Séminaire Religion et Géopolitique

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Séminaire Religion et Géopolitique
Séminaire
Religion et Géopolitique
Compte-rendus des interventions
Mme N. Marouani – Dieu et l’Amérique
Ce qui fait la particularité des Etats-Unis, c’est qu’en dépit de la séparation entre l’Eglise et
l’Etat, (séparation garantie par le 1er amendement de la Constitution) la religion reste
omniprésente et constitue un véritable kaléidoscope spirituel.
Au XIXème siècle déjà, Alexis de Tocqueville observait : « La religion en Amérique n’a pas
un rôle direct dans le gouvernement de la société mais elle doit être considérée comme la
première de ses institutions politiques ».
M. M. Castellan – Sacré et Violence : l’œuvre de
René Girard
René Girard s’interroge sur la violence à partir de sa théorie du désir mimétique. Celui-ci
permet de comprendre comment la violence peut se répandre très rapidement dans une société,
compromettant son existence même. Comment la paix peut-elle alors revenir ? Pour Girard, on
ne peut répondre à cette question qu’en faisant référence au sacré. En effet, la violence, à son
paroxysme, va se focaliser sur une victime arbitraire et l’unanimité va se faire contre elle.
Cette victime devient sacrée, c’est-à-dire porteuse du pouvoir prodigieux de déchaîner la crise
mais aussi de ramener la paix. (Girard analyse longuement l’exemple d’Œdipe dans l’Œdiperoi de Sophocle)
Séminaire Géopolitique et Religions @ Lycée Fénelon – Juin 2012.
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M. P. Meynier – Economie et religions :
Economie et religion paraissent éloignées, la première tournée vers le terrestre et les contingences
matérielles, la seconde vers la transcendance et le spirituel. Pourtant dans notre quotidien, les
croyances nous apportent des réponses sur les questions suivantes : quels biens produire et consommer
(interdiction de l’alcool), quelles personnes participent à la production (femmes et/ou hommes),
comment produire (techniques d’abattage des animaux) et quelle répartition (quelle conception de la
richesse ? du partage ?).
En élargissant le questionnement nous retrouvons l’analyse de Max Weber qui montre l’influence des
valeurs protestantes sur le développement du capitalisme. Cette étude marque encore les recherches,
elles s’appuient aujourd’hui sur des données plus fines et plus nombreuses. Les conclusions sont
variables et montrent certainement plus une interaction qu’une causalité.
Avec le développement des communications et des moyens de transports apparaissent le « village
planétaire » et la mondialisation libérale, les pays souhaitant alors s’insérer dans l’économie
sélectionnent certaines valeurs et les religieux adaptent aussi leurs discours (islam de marché). La
sécularisation du monde est en marche et l’uniformisation résulterait alors d’un benchmarking
culturel. Dans ce contexte, les religions pourraient s’éloigner de leurs influences particulières sur les
activités économiques.
Pour autant, les religions porteuses de valeurs notamment sur la perception de la richesse et de la
justice peuvent guider les individus vers des consommations plus solidaires et équitables. Et en ce sens
elles peuvent imprégner nos comportements et orienter encore nos sociétés non par la puissance
institutionnelle du dogme mais la somme des actes individuels.
M. B. Benoit – Printemps arabe, aube islamiste ?
Le Printemps arabe (2011-2012) apparaît comme un objet historique paradoxal. Ces manifestations de
démocratisation ont abouti partout à la victoire des partis islamistes, représentant l’antithèse de la
démocratie. Ce paradoxe conduit à poser une double interrogation. Interrogation sur le sens des
révolutions : toute révolution n’aboutit pas mécaniquement à l’instauration de la Démocratie (Iran en
1979). Interrogation sur nos visions du monde : la grille mentale admettant les séparations
« naturelles » (révolution / religion et islamisme / modernité) n’a de pertinence qu’inscrite à l’intérieur
d’une culture spécifique, la culture occidentale.
Les mouvements islamistes apparaissent comme une constellation diverse : mouvements inspirés des
Frères Musulmans égyptiens (ENNAHDA en Tunisie) et ceux liés au salafisme (AL NOUR en
Egypte).
Leur victoire à l’échelle du Maghreb n’a été possible que par un dépassement des principes de
l’islamisme politique ou religieux. Ils sont obligés de faire fond sur des préoccupations sociales et
économiques : s’occuper des problèmes de répartition des richesses. L’élément identitaire n’est plus la
seule matrice des mouvements islamistes. Ils doivent tenir compte de sociétés avancées promptes à
défendre leurs droits (« statut particulier des femmes » en Tunisie). Enfin les révolutions ont poussé les
mouvements islamistes à jouer le jeu des élections : or la démocratie est un jeu dangereux et les forces
qui l’investissent, finissent toujours par être bouleversées par elle (cas du salafisme, antipolitique dans
sa pureté originelle, qui s’adultère à la démocratie en acceptant de participer aux débats et aux
élections).
Davantage qu’une victoire de l’islamisme, la montée en puissance des partis islamistes en démontre au
contraire le dépassement : ainsi semble donc venu le temps du « post-islamisme » (O. ROY).
Séminaire Géopolitique et Religions @ Lycée Fénelon – Juin 2012.
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