En Wallonie: le cou et les testicules
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En Wallonie: le cou et les testicules
2 SUDPRESSE TO VENDREDI 25 MARS 2011 C Notre opinion ’est anecdotique. Quasiment insignifiant. On devrait pouvoir faire comme si les manifestations programmées le 27 mars prochain par le Voorpost, groupuscule d’ultranationalistes flamands, en Wallonie picarde, n’existaient pas. Comme si le fait qu’ils revendiquent le caractère flamand de Flobecq, Ploegsteert, Comines, Estaimpuis, Ellezelles, Mont-de-l’Enclus, et même de Tournai n’était, CALIMERO ET LES NATIONALISTES FLAMANDS Hugues Danze RÉDACTEUR EN CHEF ADJOINT après tout qu’un épiphénomène. Ce qu’il est, ceci dit. Et pourtant, on ne peut s’empêcher de s’y attarder. Pas pour donner à ces excités du bocal une importance qu’ils n’ont pas car c’est très exactement l’effet qu’ils recherchent. Non, simplement pour constater, qu’une fois encore, du côté wallon, ce qui pourrait facilement être considéré comme une nouvelle provocation nationaliste, est vécu avec le recul né- cessaire. Avec humour aussi. Cette prise de distance permet évidemment de remettre à sa juste place ce qui n’est rien d’autre qu’un non-événement d’une bêtise abyssale. Elle prouve surtout, comme l’a finalement remarqué Yves Leterme, revenu médiatiquement en grâce, que les francophones ont bien ces capacités intellectuelles qu’il avait pourtant mises en doute à une époque où l’arrogance était de mise en Flandre. Manifestement, cette époque pas si lointaine, si elle n’est pas révolue (on n’est pas naïf quand même), semble être nettement moins ”trendy ”, aujourd’hui, au Nord du pays. Et c’est plutôt une bonne nouvelle. Avec des conséquences politiques qui pourraient très bien avoir une influence (légère, quoique) sur les négociations en cours au niveau fédéral. Si on ne peut pas encore parler SANTÉ CHIFFRES 2008 59.996 nouveaux cancers, 26.647 morts En Belgique, un homme sur trois et une femme sur b quatre aura un cancer avant ses courantes ou pas n’y change rien ”, martèle laministre dela Santé,Laurette Onkelinx, dont le Plan Cancer est une priorité absolue. “ Le cancer chez la femme a grimpé de 5 % entre 2004 et 2008 ”, ajoute Liesbet Van Eycken, directrice du Registre du cancer. “ Et on s’attend à 80.000 cas par an d’ici 2040 à cause du vieillissement de la population ”. 75 ans. Les dernières statistiques du Registre du cancer (2007-2008), publiées ce jeudi, montrent que la maladie progresse d’1 % par an. Chaque jour, 164 Belges apprennent qu’ils souffrent d’un cancer. Chaquejour,lamaladieemporte15 Bruxellois et 55 Wallons. Le sein, la prostate et le poumon sont les trois cancers les plus fréquents chez nous. Pire: les tumeurs du sein, du côlon/rectum, de la lymphe et toutes celles liés au tabagisme (poumons, tête et cou, vessie) nous hissent au hit-parade européen des payslesplusfrappésparlefléau.“ La ce dépistage permet de réduire fortement la mortalité. Pour moi, il y a doncunpeu depositifdansceschiffres ”,rassureJulieFrancart,directrice adjointe du Registre. Effectivement, si l’incidence du cancer ne cesse de croître, sa mortalité est en >>“ON S’ATTEND À 80.000 CAS PAR AN D’ICI 2040, À CAUSE DU VIEILLISSEMENT” VIEILLESSE ET DÉPISTAGE En chiffres absolus, l’incidence du cancer augmente de 2,5 % par an. Maissil’onregardelesdonnéesstandardisées pour l’âge, la hausse retombe à 1 %: notre population est âgée, or le cancer frappe le plus autour de 60 ans. Le vieillissement explique donc en grande partie le nombre élevé de cancers. “ Une autre explication tient au dé- luttecontrelecancerdoitresterune priorité,quenoussoyonsenaffaires baisse constante. L’exemple du cancer de la prostate est frappant: le nombre de nouveaux cas diminue partout(saufàBruxellesoùc’eststationnaire)etlenombrededécèsaussi: on atteint aujourd’hui 90 % de survie.Sionregarde lacartedeloca- pistage précoce dans notre pays. Or l NEWS lisationdecescancers,ons’aperçoit que les incidences les plus élevées correspondent aux endroits où les médecins pratiquent le plus de dépistages (par dosage du PSA). “ On voitçaaussipourlemélanome (cancer de la peau, NDLR): on a beau- coup sensibilisé ces dernières années, donc les gens consultent plus et on diagnostique plus de cancers. Maisonen meurtmoins qu’avant ”, précise le Dr Francart. Reste le problème du cancer du sein:àluiseul,ilestencoreresponsable d’un décès sur cinq. “ On n’a pas d’explication claire. Plusieurs facteurs entrent en jeu, comme le fait d’avoirpeud’enfantsettard dansla vie ou encore la sédentarité. Nous devons avoir une réflexion tous ensemble sur ce cancer en particulier ”, conclut Mme Francart. « C.V. LES DIX CANCERS LES PLUS FRÉQUENTS EN 2008 EN BELGIQUE HOMMES BRUXELLES MONS NAMUR CHARLEROI LIEGE 1.776 Poumons Col de l'utérus Mélanome (peau) Lymphome non-Hodgkinien 820 804 756 Répartition géographique des cancers du poumon chez la femme 9.697 3.689 Sein Colorectal 1.935 1.685 1.057 946 Leucémie Estomac Mélanome (peau) 39,0 35,5 29,3 26,7 24,2 22,0 20,0 18,2 16,5 15,0 13,7 12,4 11,3 10,3 9,34 8,49 7,72 FEMMES 8.810 5.406 4.486 Prostate Poumons Colorectal Tête et cou Vessie Lymphome non-Hodgkinien Rein Répartition géographique des cancers des testicules 12,3 11,2 10,2 9,26 8,42 7,65 6,96 6,33 5,75 5,23 4,75 4,32 3,93 3,25 2,95 2,68 2,44 BRUXELLES MONS NAMUR CHARLEROI LIEGE 1.450 1.147 932 Ovaires Utérus 870 643 Tête et cou Pancréas 580 573 Répartition géographique des cancers de la thyroïde chez la femme 17,3 15,7 14,3 13,0 11,8 10,7 9,75 8,86 8,05 7,32 6,66 6,05 5,50 5,00 4,55 4,13 3,76 3,42 BRUXELLES MONS pés par la maladie. Dans plus de 60 %descas,ils’agitdeleucémies (cancersdusang),delymphomes (cancers de la lymphe) ou de tumeurs du système nerveux central. “Chez l’adulte, les cancers du sang ne représentent que 9 % descas”,expliqueleDrJulieFrancart,duRegistredu cancer.“Cela montre que les cancers chez l’enfant sont très différents. Ils sont aussi beaucoup plus différenciés que ceux des adultes, ce qui les rend difficiles à étudier, surtout vu le petit nombre de cas pour chaque type”. La moitié des cancers pédiatriquessontdétectéssoitavantl’âge En Wallonie: le cou et les testicules Ces nouveaux chiffres pour 2007-2008 nous b permettent d’avoir, pour la première fois, une image un peupluscomplètedelamaladiecheznous. Mais contrairementàlaFlandrequitientses comptes depuis dix ans, les francophones n’ont un recul quedecinqans(depuis2004). ALCOOL ET TABAC C’est trop peu pour tirer de grandes conclusions. Toutefois, ces données mettent déjà en lumière certaines disparités entre régions (avec des écarts de 1 à 5). Ainsi, on voit clairement une incidence plus élevée des cancers de la tête et du cou le long de la frontièrefrançaise(cf.cartecidessous): telle une vague qui remonte de la France et qui s’étiole au milieu de la Belgique. Pourquoi? D’abord, il faut savoir ce qu’on entend par “ tête et cou”: il s’agit de cancers qui touchentlebasduvisage(bouche, langue) et le cou (larynx, par exemple). Rien à voir avec les tumeurs au cerveau. Or ces cancers sont principalement causés par le tabac et l’alcool. “ Et ces deux facteurs derisqueontuneffetpotentialisateur ”, explique Kris Henau, manager au Registre du cancer. Autrement dit, ils se renforcent. Une étude auprès depatientstouchésparcecancer a révélé que 65 % d’entre eux cumulaient effectivement les deux assuétudes. Et sionmetenparallèled’autres cancers eux aussi liés au tabagismeetàl’alcool(œsophage, pancréas, vessie), les cartes peuvent quasi se superposer: l’incidence est plus élevée dans la même zone géographique. Des campagnes de préventionsurlesdangersdu tabagisme et de l’alcool semblent s’imposer dans cette partie de la Wallonie. CANCER DES TESTICULES Par contre, aucune explication encore pour l’autre “épidémie”: celle de tumeurs des testiculesle longdelafrontière allemande. Les statistiques ducancerenAllemagnemontrentlemêmephénomènede leur côté de la frontière. Ce cancer touche les hommes jeunes, mais il est heureusement dépisté très tôt et sa mortalité est faible. « C.V. Thyroïde: études en cours NAMUR LIEGE CHARLEROI Les cancers chez l’enfant: moins d’1 % de tous les cas ll Le cancer qui frappe un enfant, ça fait toujours froid dans le dos. Et pourtant, statistiquement, ces cancers sont rares: ils représententmoinsd’1 %detous les cas en Belgique. Mais c’est encore1 %detrop.Surtoutquandil s’agit de son propre enfant. En2008,319 enfantsontétéfrap- ÉTONNANTES “ÉPIDÉMIES” d’un an (10 % des cas), soit avant l’âge de 5 ans (40 %). En 2008, 31 tout-petitsontsouffertdelamaladie avant même de souffler leur première bougie. Les 0 à 14 ans vont faire l’objet d’une étude plus poussée par les experts du Registre du cancer. Elle sera publiée plus tard. l C.V. ll On a beau nous dire que ce n’est pas le nuage de Tchernobyl, onnepeuts’empêcherdedouter. Surtoutquandonvoitlacartedes cancers: la Wallonie est deux fois plus touchée, en particulier le Sud et l’Est. La ministre de la Santé Laurette Onkelinx a commandé plusieurs études sur la question. Les résultats sont attendus pour la fin de l’année. Avec 755 nouveaux cas en 2008, le cancer de la thyroïde est considéré comme rare. “Et ce sont des petites tumeurs (< 2 cm), qui ont un bon pronostic”, rassure le Dr Francart. Ce cancer augmente partoutdanslemonde.Unehausse qui pourrait en partie s’expliquer par le fait qu’on les diagnos- La ministre attend des résultats tiquebien:aujourd’hui,encasde goitre,onl’enlèveparsouciesthétique mais on l’analyse quand mêmeenlabo,cequipeutrévéler des tumeurs microscopiques (dontonn’auraitjamaisriensusi on était mort avec son goitre). Or de telles chirurgies sont plus fréquentes en Wallonie. l C.V.