Petite Histoire de la Chanson « Jeune Public » Un regard sur les
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Petite Histoire de la Chanson « Jeune Public » Un regard sur les
Petite Histoire de la Chanson « Jeune Public » Ca fait belle lurette que Jean-Marie Verhelst se passionne pour la chanson française avec une prédilection pour les (tout) jeunes publics. Début des années 70, il participe à la création du Cabaret « Le Chat écarlate » puis au projet de l’association « Diffusion Alternative » qui soutient des chanteurs moins médiatisés. Durant 25 ans, conseiller à la Médiathèque et Président d’Autre Chose pour Rêver, il n’a jamais cessé d’être à l’écoute des artistes et d’encourager toutes les générations de chanteurs « jeune public ». Il nous propose aujourd’hui sous forme d’un feuilleton « à suivre » les différentes étapes de la chanson pour enfants des années 1950 à 2000. Un regard sur les disques pour enfants Préambule Je fus, pendant vingt-cinq ans, conseiller discographique pour la collection « enfants » à la Médiathèque de la Communauté française de Belgique. A ce titre, j’ai vu défiler d’abord, sur la platine du tourne-disques, des 33 et 45 tours et, plus tard, sur le lecteur CD, de petites plaquettes rondes argentées spécialement conçues pour les plus jeunes. J’ai feuilleté de petites brochures accompagnant les supports sonores et qui contenaient parfois, outre les paroles des chansons et des contes, des textes situant la démarche du créateur ou de la firme. Mon boulot consistait après écoute en la rédaction de commentaires pour aider aux choix des médias dans les différents services au public de la Médiathèque. Le présent résumé de l’étude que j’ai réalisée sera présenté par étapes lors des différentes parutions du journal d’Autre Chose pour Rêver. Eternel étudiant d’une matière qui m’a passionnée, ces pages constituent, en fait, le condensé d’un mémoire de fin de carrière. Complémentairement, ma participation à l’association Autre Chose pour Rêver m’a invité à repenser, en permanence, la démarche des adultes vers les enfants, à observer l’évolution de ces derniers en regard du développement de notre société. L’enfant et la chanson constituent, ici, deux sujets convergents. Des sons Le son est une des manifestations de la vie. Pensez aux pas dans l’escalier ou aux cris des animaux. L’oreille entraînée de l’ornithologue identifie l’oiseau caché sous le feuillage d’un arbre ; il peut transcrire sur un graphique tant la ponctuation que les différentes hauteurs du cri. Dans les villes, un fond sonore continu enveloppe l’espace urbain ; la plupart des habitants s’y sont accoutumés ; leurs oreilles enregistrent, bien sûr, le ronronnement mais l’accoutumance empêche une prise de conscience. Un inspecteur de l’Institut bruxellois de la Gestion de l’Environnement (IBGE) signala, lors d’une conférence, que l’ignorance des bruits urbains peut, à la longue, causer des troubles à ceux qui vivent en permanence dans cette atmosphère. Ba, be, bi, bo, bu Dans son berceau, l’enfant gazouille. Manifestation de la vie, ces premiers babillements vocaux sont, pour lui, des expériences. Il découvre d’abord que sa gorge peut émettre des sons, que ceux-ci peuvent être variés. Cette découverte capte son attention. Il revit, par là, l’histoire de l’humanité et les premiers cris de l’être humain. Accompagner le tout-petit dans cette démarche, c’est l’aider à traverser des étapes essentielles à son évolution. Ces premiers bruits vocaux sont autant de manifestations de son état psychologique lié à ses besoins vitaux. Il perçoit les bruits qui l’environnent et lorsqu’un adulte s’approche et lui parle ou lui chante une comptine, il ne comprend évidemment pas les mots énoncés, mais il saisira les intonations vocales qui moduleront son comportement. Les lignes mélodiques des berceuses interprétées avec douceur seront, pour lui, des invitations au calme et au repos. La découverte des diverses sonorités buccales se transforme peu à peu en véritables modulations actives. Petit à petit, des sonorités vocales acquièrent un sens et lorsque le petit prononce « Maman », il vise la personne qui le nourrit. Nous pouvons parler de musique et de mots. La chanson est née. Le fœtus et les sons Nous savons, aujourd’hui, que l’enfant en formation dans le ventre de sa mère, entend les bruits de l’environnement extérieur. L’ouïe est, paraît-il, l’un des sens qui se développe rapidement. Par l’écoute, le fœtus participe donc à la vie du monde qui l’entoure ; il repère la voix de sa maman, perçoit le comportement de celle-ci et enregistre le contexte sonore dans lequel elle vit. Le choix musical du (des proches) aura donc, probablement une influence sur l’orientation musicale future de l’enfant. Le dialogue est donc possible avec le fœtus. Celui-ci saisira les moments où on lui parle. Même inconsciemment, il sera sensibilisé à la chanson que l’on exprime à son intention : il repèrera la voix et les sons évoqués, il sera bercé par la ligne mélodique et les intonations rythmiques. La répétition régulière de la chanson sera pour lui un message qui le rassurera, qui l’initiera au monde extérieur. Les berceuses Présentes dans toutes les cultures du monde, les berceuses accompagnent le petit dans sa découverte sociale. Écouter la chanson douce que lui chante un proche est un signal rassurant, un éveil à l’environnement, une présence à sa réalité, et, bien sûr, une invitation au sommeil réparateur. Il est donc important que la chanson soit interprétée de vive voix. L’écoute d’enregistrement sonore viendra après. Plus tard, à la crèche, il appréciera la petite comptine enseignée par la puéricultrice. Les comptines traditionnelles Les chants traditionnels, présents dans toutes les sociétés humaines, sont souvent accompagnés de gestuelles notamment lors d’un rituel, d’une ronde ou d’une danse. Le petit enfant qui grandit est particulièrement sensible aux gestes qui soulignent une chanson. En plus du plaisir qu’il peut éprouver, c’est, pour lui, un moyen mnémotechnique pour apprendre aisément une chanson. Celle-ci lui fait découvrir des sons, des mots, souvent nouveaux qu’il assimilera progressivement ; c’est aussi le fantastique pouvoir de s’exprimer lui-même, de trouver un moyen de communication avec son entourage. Pour le jeune enfant tout est nouveau. Attentif, il capte les sons et musiques qui l’entourent ; il n’a pas de référence. De même qu’il assimilera progressivement la langue de ses parents, il repèrera l’environnement musical dans lequel vivent ses proches. L’initiation musicale commence très tôt. Signalons, ici, que les chansons traditionnelles ne sont, pour la plupart, pas des chansons « jeune public » ; nous y reviendrons plus loin. Des disques pour enfants L’objet de l’étude est d’abord de brosser un tableau général de la production discographique de chansons destinées aux enfants. Je tenterai de démontrer l’interaction entre le développement de cette production discographique et l’évolution de la place de l’enfant dans notre société. Je vous propose un survol des années 1950 à 2000 en mentionnant la place que prennent progressivement les médias dans la vie quotidienne. Je tenterai de témoigner de l’interférence entre les disques et les lieux privilégiés de l’enfant ( la maison, la crèche, l’école, les ateliers d’animation). Je vous ferai prendre connaissance des chanteurs qui, au cours de ces cinquante ans, ont orienté leur répertoire vers le jeune public. L’histoire La trajectoire historique évoquera de nombreux témoins, autant chanteurs, animateurs musicaux, firmes de disques, associations… qui jalonnent, à un moment, le parcours de la chanson pour enfants. Je ne prétends pas citer tous les partenaires. Les omissions ne sont, certes, pas volontaires et je présente mes excuses à ceux non-cités et qui, peut-être, de longue date, s’expriment dans un secteur de la chanson « jeune public ». Je tenterai de cerner les phases évolutives de la chanson « jeune public » dans les pays francophones européens à savoir la France, la Belgique, la Suisse en prenant en compte les différents acteurs (chanteurs, animateurs, firmes, associations…) . Vu ma position d’analyse, le point de vue de l’étude est observé de la Belgique. Je remercie la Médiathèque de la Communauté française de Belgique qui, par son ouverture sur le monde des médias propose un regard objectif sur la production discographique. Je remercie également les animateurs de Média Animation et en particulier Pierre Chemin pour l’intérêt qu’a l’association à conscientiser un large public aux réalités socioculturelles. L’association a permis à Autre Chose pour Rêver de trouver un partenaire généreux et un appui dynamique. Merci à la secrétaire, Marianne Uylebroeck, pour son écoute ,ses initiatives et le travail continu réalisé avec enthousiasme. Et alors, cette histoire ? Ben, il n’y a plus de place, voyons ! Je commencerai le récit lors de la parution du prochain journal. J’ouvrirai avec l’aventure des années 1950. Jean-Marie Verhelst