« Des financements à comparer au cas par cas »

Transcription

« Des financements à comparer au cas par cas »
Gestion
TPE-PME
Entretien avec Philippe Bellevergue,
expert-comptable et associé au sein du Groupe SFC
« Des financements
à comparer au cas par cas »
Comment arbitrer entre LOA et
LLD ?
Il faut avoir en tête les deux points noirs
de la LLD. En fin de contrat, lorsque les
kilométrages réalisés dépassent le forfait
prévu au départ, le coût peut s’envoler.
Récemment, l’un de mes clients a été
facturé 3,51 euros HT par centaine de
kilomètres supplémentaire. À l’inverse, si
le véhicule parcourt moins de kilomètres
que prévu, l’entreprise aura à acquitter
des loyers plus élevés qu’elle n’aurait dû.
Il faut donc bien évaluer les kilométrages
à parcourir. De ce point de vue, la LLD
est rigide.
Second risque lié à la LLD, les frais de
remise en état facturés en fin de contrat
qui peuvent dépasser les 1 000 euros. Un
gestionnaire à la tête d’une centaine de
véhicules peut négocier avec le loueur.
Avec quelques unités, cela devient plus
difficile. La LLD suppose de bien informer les collaborateurs sur l’entretien et la
préservation de leurs véhicules pour ne
pas voir s’envoler les frais de remise en
état. Avec la LOA, vous gardez le véhicule
sans subir ces frais.
Pour Philippe Bellevergue, les différentes solutions de financement d’une
flotte doivent être étudiées à la loupe.
De fait, les offres varient d’un acteur
à l’autre et d’un moment à l’autre, ce
qui oblige l’entreprise à procéder à
une étude comparative détaillée avant
de choisir son financement. Le tour du
sujet avec les réponses d’un expert.
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Sous l’angle comptable, qu’implique
l’achat de véhicules ?
L’actif sera présent au bilan et mettra
en évidence que l’entreprise dispose de
moyens de transport. Que les véhicules
soient achetés sur la trésorerie ou via un
emprunt à la banque ne change rien à
cette règle comptable. Mais lorsque vous
achetez sur fonds propres un véhicule
d’une valeur de 20 000 euros, l’investissement se fait en une seule fois de manière
brutale et cette option peut s’avérer
dangereuse car elle génère une sortie
immédiate et importante de trésorerie.
Avec un emprunt, les remboursements
s’étalent dans la durée et pèsent moins
sur la trésorerie.
Que conseilleriez-vous à une
entreprise attachée à l’achat ?
De ne pas opter pour l’achat sur fonds
propres qui peut mettre en péril sa trésorerie mais de recourir à l’emprunt.
D’autant qu’en ce moment, les taux de crédit demeurent en dessous des 2 %. Et avec
l’emprunt, dans son bilan, l’entreprise va
pouvoir déduire les intérêts. Il s’agit d’une
légère économie fiscale. Pour les TPE et
les PME, l’impôt sur les sociétés s’élève
souvent à 15 % (pour la part du bénéfice
supérieur à 38 120 euros). Or, calculés sur
les intérêts actuels, ces 15 % pèsent peu.
Et plus on avance dans le temps, plus la
part des intérêts dans les mensualités
s’amenuise. Enfin, que l’achat se fasse
sur fonds propres ou avec un crédit ne
change rien pour la TVA et l’impôt sur
la plus-value.
Quelles différences faites-vous entre
LOA et LLD ?
Dans les deux cas, les loyers passent en
charges dans le compte de résultat et
minorent le bénéfice. L’entreprise réalise
alors une économie fiscale au titre de
l’impôt sur les bénéfices. Sur ce point, il
faut bien étudier les solutions d’achat et
de location. En achat, l’amortissement
et les intérêts doivent être déduits du
bénéfice ; en location, ils sont intégrés au
loyer. Pour comparer, il faut calculer les
montants exacts de chaque ligne et les
mettre en regard.
En location et à véhicule équivalent, les
loyers de la LOA sont plus élevés que
ceux de la LLD car le prix du véhicule
est intégré aux mensualités. Cette charge
plus importante implique une déduction
supérieure sur le bénéfice. En LLD, après
deux à quatre ans, le bailleur récupère le
véhicule et le revend ; seul l’usage, les frais
financiers et la décote seront intégrés au
loyer qui sera donc moins élevé.
Et sous l’angle comptable ?
En LOA, à la fin du contrat, le véhicule apparaîtra dans le bilan comme un
actif, mais sa valeur est calculée à partir
du montant de la dernière mensualité.
Dans ces conditions, la réelle richesse
de cet actif n’apparaît pas sur le bilan.
Autre point, les montants des loyers restant à payer doivent apparaître dans les
annexes* du bilan comptable en tant que
dettes. Depuis cette année, l’entreprise
n’a plus l’obligation de rendre public ses
comptes préalablement déposés au greffe
du tribunal de commerce. Mais lorsqu’elle
communique son bilan à la banque ou à
un établissement de financement pour
emprunter, cette dette apparaît dans les
annexes.
* Les annexes
concernent
les entreprises
qui dépassent
deux des trois
critères suivants : un chiffre
d’affaires supérieur ou égal à
700 000 euros,
un total du
bilan supérieur
ou égal à
350 000 euros et
un effectif supérieur ou égal à
10 personnes.
Que recommandez-vous avant
de choisir un financement ?
De s’interroger sur sa volonté d’être propriétaire ou non du véhicule à un moment
ou à un autre. Si la propriété importe peu,
la LLD et la LOA constituent des solutions
pertinentes. Ensuite, pour arbitrer, il faut
avoir les contrats sous les yeux. Les offres
varient énormément d’un acteur à l’autre.
La situation financière est aussi décisive.
Si la trésorerie est abondante, l’achat
sur fond propre peut s’envisager. Si la
situation est plus délicate, l’entreprise
s’orientera vers le crédit ou la location.
Entre les deux, il faudra comparer les
sorties financières année après année
et choisir la solution la plus économique.
Le véhicule peut aussi être considéré
comme un actif financier pour les modèles
avec une bonne cote sur le marché VO. Un
client en LOA a récemment racheté son
véhicule avant l’échéance du contrat pour
le revendre et a réalisé une plus-value de
9 000 euros. Chaque entreprise met en
place ses modes de gestion et définit ses
priorités en fonction des circonstances.
Propos recueillis par Éric Gibory
Ma i 2015 - F l o t t es A u t o m o bi l es \
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