
PLP par SOX10 est indirecte, c’est-à-dire que SOX10 régule l’expression d’un facteur inconnu qui à
son tour régule l’expression de PLP de manière directe ou indirecte. Plusieurs facteurs de transcription
régulant l’expression de PLP ont été identifiés, parmi lesquels les facteurs MyT1 (myelin transcription
factor 1) et YY1 (yin yang 1), tous deux capables de lier directement le promoteur de PLP (Wight and
Dobretsova 2004). Cependant ces deux facteurs ne peuvent pas représenter le facteur intermédiaire
impliqué dans nos expériences car leurs sites de liaison sont abolis par la délétion que nous avons
réalisée sur le promoteur et qui ne change pas l’activation par SOX10.
Une autre possibilité est que SOX10 se lie au promoteur via d’autres sites de liaison que ceux que
nous avons testés. Aucun autre site SOX de haute affinité n’a été identifié sur le promoteur délété.
Cependant il a été observé à plusieurs reprises que SOX10 pouvait lier des sites ne correspondant pas
parfaitement à la séquence consensus SOX. On peut imaginer que la liaison de SOX10 au promoteur
serait dans ce cas stabilisée grâce à son interaction avec un éventuel partenaire. Ce partenaire pourrait
- 79 -
être EGR1, ou EGR2 dans nos expériences, bien que nous n’ayons pas testé la liaison directe de EGR2
au promoteur. Cependant un autre facteur est un candidat très intéressant pour une telle interaction : il
s’agit de Sp1. En effet, Sp1 est capable de lier le promoteur de PLP (Janz and Stoffel 1993, figure
13B), et l’interaction synergique entre SOX10 et Sp1 a déjà été décrite (Melnikova et al. 2000). De
façon intéressante, il a récemment été décrit que SOX10 et Sp1 agissent en synergie pour activer
l’expression du gène MBP (Wei et al. 2004, cf. paragraphe précédent). Dans ce cas, la liaison, de Sp1
est nécessaire à la fonction à la fois de Sp1 et de SOX10, alors que la liaison de SOX10 est
dispensable pour son activité transactivatrice. Il semble que Sp1 recrute SOX10 sur le promoteur
MBP, et SOX10 apporte la spécificité à cette régulation. On peut alors imaginer que le même type
d’interaction se produit sur le promoteur de PLP, définissant un mécanisme plus général de régulation
des gènes de la myéline dans le SNC, et impliquant SOX10 et Sp1. Un défaut de SOX10 résulterait
donc en une dérégulation de ces gènes suite à l’altération de ses capacités à lier l’ADN et/ou à
interagir avec ses partenaires. Les anomalies de la myéline ainsi générées pourraient expliquer les
défauts du SNC observés chez certains patients PCWH. Nous avons d’hors et déjà établi que SOX10
régule également l’expression de PLP par une voie indirecte, car l’expression de MyT1 est augmentée
après induction de l’expression de Sox10 dans le système N2A-Tet-Sox10 (données non présentées).
Des expériences sont par ailleurs en cours pour déterminer l’implication éventuelle de Sp1 dans
l’activation de la partie proximale du promoteur PLP par SOX10.
o Les mélanocytes
MITF
Le gène MITF (microphtalmia transcription factor) code un facteur de transcription de type bHLH
essentiel au développement et à la survie des mélanocytes (Widlund and Fisher 2003). Des mutations
de ce gène provoquent chez l’homme et la souris des défauts de pigmentation et une surdité
correspondant au syndrome de Waardenburg de type II (WS2) (Goding 2000). L’identification de la
régulation de l’expression de MITF par PAX3 (Watanabe et al. 1998) a très rapidement suggéré que
SOX10 pouvait également être impliqué dans cette régulation. En effet, des mutations de PAX3 sont
impliquées dans des cas de WS1 et WS3 (Hoth et al. 1993), et son activité peut être modulée par
SOX10 in vitro (Kuhlbrodt et al. 1998b). L’implication de SOX10 dans le WS4 ainsi que son rôle
dans le développement des mélanocytes suggérait donc qu’une relation épistatique pouvait lier ces
trois facteurs impliqués dans les mêmes processus du développement et dans le même syndrome.
Effectivement, plusieurs équipes ont décrit simultanément la régulation de MITF par SOX10 seul (Lee
et al. 2000; Verastegui et al. 2000), ou en coopération avec PAX3 (Bondurand et al. 2000; Potterf et
al. 2000). Les deux facteurs se lient directement au promoteur spécifique de l’expression de MITF
dans les mélanocytes au niveau de sites spécifiques, et leur liaison est indispensable à la fois à leur
coopération et à l’activation transcriptionnelle. Ces observations réalisées in vitro sont confirmée in
- 80 -
vivo par le fait que les souris doubles homozygotes Sox10Dom/+/Mitfmi/+ présentent des défauts
pigmentaires beaucoup plus importants que les simples hétérozygotes de chaque type (Potterf et al.
2000), et que l’expression de Mitf est abolie au niveau des mélanocytes chez les mutants homozygotes
Dom (Bondurand et al. 2000).
De plus SOX10 module l’expression de MITF par d’autres mécanismes de régulation, d’une part en
liant directement un élément régulateur distal, situé 14,5kb en amont de son promoteur spécifique des
mélanocytes (Watanabe et al. 2002), et d’autre part en ajustant l’activation du promoteur MITF par
l’AMP cyclique en réponse à l’hormone de stimulation des mélanocytes MSH (Huber et al. 2003).
Il a par ailleurs été démontré chez le poisson zèbre que sox10 régule l’expression de mitfa,
l’orthologue de Mitf chez cet animal (aussi nommé nacre, du nom de son mutant). Cette régulation se
fait selon le même principe que chez les mammifères, par une liaison directe de sox10 au promoteur
de mitfa, indiquant une grande conservation des cascades de régulation chez les vertébrés (Elworthy et
al. 2003). Par ailleurs, l’expression forcée de mitfa selon le profil de Sox10 chez le mutant sox10cls
sauve le phénotype mélanocytaire en rétablissant le développement normal de mélanophores, de façon
comparable à un sauvetage du même type chez le mutant nacre. Ceci indique donc que chez le poisson
zèbre mutant cls la dérégulation de l’expression de mitfa suffit à expliquer les anomalies de
développement des mélanocytes.
Toutes ces données démontrent une relation épistatique entre trois gènes du Waardenburg, et
permettent d’expliquer les défauts caractéristiques du WS présentés par les patients porteurs de
mutations de SOX10.
DCT
DCT (dopachrome tautomerase), aussi nommé Tyrp2 (tyrosine-related protein 2) code une enzyme
impliquée dans la chaîne de biosynthèse de la mélanine par les mélanocytes. L’expression de DCT est
directement régulée par MITF dans les mélanocytes (Widlund and Fisher 2003). La réduction
transitoire de l’expression de DCT chez les souris mutantes Sox10 peut donc être attribuée à la
dérégulation de Mitf chez ces animaux. Pourtant l’activation de l’expression de DCT par Sox10 a été
observée à plusieurs reprises in vitro, suggérant une activation directe du gène par Sox10 (Britsch et
al. 2001; Potterf et al. 2001). Effectivement l’action directe de Sox10 sur le promoteur de DCT a
ensuite été démontrée. Sox10 se lie au niveau de plusieurs sites sur le promoteur de DCT, dont un
permet sa dimérisation de façon similaire à ce qui a été décrit au niveau des gènes de la myéline (MPZ,
GJB1, MBP), indiquant que ce mécanisme est généralement répandu parmi les cibles de Sox10 et n’est
pas spécifique à un lignage cellulaire. Sox10 est également capable d’agir en synergie avec MITF pour
activer l’expression de DCT (Jiao et al. 2004; Ludwig et al. 2004a). MITF est donc à la fois une cible
et un partenaire de Sox10. L’influence de mutations de Sox10 sur l’expression de DCT est par
conséquent double, d’une part par une diminution de son activation directe, et d’autre part par la
dérégulation de l’expression de MITF. In vivo cependant, l’action de Sox10 sur l’expression de DCT
- 81 -
semble être transitoire car celle-ci est seulement retardée et non abolie chez les souris mutantes Sox10
(Potterf et al. 2001). Ceci explique le phénotype mélanocytaire peu sévère associé à des mutations de
Sox10 chez l’homme et la souris.
o Le système nerveux entérique
RET
Le récepteur à activité tyrosine kinase c-RET est exprimé par les neuroblastes précurseurs des cellules
du SNE, et son expression est nécessaire à leur survie et leur prolifération. En conséquence, des
mutations du gène RET résultent en un défaut d’innervation du SNE et sont retrouvées dans 50% des
cas de maladie de Hirschsprung (Manie et al. 2001). SOX10 agit en synergie avec PAX3 pour activer
un élément régulateur situé à 3,4kb en amont du point de démarrage de la transcription de RET (Lang
et al. 2000). Cet élément contient des sites de fixation pour les deux facteurs, et le profil obtenu en
retard sur gel pour SOX10 suggère que celui-ci peut se dimériser sur cette séquence.
Les mêmes auteurs ont par la suite démontré l’interaction directe entre les protéines PAX3 et SOX10
in vitro et in vivo (Lang and Epstein 2003). Cette interaction est relayée par leurs domaines paired et
HMG, respectivement. Lang et Epstein ont également mené une étude comparative très intéressante du
mode d’action de SOX10 et PAX3 sur les séquences régulatrices de MITF et RET. Ils ont ainsi
déterminé que, contrairement à ce qui a été décrit dans le cadre du promoteur de MITF, PAX3 est
capable de recruter SOX10 sur le promoteur de RET, même lorsque le site de liaison de SOX10 est
muté et que la fixation de SOX10 à cette séquence est abolie. Ceci peut être attribué au fait que PAX3
lie le promoteur de RET via son domaine paired, alors qu’il se fixe au promoteur de MITF via son
homéodomaine. On peut alors imaginer que cette différence de liaison influe sur la conformation de la
protéine PAX3, et donc sur son interaction avec son partenaire SOX10. En revanche, il apparaît que le
domaine de transactivation de SOX10 est absolument indispensable à l’activation synergique du
promoteur de RET, alors que celui de PAX3 est moins important. Se dessine alors un modèle où les
deux protéines agissent en coopération au niveau de la séquence régulatrice de RET, PAX3 étant
responsable de la liaison stable à l’ADN, et SOX10 de l’activation de la transcription à partir de cette
séquence.
La différence de configuration des séquences régulatrices de RET et MITF, ainsi que la divergence des
modes de fonctionnement de SOX10 et PAX3 sur ces séquences ont amené les auteurs à s’intéresser à
l’impact que pouvaient avoir différentes mutations de SOX10 sur la régulation de ces deux gènes et
sur son interaction avec PAX3. Ils ont étudié deux mutations associées au WS4, E189X et 482ins6, et
la mutation S135T associée au syndrome Yéménite. L’étude des deux mutations 482ins6 et S135T est
particulièrement intéressante, car toutes deux affectent le domaine HMG, abolissent la liaison de
SOX10 à l’ADN, mais ne sont pourtant pas associées au même phénotype. Les données présentées par
Lang et Epstein apportent un début d’explication à ce constat. Ils ont en effet observé que la protéine
- 82 -
SOX10 mutante S135T conservait sa capacité à interagir avec PAX3, alors que la protéine 482ins6
perdait cette faculté. En conséquence, la protéine S135T peut toujours être recrutée par PAX3 sur le
promoteur de RET malgré son incapacité à lier l’ADN, et ainsi y exercer sa fonction activatrice grâce à
son domaine transactivateur resté intact. En revanche sur le promoteur de MITF, son incapacité à lier
l’ADN abolit sa fonction transactivatrice car PAX3 ne peut pas recruter SOX10 sur ce promoteur. La
protéine 482ins6, elle, ne peut exercer sa fonction ni sur RET, ni sur MITF. Ceci suggère donc que la
mutation S135T n’est associée à aucun phénotype intestinal parce que la protéine mutante a conservé à
la fois son domaine de transactivation et sa capacité à interagir avec PAX3, ce qui a permis une
activation suffisante de l’expression de RET pour ne pas provoquer de défauts de développement du
SNE. En revanche elle n’a pu exercer sa fonction sur l’expression de MITF, d’où le phénotype de
défauts mélanocytaires observés chez les patients. Dans le cas de la mutation 482ins6, la protéine
mutante n’a pu exercer sa fonction sur aucun des deux gènes, d’où les anomalies constatées dans les
lignages entérique et mélanocytaire. Cette étude démontre que l’analyse détaillée des interactions
protéine-protéine et ADN-protéine permet de mieux comprendre les mécanismes physiologiques mis
en place au niveau des séquences régulatrices dans le contexte de la régulation transcriptionnelle.
EDNRB
EDNRB code le récepteur B aux endothélines, et son expression est nécessaire à la migration des
précurseurs du SNE jusque dans le côlon, car l’expression de l’endothéline 3 par le mésenchyme
intestinal freine leur différenciation et maintient leur capacité proliférative. Des mutations
hétérozygotes de EDNRB sont associées à des cas de maladie de Hirschsprung, alors que des
mutations homozygotes sont retrouvées dans des cas de WS4 (Amiel and Lyonnet 2001). L’étude des
séquences régulatrices de EDNRB chez la souris a permis l’identification d’un élément régulateur
responsable de son expression dans le SNE, situé entre -250pb et -1,2kb en amont du point de
démarrage de la transcription. Cet élément est activé de façon spatiotemporelle au moment où les
précurseurs du SNE entrent dans la partie distale de l’intestin (Zhu et al. 2004). La séquence de 1kb
ainsi identifiée comporte trois sites de fixation SOX (I à III) qui peuvent être liés par Sox10 in vitro.
Lorsque le site II est muté, l’expression du gène rapporteur LacZ sous contrôle de l’élément régulateur
est abolie dans le SNE, indiquant que ce site est indispensable au fonctionnement de l’enhancer dans
le SNE. En revanche, lorsque les sites I et/ou III sont mutés, l’expression de LacZ est détectée dans le
côlon chez moins de 50% des embryons testés. Dans les autres, l’expression de LacZ est limitée à la
partie distale de l’iléon et ne dépasse pas le cæcum. Les auteurs proposent donc un modèle où le site II
est requis pour l’activation spatiotemporelle de l’expression de EDNRB dans l’iléon distal et/ou le
maintien de son expression dans les précurseurs du SNE, puis les sites I et III sont responsables de son
expression dans le côlon. Dans les cas d’haploinsuffisance de Sox10, la quantité de protéine étant
réduite de moitié, la liaison ne se fait pas simultanément mais aléatoirement sur les trois sites. En
conséquence, selon le ou les sites occupés par Sox10 au niveau de l’enhancer, la dérégulation de
- 83 -
l’expression de EDNRB sera différente, et résultera en différentes anomalies de colonisation de
l’intestin. Ceci pourrait expliquer la variabilité des phénotypes intestinaux, en particulier au niveau de
la longueur de la zone aganglionnaire, observés chez les souris hétérozygotes Sox10+/-, et
éventuellement chez les patients WS4 si toutefois ce mécanisme de régulation est conservé chez
l’homme.
Mash1/Phox2b/Phox2a
Les précurseurs du système nerveux autonome issus de la crête neurale expriment à la fois Sox10,
Mash1 et Phox2b au moment de leur migration vers les sites de différenciation autonome. Or
l’expression de Mash1 et Phox2b est perdue dans les cellules de crête neurale exprimant Sox10 mutant
chez les souris homozygotes Dom, suggérant que Sox10 est nécessaire à l’induction de l’expression de
ces deux facteurs dans les précurseurs autonomes (Kim et al. 2003). En revanche, aux stades plus
tardifs, Sox10 et Mash1/Phox2b ont des profils d’expression exclusifs, indiquant que Sox10 n’est pas
impliqué dans le maintien de l’expression de ces facteurs. Cette observation est en accord avec le fait
que Mash1 et Phox2b régulent négativement l’expression de Sox10 (cf. chapitre IV-4a). Il existe donc
une boucle de régulation négative où Sox10 déclenche l’expression de Mash1 et Phox2b, puis ceux-ci
répriment l’expression de Sox10 dans les neurones autonomes. Ceci est en accord avec le rôle attribué
à Sox10, dont l’expression est nécessaire pour maintenir le potentiel neurogénique des cellules
progénitrices du système nerveux périphérique, mais qui doit être réprimé pour permettre la
différenciation neuronale de ces cellules.
Phox2a est un facteur neurogénique proche de Phox2b, également exprimé dans les neuroblastes
autonomes en cours de développement. Il est exprimé après Phox2b dans les ganglions sympathiques,
et n’est jamais co-exprimé avec Sox10, son profil est exclusif de celui de Sox10 dès son apparition.
Chez les mutants homozygotes Dom en revanche, des cellules co-exprimant Sox10 mutant et Phox2a
ont pu être observées, en particulier au cours de la migration des cellules de crête neurale alors que
l’expression de Phox2a n’est normalement détectée que lorsque ces cellules se sont agrégées pour
former les ganglions sympathiques. Ces observations indiquent donc que Sox10 réprime normalement
l’expression de Phox2a, et que cette répression est levée chez le mutant Dom.
Aucune action directe de Sox10 sur les séquences régulatrices de ces trois gènes n’a cependant été
décrite.
En conclusion, l’étude des gènes régulés par SOX10 dans divers types cellulaires permet de récapituler
son rôle dans chacun des lignages où il est exprimé, de mieux comprendre son fonctionnement
moléculaire et d’expliquer les phénotypes associés à son dysfonctionnement.
- 84 -
c. Partenaires
Les protéines SOX sont connues pour interagir avec de multiples partenaires permettant de réguler
leur fonction (cf. chapitre III-2a). L’identification des partenaires de SOX10 permettra donc de mieux
comprendre sa fonction à différents niveaux. Trois partenaires de SOX10 ont déjà été identifiés grâce
à leur profil d’expression (EGR2, PAX3, POU3F1), et deux d’entre eux s’avèrent avoir une action
synergique avec SOX10 sur les promoteurs de certains de ses gènes cibles (PAX3, EGR2). Un autre
partenaire, ZBP99, a été identifié grâce à son interaction avec SOX10 sur le promoteur de MPZ.
MITF, enfin, est à la fois une cible et un partenaire de SOX10 dans le lignage mélanocytaire.
Cependant il est très probable que d’autres facteurs sont capables d’interagir avec SOX10 et de réguler
sa fonction à différents stades du développement et dans différents types cellulaires. La recherche de
ces partenaires protéiques est donc un point essentiel pour la détermination de la place occupée par
SOX10 dans les voies de régulation l’impliquant.
Dans cette optique, nous avons mis en place une stratégie de crible double hybride afin de rechercher
de façon systématique de nouveaux partenaires protéiques de SOX10.
o Double hybride : stratégie et résultats
Le principe du double hybride repose sur la modularité des facteurs de transcription, c’est-à-dire sur le
fait que les domaines de liaison à l’ADN et de transactivation peuvent fonctionner séparément et être
apportés en trans. Dans le double hybride, une protéine constituant l’appât est fusionnée à un domaine
de liaison à l’ADN (LexA dans notre cas) qui reconnaît des sites de fixation localisés en amont de
gènes rapporteurs. Cet appât est mis en contact dans les levures avec différentes protéines fusionnées à
un domaine d’activation de la transcription (GAL4TA), qui constitueront les proies. S’il y a interaction
entre l’appât et une proie, le domaine d’activation de la transcription est alors amené au contact des
promoteurs des gènes rapporteurs dans une configuration qui permet l’activation de leur transcription,
et l’on peut par conséquent détecter leur expression (figure 14).
Dans le système en levure que nous avons choisi, les gènes rapporteurs sont le gène HIS3, permettant
la synthèse de l’histidine par une levure qui en est par ailleurs incapable, et le gène LacZ, induisant la
synthèse de la β-galactosidase. Les levures portant une proie capable d’interagir avec l’appât sont donc
sélectionnées sur un milieu dépourvu d’histidine et sont testée pour l’expression de la β-galactosidase
par un test de coloration X-gal.
- 85 -
Figure 14 : Principe du crible double hybride.
(1) Une protéine appât, fusionnée au domaine de liaison à l’ADN LexA, est introduite dans des levures en même
temps qu’une banque comportant des protéines proies fusionnées au domaine de transactivation de la protéine
GAL4.
(2) Lorsqu’il y a interaction entre l’appât et une proie, le complexe protéique ainsi formé va se lier au promoteur
de gènes rapporteurs comportant des sites de fixation Lex, et ainsi activer leur transcription. L’expression de ces
gènes rapporteurs peut alors être détectée pour identifier l’interaction.
La première limitation de cette technique se révèle lorsque la protéine à étudier est un facteur de
transcription. En effet, dans ce cas l’appât possède déjà un domaine de transactivation, et est donc
capable d’activer seul la transcription des gènes rapporteurs. Dans le cas de SOX10, nous avons
contourné cet obstacle en éliminant le domaine de transactivation. Prenant parti du fait que ce domaine
est à l’extrémité carboxy-terminale de la protéine, nous avons introduit une mutation non-sens en
position 376, générant ainsi une protéine tronquée juste avant le domaine de transactivation. La
protéine appât finalement produite dans la levure comporte le domaine LexA en position aminoterminale, suivi de 375 acides aminés de la protéine SOX10 humaine, incluant le domaine HMG
(figure 15).
SOX10
HMG
1
60
102
TA
182
232
308
LexA
376
466
HMG
1
60
102
182
232
308
375
Figure 15 : Protéine SOX10-appât utilisée pour réaliser le crible double hybride.
Le domaine de liaison à l’ADN LexA est fusionné à la partie amino-terminale de la protéine SOX10 humaine.
Un codon stop a été introduit en position 376 de la protéine SOX10 afin de supprimer son domaine d’activation
de la transcription.
- 86 -
Malgré la délétion du domaine de transactivation, cette protéine appât génère un léger bruit de fond
lorsqu’elle est introduite en levure, c’est-à-dire qu’elle active faiblement l’expression des gènes
rapporteurs même en l’absence d’interaction avec une proie. La première sélection en double hybride
étant réalisée sur milieu sans histidine, le bruit de fond peut être dans ce cas diminué par l’addition
dans le milieu de culture de 3-amino-1,2,4-triazol (3-AT), un inhibiteur de la synthèse de l’histidine.
Dans notre cas, le bruit de fond est éliminé en présence de 2mM de 3-AT. Le 3-AT n’a aucune
influence sur l’expression de la β-galactosidase. Cependant la détection de l’expression de ce gène
rapporteur est moins sensible que celle de l’histidine, par conséquent le bruit de fond généré par notre
protéine appât n’est pas détectable en coloration X-gal sur filtre, ce qui nous a permis d’utiliser ce test
lors de notre crible.
Le choix de la banque est crucial pour la réalisation d’un crible double hybride. Celle-ci est constituée
de plasmides comportant les ADN complémentaires des gènes exprimés par le tissu à partir duquel
elle a été construite, fusionnés avec la séquence codant le domaine GAL4TA. Il s’agit donc de choisir
une banque issue d’un tissu où la protéine qui servira d’appât est exprimée, et peut donc
potentiellement interagir avec d’autres protéines. Nous avons choisi d’utiliser une banque construite à
partir de ganglions de la racine dorsale, car l’expression de Sox10 est maintenue dans ce tissu à l’âge
adulte, ce qui a permis d’obtenir le matériel suffisant pour la construction de cette banque chez le rat.
Le plasmide codant l’appât a été cotransformé avec la banque dans des levures de souche L40. Les
levures ont ensuite été étalées sur le milieu solide sélectif dépourvu d’histidine et comportant 2 mM de
3-AT, et les clones capables de pousser sur ce milieu ont été relevés entre 3 et 7 jours après
transformation.
Les trois premiers clones apparus sur les boîtes contenaient des ADN complémentaires différents mais
correspondant au même gène : UBC9 (ubiquitin-conjugating enzyme 9). L’interaction avec Sox10 en
levure a été confirmée par la cotransformation directe du plasmide comportant l’ADN complémentaire
de UBC9 avec le plasmide appât. Les levures ainsi transformées poussent très bien sur milieu sélectif
et produisent une coloration bleue soutenue en test X-gal.
UBC9 a ainsi été nommé à cause de son homologie avec les enzymes de conjugaison de l’ubiquitine
déjà identifiées avant son clonage dans la levure (Seufert et al. 1995). Cependant, une étude plus
approfondie de la fonction de UBC9 et de ses homologues chez les mammifères a permis de
démontrer que cette enzyme n’est pas impliquée dans l’ubiquitination, mais dans la sumoylation des
protéines cibles.
- 87 -
o La SUMOylation : qu’est-ce que c’est ?
La sumoylation est un mécanisme proche de l’ubiquitination, basé sur le même principe de
conjugaison d’un petit peptide sur une protéine substrat. En revanche, à l’inverse de l’ubiquitination le
phénomène de sumoylation ne dirige pas les protéines substrat vers la dégradation par le protéasome,
mais modifie divers paramètres fonctionnels des protéines sumoylées, variables selon le substrat. Ces
paramètres incluent, de façon non exhaustive, la localisation sub-cellulaire, les interactions protéineprotéine, la liaison à l’ADN et/ou la fonction transactivatrice de facteurs de transcription.
Ce phénomène a été identifié relativement récemment (Mahajan et al. 1997), et a pris une ampleur
croissante au cours des dernières années. Aujourd’hui encore de nouvelles cibles de la sumoylation
sont très régulièrement décrites, et ce mécanisme est de mieux en mieux connu. De nombreuses revues
ont été publiées sur ce sujet, parmi lesquelles nous citerons Muller et al. 2001; Gill 2003; Verger et al.
2003; Hilgarth et al. 2004; Johnson 2004; Hay 2005.
Enzymologie
Il existe trois protéines SUMO chez les mammifères, SUMO-1, -2 et -3, exprimés ubiquitairement.
Récemment, un quatrième SUMO a été identifié, exprimé spécifiquement dans le rein, ce qui suggère
que certains modificateurs peuvent avoir un profil d’expression restreint et donc une fonction
spécifique d’un tissu (Bohren et al. 2004). Les protéines SUMO sont de petits peptides d’une centaine
d’acides aminés, qui vont être liés de façon covalente à des protéines substrat et modifier leur fonction.
Le mécanisme de conjugaison de SUMO à son substrat est très proche de celui impliqué dans
l’ubiquitination, cependant les enzymes impliquées dans cette conjugaison sont totalement différentes
dans ces deux processus (figure 16).
La conjugaison se fait en 4 étapes :
1. Maturation du modificateur (ubiquitine ou SUMO) par clivage de sa partie carboxy-terminale.
2. Activation du modificateur par une enzyme de type E1.
3. Conjugaison par une enzyme de type E2.
4. Ligation au substrat par une enzyme de type E3.
- 88 -
Maturation
Modificateur
Hydrolase
Mature
carboxy-terminale
Conjugaison
Enzyme
Enzyme de
Enzyme de
activatrice E1 conjugaison E2 ligation E3
ATP
S
Ubiquitine
UBA1
ATP
UBCs
S
SUMO
S
AOS1/
UBA2
S
UBC9
Substrat
S
Diverses
S
Diverses
Figure 16 : Comparaison des processus d’ubiquitination et de SUMOylation.
Le mécanisme de conjugaison est le même dans les deux processus, et implique la maturation du modificateur,
son activation, sa conjugaison, puis son transfert sur le substrat. Les enzymes impliquées dans les deux
mécanismes sont cependant différentes et exclusives.
Adapté de Muller et al. 2001.
L’étape de maturation consiste à cliver la partie carboxy-terminale de la protéine SUMO, de façon à
révéler un motif constitué de deux glycines qui permettra l’attachement au substrat. SUMO est alors
lié à un complexe d’activation, constitué d’un hétérodimère Aos1/Uba2 (également nommé
SAE1/SAE2 chez l’homme). Cette étape nécessite l’apport d’énergie (ATP) et résulte en la formation
d’une liaison thioester entre SUMO et la sous-unité Uba2. SUMO est ensuite transféré à la seule
enzyme de conjugaison connue pour la sumoylation, UBC9. Il est remarquable que cette enzyme soit
unique, en comparaison avec le processus d’ubiquitination qui compte de nombreuses enzymes de
conjugaison. La dernière étape de la sumoylation consiste à attacher SUMO à son substrat. Cette étape
implique des enzymes de ligation, dont l’existence n’a été démontrée que récemment. Il a toutefois été
suggéré qu’elles n’étaient pas indispensables au déroulement complet de la conjugaison, UBC9 étant
capable de reconnaître le substrat. Les enzymes de ligation sont définies par trois caractéristiques : la
liaison au substrat, directement ou indirectement, la liaison à UBC9, et la capacité à stimuler le
transfert de SUMO sur le substrat.
La sumoylation se produit au niveau d’un site consensus sur la protéine substrat correspondant à la
séquence protéique ΨKXE, où Ψ désigne un acide aminé hydrophobe, K est la lysine d’attachement
de SUMO, X est un acide aminé indifférent, et E est un acide glutamique. SUMO2 et SUMO3
comportent dans leur séquence protéique un site de sumoylation ce qui permet la formation de chaînes
de poly-SUMO, comme cela peut être observé pour l’ubiquitine (Tatham et al. 2001). SUMO1 en
revanche ne possède pas de site interne de sumoylation, il est par conséquent toujours attaché de façon
individuelle à son substrat.
- 89 -
La sumoylation est une modification dynamique, et peut donc être retirée du substrat grâce à des
protéases spécifiques, qui sont les mêmes que celles responsables de la maturation du peptide avant la
conjugaison.
Il n’existe pas d’enzyme impliquée à la fois dans l’ubiquitination et la sumoylation, ce qui indique que
ce sont bien deux mécanismes distincts malgré leurs similitudes. Les conséquences fonctionnelles de
ces modifications sont également divergentes. L’ubiquitination est généralement connue pour diriger
les protéines modifiées vers le système de dégradation protéique. Toutefois d’autres fonctions
émergent depuis quelques temps, qui suggèrent une fonction plus complexe permettant une régulation
dynamique de la fonction des protéines substrat, en particulier des facteurs de transcription. Dans le
cas de la sumoylation, dès le début de son étude il a été reconnu que cette modification n’était pas
impliquée dans la dégradation protéique. Les fonctions attribuées à la sumoylation sont diverses et
permettent la régulation de la fonction protéique à divers niveaux.
Conséquences de la SUMOylation
La sumoylation peut se produire dans le cytoplasme ou le noyau et régule la localisation sub-cellulaire
de certaines de ses cibles. En particulier, certains composants de la machinerie de sumoylation sont
localisés au niveau des pores nucléaires, suggérant que la modification des protéines cibles peut être
impliquée dans leur transport nucléaire. Un grand nombre de protéines sumoylées sont adressées au
noyau, et en particulier vers les corps nucléaires PML (PML-NB, pour promyelocytic leukemia
nuclear body), ainsi nommés du fait de l’accumulation de la protéine PML au niveau de ces corps
nucléaires et de leur absence dans les cas aigus de leucémie promyélocytique. Il n’est toutefois pas
clairement établi si la sumoylation entraîne l’adressage aux PML-NB, ou si l’adressage aux PML-NB
entraîne la sumoylation.
La sumoylation de certaines protéines est par ailleurs impliquée dans la régulation de leur export
nucléaire. De façon générale, la sumoylation apparaît donc comme un régulateur du transport
nucléocytoplasmique de certaines de ses cibles (Pichler and Melchior 2002).
La sumoylation a également été impliquée dans la régulation de l’expression génique, en particulier
via la modification de facteurs de transcription. Cette influence s’exerce d’une part par la régulation de
leur localisation sub-cellulaire et sub-nucléaire, entre autres par l’adressage vers les PML-NB. Outre
PML, beaucoup de facteurs de transcription sont trouvés dans ces corps nucléaires, suggérant un pôle
de régulation au niveau des PML-NB (Eskiw and Bazett-Jones 2002). D’autre part SUMO s’avère
avoir une influence directe sur la fonction transactivatrice de certains facteurs de transcription. Dans la
plupart des cas, la sumoylation semble avoir un effet négatif sur la régulation transcriptionnelle (Gill
2003; Verger et al. 2003). Le mécanisme sous-jacent à cette régulation n’est pas clair. La sumoylation
pourrait modifier la conformation de la protéine cible et ainsi rendre le domaine de transactivation
- 90 -
moins accessible à la machinerie transcriptionnelle. Il a également été suggéré que la sumoylation
modifie les interactions protéine-protéine, et par conséquent les contacts entre les facteurs de
transcriptions et leurs partenaires, cofacteurs, coactivateurs, ou corépresseurs. La sumoylation de
différents facteurs permettrait ainsi de moduler la formation de complexes protéiques de régulation de
la transcription.
La sumoylation joue également un rôle important dans l’intégrité génomique, et en particulier dans la
cohésion des chromosomes et l’assemblage des kinétochores. Des levures déficientes pour Smt3/Pmt3
(l’orthologue de SUMO1, présent en un seul exemplaire chez cet eucaryote) sont caractérisées par
l’occurrence de mitoses aberrantes et de défauts dans la ségrégation des chromosomes. De la même
façon UBC9 est impliqué dans le cycle cellulaire. La sumoylation concerne également un certain
nombre de suppresseurs de tumeur et de protéines de réparation de l’ADN, se dégageant comme un
régulateur global de la stabilité génomique.
La sumoylation est impliquée dans plusieurs processus biologiques de régulation protéique. Cette
modification hautement dynamique permet de moduler la fonction d’une grande variété de protéines,
et ainsi de contrôler des mécanismes aussi divers qu’essentiels, comme le cycle cellulaire, l’intégrité
génomique ou la régulation transcriptionnelle. La poursuite de l’étude de ce phénomène devrait
apporter dans les prochaines années de nouvelles perspectives sur les mécanismes moléculaires
régissant certains processus biologiques complexes.
o SOX10 et SUMOylation
UBC9 est l’unique enzyme de conjugaison de la protéine SUMO, et c’est à cette enzyme que l’on
attribue la fonction de reconnaissance du substrat. UBC9 est donc responsable de la spécificité de la
sumoylation, et interagit directement avec la protéine cible.
L’interaction de SOX10 avec UBC9 suggère que SOX10 est une cible de la sumoylation. Cette
modification post-traductionnelle permettrait une régulation fine de sa fonction, ce qui serait en accord
avec les multiples rôles attribués à ce facteur.
Etude de la SUMOylation de SOX10 : méthodes
Suite à l’identification de UBC9 en crible double hybride, nous avons cherché à savoir si SOX10
pouvait être sumoylé in vivo. Nous avons pour cela cloné la séquence codante des trois SUMO
humains dans un vecteur d’expression eucaryote, et y avons ajouté un « tag » permettant sa détection
en western blot. Nous avons choisi le tag Myc car sa petite taille permet de limiter la perturbation de la
conformation de la protéine taggée, et nous l’avons fusionné à la partie amino-terminale de SUMO (1,
2 ou 3), la partie carboxy-terminale étant clivée lors de la maturation de SUMO. Nous avons par
- 91 -
ailleurs transféré la séquence codante de UBC9 dans un vecteur d’expression permettant sa production
en lignée cellulaire, et apportant un tag V5-His en position carboxy-terminale. Enfin nous avons utilisé
un vecteur d’expression permettant la production de la protéine SOX10 humaine fusionnée au tag HA
en position carboxy-terminale. Ces vecteurs d’expression ont été transfectés dans des cellules HeLa, et
l’expression des protéines a été testée en western blot grâce à des anticorps anti-Sox10 (Calbiochem),
V5 (Invitrogen) et Myc (Clontech). Les interactions protéiques ont été testées par des expériences de
co-immunoprécipitation. Les protéines générées ont un poids moléculaire d’environ 57 kDa pour
SOX10-HA, 23 kDa pour UBC9-V5 et 13 kDa pour SUMO-Myc.
SOX10 est SUMOylé in vivo
Afin de confirmer l’interaction entre SOX10 et UBC9 d’une part, et de tester l’occurrence de la
sumoylation de SOX10 d’autre part, nous avons réalisé des expériences de co-immunoprécipitation.
Lorsque SOX10 est précipité par un anticorps dirigé contre son tag HA, la présence de UBC9 est
détectée en western blot. UBC9 est donc co-précipité avec SOX10, confirmant leur interaction in vivo
(figure 17, piste 2). Nous avons ensuite co-transfecté SOX10, UBC9 et SUMO1 dans les cellules
HeLa, puis nous avons réalisé une immunoprécipitation avec un anticorps dirigé contre le tag Myc,
précipitant ainsi toutes les protéines sumoylées. Le western blot détectant la présence de UBC9 révèle
une bande de poids moléculaire plus important que celui attendu pour UBC9 seul. Celle-ci correspond
à la conjugaison d’une protéine SUMO à UBC9, confirmant d’une part que ces deux éléments
reproduisent bien le mécanisme de sumoylation in vivo, à savoir que SUMO1 subit une maturation
puis est conjugué à UBC9, et d’autre part que la précipitation permet bien de recueillir les protéines
conjuguées à SUMO. Lorsque la même membrane est révélée pour la présence de SOX10, on observe
une bande correspondant à SOX10, mais également une bande de poids moléculaire plus élevé,
correspondant à la conjugaison de SUMO à SOX10 (figure 17, piste 3). SOX10 est donc bien sumoylé
in vitro. Il est intéressant de noter que la protéine SOX10 non sumoylée a également été co-précipitée
dans cette expérience. Il est probable qu’elle ait été entraînée par son interaction avec UBC9-SUMO
avant que SUMO lui soit transféré. Il est également possible que SOX10 non sumoylé interagisse avec
SOX10 sumoylé, voire avec d’autres protéines sumoylées présentes dans le lysat cellulaire.
L’expression des différentes protéines a par ailleurs été confirmée par western blot sur une fraction des
lysats ayant servi à l’immunoprécipitation. La détection de UBC9 révèle bien deux bandes,
correspondant aux formes conjuguée et non conjuguée de la protéine. La forme conjuguée est
également observée en l’absence de co-transfection de UBC9 avec SUMO1 (figure 17, piste 5), et
correspond dans ce cas à la conjugaison à UBC9 d’une protéine SUMO endogène. Lorsque SUMO1
est co-transfecté avec UBC9, cette bande est plus intense (figure 17, piste 7), indiquant que l’apport de
SUMO exogène permet de palier la limitation de protéine SUMO disponible en endogène. Lorsque
SOX10 est transfecté seul ou avec UBC9, la bande à 56 kDa est bien présente, mais aucune bande de
poids moléculaire supérieur n’est détectée. En revanche, la bande correspondant à la forme sumoylée
- 92 -
de SOX10 apparaît lorsque SOX10 est cotransfecté avec SUMO1, avec ou sans UBC9 (figure 17,
pistes 6 et 7). Ceci suggère que la forme sumoylée par la machinerie endogène ne peut être détectée
par la technique de western blot. La cotransfection de UBC9 avec SUMO1 ne semble pas augmenter la
proportion de SOX10 sumoylé.
SOX10-HA
UBC9-V5
SUMO1-Myc
11
22
33
SOX10-HA
UBC9-V5
SUMO1-Myc
44
55
66
77
98
98
SOX10-SUMO
WB 64
SOX10
64
SOX10
50
50
UBC9-SUMO
*
36
36
WB V5
UBC9
22
22
IP HA
Lysats
IP Myc
Figure 17 : SOX10 interagit avec UBC9 et est SUMOylé in vivo.
L’expression de SOX10 et UBC9 est détectée par western blot (WB) sur des lysats de cellules HeLa transfectées
par des vecteurs d’expression de SOX10-HA, UBC9-V5 et/ou SUMO1-Myc, avant (panneau de droite) et après
(panneau de gauche) immunoprécipitation de SOX10 (IP HA) ou de SUMO1 (IP Myc). La même membrane a
été révélée d’une part avec un anticorps dirigé contre SOX10, et d’autre part avec un anticorps dirigé contre le
tag V5 porté par UBC9. L’échelle de poids moléculaire située de chaque côté indique des marqueurs dont le
poids moléculaire est donné en kDa. Les formes conjuguées et non conjuguées de SOX10 et UBC9 sont
signalées. L’astérisque dans la piste 5 marque UBC9 conjugué à SUMO endogène.
La sumoylation de SOX10 a été confirmée par l’expérience inverse consistant à précipiter SOX10
grâce à son tag HA, et à révéler l’expression de SUMO (figure 18). Par ailleurs, le même procédé nous
a permis de montrer que SOX10 pouvait être conjugué aux trois protéines SUMO.
SOX10-HA
UBC9-V5
SUMO-Myc
1
2
3
Ø
98
SOX10-SUMO
IP HA
64
WB Myc
50
- 93 -
Figure 18 : Les trois protéines
SUMO peuvent être conjuguées à
SOX10.
SOX10 a été immunoprécipité (IP
HA) à partir de lysats de cellules
HeLa transfectées par SOX10-HA,
UBC9-V5 et Myc-SUMO 1, 2 ou 3.
La révélation de la présence de
SUMO par un western blot (WB)
Myc détecte une bande correspondant à SOX10 sumoylé, en
présence des trois SUMO (1, 2, 3)
mais pas en leur absence (Ø).
Identification des sites de SUMOylation de SOX10
La sumoylation de SOX10 étant établie, nous avons recherché dans la séquence protéique de SOX10
la séquence consensus de sumoylation ΨKXE. Nous avons ainsi identifié trois sites potentiels de
sumoylation, dont les positions et les séquences sont indiquées dans la figure 19. Les lysines pouvant
recevoir SUMO sont situées au niveau des acides aminés 55, 246 et 357. Les sites 1 et 3 correspondent
parfaitement à la séquence consensus. Le site 2 est moins adapté car le premier acide aminé du site
doit être hydrophobe mais également de grande taille, or la proline présente un encombrement stérique
limité. De fait, aucune séquence de sumoylation n’a jusqu’à présent été décrite avec une proline en
première position.
VKKE
1
55
HMG
PKTE
VKTE
2
246
3
357
TA
Figure 19 : SOX10 possède trois sites potentiels de SUMOylation.
Les séquences des trois sites sont indiquées. Les nombres sous la protéine donnent les positions des trois lysines
accepteuses de sumoylation, indiquées en rouge dans la séquence.
Les trois sites sont conservés dans l’appât que nous avons utilisé pour réaliser le crible double hybride.
Or il est décrit que la séquence de sumoylation participe à la reconnaissance de la protéine substrat par
UBC9. Afin d’évaluer l’implication de ces sites dans l’interaction de SOX10 avec UBC9, nous avons
réalisé un appât comportant uniquement la séquence amino-terminale de SOX10. Cet appât interagit
avec UBC9 en levure et augmente significativement l’expression des gènes rapporteurs. Le site 1
permet donc l’interaction de cet appât avec UBC9, bien que cette interaction semble moins robuste
que celle impliquant l’appât complet (figure 20A). Nous n’avons pas pu tester l’interaction de la partie
carboxy-terminale de SOX10 avec UBC9 car cet appât génère un bruit de fond trop important, y
compris lorsque le domaine de transactivation est éliminé.
Afin de déterminer si les trois sites peuvent influencer l’interaction entre SOX10 et UBC9, nous avons
muté le codon codant la lysine accepteuse de chaque site pour la transformer en alanine, la présence de
cette lysine étant indispensable pour la reconnaissance du substrat par UBC9.
La mutation du site 1 dans l’appât comportant uniquement la séquence amino-terminale de SOX10
abolit son interaction avec UBC9 (figure 20A). L’interaction est donc spécifique du site de
sumoylation. Dans le cas de l’appât complet, la mutation individuelle de chacune des lysines ne
semble pas affecter l’interaction avec UBC9. En revanche l’interaction est abolie lorsque les sites 1 et
3 sont mutés simultanément, ou lorsque les trois sites sont mutés (figure 20A et données non
présentées). Les sites 1 et 3 sont donc impliqués dans l’interaction de SOX10 avec UBC9, et le site 2
seul ne semble pas suffisant pour maintenir cette interaction.
- 94 -
Afin de définir plus précisément la fonction de chaque site dans cette interaction, nous avons réalisé un
test quantitatif d’activité β-galactosidase. Ceci consiste à mesurer l’activité β-galactosidase non plus
sur filtre mais en test liquide. Les levures sont mises en présence d’ONPG, un substrat de la βgalactosidase qui génère une coloration jaune lorsqu’il est dégradé par cette enzyme. L’intensité de la
coloration jaune est mesurée par spectrophotométrie, et est ensuite rapportée à la quantité de levures
ayant participé à la réaction, évaluée par la densité optique de la culture utilisée. Afin de prendre en
compte le bruit de fond généré par l’appât, l’activité β-galactosidase est calculée selon la formule
suivante :
Mesure β-gal (appât + UBC9)
Activité β-gal =
Mesure β-gal (appât + GAL4TA seul)
Ce test permet de mesurer de façon quantitative l’activation du gène rapporteur LacZ par l’interaction
appât-proie. Les résultats obtenus confirment que la mutation de la lysine du site 2 n’affecte pas
significativement l’interaction de SOX10 avec UBC9. En revanche la mutation individuelle des sites 1
et 3 diminue de 50% l’activité β-galactosidase, et leur mutation simultanée résulte en l’abolition
presque totale de l’activation du gène LacZ, de façon comparable à ce qui est observé lorsque les trois
sites sont mutés simultanément (figure 20B).
En conclusion, l’interaction entre SOX10 et UBC9 est relayée par les sites de sumoylation 1 et 3 en
levure. Ceci suggère que ces sites pourraient être impliqués dans la sumoylation de SOX10 in vivo.
Appât
A
A
B
B
LexA
11
LexA
11
LexA
11
LexA
11
HMG
Interaction avec UBC9
22
33
+++
+
Ø
HMG
22
33
Ø
80
Mutant
% d’activité β-gal
conservée
60
Mut 1
41,3% ± 9,8
50
Mut 2
88,7% ± 19,3
40
Mut 3
47,4% ± 15,2
30
Mut 1/2
54,3% ± 16,6
Mut 2/3
43,0% ± 13,2
Mut 1/3
2,2% ± 0,9
Mut 1/2/3
3,3% ± 1,4
20
10
0
Sox10
M
u
M t1
u
M t2
ut
3
M
ut
M 1/
u 2
M t 2/3
ut
1/
3
Activité β-gal
70
Mut 1/2/3
- 95 -
Figure 20 : Les sites de
SUMOylation 1 et 3 sont
responsables de l’interaction
SOX10-UBC9 en levure.
A : L’appât complet et sa partie
amino-terminale interagissent
avec UBC9 et activent l’expression des gènes rapporteurs.
La mutation du site de sumoylation 1 dans la partie aminoterminale, et des sites 1 et 3
dans l’appât complet abolissent
l’interaction avec UBC9.
B : L’activité β-galactosidase a
été mesurée quantitativement
pour chaque type d’interaction
appât-proie entre UBC9 et
l’appât SOX10 sauvage ou
muté dans un, deux ou trois des
sites de sumoylation. L’activité
conservée par chaque appât
muté par rapport à l’appât non
muté est indiquée dans le
tableau.
Effets fonctionnels de la SUMOylation de SOX10
La forme sumoylée de SOX10 est difficile à détecter en western blot étant donné sa faible proportion
par rapport à la forme non conjuguée. Il est donc très délicat d’interpréter l’absence de la bande à
mobilité réduite lors de l’étude des mutants de sumoylation. Par ailleurs le fait de ne pas observer cette
bande signifie qu’elle n’est pas détectée, et non pas qu’elle est totalement absente, ce qui peut avoir
des conséquences fonctionnelles différentes. Nous avons donc choisi d’étudier l’effet de la
sumoylation sur la fonction de SOX10, et l’implication dans ce mécanisme des trois sites potentiels de
sumoylation de SOX10.
SOX10 est un facteur de transcription, et doit donc être adressé au noyau pour exercer cette fonction.
Pour cela il possède un site de localisation nucléaire bipartite, initialement identifié chez SOX9 et situé
dans le domaine HMG (Sudbeck and Scherer 1997). Plus récemment toutefois une propriété
inhabituelle a été attribuée à SOX10. Il semble en effet que SOX10 n’est pas statique dans la cellule,
mais que, bien que sa répartition globale soit majoritairement nucléaire, il navigue entre le cytoplasme
et le noyau (Rehberg et al. 2002). Cette propriété est due à la présence d’un site d’export nucléaire
également situé dans le domaine HMG. La navigation entre le noyau et le cytoplasme semble par
ailleurs être nécessaire à sa fonction de régulation de la transcription, car l’inhibition de son export
nucléaire diminue sa capacité transactivatrice. L’une des fonctions attribuées à la sumoylation est la
régulation du transport nucléocytoplasmique de certaines de ses cibles (Pichler and Melchior 2002).
La sumoylation de SOX10 pourrait donc avoir une influence sur sa navigation nucléocytoplasmique.
Afin de tester cette hypothèse, nous avons réalisé des expériences d’immunofluorescence sur des
cellules HeLa transfectées avec SUMO1-Myc et SOX10 (non taggé) sauvage ou muté sur un, deux ou
trois sites de sumoylation. La localisation cellulaire de SOX10 et SUMO est révélée par des anticorps
dirigés contre SOX10 et Myc, couplés à des anticorps secondaires fluorescant en vert pour SUMO, en
rouge pour SOX10. Les noyaux ont par ailleurs été révélés par marquage au DAPI. La protéine
SOX10 sauvage est détectée de façon diffuse dans le noyau exclusivement (figure 21). La localisation
cytoplasmique n’est pas détectée dans cette expérience, car celle-ci est transitoire et manifestement
fugace, et ne peut être que rarement visualisée dans les cellules. L’expression de SUMO1-Myc est
cohérente avec celle de la protéine sauvage, ubiquitaire mais majoritairement nucléaire, formant un
anneau au niveau de la membrane nucléaire (Su and Li 2002). La mutation d’un ou plusieurs sites de
sumoylation de SOX10 ne modifie pas sa localisation cellulaire, ni son profil nucléaire (figure 21 et
données non présentées). La sumoylation de SOX10 n’est donc pas indispensable à son import
nucléaire. Il est toutefois possible que cette modification soit impliquée dans son export nucléaire, par
exemple en modifiant son interaction avec le complexe d’export. Ceci pourrait être testé par des
expériences d’hétérocaryons telles que celles présentées par Rehberg et al. (2002).
- 96 -
SOX10
SUMO1
DAPI
SOX10
sauvage
SOX10
mut 1/2/3
Figure 21 : La SUMOylation de SOX10 ne modifie pas sa localisation cellulaire.
La localisation cellulaire et le profil nucléaire sont les mêmes pour la protéine SOX10 sauvage et pour la
protéine mutée dans les trois sites de sumoylation. L’expression de SOX10 est révélée en rouge, celle de
SUMO1 en vert, les noyaux sont marqués au DAPI en bleu.
La sumoylation est impliquée dans la régulation de la fonction de plusieurs facteurs de transcription
(Gill 2003; Verger et al. 2003). Nous avons testé les conséquences de la mutation des sites de
sumoylation de SOX10 sur sa capacité à activer la transcription à partir du promoteur de GJB1
(Bondurand et al. 2001). Ce promoteur présente l’avantage d’impliquer à la fois la dimérisation de
SOX10 et son action synergique avec EGR2. Nous avons donc transfecté le gène luciférase sous
contrôle du promoteur GJB1 avec chacune des protéines SOX10 sauvage ou mutée sur un, deux ou
trois sites de sumoylation, seule ou en association avec EGR2. Nous avons ainsi constaté que la
mutation d’au moins un site de sumoylation de SOX10 modifie sa capacité à activer la transcription à
partir du promoteur et/ou sa capacité à agir en synergie avec EGR2. La figure 22A présente les
résultats de ces expériences : la capacité transactivatrice de chacune des protéines mutées est rapportée
à celle de la protéine sauvage, seule ou en synergie avec EGR2.
La mutation individuelle des sites 1 et 3 augmente significativement la capacité transactivatrice de
SOX10 seul. Le site 2 semble en revanche ne pas avoir d’influence sur cette fonction. Ceci fait écho
au fait que le site 2 seul ne permet pas l’interaction de SOX10 avec UBC9 (cf. figure 20), et suggère
que ce site n’est pas impliqué dans la sumoylation de SOX10. Il est par conséquent troublant de
constater que lorsque deux des trois sites de sumoylation sont mutés, la capacité transactivatrice de
SOX10 seul n’est pas significativement altérée, et ce quelle que soit la combinaison des sites. Ainsi la
mutation simultanée des sites 1 et 2 ne reproduit pas l’effet observé lorsque seul le site 1 est muté. Le
même phénomène est observé pour la mutation des sites 2 et 3. Plus frappant encore, la mutation des
sites 1 et 3 ne produit aucun effet sur la fonction de SOX10 seul sur le promoteur.
Lorsque SOX10 est cotransfecté avec EGR2, l’effet des mutations est là plus évident : la mutation
d’un ou plusieurs sites de sumoylation augmente significativement l’activation synergique du
promoteur par SOX10 et EGR2. Ce phénomène est particulièrement évident lorsque l’on considère
- 97 -
l’index synergique de chaque réaction (figure 22B). Cet index correspond au rapport entre l’activation
mesurée en présence des deux facteurs et la somme des activations individuelles de chaque facteur.
Un effet additif donne un index synergique égal à 1. Toute valeur supérieure à 1 indique donc une
coopération entre les deux facteurs. L’index synergique de SOX10 et EGR2 augmente lorsque les sites
de sumoylation sont mutés individuellement ou collectivement, indiquant que l’abrogation de la
sumoylation de SOX10 favorise sa coopération transcriptionnelle avec EGR2 sur le promoteur GJB1.
Dans tous les cas, le gain d’activation est maximum lorsque les trois sites sont mutés, indiquant que
chacun de ces sites est impliqué dans la sumoylation de SOX10 et influence sa fonction
transcriptionnelle.
A
A
B
B
SOX10 mut
SOX10 s
SOX10 mut + EGR2
SOX10 s + EGR2
SOX10
Mut 1
Mut 2
Mut 3
Mut 1/2
Mut 2/3
Mut 1/3
Mut 1/2/3
0%
50%
100%
150%
200%
Activité par rapport à SOX10 sauvage
0
1
2
3
4
5
Index de synergie
Figure 22 : La SUMOylation réprime la fonction transcriptionnelle de SOX10.
A : La mutation des sites de sumoylation de SOX10 augmente sa capacité transactivatrice sur le promoteur de
GJB1. Les valeurs sont indiquées en pourcentages par rapport à l’activité de la protéine sauvage.
SOX10 s : SOX10 sauvage ; SOX10 mut : SOX10 muté dans 1, 2 ou 3 de ses sites de sumoylation.
B : L’index synergique représente le rapport entre l’activation mesurée en présence des deux facteurs et la
somme des activations individuelles de chaque facteur. L’index synergique de la protéine sauvage est indiqué en
référence. La mutation des sites de sumoylation augmente l’index synergique de SOX10 avec EGR2.
Notre hypothèse pour expliquer ces résultats est la suivante : nos observations précédentes suggèrent
qu’une seule protéine SUMO est conjuguée à SOX10, car une seule bande à mobilité réduite est
observée en western blot. Ceci suppose qu’un seul site de sumoylation est utilisé. Pourtant, les tests
d’interaction en levure suggèrent qu’au moins deux sites, les sites 1 et 3 permettent l’interaction de
SOX10 avec UBC9, et peuvent donc être des cibles de sumoylation. Par ailleurs les résultats de tests
luciférase indiquent que les trois sites influencent la fonction de SOX10, suggérant que le site 2 peut
également être sumoylé. Selon le modèle que nous proposons, un seul site est effectivement utilisé à la
fois, mais tous trois ont la capacité à recevoir SUMO.
La régulation de GJB1 par SOX10 implique sa dimérisation sur le promoteur, ainsi que sa coopération
avec EGR2. Notre hypothèse est que la sumoylation des sites 1 et 3 perturbe la dimérisation de
SOX10, mais que les trois sites sont impliqués dans sa coopération avec EGR2. Lorsque SOX10 est
- 98 -
seul en présence du promoteur, la liaison de deux protéines sur le promoteur s’accompagne de leur
interaction directe, et probablement d’une courbure de l’ADN permettant la formation d’un complexe
ADN-protéine tel qu’illustré par la figure 23A. Dans cette configuration, la sumoylation du site 1 et/ou
du site 3 va générer un encombrement stérique qui risque de perturber l’interaction entre les deux
protéines, et éventuellement la coopération des deux domaines de transactivation pour activer la
transcription. L’abolition de la sumoylation de ces sites permet donc de faciliter les interactions entre
les deux protéines SOX10. La sumoylation du site 2 ne perturbe pas a priori la coopération entre deux
protéines SOX10, ce qui explique que la mutation individuelle de ce site ne modifie pas l’activité de
SOX10. Cependant lorsque deux des trois sites sont mutés, la sumoylation est forcée sur le dernier site
restant. Lorsque les sites 1 et 3 sont mutés, le risque que deux protéines sumoylées sur le site 2 se
dimérisent est multiplié par 3. Or selon notre modèle, l’ajout de deux protéines SUMO au lieu d’une à
ce niveau du complexe perturberait sa stabilité et n’apporterait donc pas d’avantage par rapport à la
sumoylation des deux autres sites.
Lorsque EGR2 est impliqué dans la réaction, le complexe ADN-protéine est alors différent puisqu’il
implique cette fois au moins trois partenaires protéiques (figure 23B). Selon ce modèle, la sumoylation
de chacun des trois sites perturbe l’interaction des protéines SOX10 avec EGR2 et déstabilise donc le
complexe d’activation de la transcription. Les mutations successives de tous les sites augmentent la
force des interactions protéiques à la fois entre les deux protéines SOX10 et entre SOX10 et EGR2,
permettant une coopération plus efficace entre les trois partenaires et donc une activation renforcée de
la transcription.
Dimérisation
HM
G
2
3
1
3
TA
1
2
HM
G
Synergie
G
HM
2
1
3
TA
Zn
EGR2
TA
3
1
2
HM
G
B
B
TA
A
A
- 99 -
Figure 23 : Modèle de fonctionnement
de SOX10 sur le promoteur GJB1.
A : Dimérisation de SOX10 en
l’absence de partenaire. L’interaction de
deux protéines SOX10 est schématisée
dans le contexte du promoteur de GJB1.
Les chiffres indiquent les positions des
trois sites de sumoylation. L’ADN est
schématisé une double hélice. SOX10 se
fixe dans le petit sillon de l’ADN.
B : Complexe protéique regroupant
deux protéines SOX10 et EGR2. Les
interactions protéiques sont modifiées
par l’implication de EGR2 dans le
complexe transactivateur. EGR2 se fixe
dans le grand sillon de l’ADN via son
domaine à doigts de zinc (Zn).
Conclusion
Cette étude nous a permis de démontrer la sumoylation de SOX10 et son effet sur sa fonction de
transactivation. SOX10 possède trois sites de sumoylation qui peuvent tous être utilisés pour sa
modification post-traductionnelle. Il faut cependant noter que l’attachement direct de SUMO à chacun
de ces sites n’a pas été démontré. Or on sait que les lysines sont les cibles de plusieurs types de
modifications post-traductionnelles, incluant également l’ubiquitination et l’acétylation (Freiman and
Tjian 2003). Ces modifications n’étant pas exclusives l’une de l’autre, il est possible que les effets que
nous avons constaté en mutant les lysines des sites potentiels de sumoylation de SOX10 soient le
résultat de l’altération de plusieurs mécanismes distincts. Toutefois ces résultats démontrent que des
modifications post-traductionnelles, incluant la sumoylation, peuvent moduler la fonction de SOX10.
La sumoylation de facteurs de transcription a dans la plupart des cas un effet négatif sur leur fonction
régulatrice (Gill 2003). Ceci ne se dément pas dans le cas de SOX10, dont l’activité régulatrice est
réprimée par la sumoylation dans le contexte du promoteur de GJB1. Nos résultats suggèrent que les
trois sites de sumoylation identifiés chez SOX10 peuvent être utilisés, cependant ils n’ont
probablement pas la même importance in vivo. L’utilisation différentielle de ces trois sites pourrait
permettre une régulation de la fonction de SOX10 selon le type cellulaire, les partenaires présents dans
l’environnement, le contexte génomique, etc. Ceci permettrait d’expliquer les différentes fonctions
attribuées à SOX10 à différents stades du développement et dans différents types cellulaires.
La sumoylation de plusieurs protéines SOX a été récemment décrite, suggérant que ce mécanisme est
plus généralement répandu dans la famille SOX (Komatsu et al. 2004; Savare et al. 2005). En
particulier, SOX9 est sumoylé au niveau d’une lysine située en position 396 de la protéine. Bien que
ce résidu ne soit pas conservé entre les facteurs SOX du groupe E, sa position est réminiscente du site
3 de sumoylation de SOX10. Toutefois d’autres sites potentiels de sumoylation présents dans la
séquence de SOX9 non pas été testés. Ces sites sont situés dans des régions correspondant aux deux
autres sites de SOX10, et pourraient donc également réguler la fonction de SOX9. La sumoylation de
SOX9 réprime sa capacité à activer la transcription en coopération avec SF1 (Komatsu et al. 2004).
Une fois encore, cette observation rappelle les résultats de notre étude de la sumoylation de SOX10. Il
est donc probable que la sumoylation fasse partie des mécanismes de régulation des facteurs SOX, et
en particulier des facteurs du groupe E.
Il est intéressant de noter que SF1, le partenaire de SOX9 est également sumoylé, et que sa
sumoylation module son interaction synergique avec SOX9. La sumoylation de plusieurs facteurs
impliqués dans la même cascade de régulation peut donc permettre de moduler le déroulement de cette
cascade à de multiples niveaux. Ceci est à mettre en parallèle avec le fait que MITF a récemment été
décrit comme une cible de la sumoylation (Miller et al. 2005). MITF est un partenaire de SOX10 dans
le lignage mélanocytaire et active en synergie avec lui l’expression du gène DCT. L’interaction de
SOX10 avec ses partenaires peut donc également être modulée par la modification post- 100 -
traductionnelle de ses cofacteurs. Ce n’est toutefois probablement pas le cas de EGR2 car nous
n’avons pas retrouvé de site potentiel de sumoylation dans sa séquence protéique. En revanche, de tels
sites sont présents dans la séquence protéique de PAX3, partenaire de SOX10 capable d’interagir
directement avec lui pour activer la transcription de plusieurs de ses gènes cibles. La sumoylation de
ces deux facteurs pourrait participer aux variations observées dans leur mécanisme de régulation de
leurs gènes cibles (cf. chapitre IV-4b).
Ces observations soulignent la complexité des mécanismes de régulation impliquant des facteurs de
transcription au cours du développement.
- 101 -
V. Conclusions – Perspectives
SOX10, identifié en 1998 comme un facteur de transcription spécifique des cellules gliales du système
nerveux périphérique, se révèle aujourd’hui comme un facteur aux fonctions multiples et complexes,
impliqué dans de nombreux processus et à de nombreux stades du développement embryonnaire.
Initiée dès l’identification de SOX10, la recherche que nous avons développée sur ce facteur de
transcription repose à la fois sur des études cliniques et sur une analyse de sa fonction au niveau
moléculaire.
Nous avons ainsi participé à l’étude des neurocristopathies associées à des mutations du gène SOX10
chez l’homme et la souris. Des mutations hétérozygotes du gène SOX10 sont impliquées dans des cas
de syndrome de Waardenburg de type IV (WS4), associant les signes cliniques de la maladie de
Hirschsprung (mégacôlon aganglionnaire congénital) et du syndrome de Waardenburg (défauts
pigmentaires et surdité). Plus récemment, des mutations de SOX10 ont également été retrouvées chez
des patients présentant un phénotype neurologique périphérique et/ou central associé au WS4. Le
syndrome résultant a été nommé PCWH, pour « Peripheral demyelinating neuropathy, Central
dysmyelinating leukodystrophy, Waardenburg syndrome and Hirschsprung disease ».
Nous avons permis l’affinement de la description des phénotypes associés à des mutations de SOX10
en décrivant plusieurs patients porteurs de mutations de SOX10 et présentant une pseudo-obstruction
intestinale chronique, qui se distingue de la maladie de Hirschsprung par la persistance de cellules
ganglionnaires au niveau du côlon. Le mécanisme sous-jacent à ce phénotype n’est pas clair.
Dans les cas de maladie de Hirschsprung, l’absence de cellules ganglionnaires du système nerveux
entérique explique le défaut occasionné. Ceci est à mettre en parallèle avec l’observation que les
ganglions entériques ne se forment pas chez les mutants Sox10, et aucun neurone ou progéniteur
entérique n’est détecté le long de l’intestin dans sa partie aganglionnaire.
Dans les cas de POIC en revanche, les cellules entériques sont bien présentes, et le défaut doit alors
être attribué à une anomalie de fonctionnement du SNE dont l’origine n’est pas déterminée. Le fait que
les ganglions entériques se soient formés suggère que les mutations de SOX10 impliquées dans ces cas
ont un effet plus limité sur le développement du SNE que les mutations associées aux cas de maladie
de Hirschsprung. Alternativement, on peut envisager l’hypothèse que cette variation phénotypique est
due à l’expression différente de gènes modificateurs influant sur la fonction de SOX10. Cette
hypothèse est corroborée par une étude récente montrant que le génotype au locus Ednrb influence la
pénétrance et la sévérité de l’aganglionose chez les souris mutantes Dom (Cantrell et al. 2004). Ceci
démontre l’importance de la vision globale et multigénique que l’on doit adopter lorsqu’on analyse les
défauts associés à une pathologie aussi complexe que la maladie de Hirschsprung ou le syndrome de
Waardenburg. Les études futures de la fonction de SOX10 dans le SNE devront permettre de
déterminer pourquoi dans les cas de pseudo-obstruction intestinale chronique les cellules des
- 102 -
ganglions entériques, bien qu’ayant réussi à établir ces structures, ne permettent pas leur
fonctionnement normal, et quelle est la part de la fonction de SOX10 dans ce défaut.
Nous avons également apportés de nouvelles pistes pour mieux comprendre la fonction de SOX10 en
identifiant plusieurs de ses gènes cibles. SOX10 est en particulier fortement impliqué dans la
différenciation gliale du système nerveux central et périphérique, où son expression est absolument
indispensable à la différentiation correcte des oligodendrocytes (SNC) et des cellules de Schwann
(SNP). Ces deux types cellulaires étant responsables de la production de la myéline dans le système
nerveux, les gènes de myéline s’avèrent être des cibles privilégiées de la fonction régulatrice de
SOX10. Dans ce contexte, nous avons démontré que SOX10 régule directement l’expression de GJB1
en se liant à son promoteur spécifique de la myéline, et active sa transcription en synergie avec EGR2,
autre facteur essentiel du développement des cellules de Schwann. Le mécanisme de régulation
implique la dimérisation de SOX10 au niveau de deux sites de liaison voisins sur ce promoteur, ce qui
permet une activation beaucoup plus importante de la transcription. De façon particulièrement
intéressante, nous avons montré que des mutations du promoteur GJB1 associées à des cas de maladie
de Charcot-Marie-Tooth liée à l’X affectent la liaison de SOX10 sur le promoteur et diminuent
significativement son activité régulatrice sur ce promoteur. Ceci indique d’une part qu’une
dérégulation de l’expression de GJB1 par SOX10 est probablement à l’origine du phénotype
pathologique chez les porteurs de ces mutations. Le fait que nous ayons observé ce type de mutation
dans plusieurs familles suggère que ce mécanisme est régulièrement impliqué dans des cas de CMTX.
L’étude du promoteur de GJB1 pourrait donc être incluse dans l’analyse génétique de cas de CMTX
où aucune mutation de la séquence codante du gène n’a pu être décelée. D’autre part, des mutations de
SOX10 diminuent également sa capacité à activer la transcription à partir du promoteur GJB1,
suggérant que la dérégulation de l’expression de ce gène participe à l’occurrence d’un phénotype de
démyélinisation périphérique chez certains patients PCWH.
L’identification de UBC9, enzyme de conjugaison du modificateur SUMO, comme partenaire
protéique de SOX10 nous a amené à démontrer sa sumoylation, modification post-traductionnelle
permettant la régulation fine de son activité protéique. Cette modification réprime la capacité
d’activation de la transcription de SOX10. Nos résultats suggèrent par ailleurs que la possibilité de
modifier la protéine à différents sites induit des effets différents sur le fonctionnement moléculaire de
SOX10, permettant de moduler d’une part sa capacité à se dimériser sur le promoteur de GJB1, et
d’autre part son interaction synergique avec EGR2. L’utilisation de différentes combinaisons de sites
pouvant accepter des modificateurs permet d’adapter la modification de la protéine et donc de faire
varier sa fonction selon le type cellulaire, les partenaires présents dans l’environnement, le contexte
génomique, etc. Ceci permettrait d’expliquer les différentes fonctions attribuées à SOX10 à différents
stades du développement et dans différents types cellulaires.
- 103 -
La sumoylation est la première modification post-traductionnelle décrite pour SOX10. Il n’est
toutefois pas à exclure que d’autres types de modifications peuvent réguler sa fonction au niveau
cellulaire. L’occurrence de telles modifications, et surtout leur signification pour la fonction de
SOX10 in vivo restent à déterminer. Ceci nécessitera la mise en place de systèmes d’études
reconstituant le contexte cellulaire dans lequel évolue SOX10 dans les lignages où il est exprimé. Un
système de ce type est constitué par un modèle de culture de progéniteurs entériques permettant
l’isolement et la culture de cellules souches du SNE. La modification du milieu de culture induit leur
différenciation vers un lignage de type neuronal ou glial et permet l’étude de leurs capacités de
prolifération et de différenciation en fonction du contexte environnemental. SOX10 est exprimé dès
l’isolement de ces cellules, puis est maintenu lors de la différenciation gliale, et éteint lors de la
différenciation neuronale, ce qui correspond au profil d’expression de SOX10 observé in vivo
(Bondurand et al. 2003). Des données préliminaires indiquent un rôle crucial de SOX10 dans le
maintien du caractère pluripotent des cellules progénitrices, comme cela a déjà été décrit par Kim et
al., dont le système de culture est très proche de ce modèle (Kim et al. 2003). Ce système offre de
nouvelles perspectives pour étudier la fonction de SOX10 dans un environnement cellulaire plus
proche de celui représenté in vivo.
L’ensemble des travaux présentés dans ce manuscrit permet de mieux comprendre le rôle joué par
SOX10 au cours du développement et dans la physiopathologie de maladies telles que le syndrome de
Waardenburg de type IV ou le syndrome PCWH.
Cependant de nombreux aspects de l’étude de SOX10 restent à éclaircir. La caractérisation des
facteurs régulant l’expression de SOX10, la poursuite de la recherche de ses cibles transcriptionnelles,
et la recherche de nouveaux partenaires font partie des approches qui nous permettront d’avoir une
vision plus globale de la place occupée par SOX10 dans les différentes voies de régulation dans
lesquelles il est impliqué.
- 104 -
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Résumé :
SOX10 appartient à la famille des facteurs de transcription SOX, caractérisés par un
domaine de liaison à l’ADN similaire au domaine HMG (high-mobility group) du facteur de
détermination du sexe SRY (SOX = SRY box). SOX10 est exprimé très précocement dans
les cellules de crête neurale au moment de leur émergence, puis son expression est
maintenue dans les dérivés de crête neurale contribuant à former les ganglions
sensoriels, sympathiques et entériques, les mélanocytes, et certaines cellules gliales du
système nerveux central et périphérique (SNC, SNP). Chez l’adulte, SOX10 est présent
dans les cellules gliales du SNC (oligodendrocytes) et du SNP (cellules de Schwann).
Des mutations hétérozygotes du gène SOX10 ont été identifiées chez des patients
atteints du syndrome de Waardenburg de type IV (WS4), associant les signes cliniques
de la maladie de Hirschsprung (mégacôlon aganglionnaire congénital) et du syndrome de
Waardenburg (défauts pigmentaires et surdité). Plus récemment, des mutations de
SOX10 ont également été retrouvées chez des patients présentant un phénotype
neurologique périphérique et/ou central associé au WS4. Le syndrome résultant a été
nommé PCWH, pour « Peripheral demyelinating neuropathy, Central dysmyelinating
leukodystrophy, Waardenburg syndrome and Hirschsprung disease ». Nous avons par
ailleurs démontré l’implication de mutations de SOX10 dans des cas de pseudoobstruction intestinale chronique associée à certains phénotypes du syndrome de
Waardenburg.
SOX10 étant un facteur de transcription, l’expression de sa fonction passe par la
régulation de ses gènes cibles. Des cibles de SOX10 ont ainsi été identifiées dans chacun
des lignages où il est exprimé, et permettent de mieux comprendre le mécanisme
physiopathologique responsable des défauts associés à une mutation de SOX10. Dans ce
contexte, nous avons identifié le gène GJB1, codant la connexine 32, comme une cible
transcriptionnelle de SOX10 dans les cellules de Schwann. L’identification de mutations
affectant un site de liaison de SOX10 sur le promoteur de GJB1 nous a permis d’impliquer
des défauts de régulation de ce gène dans plusieurs cas de maladie de Charcot-MarieTooth liée à l’X (CMTX), apportant ainsi de nouvelles données sur les mécanismes
physiopathologiques à l’origine des neuropathies périphériques observées chez certains
patients porteurs de mutations de SOX10 d’une part, et dans certains cas de CMTX
d’autre part.
La réalisation d’un crible double hybride nous a par ailleurs permis de révéler un aspect
insoupçonné de la régulation de SOX10 : la sumoylation. Cette modification posttraductionnelle hautement dynamique de la protéine SOX10 module sa capacité
d’activation transcriptionnelle, permettant ainsi une régulation fine de sa fonction, en
accord avec les multiples rôles attribués à ce facteur.
L’ensemble des travaux présentés dans ce manuscrit permet de mieux comprendre le
rôle joué par SOX10 au cours du développement et dans la physiopathologie de maladies
telles que le syndrome de Waardenburg de type IV ou le syndrome PCWH.
Mots-clés :
SOX10 ; Waardenburg ; Hirschsprung ; PCWH ; pseudo-obstruction
intestinale
chronique ; crête neurale ; GJB1 / connexine 32 ; Maladie de Charcot-Marie-Tooth ;
UBC9 ; SUMO.
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