Dregen? Encore une icône tristement méconnue
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Dregen? Encore une icône tristement méconnue
LE JOURNAL DU JURA SAMEDI 25 JANVIER 2014 26 RIFFS HIFI VOYAGE EN TERRE INCONNUE La Suède, cette terre fertile pour le rock Dregen? Encore une icône tristement méconnue PASCAL VUILLE La Suède vit dans l’ombre du Royaume-Uni au niveau musical. Elle constitue pourtant depuis vingt-cinq ans un formidable vivier d’authentiques meutes sauvages, malheureusement occultées, dont Dregen est le porte-drapeau. La plupart de ces noms ne vous diront probablement pas grandchose: The Hives, Backyard Babies, The Hellacopters, Hardcore Superstar, The Peepshows, Imperial State Electric, Maryslim, Graveyard. Quel dommage! Ces ambassadeurs du rock alternatif made in Sweden mériteraient davantage qu’une demi-colonne dans «Daily Rock» tous les quinquennats. La figure la plus illustre de cette mouvance qui lutte pour sa survie est sans conteste le fantasque Dregen (né Andreas Tyrone Svensson le 12 juin 1973), dont le look extravagant et l’extrême gentillesse ont fait de lui une célébrité au pays d’Ikea et Ibrahimovic. A tel point que même une marque de bonbons arbore son effigie. Son groupe de punk/glam/sleaze/hard rock, Backyard Babies, étant en standby depuis trois ans, ce stakhanoviste a mené de front plusieurs projets épuisants: une autobio- Course contre la montre et contre la mort... Admirable. Héroïque. Poignant. Atteint d’un cancer en phase terminale, Wilko Johnson, guitariste originel des mythiques Dr. Feelgood, a choisi de bouffer sa vie plutôt que des médicaments. Renonçant à une chimiothérapie lourde, il a décidé de partir une dernière fois sur les routes. Lors de chaque concert, en rappel, il joue même «Bye, bye Johnny», ce qui fait forcément pleurer les plus endurcis. Si Dieu lui prête vie, il pourra encore célébrer le 10 mars la sortie de «Going back home», ultime album où il propose des remakes de ses plus grands hymnes, ainsi qu’une reprise de Dylan. Wilko Johnson a fait appel à Roger Daltrey, des Who, pour chanter sur tout cet album. PABR MARCHE TURQUE? Mais où s’arrêtera Jeff Beck, ce furieux génie? Aujourd’hui, la nuance n’échappe à aucun musicologue: quand il est question de guitaristes, il y a Jeff Beck et tous les autres. Remarque tout sauf anodine, tant le maître anglais écrase tous les autres par sa musicalité et sa volonté perpétuelle d’innover. A ce titre, on attend avec une impatience non feinte la sortie de son prochain CD en avril. Actuellement, l’homme s’appuie notamment sur un autre guitariste prodige suisse vivant à Londres, Nicolas Meier. Ce dernier est marié à une musicienne turque et très influencé par les sons en provenance d’Anatolie. Du coup, Beck a demandé au bon Nicolas de lui concocter quelques compositions fleurant bon la patrie d’Atatürk. Comme quoi, après le hard, le funk, le jazz rock et même la techno, Beck poursuit sa quête perpétuelle de l’innovation. Aux dernières nouvelles, hélas, sa tournée européenne ne devrait pas passer par la Suisse. PABR GONZO ET WONKEYMAN Deux diablotins sur les traces du Bon Dieu Aux dernières nouvelles, il avait perdu ses cheveux. Mais ils repoussent... LDD graphie de 330 pages, un album et une tournée avec Michael Monroe (de Hanoi Rocks), un album solo, tout cela en accueillant son premier enfant, né de son improbable (mais heureux) mariage avec la plantureuse Pernilla Andersson. Conséquence de cette période éreintante: il a perdu tous ses cheveux en une seule nuit! Les médecins appellent ce phéno- « C’est un album frais, brut, ● mélodieux, sur lequel je me suis senti totalement libre. Je fais de la musique depuis 25 ans...» DREGEN ICÔNE ROCK NORDIQUE mène «état de stress post-traumatique». Le sympathique guitariste s’explique sur sa démarche en solo: «Sur cet album, je dévoile mes racines. Mes auditeurs peuvent deviner ce qu’on trouve dans ma discothèque: du blues, Kiss, Black Sabbath, Thin Lizzy, Beastie Boys, du rock garage, The Cramps et même ABBA. Mais pas la moindre trace d’un album de Mötley Crüe, contrairement à ce que beaucoup pensent. C’est un album frais, brut, mélodieux, sur lequel je me suis senti totalement libre. Je fais de la musique depuis vingtcinq ans, c’est mon job, mais je m’éclate toujours autant!» Ce disque éponyme aurait dû constituer un «coup d’une nuit», mais le bougre est impatient de remettre la compresse cette année même. La résurrection des Backyard Babies atten- dra 2015. A peine ses cheveux ont-ils recommencé à pousser ici et là qu’il nourrit déjà d’autres projets. Il est comme ça, Dregen, il ne tient pas en place. Il continuera à sillonner les routes du rock et s’arrêtera là où l’on voudra bien de lui. Comme dans cet ancien strip club, le «457» à Zurich, où il a maltraité sa Gretsch devant une centaine de personnes en décembre dernier. Aux côtés des Imperial State Electric de Nicke «Royale» Andersson, son frère d’armes depuis toujours. Une autre icône méconnue, un autre groupe extraordinaire qui ne sera jamais planétaire, une autre énergie brute qu’aucun groupe anglais actuel ne peut égaler. La vie n’est pas toujours juste. Ni gentille. Dregen, «Dregen», Universal Music JIMI HENDRIX «Mémoire d’outre-tombe», un livre qui ressuscite le grand guitariste Le magnifique récit d’une trop courte vie Au-delà de la légende, qu’en était-il vraiment de la météorite Hendrix qui traversa l’histoire musicale entre 1966 et 1970? Les historiens, musicologues et biographes nombreux qui se sont penchés sur le phénomène ont pondu des kilomètres de thèses et autres récits basés le plus souvent sur des témoignages dont la fiabilité n’est souvent pas la première des qualités. Un peu à l’ins- WILKO JOHNSON tar de ces bricoleurs qui ont trafiqué nombre de ses enregistrements, à tel point que l’on ne distinguepluscequiestauthentique et d’époque. Le nom de Jimi Hendrix, aujourd’hui, est un logo qui sert surtout à enrichir son héritière directe, sa demi-sœur en l’occurrence, qui avait six ans à son décès. Tout ce qui touche à Hendrixdoitforcémentavoirson agrément. Ce qui n’est pas chose Un livre qui révèle un Hendrix bien différent de ce que l’on imagine. LDD aisée. A tel point qu’elle a même refusé les droits d’utilisation de ses musiques originales pour le film«Allisbymyside»,unbiopic axé sur Jimi, qui devrait finalement se résumer aux années précédantsonarrivéeen1966àLondres.Lefilmdevraitsortirenaoût prochain. Si tout va bien d’ici là. Mais il y a cependant les exceptions qui confirment la règle. «Mémoired’outre-tombe»,signé Peter Neal et publié chez Lattès, pourrait bien en faire partie, ce recueil d’écrits d’Hendrix ne faisant pas partie des ouvrages autorisés, donc contrôlés. Cette autobiographie est en fait un assemblage chronologique de textes originaux, pondus par Hendrix lui-même, qui avait l’habitude d’écrire partout et sur tous les supports, mis en perspective avec ses compositions phares et son évolution tant musicale que personnelle. Diverses interviews publiées dans des magazines à l’époque complètent ce livre qui révèle un Hendrix bien différent de l’image que nous en avons au- jourd’hui. Ecrivain, poète inspiré, mais également visionnaire, Jimi démontre qu’il est plus qu’un phénomène de foire jouant son rôle de guitariste déjanté sur scène. Il se révèle sensible, humble, peu sûr de son talent, jamais satisfait de ses prestations, remettant sans cesse en question son groupe et sonentourage,etsouventdépassé par son succès. Lui qui, pourtant, en quatre petites années, a véritablement révolutionné le rock et changé la guitare à jamais. Seule petite ombre au tableau à notregoût,laparticipationd’Alan Douglas à cette compilation de textes. Etant connu comme le producteur qui a maquillé les bandes après la mort d’Hendrix en remplaçant la section rythmique, ajoutant des chœurs et autres overdubs suspects, il a altéré ainsi définitivement quelques chefs-d’œuvre publiés à titre posthume. On ne peut qu’espérer danslecasprésentqu’iln’aurapas gribouillé sur les écrits originaux. PIERRE-ALAIN KESSI Nouvelle galette pour les Dupond-Dupont du punk not dead! Alain Meyer (Gonzo) et Stéphane Ballmer (Wonkeyman) s’attaquent cette fois à Dieu. «God is just a flash», que ça s’appelle. En plus d’une énumération des commandements pour ceux qui ne savent pas compter, il est question ici de «Kosmos KO», de «Religion sucks», de «God is dead», d’«Addicted to God» et de «Sympathy for the devil», une reprise des Stones. Sûr, Gonzo et Wonkeyman ne seront pas invités à la prochaine soirée de louanges à Reconvilier. Côté style, ils évoluent toujours entre Bob Dylan et Johnny Thunders. Acquéreurs putatifs, une seule adresse: [email protected] PABR COVER BAND ATTITRÉ DE GOD 30 ans de claptoneries pour les Chip’s 30 ans qu’ils sévissent sans changement de personnel! Et ces vétérans ont plus de tenue que nos Stones bien décrépits. Pierre-Alain Kessi (65 balais), Jan Kraboel (69), Mario Lepore (55) et Martin Bolli (itou), soit les Chip’s, constituent le meilleur cover band d’Eric Clapton, God pour les intimes. Ils fêteront cet anniversaire prestigieux samedi 1er février, à l’Union, à Tramelan. En musique, forcément. PABR LA PLAYLIST DE... Marcello Previtali [email protected] STROMAE Racine carrée (2013). Enfin un original qui innove. Un artiste qui nous surprend par son inventivité musicale et scénique. Le maestro Stromae, de son vrai nom Paul Van Haver, parvient à nous faire bouger en mêlant joie et mélancolie sur son tube «Papaoutai». Un titre qui martèle l’absence du père et l’enfance qui souffre. Le génial auteur-compositeur-interprète belge d’origine rwandaise a tout raflé en 2013 et ce n’est pas fini. Il est nominé six fois aux prochaines victoires de la musique, dont deux pour la meilleure chanson originale et le meilleur clip. Amplement mérité pour celui dont la comparaison avec le grand Brel est de plus en plus justifiée. DIDO No Freedom (2013) Rien que pour cette voix douce et suave qui nous berce et nous calme, on l’aime. Après un long passage à vide, Dido Florian Cloud de Bounevialle O’Malley Armstrong (oui, tout ça!) fait son grand retour avec ce «No Freedom» mélancolique et planant. Ça fait du bien partout. Un titre à déguster sans modération dans une ambiance feutrée, un verre à la main. RICK WAKEMAN The six Wives of Henry VIII (1973) Quel bonheur de réécouter, l’espace d’une soirée entre quinquas mélancoliques du rock progressif, cette galette du roi Henry VIII signée Rick Wakeman. L’homme aux doigts d’or qui fait valser les touches du clavier. Le blond à la cape blanche, qui a enregistré avec David Bowie, Cat Stevens, Elton John ou encore Lou Reed avant de se poser chez Yes, fait partie de cette race de musicos virtuoses en voie de disparition. LUCIO BATTISTI Il mio canto libero (1972) Avec son sens musical innovant et grâce au précieux apport du parolier Mogol, Lucio Battisti a révolutionné la chanson italienne. Ses ballades ont rythmé mes soirées d’ado transalpin en quête de l’âme sœur. Influencé par les Beatles, The Animals ou Otis Redding, cet antihéros de la chanson est parti bien trop tôt. Il avait 55 ans, en 1998. Assez longtemps tout de même pour préparer le terrain aux premiers rappeurs.