Paris, le 17 novembre 2015 Monsieur le président du

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Paris, le 17 novembre 2015 Monsieur le président du
Paris, le 17 novembre 2015
Monsieur le président du CLIS
18 avenue Gambetta
55000 Bar Le Duc
Objet : le patrimoine foncier de l’Andra
Monsieur le président du CLIS,
Dans nos échanges avec nos adhérents, avec des membres du CLIS ou avec la population, nous éprouvons des
difficultés à répondre précisément aux questions qui portent sur le foncier de l’Andra, y compris parfois les plus
simples. Les informations disparates et distillées au compte-gouttes par l’Andra à la demande du CLIS ou
d’associations de défense de l’environnement n’ont que partiellement levé le voile sur son patrimoine foncier et
sur les raisons de son accroissement continu. De plus, la bourde commise par l’agence dans la concaténation des
chiffres produits dans le tableau du 21/09/2015 (rectifiés le 07/10/2015) a ajouté la confusion et la défiance à
l’imprécision.
C’est pourquoi, Monsieur le président, nous souhaitons que le CLIS demande à l’agence et obtienne de sa part,
sur ce point, des données complètes et précises, des données fiables ainsi que des éclaircissements sur les
objectifs qu’elle poursuit.
1.
Des données complètes et précises
Il s’agit de pouvoir répondre clairement à la double question de savoir le volume exact et la localisation précise
de l’ensemble du foncier de l’Andra. Pour ce faire, les informations contenues dans le tableau précité du
07/10/2015 (Département, commune, couvert, surface, prix d’achat, etc.) doivent être complétées par celles
relatives :
•
Aux réserves foncières constituées par les deux Safer régionales au profit de l’Andra. Le tableau précité les
ignore sans raison apparente alors que l’Andra a déjà dans le passé communiqué ce type de renseignements (voir
réponse à la question 200 dans le débat public sur Cigéo de 2013)
•
Au périmètre de la nouvelle région Alsace-Lorraine-Champagne/Ardenne. En effet, les données
communiquées ne concernent que les départements de la Meuse et de la Haute-Marne alors qu’il est de notoriété
publique que l’Andra possède des terrains dans le département de la Marne où elle a, semble-t-il, déjà procédé à
des échanges des terrains et dans le département de l’Aube[1] où elle est propriétaire (voir lettre de l’Andra au
CLIS du 31/05/2011 où elle fait état d’un terrain mis en réserve dans l’Aube- forêt de Fays à Vanlay), voire dans
des départements voisins. Dans un souci de clarté, il convient que l’agence indique à chaque fois l’entité de
rattachement du terrain (par exemple siège, CMHM, CIRES, etc.)
•
Aux parcelles acquises ou mises en réserve avant le 1er janvier 2008. Aucune raison ne justifie que le CLIS fût
tenu dans l’ignorance des paramètres des terrains (ou d’autres biens immobiliers) acquis en lien avec le
laboratoire[2] ou d’autres installations de l’Andra, notamment en Meuse et en Haute-Marne, depuis son
installation dans notre région.
•
Aux références cadastrales de chaque parcelle pour pouvoir la situer très précisément. La seule indication
géographique du département et de la commune d’implantation de la parcelle est insuffisante.
•
A l’affectation fonctionnelle, réalisée ou envisagée, des terrains acquis et mis réserves (à titre d’exemples :
installation de Cigéo [zone de descenderie, zone des puits, zone d’entreposage, bâtiment technique ou
administratif…], extension du laboratoire, échange de terrains et/ou sécurisation des actifs, etc.)
[1] Dans le journal de l’Andra Edition Meuse/Haute-Marne ; Printemps 2011, on peut lire : « l’Andra réalise des
acquisitions foncières dans d’autres départements /…/ » [2] Dans sa lettre au CLIS du 27 mai 2011 l’Andra estime que le laboratoire occupe environ 98 ha.
2.
Des informations fiables
L’Andra devrait apporter plus de rigueur aux renseignements fonciers qu’elle communique au CLIS. Il importe
que dans le souci d’attacher du crédit à ses informations, elle apporte des éclaircissements sur les points suivants
à l’origine de bien des incompréhensions, voire de polémiques :
•
Les erreurs [monumentales] de totalisation commises dans le tableau des acquisitions foncières du 21/09/2015
(voir le courrier du 29/09/2015 qui vous a été envoyé par MNE). C’est bien d’avoir rectifié les erreurs, ce serait
mieux que l’Andra les explique. A notre sens, les membres du CLIS sont capables de comprendre des
explications simples et honnêtes.
•
La localisation incertaine de certaines parcelles. Ainsi, la forêt de la Vigne Chardon –une pièce de plus de 533
ha -ce qui n’est quand même pas rien- située en réalité sur le territoire de plusieurs communes de la HauteMarne (Prez-sous-Lafauche et alentour) est répertoriée dans le tableau du 07/10/2015 de l’Andra sur le territoire
des plusieurs communes voisines de la Meuse. Sur le même tableau, le village de Saudron est signalé comme
étant dans la Meuse (ligne 39 pour une parcelle de 0,4301 ha) alors que c’est une commune de Haute-Marne.
•
Les variations incompréhensibles d’un document à l’autre de la surface ou du prix d’une même parcelle. Par
exemples :
-
Le domaine du Baudray à Osne-le-Val est donné pour 260,1904 ha dans le tableau rectifié du 07/10/2015. Il a été
précédemment affiché par l’Andra à 262,93 ha dans le tableau communiqué dans le débat public de 2013 (voir
réponse à la question 200) ou encore à 257,7859 ha dans le tableau annexé à son courrier au CLIS du
27/02/2015.
-
Le prix de la parcelle de 48,4445 ha achetée en 2012 à Saudron s’élève à 319.734 € sur le tableau du 07/10/2015
(ligne 17) alors qu’il est affiché, pour une surface identique, pour un montant de 352.992 € sur la fiche
hypothécaire du service de la publicité foncière.
-
Les fluctuations du prix d’achat de terres pratiqué par l’agence, dans la même commune et dans le même terroir
(même lieu-dit), conjuguées au prix élevé acquitté parfois par l’agence, jettent un doute sur la sincérité des
moyennes de prix communiquées au CLIS par l’Andra par courrier du 18 mai 2015. Régulièrement, l’Andra
rappelle que les valeurs d’achat qu’elle pratique sont conformes au prix du marché et approuvées, selon le cas,
par l’ONF ou France Domaine. Dès lors, il est peu compréhensible, sans autres explications, d’observer que :
ü Elle achète en février 2008 à une collectivité locale 6,40 ha de terres au lieu-dit « le chien » à
Saudron au prix de 2650 € l’hectare (parcelle sans doute revendue plus tard) alors que dans le
même terroir elle achète en décembre 2012 cette fois à un propriétaire privé 48,44 ha au prix
de 7200 € l’hectare.
ü Elle acquiert à Saudron deux terrains au lieu-dit « les chênes » -4,13 ha en 2012 et 4,21 ha en
2013- au prix de 7500 € l’hectare.
On est loin du prix moyen de l’hectare de terre agricole affiché par l’Andra à 5640 € dans le courrier
susmentionné du 18/05/2015. A cet égard, nous nous permettons de rappeler que les questions posées par
l’ASODEDRA sur les prix de plusieurs biens immobiliers par mail adressé au CLIS le 05/04/2015, et relancé à
plusieurs reprises, n’ont toujours pas reçu de réponses de l’Andra.
Au passage, nous relevons que nous n’avons pas trouvé dans les données déjà communiquées (voir colonne
occupation dans le tableau du 27 février 2015) les informations relatives aux maisons[3] possédées par l’Andra,
par exemple dans les communes de Poissons (52230) ou encore de Bonnet (55130). Cette lacune mérite d’être
comblée.
Les chiffres peuvent difficilement s’accommoder d’approximations ou de calculs effectués sur un coin de table
au risque de jeter le discrédit sur le sérieux du dialogue noué entre l’Andra et le CLIS, sur ce sujet mais aussi sur
d’autres.
[3] Biens mobiliers urbains.
3.
Les objectifs poursuivis par l’Andra
La publication de la surface totale du foncier de l’Andra, pourtant limitée aux seuls départements 55 et 52 et aux
seuls besoins de Cigéo, qui est passée de 650 ha en 2011 à près de 3000 ha en juin 2015, a provoqué nombre
d’interrogations : pourquoi une telle ampleur et une expansion foncière aussi importante ? Comment les
agriculteurs vont-ils encore pouvoir s’installer ou s’agrandir et à quel prix ? A quoi va ressembler la campagne
Meusienne et Haut-Marnaise une fois ces terres équipées des installations de l’Andra ?
•
Pour tenter de canaliser les polémiques naissantes, l’Andra a répondu dans un premier temps que ses
acquisitions avaient pour but de pouvoir procéder à des échanges amiables pour la construction éventuelle du
futur centre de stockage et ainsi éviter de recourir à la procédure contraignante de l’expropriation.
Mais, si avec 650 ha tout le monde peut comprendre cet objectif de l’agence, en revanche personne ne s’explique
pourquoi l’agence dispose de 2890 ha (dont 800 ha de terres agricoles et 2000 ha de forêts) pour satisfaire un
besoin limité à environ 300 ha ( ?) d’emprise de Cigéo[4]. La nécessaire marge de manœuvre que l’agence
revendique pour négocier avec les propriétaires n’explique pas l’importance de l’écart. A ne considérer que les
terrains agricoles (800 ha), l’Andra est même à la tête d’un capital foncier supérieur de plus de deux fois à son
besoin. D’où la question :
-
Quelle est la surface maximale de terres (agricoles, forestières et d’autre nature) que l’Andra estime nécessaire
pour répondre à ses besoins d’échanges de terres et bois indispensables à la création de Cigéo ?
•
L’Andra a également avancé que les acquisitions de forêts sont appelées à sécuriser une partie des fonds
destinés à financer la gestion de ses propres déchets radioactifs, en ajoutant qu’elles servent à sécuriser ses
actifs afin de répondre « aux obligations de gestion à long terme[5] ». Ces informations appellent plusieurs
questions qui intéressent au premier chef le CLIS :
-
De quels actifs s’agit-il[6] ? De ceux de l’agence ? de ceux du CMHM ? Ou de ceux de Cigéo ??
-
Est-ce lié aux dispositions de l’article 20 de la loi du 28 juin 2006 modifiée et du décret d’application du 23
février 2007 concernant la sécurisation des charges d’arrêt, d’entretien et de surveillance des installations de
stockage des déchets ? Si oui, l’Andra se doit d’expliquer au CLIS le mécanisme de sécurisation par l’achat
de forêts du financement de ces obligations futures.
-
Quel est le montant du financement à sécuriser par des achats de forêts ? A hauteur de quel volume financier ?
Et par quels mécanismes financiers ?
•
En parallèle, l’agence a signalé que si Cigéo était autorisé, « l’équivalent des superficies boisées qui seront
défrichées devra être compensé. Les parcelles forestières déjà acquises permettront d’assurer ces
compensations ». D’où les questions :
-
Quelle est le fondement juridique de l’obligation à laquelle se réfère l’Agence ?
-
L’Andra a-t-elle respecté cette contrainte réglementaire pour la construction du laboratoire ?
-
Quelle est la superficie totale de forêts qui a déjà été défrichée et/ou qui devra l’être par l’Andra au regard des
besoins de l’emprise des installations de surface de Cigéo?
-
Comment des forêts existantes peuvent-elles, au regard des textes applicables, compenser des défrichements sans
travaux compensatoires effectifs de boisement ou de reboisement pour une surface équivalente, voire
supérieure ?
[4] Source : site Internet Cigéo.com. Au cours d’une action de formation du 08/12/2014, l’Andra a évoqué le
chiffre de 500/600 ha. Qui croire ?
[5] Journal de l’Andra, édition Meuse/Haute-Marne, printemps 2015
[6] Idem
-
Les forêts de l’Andra seront-elles ou non exploitées pour alimenter le fonctionnement de Syndièse ?
µµµµ
Nous souhaitons, Monsieur le président, que le CLIS obtienne de l’Andra des réponses claires dans un délai
raisonnable aux questions posées. Pour la bonne règle, nous adressons copie de ce courrier à l’Andra et aux
associations de défense de l’environnement membres du CLIS.
Enfin, nous ne verrions que des avantages à ce que les données dont nous demandons la production figurent sur
un tableau dont le contenu serait périodiquement mis à jour –il serait bon d’obtenir l’engagement de l’Andra
sur ce point-, par exemple tous les 6 mois. Ce serait un progrès sensible de l’effort de transparence de l’Andra
envers le CLIS.
Dans l’attente des réponses de l’Andra, nous vous prions de croire, Monsieur le président, à l’assurance de notre
parfaite considération.
Pour et P/o de Meuse Nature et Environnement (MNE), du Collectif contre l’enfouissement des déchets
radioactifs (CEDRA 52), de Mirabel-Lorraine Nature Environnement et de l’ASODEDRA,
Maurice MICHEL, Pt de l’ASODEDRA, 81/83 avenue Ledru-Rollin, 75012, PARIS – [email protected]
Copie à :
-
Messieurs les directeurs de l’Andra et du centre de Meuse/Haute-Marne
Association des élus de Lorraine et de Champagne-Ardenne opposés à l’enfouissement des déchets
radioactifs (EODRA)
Association Bure Stop 55