La moto - texte distingué par les élèves
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La moto - texte distingué par les élèves
Vous avez dit «à la manière de Ponge» ? La moto Lorsque cette monture se repose dans son écurie, juchée sur une meule de foin et maintenue en équilibre grâce à une canne filiforme, sa masse corporelle dynamique et puissante se tient inerte et statique. Formant une carcasse robuste, son squelette se confond avec ses muscles et ses organes, visibles de l'extérieur tel un cadavre étripé. Pour que cette monture percluse reprenne vie, un noble chevalier impérieux et absolu doit la dompter en lui murmurant un chant formel et singulier à son oreille. Alors, leurs deux corps ne font plus qu'un; ils sont en symbiose. La monture se laisse complaisamment guider par son maître. Ainsi ses yeux s'ouvrent et font jaillir une explosion de lumière jaunâtre et étincelante. Son souffle noirâtre, expulsé par ses naseaux cylindriques, quant à lui provoque une mélodie grisante. Ses deux paires de sabots et de jambes formant deux spirales tournent dans un même mouvement continuel permettant de parcourir d'innombrables kilomètres. Assis sur une selle rectangulaire et équipé simplement d'un heaume circulaire, le chevalier jouit de la vitesse vertigineuse et dense du galop exalte qu’il augmente ou diminue à chaque tension de son poignet. Cependant, plus les kilomètres défilent et plus l’énergie de la bête s'amenuise. Alors indocile et entêtée, elle s'endort et éteint son ardeur attendant qu'on lui desserve dans sa gueule ce breuvage vulgaire et commun. Hugo P. 1