VENDRE L`ENTREPRISE SANS IMPÔT

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VENDRE L`ENTREPRISE SANS IMPÔT
FISCALITÉ
par François SABARLY
VENDRE L’ENTREPRISE SANS IMPÔT
Lors de la cession de l’entreprise, les plus-values professionnelles sont normalement
imposables. Heureusement, cette taxation peut dans de nombreux cas être réduite,
voire même évitée. Voici ce qu’il faut savoir.
E
n matière de plus-values d’entreprise, on distingue principalement celles qui concernent les entreprises soumises à l’impôt sur le
revenu et celles qui sont taxables dans les sociétés soumises à l’Impôt sur les Sociétés (IS). Un régime spécifique s’applique également
aux plus-values immobilières. Pour les exploitants individuels, le régime est celui des plus-values professionnelles.
L’IMPOSITION DES PLUS-VALUES
L
ors de la vente d’une entreprise
individuelle, la sortie de l’actif
professionnel, des différents biens
qui composent le fonds de commerce
(clientèle, droit au bail, matériels,
agencements, etc.) peut avoir des
conséquences fiscales très lourdes. En effet,
on fait masse de ces différents éléments
pour calculer une plus-value nette globale,
qui sera soumise à l’impôt sur le revenu.
Ces plus-values (ou moins-values dans
certains cas) peuvent être à long terme
ou à court terme. Elles sont à court terme,
schématiquement, si elles résultent de
la vente de biens acquis depuis moins de
deux ans ou depuis plus de deux ans mais
dans la limite, alors, de l’amortissement
déduit fiscalement. Les plus-values sont
au contraire à long terme lorsqu’elles
proviennent de la cession de biens figurant
à l’actif depuis au moins deux ans.
La plus-value nette globale à court
terme est en principe imposable avec les
bénéfices de l’exercice, sans possibilité
d’étalement sur trois ans comme c’est le cas
lorsqu’un bien professionnel est cédé en
cours d’exploitation. Quant à la plus-value
nette globale à long terme, elle est taxée
au taux forfaitaire de 16% auquel s’ajoutent
les prélèvements sociaux, ce qui aboutit à
une imposition effective de 31,5%.
Attention : la cession du fonds de commerce
entraîne aussi l’imposition immédiate des
bénéfices réalisés depuis la fin du dernier
exercice clos ainsi que des bénéfices en sursis
d’imposition (plus-values dont l’imposition
avait été différée, notamment). Il faut établir
une déclaration de ces bénéfices et des plusvalues imposables dans un délai de 60 jours.
Mais pour les entrepreneurs soumis à l’impôt
sur le revenu, cette imposition est provisoire.
Le montant d’impôt réclamé au moment de
la cessation vient ensuite en déduction de
l’impôt sur le revenu calculé sur l’ensemble
des revenus perçus au cours de l’année.
L’EXONÉRATION DES PETITES ENTREPRISES
D
epuis plusieurs années, des dispositifs
ont été mis en place pour éviter
une taxation trop lourde des plus-values
réalisées lors des cessions d’entreprises,
afin de favoriser leur transmission.
Le premier d’entre eux vise les petites
entreprises individuelles et les sociétés
de personnes relevant de l’impôt sur
le revenu, et concerne les plus-values
réalisées en fin d’exploitation comme
CGAcontact - N°113 Mars / Avril 2016
en cours d’activité. Pour en bénéficier, il
faut avoir exercé l’activité professionnelle
pendant cinq ans au moins. En pratique,
pour les entreprises exerçant une activité
de vente, l’exonération est totale si les
recettes n’excèdent pas 250 000 € hors
taxes, et partielle lorsque les recettes sont
comprises entre 250 000 et 350 000 € hors
taxes.
Pour les prestataires de ser vices,
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l’exonération est totale si les recettes
n’excèdent pas 90 000 € hors taxes, et
partielle lorsque les recettes sont comprises
entre 90 000 et 126 000 € hors taxes.
Le chiffre d’affaires à comparer à ces seuils
est le chiffre moyen des deux années civiles
précédant l’exercice de réalisation de la
plus-value.
FISCALITÉ
EN CAS DE TRANSMISSION D’ACTIVITÉ
E
n cas de transmission d’activité le second
dispositif concerne la transmission de
l’entreprise ou d’une branche complète
d’activité. En effet, il est possible de céder ou
de transmettre à titre gratuit (par donation
ou succession) un fonds de commerce
ou une branche complète d’activité, sans
imposition sur les plus-values, lorsque la
valeur des éléments transmis ne dépasse
pas 300 000 € hors taxes. Si cette valeur
est comprise entre 300 000 et 500 000 €,
la cession ou la transmission bénéficie
d’une exonération partielle. A l’impôt sur
le revenu, l’exonération s’étend aussi aux
prélèvements sociaux sur les plus-values
à long terme ; en revanche, les plusvalues à court terme exonérées d’impôt
n’échappent pas aux cotisations sociales
du RSI.
Ce dispositif concerne aussi la transmission
de toutes les parts d’une société de
personnes (société en nom collectif par
exemple) ou des parts d’une société
soumise à l’impôt sur les sociétés.
Entre
autres
conditions,
l’activité
professionnelle doit avoir été exercée
pendant au moins cinq ans, et il ne doit
pas y avoir non plus de lien de dépendance
entre le cédant et l’entreprise cessionnaire.
En cas d’exonération partielle, en pratique,
le montant de la plus-value exonérée est
calculé de la manière suivante : [(500 000
– valeur des biens transmis) / 200 000] x
plus-value.
Exemple :
Un entrepreneur individuel vend son fonds
de commerce 425 000 € acheté dix ans
auparavant pour une valeur de 200 000 €.
La plus-value dégagée est donc égale à
425 000 - 200 000 = 225 000€. Celle-ci est
exonérée à hauteur de : [(500 000 - 425 000)
/ 200 000] x 225 000 = 84 375 €.
EN CAS DE DÉPART EN RETRAITE DE L’EXPLOITANT
A
u moment du départ à la retraite d’un
exploitant qui cède son entreprise ou
d’un associé d’une société de personnes
qui cède la totalité de ses droits sociaux,
un dispositif d’exonération des plus-values
professionnelles est également prévu,
sous certaines conditions : le cédant doit
avoir exercé son activité professionnelle
pendant au moins cinq ans, cesser toute
fonction dans l’entreprise qu’il cède (et
sans être exploitant de droit ou de fait
dans l’entreprise reprise) et faire valoir ses
droits à la retraite dans les deux années
qui suivent ou qui précèdent la cession.
L’exploitant dispose ainsi d’une période
de vingt-quatre mois répartie autour de
la date de la vente pour faire valoir ses
droits à la retraite. Cette exonération ne
vise que le fonds de commerce ou les parts
de la société de personnes, à l’exclusion de
tout autre actif, notamment immobilier.
A noter aussi que seule la part fiscale des
plus-values est exonérée, les contributions
sociales au taux de 15,5% restant dues.
L’économie d’impôt réalisée est donc de
16%.
A noter : la cession d’une activité qui a fait
l’objet d’un contrat de location-gérance
peut bénéficier de cette exonération à
condition qu’elle soit réalisée au profit du
locataire et qu’elle ait été exercée pendant
au moins cinq ans avant la mise en locationgérance.
EN CAS DE DÉPART EN RETRAITE DU DIRIGEANT
D
ernier dispositif enfin : l’exonération
de plus-value sur cession de valeurs
mobilières dont peut bénéficier un
dirigeant qui cède les parts d’une société
soumise à l’impôt sur les sociétés tout en
faisant valoir ses droits à la retraite. Les
critères de taille de la société étant larges,
toutes les petites sociétés sont concernées.
En pratique, depuis le 1er janvier 2014 et
jusqu’au 31 décembre 2017, la plus-value
bénéficie de deux abattements :
- un abattement fixe de 500 000 € ;
- et un abattement pour durée de
détention,dit « renforcé », de 50% pour
une durée de détention des parts de un an
à moins de quatre ans, de 65% pour une
durée de détention de quatre ans à moins
de huit ans, et de 85% à partir de huit ans
de détention.
La part qui reste imposable, le cas échéant,
après abattement, est imposée au barème
progressif de l’impôt sur le revenu. Les
prélèvements sociaux de 15,5% sont dus
en revanche sur la totalité de la plus-value
réalisée.
Cet avantage est soumis à plusieurs
conditions :
- le cédant doit avoir détenu directement
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ou par personne interposée, pendant les
cinq dernières années, au moins 25% du
capital de la société cédée ou des droits de
vote ; - la fonction de direction exercée doit
représenter plus de la moitié des revenus
professionnels de l’intéressé ;
- le dirigeant doit céder tous les titres ou
plus de 50% des droits de vote ;
- il doit cesser toute fonction dans la société
et faire valoir ses droits à la retraite dans les
deux ans suivant ou précédant la cession
des titres.
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