Contribution de la CGT/RATP relative à la négociation du prochain

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Contribution de la CGT/RATP relative à la négociation du prochain
 Contribution de la CGT/RATP relative à la négociation du prochain contrat STIF-­‐RATP 2016-­‐... Contribution de la CGT/RATP relative à la négociation du prochain contrat STIF-RATP 2016-...
PRÉAMBULE .................................................................................................................................................................................... 3 I. LE CONTEXTE DU CONTRAT ............................................................................................................................. 4 1. LES PROBLEMES DE FINANCEMENT .............................................................................................................. 4 A) EN PREMIER LIEU, IL Y A LES EFFETS DE LA CRISE : ........................................................................................................... 4 B) EN SECOND LIEU, IL Y A LES CONSEQUENCES DES CHOIX GOUVERNEMENTAUX : .......................................................... 4 II. L’OUVERTURE A LA CONCURRENCE ............................................................................................................. 6 1. LA RATP UNE ENTREPRISE PUBLIQUE DE SERVICE PUBLIC POUR DES DEFIS A RELEVER ........ 7 A. C’EST D’ABORD L’EMERGENCE D’UNE VERITABLE « CHAINE DU TRANSPORT ». ............................................................ 7 B. C’EST ENSUITE UN BESOIN GRANDISSANT D’INTER MODALITE. ........................................................................................ 7 C) C’EST ENFIN LA CAPACITE D’INNOVATION ET L’ENGAGEMENT DANS LA TRANSITION ENERGETIQUE. ..................... 7 III. 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. REFLEXIONS ET PROPOSITIONS DE LA CGT/RATP ................................................................................ 8 UN CONTRAT UNIQUE ........................................................................................................................................................ 8 UN CONTRAT PLUS LONG ................................................................................................................................................. 8 PRODUCTIVITÉ : STOP ! ..................................................................................................................................................... 9 DONNER DU CONTENU AUX CLAUSES SOCIALE, ENVIRONNEMENTALE ET ÉTHIQUE ..................... 10 DES INDICATEURS DE QUALITE DE SERVICE MOINS NOMBREUX ET PLUS PERTINENTS .............. 11 LES INVESTISSEMENTS .................................................................................................................................................. 12 L’UTILISATION DES RÉSULTATS DU CONTRAT .................................................................................................. 12 2 Contribution de la CGT/RATP relative à la négociation du prochain contrat STIF-RATP 2016-...
PRÉAMBULE La priorité aux transports publics est désormais reconnue quasi unanimement comme la condition d’un développement soutenable des grandes métropoles comme la nôtre. Pour faire vivre le droit à la mobilité pour tous, la région Ile-­‐de-­‐France dispose d’un atout incomparable : l’existence de deux entreprises publiques nationales, la RATP et la SNCF, combinant en leur sein l’ensemble des fonctions qui concourent à la production du Service public de transport : exploitation, maintenance, gestion des espaces et des infrastructures, ingénierie, recherche. Depuis 2000, les relations de ces deux entreprises avec l’Autorité Organisatrice qu’est le STIF sont définies par un contrat pluriannuel. Cette contractualisation a instauré entre le STIF et la RATP des relations de type client-­‐fournisseur que nous n’avons pour notre part pas approuvées. Cependant, dans le cadre ainsi créé, nous avançons un certain nombre d’exigences inspirées par le souci premier du Service Public. Tel est l’objet du présent document. Celui-­‐ci a pour but d’éclairer le STIF et les élus régionaux qui le composent sur les répercussions des choix politiques qu’ils sont amenés à faire et pour lesquels ils ont toute légitimité sur le fonctionnement de l’entreprise publique. Nous pensons en effet qu’il y a un lien étroit entre la situation faite aux personnels qui produisent le Service public et la qualité de celui-­‐ci. C’est d’ailleurs à partir de cette conviction que nous souhaitons que les Organisations Syndicales de la RATP puissent être auditionnées dans le cadre des discussions préparatoires à l’élaboration du nouveau contrat liant leur entreprise au STIF, comme ce fut le cas dans le cadre de la commission « démocratisation » du STIF à l’occasion de celui qui s’achève. De même, nous souhaitons également qu’elles soient associées au suivi du déroulement du contrat à échéances régulières. Ce document s’ouvre sur une analyse du contexte dans lequel s’inscrit la préparation du futur contrat, abordant notamment les problèmes de financement du système de transports franciliens et d’ouverture à la concurrence. Il comporte ensuite un certain nombre de réflexions et propositions élaborées par la CGT/RATP à la lumière de l’expérience des quatre contrats déjà conclus. Nous les avons regroupées sous sept rubriques qui concernent la forme du contrat, sa durée, la question de la productivité, la question des clauses sociale, environnementale et éthique, les indicateurs de qualité de service, les investissements, l’utilisation des résultats financiers. 3 Contribution de la CGT/RATP relative à la négociation du prochain contrat STIF-RATP 2016-...
I.
LE CONTEXTE DU CONTRAT La négociation du futur contrat STIF-­‐RATP s’est engagée dans un contexte marqué par deux facteurs déterminants : -­‐
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Les difficultés de financement que rencontre actuellement le transport public, L’ouverture progressive des réseaux à la concurrence. 1. LES PROBLÈMES DE FINANCEMENT -­‐
Les moyens du STIF ont subi récemment des amputations pour deux raisons fondamentales. a) En premier lieu, il y a les effets de la crise : -­‐
D’une part, alors que la fréquentation des réseaux continue d’augmenter, les « recettes voyageurs » stagnent car le pourcentage d’usagers bénéficiant de titres réduits (FST) tend à s’accroître. -­‐
D’autre part, les recettes tirées du Versement Transport (fondées sur un pourcentage de la masse salariale des entreprises de plus de 10 salariés) subissent également l’impact des difficultés économiques et de la hausse du chômage. b) En second lieu, il y a les conséquences des choix gouvernementaux : -­‐
L’augmentation à 10% du taux de TVA a privé le STIF de 100 millions € de recettes annuelles, la répercussion de cette hausse sur les tarifs usagers au 1/1/14 ayant intégralement bénéficié au seul budget de l’Etat. -­‐
La suppression de l’écotaxe poids lourds est une autre décision qui a empêché des recettes nouvelles attendues pour les transports publics. -­‐
Enfin, la baisse de 11 milliards € des dotations aux collectivités territoriales a évidemment des impacts sur le budget de la Région et donc les moyens disponibles pour financer ses transports. Du côté de la RATP, l’arbitrage rendu par l’Etat propriétaire concernant son endettement pèse lourd. Cette dette (5,2 milliards €) est une dette d’investissement dont l’origine remonte aux années 70. Alors que l’Etat dirigeait les transports franciliens à travers le STP, il a laissé la RATP supporter une large part des investissements nécessaires au développement des réseaux, notamment du RER. L’endettement d’origine engendré par le prix des infrastructures et des matériels roulants a ensuite été financé par un système de crédit revolving particulièrement onéreux à une époque où les taux d’intérêt étaient à deux chiffres. Il s’agit donc d’une dette déléguée par l’Etat à l’entreprise publique. Or, en 2010, lors de la mise en place du règlement européen et de la loi ORTF, l’Etat a non seulement refusé de reprendre à son compte cette dette, mais il est intervenu pour que la plus grande partie en soit affectée à la partie « Opérateur de transport (OT) » de la RATP, c’est-­‐à-­‐dire celle appelée à être mise en concurrence. Le remboursement de cette dette de l’OT est devenu un objectif central de la gestion de la RATP dans la perspective des échéances d’ouverture du marché. Cette décision de l’Etat a des conséquences directes sur le contrat STIF-­‐RATP. La maquette financière de l’actuel contrat a ainsi été conçue autour de l’impératif de stabilisation de la dette de la RATP. Et pour le prochain, elle pourrait intégrer l’objectif d’une diminution de celle-­‐ci. Mais quel que soit le choix qui sera fait 4 Contribution de la CGT/RATP relative à la négociation du prochain contrat STIF-RATP 2016-...
en la matière, c’est bien la RATP et la Région qui sont appelés à se partager le coût du désengagement de l’Etat. A cela vient s’ajouter la volonté gouvernementale de mettre la RATP à contribution pour compenser le coût des cadeaux fiscaux consentis aux entreprises (tels le CICE ou le CIR) et de l’impact négatif de l’absence de croissance sur les recettes du budget national. Ainsi, l’Etat entend soumettre la RATP à l’impôt sur les sociétés et à la taxe sur les salaires (dont elle est aujourd’hui exonérée) dès 2016 et lui imposer le versement de dividendes. Pour notre part, nous nous opposons à cette hypothèse qui viendrait encore compliquer les choses en pompant des ressources qui doivent à notre sens rester au sein du système de transport francilien. Enfin, il faut garder en tête la cause structurelle d’accroissement des besoins de financement qu’est l’augmentation du coût marginal du transport. En effet, plus les réseaux s’étendent en banlieue et moins les recettes nouvelles tirées du trafic permettent de compenser les dépenses. Les récentes décisions politiques sur les 140 Millions d’euros de recettes fiscales nouvelles et la mise en place, en septembre prochain, du Pass Navigo unique à 70€, ne changeront pas le déséquilibre financier global du transport public en Ile de France. Au final, le constat est clair : l’écart grandit entre l’ambition du STIF (que la CGT soutient) de donner la priorité aux transports publics et les ressources affectées aujourd’hui au fonctionnement du Service public. Face à cette situation, le contrat actuel 2012-­‐2015 a fait un choix : celui de renforcer la productivité demandée à la RATP. La contribution du STIF aux dépenses de fonctionnement a ainsi été diminuée de 40 millions € par an par rapport au contrat 2008-­‐2011, un chiffre qui correspond aux 700 à 800 suppressions d’emplois annuelles réalisées dans l’EPIC RATP. La contestation de ce choix avait été la principale raison qui avait conduit la quasi-­‐totalité des organisations syndicales de la RATP à dénoncer le contrat. Aujourd’hui, le bilan montre que cette productivité renforcée empêche et empêchera de plus en plus d’atteindre les objectifs de production et de qualité de service attendus par le STIF (on trouvera dans la suite de ce document des exemples plus détaillés de cette contradiction). De plus, après des années de réduction des coûts de personnel, les gisements de productivité tendent à s’épuiser. Certaines pratiques en la matière se révèlent d’ailleurs complètement contre-­‐productives. Ainsi, la dégradation continue des conditions de travail des machinistes a conduit à une remontée des phénomènes d’absentéisme et d’inaptitude à l’emploi (même si le taux d’absentéisme à la RATP demeure de moitié inférieure à ceux des transporteurs privés). Le recours à du personnel de conduite intérimaire à l’été 2014 a été le syndrome de l’échec de cette politique. Ceci montre que la fuite en avant dans la baisse des coûts de production et les gains de productivité ne peut pas faire office de réponse durable et crédible au problème global de financement du système de transports franciliens. La vraie solution réside dans la recherche de nouvelles ressources, au premier rang desquelles figurent l’augmentation des recettes du Versement Transport acquitté par les entreprises, la mise à contribution de leurs profits et le réengagement financier de l’Etat. 5 Contribution de la CGT/RATP relative à la négociation du prochain contrat STIF-RATP 2016-...
II.
L’OUVERTURE À LA CONCURRENCE La loi ORTF de décembre 2009 a défini les modalités d’application à la région Ile-­‐de-­‐France de la libéralisation des services publics de transport prévue par le règlement européen OSP : -­‐
Toute nouvelle desserte, quel qu’en soit le mode, est d’ores et déjà soumise à l’obligation d’appel d’offres ; -­‐
Le réseau bus sera entièrement ouvert à la concurrence au 1/1/2025 ; -­‐
Le réseau tramway au 1/1/2030 ; -­‐
Les réseaux de métro et de RER au 1/1/2040. Afin de faciliter l’entrée de nouveaux opérateurs, la loi a aussi modifié profondément le régime de la propriété des biens. Et elle a imposé à la RATP une séparation comptable entre les fonctions d’ « Opérateur de transport (OT) » et de « Gestionnaire des infrastructures (GI) » exercées par la RATP. Il faut noter qu’on a ainsi évité la séparation juridique, contrairement au modèle appliqué au transport ferroviaire national. Le contrat STIF-­‐RATP en vigueur est demeuré dans ce cadre un contrat unique où la rémunération du GI fait l’objet d’un fléchage particulier. La CGT/RATP a combattu et continue à combattre la logique libérale qui sous-­‐tend ces textes. Elle ne vise en effet qu’à permettre à des sociétés privées de faire du transport public une source de profit et de rémunération de leurs actionnaires, au détriment des principes du Service public. Ceci dit, l’attribution des contrats demeure et demeurera exclusivement de la responsabilité du STIF. C’est donc lui qui, en pratique, a déjà pour partie et aura bientôt en totalité la latitude de remettre ou non en cause la place de l’entreprise publique RATP dans les transports franciliens en privatisant une partie des lignes qu’elle exploite aujourd’hui. Il s’agit bien d’un choix politique entre conception de Service public et vision marchande du transport, entre entreprise publique et groupes privés, entre opérateur unique et multiplicité de sociétés intervenantes. Précisons que cette question concerne à la fois l’exploitation des réseaux, mais également les autres activités aujourd’hui incluses dans le périmètre du contrat : maintenance, billettique, gestion des espaces, maîtrise d’ouvrage des projets. L’attitude récente du STIF nous interpelle fortement car elle dénote une volonté manifeste de réduire la place de la RATP : -­‐
C’EST LA VELLEITE (HEUREUSEMENT M ISE EN ECHEC) D E CONFIER LA M AINTENANCE DES LIGNES DU G RAND P ARIS E XPRESS AUX FOURNISSEURS DE M ATERIEL ROULANT ET N ON PAS A L’EXPLOITANT D E CES LIGNES ; -­‐
C’EST LA VOLONTE D ’EXCLURE LES TRANSPORTEURS, ET NOTAMMENT LA R ATP COMME LA S NCF, D E LA GESTION D U F UTUR S YSTEME B ILLETTIQUE ; -­‐
C’EST LA REMISE EN CAUSE SUR PLUSIEURS PROJETS DU ROLE DE CO -­‐MAITRISE D’OUVRAGE EXERCE JUSQU ’ ICI P AR L A R ATP C ONJOINTEMENT A VEC L E S TIF ; -­‐
C’EST L’ATTRIBUTION D E LA D ESSERTE M EAUX-­‐M ELUN A UNE SOCIETE P RIVEE ALORS Q UE L’OFFRE DE LA RATP ETAIT FINANCIEREMENT EQUIVALENTE . 6 Contribution de la CGT/RATP relative à la négociation du prochain contrat STIF-RATP 2016-...
1. La RATP une Entreprise Publique de Service Public pour des défis à relever Si la CGT/RATP défend la place de l’entreprise publique intégrée qu’est la RATP dans les transports franciliens et milite pour son élargissement, c’est à partir d’une analyse des défis auxquels ceux-­‐ci sont confrontés aujourd’hui : a. C’est d’abord l’émergence d’une véritable « chaîne du transport ». Moins que jamais, la gestion d’un système de transport peut être vue comme la juxtaposition de tâches séparées. L’ingénieur qui conçoit une nouvelle desserte ou une gare routière doit par exemple maîtriser les contraintes de l’exploitation et de la maintenance pour les intégrer en amont. Et l’introduction des nouvelles technologies renforce cette interpénétration ; ainsi, la planification de la production, l’exploitation en temps réel, l’information des voyageurs, la validation des titres, la gestion des signalements et le suivi des alarmes de sécurité font de plus en plus appel à des systèmes intégrés et à des personnels appelés à coopérer toujours plus étroitement. Eclater ces fonctions entre plusieurs intervenants, c’est la certitude d’une perte de synergies et du renvoi des responsabilités sur l’autre à chaque dysfonctionnement. C’est aussi accroître significativement les risques en matière de sécurité. La réponse efficace, c’est l’intégration de ces fonctions au sein de la même entreprise. b. C’est ensuite un besoin grandissant d’inter modalité. Pour être attractive, l’offre de mobilité d’une grande métropole comme notre région doit en effet combiner modes lourds (RER et métro), intermédiaires (tramway), légers (autobus et autocars) et circulations douces (vélos,…). Mais elle doit aussi le faire en coordonnant le fonctionnement de ces différents modes à travers des correspondances performantes en temps réel, une information voyageurs multimodale pertinente et une bonne gestion des interfaces et des flux de voyageurs. Multiplier le nombre d’exploitants (qui seront par définition concurrents entre eux), c’est prendre le contrepied de ces besoins. La bonne réponse, c’est l’opérateur multimodal. c) C’est enfin la capacité d’innovation et l’engagement dans la transition énergétique. Or, l’exemple des bus électriques (où équiper le réseau implique de mettre sur pied une filière industrielle qui aujourd’hui n’existe pas en Europe) ou celui du métro du futur (dont la mise au point passe par une coopération associant exploitant et fournisseur de matériel roulant) sont éclairants. Ils montrent que, dans les faits, ce n’est pas le secteur privé, mais bien l’entreprise publique nationale, en tant que bras armé des politiques de l’Etat, qui joue ce rôle d’impulsion. C’est donc au nom de l’efficacité économique et sociale que nous souhaitons voir se mettre en place sur le long terme des rapports de coopération entre le STIF et la RATP. Une RATP qu’il doit selon nous considérer et traiter comme un partenaire privilégié, et non comme un opérateur banalisé dans la concurrence. 7 Contribution de la CGT/RATP relative à la négociation du prochain contrat STIF-RATP 2016-...
III.
RÉFLEXIONS ET PROPOSITIONS DE LA CGT/RATP 1. UN CONTRAT UNIQUE La RATP est une entreprise intégrée, un exploitant multimodal, et son personnel compétent couvre tout le spectre professionnel du transport : de la recherche et développement, à la maintenance en condition opérationnelle des infrastructures et des matériels, jusqu’à l’exploitation multi réseaux et les services associés. Cette intégration est la colonne vertébrale de son efficacité. La séparation comptable imposée par le législateur entre l’exploitant et le gestionnaire d’infrastructures est un non-­‐sens pour une entreprise comme la RATP, tant les systèmes de sécurité de fonctionnement et d’exploitation sont interactifs. Cela ne doit pas générer des contrats spécifiques sur le modèle mortifère de la séparation RFF-­‐SNCF. Dans le contrat actuel, la segmentation par réseaux et sous réseaux des indicateurs porte en elle une vision d’éclatement de cette intégration. Une vision d’un réseau à plusieurs vitesses. Une vision tournant le dos aux objectifs du service public : égalité d’accès – égalité de service – égalité de traitement sur tout le territoire. Aujourd’hui, ces objectifs ne sont pas atteints pour tous les Franciliens. Le contrat STIF doit, au contraire, contribuer à maintenir et développer cette notion d’unicité de gestion multimode, gage d’efficience et de qualité du service sur l’ensemble des réseaux gérés par la RATP. Plusieurs contrats, c’est préparer l’éclatement de l’opérateur parisien historique, supprimer la péréquation intermodale existante et perdre le haut niveau de qualité de service toujours fragile d’aujourd’hui. Un contrat unique, c’est la garantie d’une exploitation multi réseaux efficiente, d’une maintenance journalière et patrimoniale du matériel et des infrastructures permettant un haut niveau de sécurité et de sureté, des investissements pour maintenir et développer les réseaux, augmenter la qualité de service et conserver l’excellence RATP reconnue mondialement par tous les acteurs du transport. Une RATP = Un contrat ! 2. UN CONTRAT PLUS LONG La RATP et le STIF se sont engagés sur un programme d’investissements très important de plusieurs milliards d’euros. La plupart de ces projets couvrent des durées supérieures à celle du contrat, aujourd’hui limité à 4 ans. Ces projets nécessitent une sécurisation accrue de leur financement jusqu’à leur terme, ce qui n’est pas le cas avec cette durée trop courte. Le futur réseau de transport du Gd Paris est l’exemple vivant d’un besoin sécurisé de financement sur le moyen et long terme. Loin de soutenir les échéances organisationnelles (Vision 2020) ou législatives (ouverture à la concurrence BUS en 2024) que nous subissons et que nous dénonçons, nous constatons que ces dernières sont elles même en décalage avec les limites calendaires du contrat et génèrent en conséquence des opérations de productivité accélérées pour le personnel. Nous demandons un contrat plus long, sécurisant les projets, permettant une gestion plus souple et plus humaine pour le personnel subissant les adaptations organisationnelles. 8 Contribution de la CGT/RATP relative à la négociation du prochain contrat STIF-RATP 2016-...
Une durée de 6 ans serait un minimum au regard des projets engagés et des enjeux sociaux et sociétaux à venir pour l’entreprise et ses agents. 3. PRODUCTIVITÉ : STOP ! Dans le contrat en cours, l’objectif de productivité assigné à la RATP a été doublé par rapport au précédent contrat pour atteindre 1%. Ces 1% se décomposent en : -­‐
0,5% appliqués à la contribution qui lui est versée (autrement dit, la RATP reçoit l’année n+1 99,5% de la contribution reçue l’année n pour effectuer la même offre) ; -­‐
0,5% « cachés » dans la maquette financière (qui prévoit que la RATP compense la baisse de la contribution du STIF au financement des dépenses d’exploitation). A ces dispositions s’ajoutent les marges de manœuvres que recherche la RATP pour améliorer sa capacité d’autofinancement, pour ses investissements et son développement, mais surtout pour faire face à un endettement contracté en grande partie par l’Etat propriétaire et que celui-­‐ci a refusé de reprendre à sa charge. Compte tenu de la structure des coûts de production du transport (où les dépenses de personnel représentent 70% du total), ce sont les agents de la RATP qui supportent pour l’essentiel le poids des économies ainsi réalisées. Avec une dégradation importante de l’emploi et de leurs conditions de travail et un quasi-­‐blocage des salaires. Une baisse des coûts de 1% se traduit ainsi par la disparition d’environ 400 postes par an. Fin 2013, les effectifs de l’EPIC ont été ramenés au niveau de 2002, alors même que l’offre de transport a augmenté de plus de 22% depuis cette date. Sur la période 2009-­‐2013, ils accusent une perte nette de 1463 emplois, autant de chômeurs en plus. Cette course à la baisse des coûts est tout aussi négative pour les usagers et a largement atteint ses limites. Ses effets sur la qualité de service sont notamment sensibles dans les secteurs suivants : -­‐
le niveau de la production, en premier lieu sur le réseau bus, avec un nombre important de services quotidiennement supprimés en raison du manque de personnel, et ce malgré le recours à des pratiques de gestion relevant de la déréglementation sociale (par exemple l’appel à du personnel intérimaire non formé au cours de l’été 2014) ; -­‐
la disponibilité du matériel roulant ; -­‐
la disponibilité des équipements dans les espaces gares et stations (escaliers mécaniques, péages, appareils de vente, appareils de vidéosurveillance, etc.) ; -­‐
l’accueil des voyageurs et la disponibilité des personnels au contact avec le public. Les dispositifs de productivité actuels ne doivent donc pas être reconduits dans le futur contrat. Celui-­‐ci doit au contraire garantir un engagement de moyens nouveaux, cohérents avec l’objectif d’une qualité de service de haut niveau. C’est en particulier pourquoi la formule d’actualisation de la rémunération de la RATP qui permet de prendre en compte les effets de l’inflation sur les différents facteurs de production (dépenses de personnel, facture énergétique, etc.) doit être conservée. 9 Contribution de la CGT/RATP relative à la négociation du prochain contrat STIF-RATP 2016-...
4. DONNER DU CONTENU AUX CLAUSES SOCIALE, ENVIRONNEMENTALE ET ÉTHIQUE La commande publique est un outil pour promouvoir le progrès social, le respect de l’écosystème et le mieux vivre ensemble. L’inclusion dans le contrat STIF-­‐RATP de clauses sur le plan social, environnemental et éthique est une nécessité pour répondre à ces objectifs, a fortiori dans un contexte de libéralisation des transports et de mise en concurrence des opérateurs qui pousse à réduire les coûts de production par tous les moyens. Ces clauses doivent définir un cadre contraignant quant aux conditions d’exécution du contrat tout en préservant la légitime autonomie de gestion de la RATP. Ce contrat pourrait ainsi revêtir une valeur d’exemple traduisant la volonté politique des élus de la région. L’enjeu est d’autant plus marqué que la RATP est le 2ème employeur de la région et contribue à ce titre de façon importante à définir les normes en vigueurs en Ile de France. Ces clauses pourraient également être reprises dans les appels d’offres lancés par le STIF pour l’exploitation des nouvelles lignes pour laquelle la mise en concurrence est désormais obligatoire. Une clause sociale a été intégrée dans le contrat en cours. C’est un premier pas. Cependant, cette clause ne comporte aujourd’hui ni engagements précis, ni contraintes particulières. Il convient donc de la faire évoluer pour la rendre réellement efficace. Aux regards des enjeux sociaux face à l’arrivée de la concurrence, le risque de dumping social ne pourra être supprimé qu’avec la généralisation d’une norme sociale dans le transport urbain d’Ile de France. A notre sens, la clause sociale doit permettre de mettre en place des garde-­‐fous face au risque de dumping social. C’est aussi une condition de la qualité du service public car il existe un lien fort entre celle-­‐ci et la situation faite aux personnels en charge de sa production. La clause devrait comporter les dispositions suivantes : ü Un engagement d’augmentation du point d’indice au moins égal à l’inflation de l’année n-­‐1 ; ü Un engagement de maintien de l’emploi statutaire au sein de l’EPIC et de son développement en proportion des évolutions de l’offre de transport ; ü Un engagement de non-­‐dégradation de la réglementation du travail en vigueur (au travers de la remise en cause des règles collectives, par exemple sur le temps de conduite, ou bien en interdisant le recours à l’intérim sur les métiers de sécurité, ces questions faisant actuellement l’objet de projets régressifs, notamment sur le réseau de surface) ; ü Un engagement de limitation du temps d’utilisation des salariés soumis à des contraintes de pénibilité du travail liées aux sujétions du service public (horaires et repos décalés, travail de nuit, etc.), cette limitation étant à la fois une condition de la préservation de leur santé et de la sécurité des réseaux ; ü Un engagement en matière d’insertion professionnelle concernant les personnes en difficultés (jeunes, chômeurs, handicapés, non diplômés). Concernant la clause environnementale, la RATP développe aujourd’hui une politique de management de la qualité qui s’appuie sur différentes démarches qualité sur l’environnement (norme ISO 14001), la santé et la sécurité au travail (norme OHSAS 18001). 10 Contribution de la CGT/RATP relative à la négociation du prochain contrat STIF-RATP 2016-...
Ces dispositions devraient être étendues et rendues obligatoires à travers la clause environnementale. Leur mise en œuvre doit faire l’objet dans le contrat d’un calendrier et d’une contribution financière spécifique du STIF. Le contrat devrait par ailleurs intégrer un instrument de mesure du bilan carbone de l’activité de la RATP liée au périmètre du contrat. La clause éthique doit comporter des engagements afin que les marchés de fourniture de biens et de sous-­‐traitance passés par la RATP pour l’exécution du contrat STIF soient soumis aux mêmes exigences que les prestations fournies par la RATP elle-­‐même. Ces engagements sont notamment : le respect de la réglementation du travail (normes OIT et code du travail français), des règles d’hygiène-­‐sécurité, des minimas salariaux. Sur chacune de ces trois clauses, et à l’image du reste du contrat, un système de mesure des engagements couplé avec un système de bonus-­‐malus devrait être mis en place. 5. DES INDICATEURS DE QUALITE DE SERVICE MOINS NOMBREUX ET PLUS PERTINENTS Chaque renouvellement du contrat aura été l’occasion, pour le STIF, de renforcer le suivi de son exécution à l’aide d’indicateurs de productions et de qualité de service. Afin de placer le voyageur au cœur du système et d’obtenir une image plus proche de son ressenti, le STIF a révisé en profondeur dans leur définition, dans leur nombre et dans leur niveau de rétribution les indicateurs de production, 377 à ce jour, et de qualité de service qui sont passés de 78 à 141. Cette inflation d’indicateurs n’est pas sans poser de réelles questions sur leur pertinence et sur leur suivi. Les exigences ont été globalement renforcées avec des objectifs nettement plus difficiles à atteindre. Ces objectifs de production et de qualité sont tellement ambitieux qu’ils apparaissent pour certains complètements irréalistes et produisent plutôt un effet de démotivation voire de renoncement à les atteindre. C’est toute la question entre le travail prescris et le travail réel qui est posée. En quoi les indicateurs sont-­‐ils reliés aux valeurs du service public et à la réalité des moyens mis en œuvre pour assurer un service de qualité attendu par tous ? Le service public tel que nous le concevons ne peut pas être incarné par des gens qui ne connaissent pas ses valeurs et ce n’est pas avec des indicateurs que cette question pourra se régler. Pour exemple, la conformité d’un arrêt au trottoir pour un bus ne peut être appréciée que si le machiniste sait fondamentalement pourquoi et comment il doit positionner le bus afin de faciliter la montée et la descente des voyageurs. Ce n’est pas un indicateur qui va régler ça. En matière de production, assurer un tel niveau de service sur le RER est aujourd’hui et malgré les nouveaux matériels, impossible. Le service se tend au moindre incident et ne laisse aucune marge de manœuvre. Les actions pour améliorer la régularité sont longues à mettre en œuvre et elles sont couteuses. La situation était connue lors de la construction du contrat mais au final, l’idée générale du STIF a été de considérer que le voyageur ne comprendrait pas que des situations inacceptables ne soient pas pénalisées. Les engagements de production sur le réseau de surface sont soumis à de fortes pressions avec une distinction entre pertes pour causes internes et causes externes. Pourquoi pénaliser la RATP 11 Contribution de la CGT/RATP relative à la négociation du prochain contrat STIF-RATP 2016-...
sur des pertes externes alors que par définition la maîtrise des évènements lui échappe ? Quant aux pertes internes avec un objectif dégressif chaque année, elles sont essentiellement le fruit des opérations de productivité et du sous-­‐effectif en machinistes receveurs. Si l’intérêt des usagers est mieux pris en compte aujourd’hui il ne faut pas qu’il se fasse au détriment des agents, dont l’avenir de certaines catégories semble bien peu engageant, et des marges de manœuvre de l’entreprise à assurer un service public de qualité tout au long de l’année. La qualité globale du transport public de voyageurs est constituée d’un grand nombre de critères. Une redéfinition de ces critères, des mesures et du management de la qualité de service semble pour nous incontournable dans le cadre des négociations du futur contrat. 6. LES INVESTISSEMENTS Depuis 30 ans, la CGT n’a eu de cesse de dénoncer la faiblesse des investissements dans le transport public francilien, au regard de la croissance des besoins et du vieillissement du système de transport. Depuis 2012, le niveau des investissements est intégré au contrat avec des clauses engageant les parties prenantes. Avec 6,5 milliards d’engagements sur la durée du contrat 2012-­‐2015, c’est une décision que la CGT soutient, tant le retard à rattraper est important. Sur le prochain contrat, Il faudra garantir et amplifier ce niveau d’engagements car d’autres défis seront à financer : la transition énergétique vers une motorisation dé carbonée des autobus, le soutien stratégique aux filières industrielles françaises du secteur ferroviaire et du secteur poids lourd -­‐ transport en commun, la rénovation des gares du réseau RER, la mise en accessibilité du réseau métro et RER, etc. La clef de répartition actuelle sur les investissements est à conserver : 50% RATP / 50% STIF lors du renouvellement en fin de vie et 100% STIF pour les prolongements et nouvelles lignes. La RATP devra rester force de proposition sur les choix industriels les plus à même de répondre aux besoins de transport aux meilleurs coûts pour l’autorité organisatrice. L’ingénierie RATP est reconnue mondialement pour cela et son territoire d’excellence est l’Ile de France. Cette vitrine parisienne de référence, promotionne les industriels français du secteur et crée des emplois. La maquette financière du futur contrat devra prendre en compte ces besoins à la hauteur des enjeux environnementaux, industriels mais également sociaux. La capacité contributive de la RATP, sa capacité d’autofinancement ; la CAF ; à ces investissements ne devra pas être alimentée par une destruction des effectifs, une réduction de la masse salariale, ou une productivité accrue sur le personnel. Un rappel : 700 postes supprimés par an depuis 4 ans. Le développement, oui. La casse de l’emploi, non. 7. L’UTILISATION DES RÉSULTATS DU CONTRAT A l’origine de la contractualisation avec le STIF, il y a la volonté de la direction de la RATP de financer le développement externe de l’entreprise avec les marges dégagées par ce contrat. Mais ce développement (à travers la filiale de droit privé RATP Dev) est de plus en plus exclusivement centré sur la rentabilité des capitaux investis et de moins en moins inspiré par des objectifs de service public. Cette orientation stratégique est un point de désaccord majeur entre la direction et la CGT. 12 Contribution de la CGT/RATP relative à la négociation du prochain contrat STIF-RATP 2016-...
Cependant, nous ne considérons pas pour autant que la RATP doive nécessairement réinvestir en Ile-­‐de-­‐France la totalité des bénéfices qu’elle tire du contrat STIF, comme certains le réclament. Cela reviendrait en effet à traiter la RATP comme une régie régionale. Or, nous sommes attachés à son statut d’entreprise publique nationale et à rayonnement international. Celui-­‐ci signifie deux choses : a. D’une part que la RATP assume (au sein de l’EPIC) des missions d’intérêt général qui dépassent le strict cadre de l’offre de transport régionale. C’est le cas par exemple de la recherche sur les transports (dont les résultats bénéficient à bien d’autres réseaux) ou de l’ingénierie (dont l’utilité va au-­‐delà des projets conduits en délégation de maîtrise d’ouvrage pour le STIF ou la SGP). Ces activités doivent évidemment être financées à une hauteur suffisante ; or, certaines d’entre elles sont structurellement déficitaires. b. D’autre part que la RATP est potentiellement un outil pour faire progresser le droit à la mobilité des individus dans le monde à travers son activité à l’international. C’est du moins l’orientation que nous souhaitons lui voir prendre ; elle suppose là aussi des moyens qui ne peuvent pas uniquement reposer sur l’autofinancement. Qu’une partie des résultats tirés du contrat STIF contribue à financer ces besoins n’est donc pas à nos yeux anormal dans cette double perspective. Dans le contrat en vigueur, il est prévu qu’en cas de capacité d’autofinancement réalisée supérieure à celle prévue, la RATP s’engage à réinvestir en Ile-­‐de-­‐France au moins 25% de cet écart. Nous proposons de reconduire ce principe. 13