La Renaissance carolingienne

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La Renaissance carolingienne
Université Paris 1 Panthéon-­‐Sorbonne Jean-­‐Philippe Genet, Le Moyen Âge n’existe pas ! La Renaissance carolingienne La Renaissance carolingienne, il faut bien nous contenter de parler de Moyen Âge pour la partie occidentale de l'Europe, celle qui est la plus occidentale des trois civilisations qui sont les héritières du monde romain. Byzance est réduite à la portion congrue à partir de 1214 et puis en 1453 de toute façon, Constantinople est prise par les Ottomans et Byzance disparaît. En revanche, l'Islam c'est l'inverse puisque l'Islam connaît une extraordinaire dilatation depuis l'Afrique noire jusqu'à l'Indonésie et évidemment sa périodisation est tout à fait différente. Donc la Renaissance carolingienne. Le Moyen âge commence-­‐t-­‐il avec cette Renaissance carolingienne? Renaissance, oui, c'est une rénovation de l'Empire romain qui est fondée sur une alliance entre les Pépinides, la famille austrasienne que l'on connaît bien comme, par exemple, avec Pépin le Bref et puis la papauté romaine. La papauté romaine est, en effet, prise entre Byzance où il y a à ce moment là une hérésie très violente, l'hérésie iconoclaste. Il n'y a pas que dans l'Islam que l'on a des problèmes avec la représentation du sacré et du divin. Cela affecte aussi le christianisme et donc les empereurs byzantins ont banni les images et sont donc brouillés avec le pape. Et les papes sont par ailleurs l'objet d'attaques venues d'un royaume barbare qui est le royaume lombard. Ils vont donc se rabattre sur l'alliance de ces fameux Pépinides. Pépin le Bref, qui est simplement l'héritier du maire du palais, qui n'est pas le roi des Francs, le roi est en effet un mérovingien, va devenir roi des Francs grâce au pape en 750. Le Mérovingien est simplement enfermé et on ne parle plus de lui. Et puis, Pépin est couronné par le pape en 754. Quant à son fils Charlemagne, il conquiert le royaume Lombard en 774 et il est couronné empereur par le pape le 25 décembre 800. Un couronnement impérial qui ne s'est d'ailleurs pas fait selon ses goûts puisque c'est le pape qui a pris l'initiative de le couronner sans attendre que des acclamations populaires viennent lui donner une légitimité indépendante de celle que lui conférait le couronnement par le pape. Les empereurs carolingiens se voient, en tout cas, comme les héritiers des empereurs romains et se font représenter comme tels. On le voit ici avec Lothaire, empereur de 840 à 855, ou encore avec Charles le Chauve, empereur de 875 à 877. On a donc bien un État carolingien, un État qui a son centre qui ne peut être une ville, il n'y en a plus en Occident pratiquement, mais qui est le palais d'Aix-­‐la-­‐Chapelle qui est le centre nerveux de cet empire, un palais dont subsistent aujourd'hui encore des éléments de la chapelle qui se trouvent intégrés à ce qui est aujourd'hui la cathédrale d'Aix-­‐la-­‐Chapelle. Mais de ce palais, partent effectivement les ordres du souverain, qui tente de gouverner par l'écrit son vaste empire qui est gouverné localement par des comtes assistés par les évêques. L'empereur envoie ce que l'on appelle des "missi dominici". Les envoyés du seigneur, le plus souvent un comte et un évêque font des tournées dans l'empire et amènent avec eux des capitulaires, des documents qui sont ainsi appelés parce qu'ils sont divisés en chapitres, qui sont des documents écrits dans lesquels se trouve le programme de gouvernement de l'empire. Ici par exemple l'Adminitio generalis, un capitulaire de 789, qui est un véritable programme éducatif car Charlemagne avait effectivement bien pensé que s'il voulait gouverner par l'écrit, il lui fallait former des élites non seulement religieuses mais aussi laïques capables de parler et d'écrire le latin. Mais le vrai problème de l'empire, c'était de pouvoir entretenir son armée. Car l'empire carolingien est un empire de conquête : conquête de la Bavière, de la Saxe, du royaume lombard, du khanat avar, un très vaste empire qui est construit en quelques MOOC : Découper le temps : les périodes de l’histoire Plateforme France Université Numérique – Session mai-­‐juin 2015 Document mis à disposition selon les termes de la licence Creative Commons BY-­‐NC-­‐ND soumise au droit français Page 1 sur 2 Université Paris 1 Panthéon-­‐Sorbonne années et qui permet d'ailleurs d'entretenir cette armée puisqu'on distribue les terres de conquête à ces cavaliers lourds qui font la force de l'empire. Vous les voyez ici sur cette enluminure du psautier de Saint-­‐Gall, avec des cavaliers qui ont des étriers qui leurs permettent de maîtriser de grandes montures qui peuvent supporter le poids et du cavalier et de son armure, en général une cuirasse de cuir très épaisse sur laquelle on a attaché des plaques de métal. Pour entretenir cette armée, il faut néanmoins structurer de façon solide ces élites militaires et là, le problème est complexe. Pour cela, on utilise essentiellement des terres que l'on va distribuer à ces guerriers pour leur permettre d'entretenir leur armement, leur monture et de disposer du temps nécessaire pour s'entraîner et pour participer aux expéditions. Donc on leur distribue des terres sous forme de bénéfices, qui sont des terres, au départ, qui ne sont pas héréditaires, qui sont liées aux services rendus et qui sont d'abord des terres prises à l'Église puis ensuite des terres prises à l'occasion des conquêtes. On renforce cet attachement par un serment qui est prêté aux souverains carolingiens, à partir essentiellement des années 790 et puis on va aussi renforcer cela par ce que l'on appelle la vassalité, avec une recommandation qui lie entre eux le vassal et puis celui qui est son seigneur. Et à la tête de cette pyramide, se trouve évidemment le souverain carolingien. Mais cet État va s'effondrer car il ne va pas pouvoir résister à la division de l'empire, qui amène une concurrence entre les différents royaumes. Précisons bien les choses, l'empire lui-­‐même n'est pas partagé. Il n'y a qu'un empereur, on ne peut pas le partager. Mais, par contre, les royaumes qui composent son territoire, eux peuvent être partagés entre les différents héritiers du souverain comme un bien privé, finalement. Ceci entraîne une concurrence extrêmement violente entre les descendants des empereurs carolingiens : des guerres incessantes à l'occasion desquelles ils distribuent des quantités de terre. Charles le Chauve a ainsi distribué 4 fois plus de bénéfices pour la Gaule que n'en a fait Charlemagne pendant tout son règne et évidemment, ces terres s'épuisent. Si bien que les Carolingiens vont finir par disparaître assez rapidement : dès 887 en Italie, dès 919 en Germanie et puis en 987 en Francie. Reste donc en fin de compte, le seul ciment dans cette société qui est la recommandation qui unit deux hommes, d'autant plus importante que les bénéfices qui à l'origine n'étaient pas héréditaires, deviennent progressivement à partir du capitulaire de Quierzy en 877, de plus en plus souvent héréditaires et ceci à tous les niveaux de la hiérarchie vassalique. Bientôt, c'est ce lien d'homme à homme qui est la seule structure politique de cette Europe latine. 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