Anches de bourdon de cornemuse écossaise

Transcription

Anches de bourdon de cornemuse écossaise
CFA 2006
Anches de bourdon de cornemuse écossaise – Perception et analyse du signal
Mathieu Paquier, Cédric Moign
EA 3883 LISyC, Université de Bretagne Occidentale, 29238 Brest cedex 3, France. [email protected]
Résumé
Matériel et méthode
Les bourdons de cornemuse écossaise sont munis d’anches
simples battantes. Historiquement ces anches étaient
fabriquées en roseau, mais de plus en plus de musiciens
s’équipent désormais d’anches synthétiques. L’intérêt du
plastique est la moindre dépendance de l’anche à l’humidité,
à la chaleur, et au vieillissement ; la régularité de l’accord de
l’instrument est donc meilleure lorsqu’il est « monté » en
plastique. Malgré cela, certains musiciens considèrent que
l’anchage synthétique dégrade le timbre de l’instrument, et
restent donc fidèles au roseau. Bien sûr le débat roseauplastique est animé de pensées assez magiques et non
fondées.
Enregistrement
Nous avons utilisé huit différents modèles d’anche; quatre
modèles étaient en plastique (de fabrication industrielle), et
quatre autres étaient en roseau (de fabrication artisanale).
Toutes ces anches étaient neuves mais rodées. Pour chaque
modèle d’anche nous disposions de deux jeux différents,
Deux sonneurs profesionnels ont réalisé nos enregistrements,
chacun avec leur propre instrument.
Pour chaque jeu nous avons enregistré un bourdon basse
seul, un bourdon ténor seul, et une mélodie au chanter
accompagnée par les trois bourdons (plein jeu : deux
bourdons ténors et un bourdon basse).
Nous avons donc enregistré des sons de bourdons équipés
d’anches en roseau ou en plastique. Nous avons ensuite
interrogé des sujets – sonneurs ou non – sur les sons
enregistrés. En plein-jeu, alors que les auditeurs nonsonneurs ont significativement préféré les anches en roseau,
les auditeurs sonneurs sont apparus bien plus indécis. De
plus, une des deux cornemuses enregistrées a semblée plus
dédiée (en terme de jugement de qualité) aux anches en
plastique, et l’autre plus dédiée aux anches en roseau.
Les séquences de bourdon seul duraient 8s, et la mélodie en
plein jeu durait environ 15s.
En résumé nous avons enregistré 8 modèles × 2 exemplaires
× 2 musiciens = 32 séquences pour chacune des trois
expériences (bourdons ténor seuls, bourdons basses seuls , et
chanter+plein jeu), soit au total 96 séquences.
La prise était monophonique, et le micro était placé 1,20m
devant le musicien, à une hauteur de 1,60m.
Parallèlement à ces études perceptives, nous avons effectué
des analyses de nos enregistrements, notre but étant ici de
caractériser les anches par des paramètres temporels,
spectraux, et spectro-temporel, et de corréler ces paramètres
avec les résultats perceptifs.
Protocole de test
Nous avont mis au point trois expériences (à réaliser
consécutivement) : la première concernait des bourdons
ténor seuls, la seconde des bourdons basse seuls, et la
troisième des jeux de bourdons complets accompagnés d’un
chanter. Le protocole de test précis est décrit dans [1].
Introduction
La littérature scientifique concernant la cornemuse est très
limitée et ne concerne que l’échelle musicale particulière de
cet instrument. Les rares études des matériaux des anches
n’ont été effectuées que pour d’autres instruments,
notamment pour la clarinette; néanmoins la structure de
l’ensemble anche/bec de la clarinette étant totalement
différente ce celle d’une anche de bourdon, les
extrapolations sont difficiles. Nous avons souhaité interroger
des auditeurs, naïfs et spécialistes, sur la qualité de
différentes anches de bourdons, en plastique et en roseau.
Pour cela nous avons réalisé trois expériences : (1) auditions
et jugements de bourdons ténor seuls, (2) auditions et
jugements de bourdons basse seuls, et (3) audition et
jugements des trois bourdons, accompagnés par le chanter
(conditions de jeu normales).
Le principe des trois tests était identique : un auditeur était
placé devant un écran d’ordinateur et était équipé d’un
casque. Il entendait tout d’abord une séquence sonore; à la
fin du son il devait juger la qualité de la séquence entendue
sur une échelle de trois niveaux : - , ~ , + ; une autre
séquence était alors envoyée dans le casque de l’auditeur,
suivie d’une nouvelle étape de jugement, etc…
En fait les sujets étaient intérogés sur la qualité globale du
son, à la suite de quoi il leur était aussi demandé de juger
d’autres paramètres (clarté, agressivité, chaleur, volume,
immersion), mais ces autres paramètres perceptifs ne seront
pas abordés ici.
Il était bien précisé aux sujets que le test concernait le son
des bourdons exclusivement, donc que lorsque le chanter
jouait, dans la troisième expérience, les jugements devaient
porter sur les bourdons en condition de jeu avec chanter,
mais pas sur le chanter lui-même.
463
CFA 2006
De plus des différences significatives (p<0.0001) sont
observables entre les auditeurs non sonneurs et les auditeurs
sonneurs (figure 2) : les anches les mieux notées par les
auditeurs sonneurs n’ont pas forcément été les anches
préférées par les auditeurs non sonneurs.
Vingt sujets auditeurs ont participé à l’étude. Dix d’entre eux
étaient musiciens ou intéressés de près à la musique
(incluant notamment de la cornemuse), mais n’étaient pas
sonneurs de cornemuse. Les dix autres sujets étaient
sonneurs, de différents niveaux, et de différentes cultures
musicales
(solistes
ou
musiciens
d’ensembles
exclusivement).
QUALIT
3
Résultats du test perceptif
2,5
SONNEURS
2
MODELE 8
(roseau)
MODELE 7
(roseau)
MODELE 6
(roseau)
MODELE 5
(roseau)
MODELE 4
(synthetique)
MODELE 3
(synthetique)
MODELE 2
(synthetique)
1
Tout d’abord nous n’avons pas observé d’effet simple des
facteurs « auditeur » et « musicien ». Par contre nous avons
observé des effets et interactions très significatif concernant
la matière de l’anche :
MODELE 1
(synthetique)
1,5
Qualité sonore des bourdons en plein jeu
MODELE D'ANCHE
Figure 2: Qualité des bourdons en situation de plein jeu, en
fonction du modèle d’anche et des auditeurs
Effet de la matière de l’anche
L’ensemble des auditeurs (non sonneurs et sonneurs
confondus) a significativement mieux noté les bourdons
équipés d’anches en roseau que les bourdons équipés
d’anches en plastique (p=0.0025).
Interaction Modèle d’anche/Musicien
Nous avons précédement observé que la préférence des
auditeurs vers le roseau était observable uniquement pour les
séquences enregistrées par le musicien 2. De même, les
préférences des auditeurs pour tel ou tel modèle d’anche (en
plastique ou en roseau) ont été significativement différentes
selon le musicien ayant enregistré la séquence (p=0.037).
Ces différences sont apparues particulièrement notables pour
les anches en plastiques, peu appréciées pour les séquences
enregistrées par le musicien 2.
Interaction Matière/Auditeur
La figure 1 montre que le paramètre “matière” n’est pas
significatif pour les sonneurs (p=0.6476), alors qu’il l’est
franchement pour les non sonneurs (p=0.0006).
3
SYNTHETIQUES
NON SONNEURS
ROSEAU
Qualité sonore des bourdons basse seuls
2
Pour les bourdons basse seuls, nous n’avons pas observé
d’effets simples de la matière, de l’auditeur, et du musicien.
De même, aucune interaction mettant en jeu les auditeurs
(non sonneurs vs sonneurs) n’est apparue pour les jugements
de bourdons basse seuls. Le seul effet simple observé est
celui du modèle d’anche (indépendamment de la matière).
1,5
1
SONNEURS
AUDITEURS
Figure 1: Qualité des bourdons en situation de plein jeu, en
fonction de la matière des anches et des auditeurs
Effet du modèle d’anche
Même si aucun effet direct de la matière n’a été observé
pour les jugements de bourdons basse seuls, les auditeurs ont
tout de même préféré certains modèles d’anche à d’autres
(p=0.0393; figure 3). Ces préférences étaient les mêmes pour
les auditeurs non sonneurs et pour les sonneurs.
Interaction Matière/Musicien
Pour les séquences enregistrées par le musicien A, les sujets
n’ont pas semblé avoir de préférence pour le plastique ou le
roseau ; en revanche pour les séquences enregistrées par le
musicien B, la préférence des sujets est nettement allée au
roseau (p<0.0001). La cornemuse du musicien B serait donc
plus dédiée aux anches en roseau qu’aux anches en
plastiques (alors que celle du musicien A ne serait pas plus
destinée à un type d’anche qu’à un autre). L’interaction
Matière/Musicien pourrait aussi être due au musicien plutôt
qu’à sa cornemuse, mais cette hypothèse semble moins
probable.
3
QUALIT
2,5
2
1,5
MODELE 8
(roseau)
MODELE 7
(roseau)
MODELE 6
(roseau)
MODELE 5
(roseau)
Effet du modèle d’anche
Nous avons vu que les auditeurs préféraient globalement les
anches en roseau aux anches en plastique. Ces préférences
peuvent être explicitées : l’effet du modèle d’anche,
indépendament de la matière est significatif (p<0.0001), et
contrairement à la tendance générale, certaines anches en
plastique peuvent être préférées à certaines anches en roseau.
MODELE 4
(synthetique)
MODELE 1
(synthetique)
1
MODELE 3
(synthetique)
NON SONNEURS
MODELE 2
(synthetique)
QUALIT
2,5
MODELE D'ANCHE
Figure 3: Qualité des bourdons basse seuls, en fonction du
modèle d’anche
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celles enregistrées par le musicien B. Pour d’autres modèles
d’anche, c’est le phénomène inverse qui a été observé
(p<0.0001). Cette interaction confirme l’interaction Matière /
Musicien décrite précédemment car les modèles d’anche en
plastique étaient généralement préférés lorsque les séquences
avaient été enregistrées par le musicien A, et les modèles
d’anche en roseau étaient généralement préférés lorsque les
séquences avait été enregistrées par le musicien B.
Interaction Modèle d’anche/Musicien
Les auditeurs ont bien noté certains modèles d’anches dans
les séquences enregistrées par le musicien A, et pas dans
celles enregistrées par le musicien B. Pour d’autres modèles
d’anches, c’est le phénomène inverse qui a été observé
(p<0.0001). Ces différences sont particulièrement marquées
pour les anches en plastique; pour les anches en roseau les
auditeurs ont jugé les anches assez identiquement sur les
séquences enregistrées par les deux musiciens.
Analyse des signaux et corrélation avec
les jugements de qualité
Qualité sonore des bourdons tenor seuls
Pour les bourdons ténor seuls, nous n’avons pas observé
d’effets simples de la matière, de l’auditeur, et du musicien.
De même, aucune interaction mettant en jeu les auditeurs
(non sonneurs vs sonneurs) n’est apparue pour les jugements
de bourdons ténor seuls. Le seul effet simple observé est
celui du modèle d’anche (indépendamment de la matière).
Plusieurs paramètres ont été calculés à partir de chaque
enregistrement de bourdon seul (ténor et basse) : niveau
RMS, niveau dB SPL, fréquence fondamentale (moyenne et
évolution temporelle), différents indices de balance
harmoniques impairs/pairs, centre de gravité spectral
(moyenne et évolution temporelle), indice d’irrégularité
(indique un degré de constance de l’énergie dans des bandes
spectrales voisines), skewness (indique le degrés d’asymétrie
de la distribution), kurtosis (indique une distribution plus ou
moins pointue), rapport Ai/A1 (entre l’énergie de
l’harmonique i et l’énergie de la fréquence fondamentale),
rapport Ai/ΣAi (entre l’énergie de l’harmonique i et
l’énergie totale des n harmoniques), indices tristimulus 1, 2
et 3 [3].
Effet du modèle d’anche
Comme pour les bourdons basse seuls, même si aucun effet
direct de la matière n’a été observé, les auditeurs ont tout de
même préféré certains modèles d’anche à d’autres
(p<0.0001) pour les bourdons ténor seuls (figure 4). Ces
préférences étaient les mêmes pour les auditeurs non
sonneurs et pour les sonneurs. Notons que les préférences de
modèles d’anche pour les bourdons ténor seuls ont été assez
proches de celles observées en condition de plein jeu (les
préférences pour les bourdons basse seuls en étaient plus
éloignées).
Nous n’avons pas effectué d’analyse sur les enregistrements
en « plein jeu », car il aurait été difficile d’expliquer
l’origine (bourdon ténor ? basse ? chanter ?) des différentes
propriétés du signal total.
3
QUALIT
2,5
Importance relative des harmoniques
2
Une première observation des spectres des bourdons basse et
ténor nous a indiqué que la répartition des harmoniques
semblait différente pour les deux types de bourdons. Nous
avons donc observé (1) les corrélations entre les analyses des
signaux de bourdon basse avec la qualité perçue des sons de
bourdon basse, et la qualité perçue des sons en plein jeu,
puis (2) les corrélations entre les analyses des signaux de
bourdon ténor avec la qualité perçue des sons de bourdon
ténor, et la qualité perçue des sons en plein jeu.
1,5
MODELE 8
(roseau)
MODELE 7
(roseau)
MODELE 6
(roseau)
MODELE 5
(roseau)
MODELE 4
(synthetique)
MODELE 3
(synthetique)
MODELE 2
(synthetique)
MODELE 1
(synthetique)
1
MODELE D'ANCHE
Figure 4: Qualité des bourdons ténor seuls, en fonction du
modèle d’anche
L’observation des corrélations entre les analyses d’un signal
de bourdon seul avec la qualité perçue en plein jeu est utile
car elle peut indiquer que certains paramètres ont une
influence sur la qualité du son en jeu « normal » (plein jeu),
indépendamment de leur influence sur la qualité du bourdon
considéré seul.
Interaction Matière/Musicien
Cette interaction est significative (p<0.0001). Pour les
séquences enregistrées par le musicien A, les sujets ont
largement préféré le plastique au roseau ; en revanche pour
les séquences enregistrées par le musicien B, la préférence
des sujets est plutôt allée au roseau, mais n’était pas aussi
flagrante.
Globalement les jugements des auditeurs non sonneurs et des
auditeurs sonneurs ont permis d’observer des corrélations
importantes avec les mêmes paramètres, avec des valeurs de
corrélation plus ou moins importantes selon les paramètres et
les auditeurs.
Rappelons que pour les conditions de plein jeu, la préférence
des auditeurs allait aussi au roseau pour les séquences
enregistrées par le musicien B, mais aucune préférence
n’était visible pour les séquences enregistrées par le
musicien A.
Analyse des sons de bourdon ténor seul
Rapport Ai/A1 : Le rapport pour l’harmonique 15 est
inversement corrélé avec les jugements de qualité du
bourdon ténor seul (r(32)=-.688, p<.0001) et du plein jeu
(r(32)=-.468, p=.002), pour tous les auditeurs. Les rapports
Interaction modèle d’anche/musicien
Les auditeurs ont bien noté certains modèles d’anches dans
les séquences enregistrées par le musicien A, et pas dans
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CFA 2006
Le paramètre Tristimulus 1 est lui aussi corrélé avec les
jugements de bourdon seul, ténor (r=+.651, p<.0001) comme
basse (r(32)=+.451, p=.0089). Il indique l’énergie de la
fréquence fondamentale (pondérée par l’énergie de tous les
harmoniques) . Cette corrélation est positive : les auditeurs
ont apprécié les bourdons seuls dont la fréquence
fondamentale était particulièrement énergétique.
pour les harmoniques 14, 18, et 19 sont aussi inversement
corrélés avec les jugements de qualité, mais les valeurs de
corrélation sont plus faibles et variables selon le groupe
d’auditeurs et l’expérience bourdon ténor seul / plein jeu.
Rapport Ai/ΣAi : Comme pour le rapport précédent, le
rapport pour l’harmonique 15 est inversement corrélé avec
les jugements de qualité du bourdon ténor seul (r(32)=-.468,
p=.002) et du plein jeu (r(32)=-.661, p<.0001), pour tous les
auditeurs. Le rapport pour l'harmonique 6 est inversement
corrélé avec le jugement de qualité du bourdon ténor seul
(mais pas pour le jugement de qualité en plein jeu), pour tous
les auditeurs : r(32)=-.574, p=.0005. En revanche, le rapport
pour l'harmonique 19 est seulement corrélé avec les
jugements de qualité en plein jeu.
Le paramètre IP [2] est corrélé – négativement - avec les
jugements de bourdon seul, ténor (r=-.419, p=.00182)
comme basse (r(32)=-.392, p=.0255). Il représente le
logarithme du rapport entre la somme des amplitudes des
harmoniques impairs et la somme des amplitudes de la
fréquence fondamentale et des harmoniques pairs.
Enfin le niveau RMS est aussi corrélé avec les jugements de
bourdon seul, ténor (r=-.488, p=.0048) comme basse
(r(32)=-.401, p=.0220).
Analyse des sons de bourdon basse seul
Les paramètres physiques calculés à partir des bourdons
basse sont globalement moins corrélés avec les jugements
que ceux calculés pour les bourdons ténor. Cette observation
peut être mise en parallèle avec l'observation des sonneurs
indiquant que le son des bourdons basse est généralement
moins critique que celui des bourdons ténor.
Le kurtosis (r=-.482, p=.0055) et le skewness (r=-.513,
p<.0027) calculés à partir des sons de bourdons ténor
uniquement sont corrélés avec les jugements de qualité des
bourdons seuls. Les auditeurs n’ont pas apprécié les
bourdons ténor seuls dont la distribution était plutôt
asymétrique à droite et plutôt pointue.
Rapport Ai/A1 : les harmoniques pour lesquels les rapports
sont corrélés avec les jugements de qualité du bourdon basse
ne sont pas les mêmes que ceux observés pour le bourdon
ténor: le rapport pour l’harmonique 13 est inversement
corrélé avec les jugements de qualité du bourdon basse seul
pour tous les auditeurs (r(32)=-.423, p=.0150), et avec les
jugements de qualité en plein jeu pour les auditeurs non
sonneurs (r(32)=-.376, p=.0332). La même observation est
faite avec l'harmonique 11, avec des valeurs de corrélation
légèrement inférieures. Le rapport pour l’harmonique 6 est
inversement corrélé avec les jugements de qualité en plein
jeu (r(32)=-.407, p=.0199), pour tous les auditeurs, mais pas
avec les jugements de qualité du bourdon basse seul.
Les autres paramètres calculés sont très faiblement corrélés
avec les jugement de qualité des bourdons seuls.
Les jugements de qualité en plein jeu sont très peu corrélés
avec les paramètres calculés sur les sons de bourdon seul.
Cela peut signifier que la perception des bourdons est
modifiée par leur mélange et l’ajout du chanter.
Conclusion
En plein jeu, les anches de bourdon en roseau ont été
préférées aux anches synthétiques chez les auditeurs non
sonneurs. En revanche les sonneurs n’ont n’ont pas montré
de préférence significative pour une des deux matières. Lors
des écoutes de bourdon seul (basse ou ténor), la matière des
anches ne dirigeait pas forcément les préférences. Chaque
cornemuse (ou musicien?) a semblé plus adaptée à certains
modèles d’anche (bourdon seul et plein jeu). Une des
cornemuses que nous avons enregistrée a notamment semblé
plus dédiée aux anches synthétiques (ténor seul) et l’autre
cornemuse aux anches en roseau (ténor seul et plein jeu).
L’énergie de certains harmoniques élevés (différents pour les
bourdons basse et ténor) semble défavorable à la qualité
perçue des bourdons. Une fréquence fondamentale
énergétique semble par contre bénéfique.
Rapport Ai/ΣAi : les corrélations de ce rapport avec les
jugements de qualité concernent les mêmes harmoniques que
celles observées avec le rapport Ai/A1 et les valeurs de
corrélation sont du même ordre de grandeur. L’harmonique
6 apparait encore plus génant pour le jugement de qualité en
plein jeu (r(32)=-.511, p=.0024).
Autres paramètres
Les corrélations suivantes sont celles observées pour les
jugements de qualité par l’ensemble des auditeurs (en fait les
jugements des auditeurs sonneurs et auditeurs non sonneurs
sont corrélés avec les mêmes paramétres, avec des valeurs de
corrélation légèrement supérieures pour les jugements des
auditeurs sonneurs).
Références
[1] M. Paquier et C. Moign, Quality of Bagpipe drone reeds:
plastic versus cane ?, Forum Acusticum, Budapest (2005)
Le paramètre Tristimulus 3 est le paramètre physique le plus
corrélé avec les jugements de bourdon seul, ténor (r=-.755,
p<.0001) comme basse (r(32)=-.545, p=.001). Il reflète la
quantité d’énergie contenue dans les harmoniques de rang
supérieur à 5 (pondérée par l’énergie de tous les
harmoniques). Cette corrélation est négative : les auditeurs
n’ont pas apprécié les bourdons seuls qui possédaient une
forte répartition de l’énergie dans les harmoniques de rang
supérieur à 5.
[2] F. Guyot Etude de la pertinence de deux critères
acoustiques pour caractériser la sonorité des sons à spectre
réduits. DEA d’Acoustique, université du Maine (1992).
[3] H. Pollard et E. Jansson, A tristimulus method for
specification of musical timbre, Acustica, 51: 162-71 (1982).
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