La brièveté de la vie.wps

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SÉNÈQUE - LA BRIÈVETÉ DE LA VIE
A été écrit entre 49 et 55 après JC, avant la Vie Heureuse et dix ans avant Lettres à Lucilius :
lettre 1 : "si tu veux bien voir les choses, la plus grande partie à mal faire, une grande partie à ne rien faire
et la totalité de la vie à faire autre chose qu'il ne faudrait" . => injonction au lecteur pour prendre
conscience que le temps passe le + souvent en pure perte -> urgent de procéder à une " conversion.
Brièveté de la Vie : genre protractile = exhortation, convertisseur. Réflexion de Sénèque se fait par
association d'idées (justification de la suppression des chapitres dans cette édition...).
Chapitre 1 : Exposition du sujet : "malheur général" => Va s'agir pour Sénèque de faire un sort à
un lieu commun qui concerne la "plupart des mortels". Les hommes à l'écrasante majorité se plaignent de
la Brièveté de la Vie, "que nous venons au monde pour une courte vie". N'hésitent pas à incriminer la
nature pour cette "parcimonie".Pour Sénèque : extrêmement insensé. Désir de bonheur si profondément
ancré en eux, mais de là à imputer à la nature la faute alors que dans la Vie Heureuse dira que c'est la
nature qui permet d'arriver au bonheur, Sénèque ne peut pas. Ce lieu commun aussi bien de la foule que
des "hommes de grand renom". Tous se laissent abuser par cette tentation d'imputer à la nature une
responsabilité qu'elle ne peut pas avoir. Réf à Hippocrate: " la vie est brève et longue la science". Réf à
Aristote : ici explicite alors que dans la Vie Heureuse son nom jamais apparu -> différence "gens cultivés"
et "foule" = confond réalité et idéal => Sénèque veut faire fond sur une réalité de bon sens donc opinion
d'Aristote à faire répandre comme une vérité de bon sens (peu importe qui l'a dit). Mais ici réf explicite car
Sénèque s'attaque directement à une erreur de jugement d'Aristote. Universalité du désir de bonheur mais
pas d'unanimité dans la définition de celui-ci -> obtenue dans la désignation de la cause de son absence. En
rapprochant les 2 textes : lieu commun unanime sur la question de l'absence de bonheur = alliance
suspecte. Sénèque va essayer de rétablir le "divorce" entre "foule" et "gens cultivés". Ne sera jamais
question ici de la définition de la nature du bonheur. Ce qui intéresse S ici : problème se situe en amont du
problème de la Vie Heureuse : s'interroge sur la possibilité de ce bonheur. Réfutation du lieu commun vaut
comme un rétablissement de la possibilité de travailler à une Vie Heureuse. La réfutation du commun
initial et le rétablissement de la vérité => "condition a priori de possibilité" (Kant) de la Vie Heureuse.
I] Première partie (chapitre 2 à 13) :
"Nous ne vivons jamais, mais nous espérons de vivre" Pensées, Pascal
Chapitre 2 : Thèse : Nous rendons notre vie brève par notre folie, négligence, désinvolture. p90: problème :
"nous en perdons beaucoup", p91 : "nous ne sommes pas indigent, nous gaspillons". Homère : "La partie
de la vie que nous vivons est courte": tout le reste, c'est du temps. Distinction entre temps et vie sous-tend
le reste du traité. Sénèque explique que ceux qui se plaignent de la Brièveté de la Vie n'utilisent q'une
infime partie du temps imparti pour vivre -> de leur faute. Quiconque parvient à vivre le temps imparti par
la nature ne se plaindra pas de Brièveté car aura utilisé le temps donné à bon escient, aura fait bon usage de
son temps. "convertissant" -> transfiguration de la donnée objective immatérielle qu'est le temps en vie.
Renoncement à l'ajournement perpétuel = vie toujours suffisamment longue pour atteindre au bonheur.
Excellence de la vertu = secret du bonheur. Peu importe le temps qui nous échoit, il deviendra un bien
entre les mains du sage, ce bien suprême qu'est une Vie Heureuse. Rien n'empêche de se servir de la notion
de préférable neutre pour parler du temps: temps n'est pas en lui-même long ou court, en lui même est
neutre. Deviendra long ou court suivant l'usage que l'on en fait. S'il y a transfo du temps en vie => temps
suffisamment long pour combler le bénéficiaire. Alternative entre vie longue et vie brève qui résulte
seulement de l'usage que l'on fait du temps, lui-même induit par la conception qu'on se fait de l'existence
humaine. P95 : ce sont les mêmes qui se plaignent de la Brièveté de la Vie et qui, p96, "vivent comme s'ils
étaient destinés à vivre toujours". Folie tient à l'ignorance qu'ils ont de la condition humaine. Tort = passer
outre notre finitude. Ignorance de la nature véritable de l'homme -> constitution propre dont nous a dotée
la nature. P105 : "il faut apprendre à vivre le long de sa vie" ; "il faut, sa vie durant, apprendre à mourir". > sage = instruit de sa condition de mortel. Sagesse stoïcienne bien grecque. -> on retrouve l'unité du bien
- beau - vrai. Rétablissement de la vérité conduit au bonheur = bien véritable.P108 : faire preuve de
prudence -> Aristote : Éthique à Nicomaque livre VI. Éthique de la prudence: mettre sa vie en sûreté ->
part de l'existence qui nous incombe, dont nous sommes responsable doit être appropriée sans délais. ->
Appropriation : nous devons nous rende maître de la part de la vie qui ne dépend que de nous. Se rendre
maître de sa vie = vertu. P79 dans la Vie Heureuse "celui qui enlèvera ses richesses au sage lui laissera
tout son bien". P108 : De même que le sage peut se voir privé de toutes se richesses sans perdre son bien
(la vertu), celui qui a mit sa vie en sûreté peut y voir "ajouter des choses mais rien en soustraire".
Appropriation non tardée => vite comblée : p108 : "avale ce dont il n'a même pas envie". Ici appropriation
à soi par appropriation de soi. Dans la Vie Heureuse on s'efforce de devenir souverain de son existence par
une conformisation avec ce qui nous est propre, ici inverse : avec mise en sûreté de notre propre vie permet
de se mettre en conformité avec le statut d'être vivant -> conscience aiguë de sa mortalité. P93 : "personne
ne s'appartient" = cause du malheur général = condition structurelle de la vie sociale détournent les
hommes de cet indispensable effort d'appropriation. Dès l'instant où vivent ensemble, cessent de se
suffirent eux-mêmes. -> inflexibilité pour les biens extérieurs et laxisme face au bien véritable. On fait
entrer soi-même ceux qui vont en devenir les accapareurs". Aliénation subie par l'homme en société.
L'homme s'aliène lui-même quand il vit avec ses semblables mais on doit pouvoir vivre pour soi-même au
milieu de ses semblables.
Donc : incrimination des conditions sociales de l'existence => perte de temps qu'elles occasionnent .
Chapitre 4-5 : Sénèque examine les cas de Auguste et Cicéron : parlent de "retraite"= œuvrer efficacement
à le Vie Heureuse -> "retour de l'âme sur elle-même" -> "conversion". -> modification du regard, de la
représentation = renversement des valeurs. Choses dont on doit changer la représentation :1° le temps
p103 : "il y a urgence" sur la nature du temps , "la plus fuyante des choses" => écoulement du temps :
irréparable temps physique : court, en écoulement perpétuel et rapide. Nature nous a doté des moyens de
"dilater" le temps : le "ralentir" ou le "saisir". Fuite en avant -> négligence, reporter toujours plus tard le
moment où on va accomplir les choses les plus essentielles. P112 : "le plus grand gaspillage de la vie, c'est
l'ajournement". On ne peut pas raisonnablement ajourner le renoncement à l'ajournement. Insensé de
précipiter le cours des choses = aspirer à l'avènement de demain = abréger l'existence. Urgence de la
conversion = c'est d'abord sur la dimension du présent que doit porter notre regard => "vis tout de suite".
=> Attention la plus grande au présent car "l'avenir est incertain" (fortune) => vain, stupide de miser sur
l'avenir. Présent : seule dimension du temps sur laquelle on ait prise, on puisse intervenir. P115 : "le vis se
divise en 3 périodes: ce qui a été, ce qui est et ce qui sera" => mettre son attention dans le présent et mettre
le passé en "sûreté". P116 : passé = part "inviolable" de la vie, la possession en est "paisible". Des 3
dimensions du temps, passé est la dimension la plus propice à la tranquillité de l'âme = bonheur. Pour se
faire une Vie Heureuse il faut soigner son passé: absorption est telle que passé de l'homme absorbé pas du
tout propice à la tranquillité mais ressent des "regrets" : constate qu'il n'a fait que travailler à l'abréviation
de sa propre existence, gaspiller son temps imparti. L'attention au présent permet d'édifier un passé ->
dilatation du temps permise, se fait en direction du passé. P118 : pour pouvoir dilater le temps: faut être
loin du tumulte de la foule.
II] Deuxième partie (chapitre 14 à 17) :
La sagesse comme art de vivre
Faut tendre à un certain "détachement". Détachement du sage ne le rend pas étranger à l'humanité. Ici
Sénèque veut proposer des solutions à une vie concrète. Sage : celui qui va accéder à l'humanité véritable
en fuyant ses contemporains. Cherche à se détacher du simulacre de vie qu'est l'existence du plus grand
nombre. Paradoxe : seul le sage vit alors que semble tant détaché des choses extérieures, résolu par
l'analyse des rapports qu'entretient le sage avec le temps. P129 : "vivre" est 1° une bonne gestion de son
temps : complaisance tranquille à l'évocation du passé, attention au présent et indifférence au futur ->
appropriation de soi du sage, s'est approprié sa vie mais ne vaudrait pas comme appropriation à lui-même
comme homme, vaudrait ici comme appropriation à soi comme sujet singulier. Conformité à un type
universel recherchée par le stoïcisme. HOMOLOGIA : accord entre notre nature et la nature/notre raison et
le logos divin (-> notre nature = la raison = universelle, concerne l'espèce) donc l'appropriation à soi est
seulement une conformisation au modèle universel => valable ssi des tierces personnes sont capables de
juger la félicité d'un homme => possible car homme conforme à un modèle générique. "y ajouter tous les
siècles" = se donner les moyens d'appartenir à l'humanité toute entière-> éternise sa vie. Siècles passés =
faire des hommes les plus illustres de ces temps révolus ses "familiers de chaque jour". Au lieu de perdre
son temps à rencontrer ses contemporains absorbés, allons rendre visite aux sages anciens = on ne peut
leur faire perdre leur temps et on a toujours quelque chose à apprendre d'eux.
"grandeur des aspirations du sage" -> étendre les limites de l'humain au-delà de la compréhension qui se
borne à une représentation empirique et subjective des "petitesses humaines". Auguste Conte : "L'humanité
se compose de plus de morts que de vivants". Mieux vaut la compagnie des morts véritables qui ont
consacré leur vie à apprendre à vivre que celle des morts-vivants que sont les contemporains
affairés/absorbés car même s'ils sont vivants, ils gaspillent leur temps et sont comme si déjà morts au
niveau de leur vie. "exercice de la souveraineté" = se soustraire à la nécessité contingente = vivre parmi
ceux dont la nature a fait nos proches n'est pas obligatoire. P130 et 134 : "futur, il s'en réjouit d'avance", ce
dont se réjouit le sage pour les siècles à venir ne concerne que l'infime influence qu'il sera susceptible
d'exercer de la possibilité qu'il aura de devenir un familier d'un contemporain d'un siècle futur. " ce qui fait
la longueur de sa vie, c'est la réunion de tous ses moments de sa vie". En s'absorbant en lui-même = retraite
-> en peuplant sa "solitude" de la compagnie des illustres "familiers" que sont les grands hommes du
passé => "communion" avec l'humanité -> éprouve le lien qui unit à tous les autres hommes. Lien = raison
= instrument de la dilatation du temps.
III] Citations importantes :
P89 : "la plupart des mortels […] (s'accorde) pour se plaindre de la parcimonie de la nature, parce que nous
venons au monde pour une courte vie" "ce malheur général" "même parmi des hommes de grands renom"
P90 : Hippocrate : "<< la vie est brève et longue la science>>" "nous n'avons pas un temps trop court, nous
en perdons beaucoup"
P91 : "nous ne sommes pas indigents, nous gaspillons"
P92 : Homère"<<la partie de la vie que nous vivons est courte>>. Tout le reste, […] c'est du temps"
P93 : "personne ne s'appartient"
P96 : "vous vivez comme si vous étiez destinés à vivre toujours"
P103 : "la plus fuyante des choses"
P105 : "il faut apprendre à vivre tout au long de sa vie" "il faut, sa vie durant, apprendre à mourir"
P108 : "on peut y ajouter des choses, rien en soustraire" "il avale ce dont il n'a même pas envie"
P112 : "le plus grand gaspillage de la vie, c'est l'ajournement"
P115 : "la vie se divise en trois périodes : ce qui a été, ce qui est et ce qui sera. Des ces trois, celle que
nous traversons est courte, celle que nous allons vivre est douteuse et celle que nous avons vécu est
certaine"
P116 : "notre passé est justement la part […] inviolable du temps"
P118 : "pour ceux dont la vie se déroule loin de toute agitation"
P132 : "parmi eux, nul ne te forcera mais tous t'apprendront à mourir"
P134 : "le temps est-il passé qu'il le retient par son souvenir ; présent, il l'utilise ; futur, il s'en réjouit par
avance" "ce qui fait la longueur de sa vie, c'est la réunion de tous ses moments en un seul"