Le Certificat de « Maître Nageur »

Transcription

Le Certificat de « Maître Nageur »
Almanach 1908 : P. 131
Le Certificat de « Maître Nageur »
Depuis le 4 avril 1907, tout marin obtiendra de la Marine le certificat de Maître
nageur, s’il peut passer l’examen pratique et théorique dont nous donnons ci-dessous les conditions.
Tout homme, pour être considéré comme sachant nager, devra pouvoir satisfaire
aux deux épreuves ci-après :
1° Exécuter un parcours minimum de 100 mètres ;
2° Exécuter une plongée sous l’eau d’une durée minima de 10 secondes, le corps
entièrement immergé.
Conditions pour obtenir le certificat de Maître nageur.
Un certificat de maître nageur sera délivré aux marins qui auront satisfait aux
épreuves suivantes :
1° Épreuve de vitesse : 100 mètres en deux minutes ;
2° Épreuve de résistance : 1 000 mètres en trente minutes ;
3° Piquer une tête de 5 mètres de hauteur ;
4° Rester soixante secondes en plongée sous l’eau, le corps entièrement immergé ;
5° Étant habillé (tricot, chemise, vareuse, pantalon et souliers), ramasser, par 3
mètres de fond, une pierre ou un poids en fonte de 5 kilogrammes ;
6° Etant habillé (comme ci-dessus), exécuter avec un mannequin ou un homme
désigné à cet effet, l’exercice de porter secours à une personne en danger de se noyer
et franchir ainsi un espace de 25 mètres ;
7° Justifier de la connaissance théorique et pratique des «soins à donner aux
noyés».
Les marins de tous grades qui auront obtenu le certificat de maître nageur recevront, dans les conditions indiquées à l’article 314 de l’arrêté du 5 juin 1897 modifié, un nombre de points supplémentaires compris entre 20 et 30 ; ce nombre sera
déterminé par le commandant et l’officier chargé de la natation, qui présideront à
l’exécution des épreuves et signeront les certificats.
Comme conséquence des dispositions qui précèdent, la classification des nageurs
qui figurent actuellement sur les livrets sera remplacée par la suivante :
1. Ne sachant pas du tout nager ;
2. Nageur insuffisant ;
3. Sachant nager ;
4. Maître nageur.
Les marins classés dans la 1ère ou la 2ème catégorie devront être exercés aussi souvent
que le permettront la température de l’eau et les nécessités du service.
Almanach 1908 : P. 135
SYNDICATS DE MARINS-PÊCHEURS
(A la demande de beaucoup de pêcheurs, nous reproduisons cette année cet article qui a été
vivement apprécié).
Bien souvent, les marins se demandent ce qu’il faut penser des syndicats...
Il parait tellement important de répandre des notions précises et sincères sur le
rôle des syndicats, que voici en quelques mots une appréciation exacte, et conforme
d’ailleurs, à l’esprit même de la Loi Française sur les syndicats.
Le but de tout syndicat, c’est d’étudier les questions professionnelles dans un esprit de progrès véritable, en vue d’améliorer la situation des marins syndiqués et de
leur obtenir, au moyen du «groupement», des avantages qu’ils ne pourraient avoir
s’ils restaient isolés.
Seulement, voilà : le syndicat est un organisme très délicat ! Un syndicat peut être
comparé à une épée pointue des deux bouts : une telle épée peut facilement blesser
celui qui s’en sert au lieu de lui rendre service. Le syndicat, c’est un outil excellent si
on veut le manier habilement : mais c’est un outil mauvais qui gâte l’ouvrage si l’on
ne s’en sert pas comme il faut.
Pour qu’un syndicat obtienne de bons résultats, il faut absolument que le comité
qui le dirige remplisse les conditions suivantes :
1° Le comité ne doit contenir aucun membre d’une profession différente : ainsi,
un syndicat de marins-pêcheurs ne doit pas contenir un seul membre qui ne soit
pas marin-pêcheur, vivant spécialement et uniquement du métier de la pêche, sans
une seule exception ; c’est, du reste, la Loi qui le prescrit, et elle devrait toujours être
strictement appliquée ;
2° Le comité, ou tout au moins le Bureau du syndicat, ne doit être composé que
d’hommes parfaitement estimés de la majorité des collègues, et ne s’occupant pas
d’action politique.
Le certificat de maitre-nageur,
c’est 20 à 30 points supplémentaires.
Regardez autour de vous, examinez un à un les directeurs et membres du Bureau
et dites-vous intérieurement : «Puis-je avoir confiance en celui-ci, en celui-là ?...» Réfléchissez bien avant de vous lancer dans une organisation qui pourrait peut-être
vous causer des brouilles avec vos amis, entraîner des injustices et vous faire perdre
de l’argent.
Un syndicat de marins-pêcheurs faisant des opérations commerciales (achats d’engins, de rogues, etc.), court les mêmes risques que les commerçants : par conséquent
il peut, comme les commerçants, faire de mauvaises opérations et faire perdre de
l’argent aux syndiqués : il est donc important, indispensable, de ne choisir, pour
l’administrer, que des hommes absolument de confiance.
D’ailleurs, il faut noter que quand un syndicat éprouve le besoin de faire des
opérations commerciales, il a tout avantage à monter une Coopérative, en plus, et à
côté du syndicat.
Conclusions. - Pour résumer, voici à quels signes on reconnaît qu’un syndicat de
pêcheurs est utile, ou bien qu’il n’est guère capable d’améliorer le sort du pêcheur.
Un syndicat de marins dont le Bureau ne contient que des membres très estimés
de tous et ne s’occupant pas de politique, un syndicat qui est très prudent en fait
d’opérations commerciales, un syndicat qui s’occupe activement des réglementations à apporter dans la pêche et dans le port, et des améliorations pratiques à faire
à tout ce qui intéresse les marins, comme la Caisse de Prévoyance et les Invalides de
la Marine... Ce syndicat-là pourra faire d’utile et de profitable besogne. Celui-là sera
le vrai et le fécond Syndicat des Marins-Pêcheurs.
Au contraire, un syndicat qui aura laissé se glisser, dans son bureau ou à ses réu-
nions, un homme qui ne vit pas comme eux du métier de marin-pêcheur, un homme
qui a quelqu’intérêt en dessous, un homme qui, d’autre part, n’est pas connu comme
ayant une grande et longue expérience des affaires commerciales, ce syndicat-là risque
fort de ne faire que du mauvais ouvrage ; il sera le Syndicat des marins-blagueurs...
Marins intelligents, défiez-vous donc ! Ouvrez l’œil : ne vous laissez pas mener
contre vos véritables intérêts.
Almanach 1908 : P. 135
LE « BIEN DU PÊCHEUR »
L’Œuvre «le Bien du Pêcheur» s’inspire d’institutions déjà existantes : «Jardins ouvriers», «Habitations salubres à bon marché», «Bien de Famille», «Cités-jardins», etc.,
ainsi que de certaines initiatives individuelles locales. Elle a pour but :
1° BUT MATÉRIEL :
- A. De faciliter, à des conditions avantageuses, tant l’achat que la location de logements salubres, gais, commodes, aux jeunes ménages de marins-pêcheurs.
- B. De supprimer le cabaret à alcools du village, en le proscrivant légalement de
ces groupements nouveaux ; l’alcool du débit est, on le sait, la cause presque unique
des misères physiques et morales du marin breton.
- C. De faire connaitre, et adopter peu à peu, certaines particularités de construction et d’installation rendant la maison et le jardin du pêcheur plus hygiéniques et
plus profitables.
-D. De rendre impossible les «entassements humains» si fréquents, hélas ! en BasseBretagne.
2° BUT MORAL :
- A. De combattre efficacement l’alcoolisme et l’oisiveté en procurant dans des
conditions exceptionnelles au marin-pêcheur, dont les loisirs à terre sont fréquents,
une maison agréable qui l’attache au logis et un jardinet de rapport qu’il trouve
plaisir et profit à cultiver.
- B. De faire prendre peu à peu des habitudes d’épargne au marin-pêcheur, grâce
à la perspective séduisante d’acquérir en peu d’années un «chez lui» commode, indépendant et sain, où il vivra heureux.
- C. De ramener peu à peu aux habitudes de culture de la terre les marins-pêcheurs
qu’un trop grand nombre ont eu le tort d’abandonner.
Fécond syndicat des MarinsPêcheurs ou Syndicat des
marins-blagueurs
Quelques détails. - L’Œuvre offre ces petites propriétés, soit en location soit en
vente, aux marins-pêcheurs (principalement aux tout jeunes ménages) qui présentent des garanties sérieuses de bonne conduite, de sobriété et d’esprit de travail et
d’ordre. La location est d’un prix légèrement inférieur au taux des locations du pays.
Le prix de vente est payable par annuités, régulières ou irrégulières, suivant certaines
conditions, particulièrement avantageuses 1 pour le ménage, avec cette restriction,
qui est une clause formelle du contrat, que la maison ne pourra jamais servir de débit
à alcool. Afin d’écarter toute pensée de spéculation mal entendue chez les marins
acquéreurs, des mesures spéciales doivent empêcher que ces propriétés ne puissent,
en dehors de certaines circonstances, être revendues... Aucune parcelle cultivable
ne pourra non plus être détournée de sa destination pour recevoir des bâtiments de
location, afin de combattre efficacement les funestes tendances à l’entassement si
fréquent hélas parmi les populations de la côte.
1 L’Œuvre croit indispensable d’envisager le sacrifice pour elle des intérêts du capital engagé, afin
de pouvoir faire au ménage économe et pourtant obéré souvent par les enfants par la maladie ou par
les pertes d’engins de pêche, des avantages sérieux.