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Musicien Manouche d’aujourd’hui
Moreno
Moreno : guitare solo, Tonino & Potzi : guitares d’accompagnement, Stefan : contrebasse
Yochka
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Moreno
Il est des musiques dont on s’entiche aussi vite qu’on
les oublie malgré leur supposée variété ; d’autres qui
s’imposent par le respect convenu que l’on a de la forme
classique de leur sérieux. Et puis il y a celles, plus rares - tel
le jazz manouche de Moreno - dont on ressent confusément
ce que sa fascination a de mystérieux et d’irrémédiable.
Guitare au charme à la fois impalpable comme une saute
de vent sur un terrain vague, ou prégnant comme un coup
de foudre, et qui vous saisit au détour d’une rue, ou du fond
d’un bistrot des Puces, pour ne plus vous lâcher...
Soudaine intrusion d’un souffle musical à la fois
sauvage dans son arabesque et le contraste de ses
couleurs “Cesar Swing”, et empreint d’une sorte
d’innocence désarmée lorsque Moreno s’abandonne à un
délicat onirisme sonore “Yochka”. C’est que, pour nos sens
blasés, ce swing manouche au parfum si particulier - émanation même de l’âme tsigane
- réintroduit en nous la notion de musique naturelle et nourrit notre imagination en mal
d’émotion vraie. D’ailleurs, à l’écouter improviser, l’on pressent chez Moreno que l’approche
instrumentale ne procède nullement d’une démarche réellement concertée, mais de l’heureuse
conjonction de traditions ancestrales et d’influences diverses rencontrées au gré du Voyage, et qui
viennent se fondre en lui sans jamais annihiler sa propre personnalité : influence manouche bien
évidemment, non seulement par Django Reinhardt “J’attendrai”/“Over The Rainbow” mais
aussi par ceux de sa Lorraine natale, Dorado ou Tschavolo “Laurence Süni”, et influence
plus gitane, par celle des guitaristes Bousquet et Tchan-Tchou aux côtés desquels il joua un
temps, dans le sud de la France “Moreno Waltz”/”Waltz à Witi”.
Aussi est-on loin des sempiternels “Hommââge à Django” (avec un tremblement dans
le médiator!), pâles copies qui ne laissent du modèle que le spectre sonore exsangue du
reflet. Ici l’art de Moreno se révèle au contraire généreusement irrigué par une inspiration
jaillissante, pleine d’allant et de verve “Swing d’Alsace”/”Place Parodi”. Et si,
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manifestement, il joue dans l’esprit du maître (“c’est ma culture, après tout !” aime-t-il à
rappeler), ce n’est jamais, comme tant d’autres, pour en reprendre systématiquement les
clichés, mais plutôt pour en prolonger le chant intérieur et les conceptions instrumentales
“I love you ”. Aussi, pour lui, une guitare doit-elle sonner avec l’ampleur d’un orchestre
et vibrer du plus profond de ses fibres - sans nul artifice - aux élans irrépressibles de ses
improvisations.
Il est à noter par ailleurs que Moreno a la délicatesse de n’interpréter ici aucun thème
de Dango (pourtant chers à son cœur) mais presque exclusivement des compositions
personnelles où s’opposent aux morceaux swing, d’une luxuriance ornementale toute
tsigane “Milko”/”Dikeno Sinto”, des mélodies plus dépouillées dont le caractère élégiaque
et mélancolique révèle un souci constant de musicalité “Resla”/”Nouk”.
Quant à souligner la grande virtuosité de son jeu, cela tombe sous le sens, la musique de
Moreno - plus élaborée qu’il n’y paraît de prime abord - requièrant en effet une maîtrise
parfaite de l’instrument : contrôle du plectre, vélocité digitale, précision de l’attaque et
rigueur du phrasé. Tout ceci au service d’une sonorité d’un lyrisme unique; à tel point
spécifique aux manouches, que ce n’est pas sans un certain dépit que les gadjés (non-tsiganes)
s’essayant à ce style si typé, mesurent tout ce qui sépare la
seule technique de l’expressivité atavique d’un peuple. Cette
fameuse gipsy touch, comme disent les anglais, qu’évoquait,
peu après la disparition de Django Reinhardt, le critique
Michel-Claude Jalard, en terme de supplément ethnique ...
Toujours est-il que Moreno, hors des modes mais bien de
notre temps, a su conserver à sa guitare cette irréductible
liberté qui s’épanouit jusque dans les conventions d’un jazz
de tradition : ce “Swing des Puces” rétif à toute assimilation,
certes ici capté - pour notre bonheur - mais qui n’est pas près
d’être mis en cage!
Alain Antonietto
(des “Etudes Tsiganes”)
Tonito
guitare d’accompagnement
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Moreno
There are some musics you get hooked on just as easily as
you forget them, in spite of their so-called variety ; There
are others that draw attention by conventional respect for
classical music, by their seriousness. Then there are those,
more rare, such as Moreno’s manouche jazz - that are fascinating and mysterious in a hopeless sort of way. A guitar
that has a charm that is intangible like the wind rushing
across a vacant lot, and is striking, like lightning. It grabs
you as you round the corner of a street, or in the back of a
café at the flea market, and doesn’t let go...
The sudden intrusion of a musical inspiration that is
both savage, in its arabesque and constrast of colors like
Potzi
guitare d’accompagnement
in “Cesar Swing”, and disarmingly innocent, such as
“Yochka”, when Moreno goes into delicate dreaminess.
For our bored senses, this manouche swing that has such a distinct taste, -stemming
from the gypsy soul itself- reintroduces the notion of natural music and feeds our
imagination that is starving for real emotion. When you hear Moreno improvise, you
can sense that his approach to music is is not an artifical preparation. His playing
has emerged from the meeting of ancestral traditions with the various influences
encountered during travel, that he has absorbed without effacing his own personality: manouche influences of course, not only Django Reinhardt “J’attendrai/Over
the Rainbow”, but also from the Lorraine region where he was born, Doardo and
Tschavolo “Laurence Süni”. He is influenced by the more gypsy-type musics, such as
the guitarist Bousquet and Tchan-Tchou with whom he played for a time in the south of
France “Moreno Waltz”/Waltz à Witi”.
We are far from the same old “Hommage to Django” (with the pick trembling with
emotion!), pale immitations that leave only a lifeless reflection of the model. Moreno’s
art is, on the contrary, generously fed by gushing inspiration, and verve in “Swing
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d’Alsace”/Place Parodi”. While he plays in the spirit of the master -”after all, its my
culture” as he likes to say-, it is not to repeat the clichés so often heard, but to prolong
the interior song and instrumental concepts as in “I love you”. For him, the guitar
has to resound with the amplitude of an orchestra, and to vibrate from deep down
inside- without anything artificial- moved by the irrepressible enthusiasm of his
improvisations.
It should also be noted that Moreno is tactful enough not to interpret any of Django’s
pieces here (although they are dear to him), recording only his own compositions. There
is a mixture of styles, from the highly ornamental gypsy-style swing, “Milko/Dikeno
Sinto”, to simpler tunes that are elegiac and melancholic, revealing his constant regard
for musicality, “Resla/Nouk”.
Moreno plays with great virtuosity, his music, more elaborate than it seems at first,
requires complete mastery of the instrument: the control of the plectrum, speed, precision
in entering and rigor in the phraseology. This is all to serve a unique sound and lyricism.
It is not without some disdain that the gadjés (non-gypsies) try to play this typical style
and learn that it is not just a question of technique but also stems from the atavistic
expressivity of a people. This famous gypsy touch, that the music critic, Michel-Claude
Jalard, writing shortly after the death of Django Reinhardt, considered as an ethnical
addition....
In any case, Moreno, far from the realm of fashion but from our
times, has managed to preserve the irreducible freedom of his
guitar, being comfortable even in the conventional jazz tradition,
the “Swing des Puces”, resisting assimilation, that here is captured for our pleasure, but is far from being caged.
Alain Antonietto
of Etudes Tsiganes
Stefan : contrebasse
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Moreno : guitare solo, Tonino & Potzi : guitares d’accompagnement, Stefan : contrebasse
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