DetRieR La fermeture de l`école
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DetRieR La fermeture de l`école
DETRIER La fermeture de l’école Détrier est une petite commune de 440 habitants, les Destrolains et Destrolaines, située dans le département de Savoie en région Rhône-Alpes. à 50 km de Grenoble ou de Chambéry. Elle appartient à la communauté de communes de La RochetteVal-Gélon qui compte 14 communes. Les amateurs de batraciens peuvent se rendre sur le territoire de Détrier, au lac St Clair, où se déroule chaque année l'opération « un coup de main aux batraciens » de fin février à fin mars. Cette année, 4 118 amphibiens ont été sauvés et l'opération a reçu le trophée de Savoie dans la catégorie « développement durable/prix Albert Bernard » décerné par le conseil général de Savoie à la communauté de communes de La Rochette Val Gelon qui a été partagé avec la ligue pour la protection des oiseaux, la fédération Rhône-Alpes de protection de la nature et patrimoine sauvage. Cette distance ne pénalise pas les parents qui peuvent l’effectuer facilement. Si la commune nichait au fond de la vallée de la Maurienne, cette exigence n’aurait pas pu s’appliquer. >La mobilisation des parents d’élèves Les parents d’élèves se mobilisent immédiatement et mettent en place des stratégies pour défendre l’école de leurs enfants. >Manifester Ils manifestent devant l’académie et font une pétition qui recueille 400 signatures. >Informer Les médias sont conviés à relayer leur action dont TV8 MontBlanc, le journal de 13h. de France 2 et FR3 Alpes. La problématique La limite des moyens que peut mettre en œuvre une petite commune pour sauver son école. Historique L’école primaire de Détrier était composée d’une classe unique qui accueillait entre 9 et 12 élèves depuis une dizaine d’années. Par ailleurs, autant d’enfants étaient scolarisés hors de la commune pour différentes raisons : - domiciliation de la nourrice, - lieu de travail des parents, - refus d’inscrire les enfants dans une classe unique. Une enseignante assurait la scolarité des enfants de la grande section de maternelle au CM2. En mars 2011, l’inspecteur d’académie, dans le cadre d’une réflexion sur la carte scolaire départementale, pose deux conditions pour que l’école communale reste ouverte au public : - un minimum de 15 élèves, - un maximum de 3 niveaux scolaires. L’école de Détrier ne répond à aucune des deux conditions. Analyse et enjeux >La justification d’un quota minimum d’élèves M. Pache, maire de Détrier, a donc informé l’enseignante et les parents d’élèves du risque de fermeture de la classe unique de l’école et des conditions requises pour la sauver. L’inspecteur d’académie a justifié le quota de 15 élèves, eu égard à la situation géographique de la commune de Détrier qui se trouve à une distance d’1,5 km du chef-lieu de canton, accessible par une route droite. >Création d’une classe de maternelle L’école de Détrier n’a pas de classe de maternelle. La grande section de maternelle est intégrée au premier cycle primaire. Les parents proposent de ramener les enfants scolarisés à l’école maternelle du chef lieu de canton, la commune de La Rochette, à Détrier. Pour réaliser ce projet, ils sollicitent le conseil municipal pour créer la maternelle et financer le salaire d’une enseignante. Le conseil municipal accepte de financer le projet à hauteur de 30 000 € par an. Ce point acquis, les parents d’élèves présentent une nouvelle demande au conseil municipal : le financement d’une cantine. Pour que le prix d’un repas à la cantine soit attractif pour les parents, il ne doit pas dépasser 6 €. Pour 5 élèves en maternelle, le prix du repas et de la surveillance s’élève à 15 €/enfant et à 9 €/enfant par repas pour 10 enfants. Les parents demandent à la commune de financer la différence entre le prix réel du repas et le prix attractif. Le conseil municipal commence alors à reculer en posant une condition de nombre minimum d’enfants inscrits en maternelle et sans se prononcer sur la cantine. Puis devant l’insistance des parents dont les exigences augmentent sans cesse, il refuse de financer la cantine. >Rappel à la réalité En juin, la commune de Détrier envoie à l’académie une liste de 15 inscriptions d’élèves pour la rentrée de septembre 2011. Cependant, ce nombre est fictif, car il n’y avait, en réalité que 12 inscriptions. L’inspecteur d’académie a, de son côté, bloqué le poste d’enseignant à l’école de Détrier, sous réserve de le pérenniser en septembre après comptage des élèves présents le jour de la rentrée, qu’il effectuerait personnellement. Petites et Moyennes Communes - n° 14- 2012 21 temoignage LE CONSTAT temoignage La fermeture de l’école LE RESULTAT Dès lors, la motivation des parents retombe comme un soufflet et ils s’inquiètent des conséquences de cet acte de bravoure. Sachant qu’à moins d’un miracle, 15 enfants ne seraient pas présents le jour de la rentrée, la classe unique de l’école serait automatiquement fermée par l’académie et les 12 enfants réellement inscrits ne pourraient pas effectuer leur rentrée scolaire. Ils décident donc d’inscrire leur(s) enfant(s) dans les écoles des communes voisines. Le 15 juillet, la commune enregistre zéro inscription dans son école ! >Fin de la classe Le jour de la rentrée, à 8h30, n’ étaient présents dans la cour de l’école que trois personnes : l’enseignante, l’inspecteur d’académie et M. Pache. La classe a donc été officiellement fermée à 8h55. Tous les enfants de Détrier sont scolarisés dans les communes voisines. Coût et financement La fermeture de l’école de Détrier représente un coût pour la commune. Comme le souligne M.Pache, la scolarisation des petits destrolains et destrolaines hors de la commune coûte plus cher que le fonctionnement de l’école. La commune de La Rochette a donc envoyé une convention à la commune de Détrier pour financer l’augmentation à la place des parents. Avant même que le conseil municipal se soit prononcé sur le sujet, les parents sont venus réclamer auprès du maire le financement de cette augmentation par la commune de Détrier. Une solution de financement, avec l’aide du conseil général sera mise en place. Enfin, comme le rappelle M.Pache, la commune n’a pas fermé l’école et celle-ci peut être réouverte à tout moment. En effet, l’académie décide de la mise en place ou de la suppression de poste des enseignants, mais pas de l’ouverture ou de la fermeture d’une école. >Mise aux normes d’accessibilité de la mairie Comme le dit M. Pache, « A toute chose malheur est bon ». En effet, la mairie est installée au 1er étage d’un bâtiment et de ce fait est inaccessible aux personnes handicapées. Elle va être transférer dans l’école après la réalisation des travaux prévus en 2013 et permettra ainsi aux personnes accompagnées de très jeunes enfants en poussette, ainsi qu’aux personnes handicapées ou à mobilité réduite, de se rendre facilement dans les bureaux de la mairie. Enfants en maternelle 1 100 € / enfant en × 15 320 € / enfant Enfants e r i a = 16 500 € × 10 prim = 3 200 € < A cela, il faut ajouter que la classe unique de l’école qui a été fermée en 2011 avait été rénovée en 2005 et la commune continue à payer l’emprunt qui avait été souscrit pour financer les travaux. Montant de l’emprunt Remboursement annuel 13 184 € < 150 000 € >Vente du matériel scolaire En 2012, la SIVU de 5 communes a créé une classe supplémentaire, ce qui a permis à la commune de Détrier de vendre tout le mobilier de la classe pour la somme de 1 700 €. Le résultat Aucune famille n’a été pénalisée par la fermeture de la classe. Elles se sont toutes très bien adaptées à cette nouvelle situation bien qu’il n’existe pas de service de ramassage scolaire puisque la commune support est à moins de trois km de Détrier. L’école de La Rochette qui accueille certains enfants de Détrier a augmenté le prix du repas de la cantine et de la garderie de 50 %, soit de 5,20 € à 10 €. 22 2012 - n° 14 - Petites et Moyennes Communes La commune de Détrier, de par sa localisation géographique entre deux grandes villes est devenue au fil des années une cité dortoir pour 50 % de sa population. De jeunes familles sont venues s’y installer sans pour autant participer à la vie de la commune. Détrier comptait suffisamment d’enfants pour conserver son école et même la développer. Mais, les choix des parents pour des raisons purement pratiques ou plus idéologiques de scolariser leurs enfants hors de la commune, avant même que la classe ne soit fermée, a fini par vider l’école. Bien que M.Pache n’ait jamais délivré de dérogation pour permettre à une famille de scolariser son enfant hors de la commune, cela n’a pas empêché les écoles du canton de scolariser des enfants de Détrier. Leur objectif est également de maintenir ou d’augmenter leurs effectifs afin de ne pas connaître le sort de la classe unique de Détrier.