Miss

Transcription

Miss
Ingrid Graziani
Boxe française
Entretien : Région parisienne, Mars 2009
3 – La parenthèse « Miss »
En 2003, tu es championne du Monde et c’est aussi l’année où tu deviens Miss Ile
de France. Déjà, c’est plutôt une bonne année pour toi…
Oui (Rires).
C’est un peu paradoxal, parce que ce sont deux mondes que l’on n’associe pas, a
fortiori en même temps. On peut plus facilement imaginer cela dans une logique
séquentielle. D’où t’est venue cette idée de participer au concours de Miss ?
Cela m’est venu sans vraiment réfléchir. Au départ, j’étais sceptique. Finalement, je
l’ai fait et cela s’est bien passé, mais j’ai complètement dissocié les deux choses. La
finale des championnats du Monde était en septembre, tandis que l’élection était au
mois de décembre, ce qui laisse du temps. Ma saison était finie… J’étais moins
assidue à l’entraînement que par la suite. J’ai participé et j’ai gagné. Tout s’est
enchaîné très vite : j’ai gagné l’élection de Miss Ile de France au mois de décembre, et
dix jours après, je partais avec les quarante-sept filles pour l’élection de Miss France.
C’est si rapproché ?
L’élection de Miss Ile de France, c’est la dernière élection. Je n’avais pas de
passeport : il a fallu en faire un en urgence. D’ailleurs, c’était étonnant, parce que j’ai
eu mon passeport en une heure. Nous sommes arrivés : « Oui, l’élection… Geneviève
de Fontenay… Machin… Bon, d’accord, on va le faire. » (Rires). Je suis partie en
Tunisie pendant dix jours, puis nous sommes allés à Deauville, à l’hôtel Normandie.
J’ai une anecdote à ce propos. Quand j’étais sponsorisée par Nike, j’avais un rendezvous à l’Hôtel Normandie à Deauville. Dans le hall de l’hôtel, avec la fille qui
s’occupe de moi chez Nike, des gens nous ont demandé où se trouvait la boîte de nuit.
Et je connaissais l’hôtel Normandie par cœur, ce qui l’a beaucoup étonnée. Pour
l’élection de Miss France, nous sommes restés pendant trois semaines à l’hôtel
Normandie, pour préparer les chorégraphies. Nous n’avions pas le droit de sortir de
l’hôtel, et nous passions donc notre vie dans l’hôtel. Cela devient ton Q.G. (Rires) !
J’ai fait cette émission et j’ai kiffé. J’ai fait des rencontres ; je suis toujours en contact
avec certaines filles. Je me suis beaucoup amusée.
Que faîtes-vous pendant trois semaines ? Des répétitions…
Voilà, à Deauville. Avant, en Tunisie, nous tournons les petits clips : « Je suis Ingrid
Graziani, Miss Ile de France, élue à Bourg-Marlotte » (Rires)
À Bourg-Marlotte (Rires) ?
La honte ! (Rires). Nous sommes parties à quinze filles dans le désert Tozeur de
Tunisie ; je ne sais pas comment ils ont choisi, j’ai eu de la chance. Nous sommes
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allées dans le désert pour tourner les clips, un voyage dans le voyage. Nous avons pris
un vieux train qui traverse un désert, nous sommes passés à un endroit où se trouvent
les décors de « Star Wars », en plein milieu du désert. Pour l’élection de Miss France,
je me suis bien amusée. Je n’étais pas dans les douze candidates présélectionnées.
Douze sur les quarante-sept ? Je suis désolé, je ne regarde pas…
Moi non plus, je ne regardais pas. Quand ils ont vu que je n’étais pas sélectionnée,
mes parents ont changé de chaîne, énervés (Rires) ! Une anecdote : je m’entendais
bien avec les gardes du corps. Nous n’avions pas le droit de sortir de l’hôtel sans un
garde du corps, même si nous voulions aller acheter… Je ne sais pas…
… Une fraise Tagada ?
Oui, voilà (Rires). Ils étaient devenus nos amis : « Allez, tu viens avec nous ». J’ai
gardé quelques contacts ensuite d’ailleurs. Je n’étais pas les douze présélectionnées, et
tant pis.
Qui fait cette présélection ?
Dans le jury, il y avait Madame de Fontenay, son fils, une autre dame, « La
gouvernante des Miss », une fille très sévère et en même temps marrante.
Pour les bonnes manières ?
Oui. Il ne faut pas être en retard à un rendez-vous, il faut bien parler… Quand nous
étions en jean : « Enlevez-moi ce jean, vous ne vous rendez pas compte ! ». (Rires).
Cela a changé depuis, depuis qu’Endemol a racheté des parts. Et donc, dans ce jury, il
y avait des personnalités.
Et le jour J : les quarante-sept défilent ; ils annoncent les douze, et…
C’est cela qui m’a foutu les boules ! (Rires) Pendant des jours et des jours, nous
avions répété : la chorégraphie des quarante-sept, puis celle des douze, celle des huit,
celle des quatre. Nous étions toutes obligées d’apprendre les chorégraphies !
Alors que cela ne sert à rien pour trente-cinq d’entre vous.
Exactement ! Et j’étais éliminée, alors que j’avais répété pendant des jours et des
jours une chorégraphie que je n’allais même pas faire ! Sur le coup, j’étais un peu
déçue, pas pour moi, mais pour mes parents : « Les pauvres, ils regardent la
télévision, je ne suis même pas dans les douze. » Ma mère était à fond. C’était une
bonne expérience ; si c’était à refaire, je le referais. Je me suis bien amusée.
Qui a été élue Miss France cette année-là ?
Laetitia Bléger, Miss Alsace.
Et l’ambiance entre Miss ?
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Cela allait. En même temps, nous étions quarante-sept, et on ne peut pas s’entendre
avec tout le monde. Il n’y avait pas de problèmes particuliers. Nous étions cinq filles :
Miss Tahiti, Miss Corse, Miss Languedoc-Roussillon (avec l’accent), les filles du
soleil. Au cas où, je gardais des contacts pour les vacances (Rires). Je suis d’origine
corse, et je me suis très bien entendue avec Miss Corse. J’aurais révolutionné l’image
de Miss France (Rires).
Sur Geneviève de Fontenay, as-tu perçu un décalage entre la réalité et l’image ?
Disons que… Je ne sais pas. Je n’ai pas vraiment accroché, parce que c’est une
femme qui vit encore un peu dans son temps, dans son monde. Elle a des principes
qui n’existent plus. J’aime bien aller vers les gens, mais pour les connaître vraiment,
au-delà des mondanités. Cela m’a un peu déçue… C’est peut-être lié à mon
éducation : je viens d’un milieu populaire, où les gens se parlent sans chichis, sans
manières. Elle est quand même impressionnante, c’est un personnage. Elle a ce côté
pas tout à fait sympathique. Je me disais : « Ce n’est pas possible, elle n’est jamais
contente » (Rires). C’est peut-être le stress d’une élection, tu ne peux pas juger
comme cela. Elle n’est pas méchante.
Tout repose un peu sur ses épaules…
Oui. Madame de Fontenay, tu ne peux que l’associer au monde des Miss France.
Aujourd’hui, ce n’est pas facile pour elle : le concept a été racheté par Endemol et elle
ne tient plus les choses comme avant. Sur les plateaux télévision, la Miss France est
sans Madame de Fontenay, alors que c’était impossible avant. Ce n’est pas plus mal,
pour dépoussiérer tout cela : les filles de nos jours sont différentes de celles d’avant.
Heureusement ! Ma grand-mère se permettait moins de choses que nous aujourd’hui,
par exemple le fait de faire de la boxe pour une fille.
Prochaine lettre :
Ingrid Graziani
4 –La vie en général.
© Loïc Henry / 2009 – 2010.
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