03 oct - Site de la paroisse de Blocry

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03 oct - Site de la paroisse de Blocry
Dimanche 3 octobre 2010
Homélie du Père Louison
1. Dans la première lecture de ce dimanche, il y a quelque chose qui m'a d'emblée frappé : un prophète, Habacuc,
questionne Dieu d'une manière tout à fait surprenante. Ecoutons ses paroles : «Combien de temps, Seigneur, vais-je
t'appeler au secours, et tu n'entends pas, crier contre la violence, et tu ne délivres pas ! Pourquoi m'obliges-tu à voir
l'abomination et restes-tu à regarder notre misère ?» Il peut donc arriver à un prophète, à un porte-parole de Dieu,
de ne pas comprendre l'attitude de celui au nom de qui il délivre des messages. Mais pour Dieu, il n'y a rien de
sacrilège dans les propos d'Habacuc. La relation entre Dieu et son prophète est une relation d'amitié, de profonde
intimité. C'est parce que Dieu est l'Ami par excellence de l'homme que le prophète peut lui exprimer, sans
dissimulation, ce qu'il y a dans son cœur, y compris son sentiment de révolte, voire sa colère. Il est donc normal que,
nous aussi, puissions exprimer à Dieu ce que nous ressentons au fond de notre cœur. En principe, c'est ce qui se
passe entre de vrais amis. Si dans ta relation d'amitié avec l'autre, il ne t'est jamais arrivé de lui dire qu'il y a quelque
chose d'étrange, voire d'inadmissible dans son comportement, alors il y a lieu de se demander si le mot « ami » n'a
pas été ajouté par erreur dans ton dictionnaire, ou bien si ce n'est qu'une « amitié » version réseaux sociaux
(Facebook, Netlog, etc..) : « X et Y sont maintenant ami(e)s ». L'amitié proprement dite est bien plus sérieuse.
2. De plus, le contenu de la plainte du prophète est parfaitement compréhensible. Il vit dans une société où la justice
devient une denrée très rare, où l'injustice est banalisée. Le juste est écrasé par le méchant, alors qu'il se trouve dans
une société où la religion occupe une place centrale. On n'a pas besoin de faire des études poussées en histoire ou en
archéologie pour comprendre ce qui est en jeu dans la première lecture. Il suffit simplement d'aller sur internet,
d'écouter la radio, de suivre la télévision ou de lire les articles de presse pour réaliser combien ce que dit Habacuc est
d'actualité dans notre monde, même si les situations diffèrent selon que l'on se trouve dans la région des Grands
Lacs ou au Moyen-Orient - pour ne pas allonger la liste.
3. Le danger qui guette celui qui croit à la justice, c'est de changer de camp. Puisque c'est la loi de la jungle qui
semble l'emporter, alors moi aussi je vais me transformer en une bête féroce et on verra les résultats. C'est
pourquoi, la réponse de Dieu au prophète Habacuc est très importante : « Celui qui est insolent n'a pas l'âme droite,
mais le juste vivra par sa fidélité ». La fidélité ou la foi (c'est le même mot dans la Bible : emunah en hébreu, pistis en
grec), ça compte ! Ne désespère donc pas. Ceux qui retiennent la vérité captive dans l'injustice (Rm 1,18) recevront le
salaire de leur conduite. Ceux qui persévèrent dans la justice qui vient de la foi vivront (cf. Rm 1,17). Pour nous
chrétiens, le Juste par excellence c'est le Christ. Il avait crié : « Mon Dieu, mon Dieu pourquoi m'as-tu abandonné ? »
Mais sa fidélité jusqu'au bout lui a valu la résurrection d'entre les morts. C'est lui le vrai Seigneur, et non ceux qu'on
qualifie de « seigneurs de guerre », « barrons de la drogue », « hommes forts », etc.
4. Dans l'évangile, les apôtres demandent à Jésus d'augmenter leur foi. Rien de plus normal pour des gens qui
cheminent avec celui dont l'attachement à Dieu est indéfectible. Mais dans sa réponse, le Christ attire leur attention
sur ce que leur foi, qu'ils trouvent petite, peut réaliser . « La foi, dit-il, si vous en aviez gros comme une graine de
moutarde, vous diriez au grand arbre que voici : 'Déracine-toi et va te planter dans la mer', et il vous obéirait ».
Autrement dit, à travers cette foi que vous trouvez petite, vous êtes déjà en mesure d'accomplir des choses
incroyables.
5. Evidemment, Dieu ne nous demande pas, au nom de la foi, de provoquer des catastrophes écologiques, du genre
déraciner des arbres pour les jeter dans la mer. Mais il attend de nous que nous puissions accomplir notre tâche,
avec la foi qui est la nôtre. Il est normal que, face au spectacle du monde qui nous révolte souvent, nous puissions
demander une foi plus grande. Mais prenons-nous conscience de l'efficacité de celle que nous avons déjà ? Pour
reprendre les paroles d'une chanson intitulée When you believe, chantée par Mariah Carey et Whitney Houston: «
Who knows what miracles you can achieve when you believe. Somehow you will, you will, when you believe » ( « Qui
sait quels miracles tu peux accomplir, quand tu crois. D'une façon ou d'une autre, tu y arriveras, tu y arriveras, quand
tu crois »).
6. Il est certainement plus facile de se plaindre de ce qui ne va pas dans le monde que d'accomplir notre devoir de
disciples du Christ. A la fin de l'évangile, Jésus déclare : « Lorsque vous aurez fait tout ce qui vous a été prescrit, dites :
Nous sommes de simples serviteurs ; nous avons fait ce que nous devions faire ». Imaginons, un seul instant, que
chacun de nous ici présent, en communion avec les autres, faisait son devoir de témoigner par la parole et par les
actes de sa foi, de son espérance et de sa charité, utilisait le don qu'il a reçu pour le mettre au service de sa famille,
de l'Eglise et de la société. Imaginons un seul instant que le milliard de catholiques dans le monde agisse ainsi, que
les tous les chrétiens œuvrent pareillement. N'y aurait pas un changement radical dans notre société et dans le
monde ? N'y aurait-il pas moins de cris de détresse semblables à ceux que nous avons entendu dans la première
lecture ? Qu'est ce qui nous empêche alors d'agir en ce sens ? Saint Paul nous rappelle pourtant que ce n'est pas un
esprit de peur que Dieu nous as donné, mais un esprit de force, d'amour et de maîtrise de soi.
Prions le Seigneur, qu'en acceptant de prendre notre part de souffrance pour l'annonce de l'Evangile, nous puissions
accomplir, avec le peu de foi que nous avons, notre devoir quotidien de disciples du Christ mort et ressuscité, pour
que la justice et la vérité triomphent dans le monde. Amen.
Père Louison
http://www.louisonus.com/