ABUS DE BIENS, DE CONFIANCE, DE MAJORITE, DE MINORITE

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ABUS DE BIENS, DE CONFIANCE, DE MAJORITE, DE MINORITE
Les notes d’information juridiques
ABUS DE BIENS, DE CONFIANCE, DE MAJORITE, DE
MINORITE ET MOYENS D'ACTION DES ASSOCIES
10.08.16
L’associé en tant que possesseur de parts sociales a des droits dans cette société :
•droit de participer aux assemblées
•droit de vote
•droit à des informations
•droit de sanctionner la gestion de la société
Ce dernier droit permet à un associé face à des dirigeants ou à d’autres associés abusant
de leur position au sein de la société d’engager des actions en justice en vue de la protection
de son patrimoine et de celui de la société.
Ces moyens d’action sont prévus pour les uns par le Code de Commerce et pour les autres
par le Code Pénal et le Code Civil.
Certaines de ces actions sont également ouvertes à d’autres personnes (les dirigeants ou
le commissaire aux comptes par exemple).
I. DEMANDE DE NOMINATION D’UN ADMINISTRATEUR PROVISOIRE
II. DEMANDE D’UNE EXPERTISE DE GESTION
III. MISE EN JEU DE LA RESPONSABILITE PENALE DES DIRIGEANTS
IV. ACTIONS EN CAS D’ABUS DE MAJORITE OU DE MINORITE
V. DEMANDE DE DISSOLUTION DE LA SOCIETE
Avertissement : cette note a pour but de donner une information générale
et ne peut remplacer une étude juridique personnalisée.
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Les notes d’information des CCI d’Alsace sont régulièrement mises à jour.
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Les notes d’information juridiques
I. DEMANDE DE NOMINATION D’UN ADMINISTRATEUR PROVISOIRE
Toute personne intéressée, notamment un associé quel que soit le pourcentage de parts
détenues par lui mais également les dirigeants, commissaires aux comptes et créanciers,
dans certains cas peut demander la nomination d’un administrateur provisoire. Pour cela, il
lui faudra s’adresser au Tribunal de Commerce (Chambre Commerciale du Tribunal de
Grande Instance en Alsace-Moselle) par voie de référé ou de requête.
Selon l’article L811-1 du Code de Commerce, « les administrateurs judiciaires sont les
mandataires chargés par décision de justice d’administrer les biens d’autrui ou d’exercer
des fonctions d’assistance ou de surveillance dans la gestion de ces biens ». Le tribunal
nommera en principe un administrateur inscrit sur une liste professionnelle nationale ou
exceptionnellement une personne physique ayant une expérience ou une qualification
particulière. La décision sera notifiée à l’administrateur. Dans certains cas, la décision de
justice peut autoriser l’administrateur à se faire assister par toute personne compétente de
son choix.
C'est le juge qui fixe les pouvoirs de l'administrateur en fonction de la nature et de l'étendue
de la mission de l'administrateur.
La nomination d’un administrateur provisoire peut entraîner corrélativement le
dessaisissement des organes sociaux, l’administrateur recueillant les pouvoirs légaux. Une
fois sa mission terminée, il cessera d’être le représentant légal de la société ; il ne pourra
donc plus engager la personne morale par ses actions.
Quelles sont les circonstances justifiant la nomination d’un administrateur provisoire ?
Selon la jurisprudence, seules des circonstances exceptionnelles entraînant la paralysie du
fonctionnement de la société ou mettant gravement en péril les intérêts de la société
justifient la nomination d’un administrateur provisoire.
La désignation d’un administrateur a été admise en cas d’inexistence ou de démission du
gérant, de dissentiment entre dirigeants, d’opposition entre deux blocs égaux d’associés
empêchant toute prise de décision ou toute nomination de dirigeant, d’hostilité entre
associés lors d’une assemblée, de détournements imputés au gérant, de perte de confiance
de l’associé possédant 50 % des parts…
La mission de l’administrateur est en principe définie dans l’ordonnance de nomination. Il
peut être chargé de gérer provisoirement la société ou d’effectuer un simple contrôle sur la
gestion. Il peut également être chargé de convoquer une assemblée générale des associés
et de veiller à la régularité de sa tenue. Il est tenu d’une obligation de discrétion.
L’administrateur pourra selon le cas accomplir des actes d’administration courante et des
actes conservatoires pour préserver le patrimoine social, résilier un contrat défavorable
pour la société, conclure un contrat de prêt pour achever des travaux en cours. Mais les
actes de disposition particulièrement graves ne relèvent pas de sa mission. Celle-ci peut
également être limitée à la conduite du procès dont la société fait l’objet en cas de
désaccord entre dirigeant et associés.
L’excès de pouvoir par l’administrateur est sanctionné par la nullité de l’acte. Il est
civilement responsable de ses fautes envers la société, les associés ou les tiers auxquels il
a causé un préjudice. A la fin de sa mission, l’administrateur provisoire fait approuver les
comptes de sa gestion et demande le quitus.
Avertissement : cette note a pour but de donner une information générale
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II. DEMANDE D’UNE EXPERTISE DE GESTION
Un ou plusieurs associés de SARL représentant au moins un dixième du capital, soit
individuellement, soit en se groupant, le ministère public agissant sur requête ou le comité
d’entreprise d’une société peuvent demander la nomination en justice d’un ou de plusieurs
experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion. Pour
cela il leur faudra s’adresser au président du Tribunal de Commerce (président de la
Chambre Commerciale du Tribunal de Grande Instance en Alsace-Moselle) par voie de
référé.
Dans les sociétés par actions, les actionnaires représentant au moins 5% du capital ou
association d’actionnaires doivent, dans un premier temps, interroger par écrit le président
du conseil d’administration ou le directoire sur la ou les opérations de gestions pour
lesquelles ils souhaitent des éclaircissements. Ce n'est qu'à défaut de réponse dans un délai
d’un mois ou si la réponse n’est pas jugée satisfaisante que les actionnaires ou l’association
peuvent recourir à la justice pour demander la désignation d'un expert..
L’expertise a principalement pour but de prévenir ou de mettre fin à des abus de pouvoir
de la part d’un groupe majoritaire et de nature à compromettre gravement l’intérêt social.
Le juge devra apprécier le bien-fondé de la demande ; il n’acceptera de nommer un expert
de gestion que s’il relève « des présomptions d’irrégularités affectant une ou plusieurs
opérations de gestion déterminées ». Une opération de gestion est une décision prise par
l’organe de direction de la société et non par l’assemblée générale. Selon la jurisprudence,
une expertise de gestion ne sera ordonnée que si le demandeur établit de sérieux doutes
sur la régularité d’une opération sociétaire et parvient à la rendre suspecte aux yeux du
tribunal. Le fait que le caractère d’urgence de la demande ne soit pas établi, que les autres
moyens légaux ou statutaires d’obtenir des informations n’aient pas été épuisés importe
peu. La demande d’un ou de plusieurs associés minoritaires n’est pas subordonnée à
l’établissement d’un abus de majorité.
La désignation de l’expert est limitée à une ou plusieurs opérations de gestion. Elle a ainsi
été admise pour établir les relations entre deux sociétés pendant plusieurs années, pour
établir les conventions passées entre la société et l’un de ses associés, pour rechercher si
des frais professionnels exposés par les dirigeants sont conformes à l’intérêt de la société…
La demande doit préciser l’étendue de la mission et les pouvoirs de l’expert. L’expertise ne
saurait avoir pour objet de remettre en cause la régularité et la sincérité des comptes
sociaux par exemple.
Les pouvoirs de l’expert sont précisés dans l’ordonnance de nomination. Il dispose d’un
pouvoir d’enquête qu’il exerce en principe en présence des parties. Il peut demander la
remise des livres, de la correspondance, des factures, des registres de procès-verbaux et
de tout autre document relatif à la marche de la société. Il peut procéder à l’audition de
toute personne. Toute entrave à la mission de l’expert par les dirigeants sociaux ou toute
autre personne est passible d’un emprisonnement pouvant atteindre 5 ans et d’une amende
de 75 000 euros au maximum.
A la fin de sa mission, l’expert établit un rapport déposé au greffe du tribunal. Ce rapport
est ensuite adressé au ministère public, au comité d’entreprise, au commissaire aux
comptes et aux dirigeants sociaux par le tribunal.
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III. MISE EN JEU DE LA RESPONSABILITE PENALE DES DIRIGEANTS
Divers agissements des dirigeants de droit ou de fait contraires à l’intérêt de la société sont
pénalement sanctionnés :
• délit d’escroquerie (article 313-1 du Code Pénal) : sont visées la présentation de bilans
falsifiés, la publicité mensongère lors de l’émission d’actions… Sanctions : jusqu’à cinq ans
d’emprisonnement et une amende de 375 000 euros au maximum,
• abus de confiance (article 314-1 du Code Pénal) : il s’agit notamment de détournements
de fonds et d’autres biens sociaux… Sanctions : jusqu’à trois ans d’emprisonnement et une
amende de 375 000 euros au maximum,
• abus de biens sociaux (articles L.241-3 et L.242-6 du Code de Commerce) :
-
ont été ainsi sanctionnées des émissions de traites de complaisance pour aider une
société dirigée par un ami,
l’appropriation personnelle par un dirigeant de sommes dues à la société,
la vente de marchandises non inscrites en comptabilité,
l’utilisation par un dirigeant d’un prêt consenti à une SARL par une autre société dont
il est le gérant,
la prise en charge par une société de dettes personnelles du dirigeant,
l’existence d’un compte courant d’associé au nom du dirigeant constamment
débiteur,
des rémunérations abusives…
Sanctions : jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende au maximum,
•abus de pouvoir et de voix (articles L.241-3, 5° et L.242-6, 4° du Code de Commerce) :
-
est considéré comme un abus de pouvoir par exemple le fait pour un gérant de ne
pas réclamer des sommes à une autre société dans laquelle il a des intérêts.
Est un abus de voix le fait pour un dirigeant d’utiliser dans son intérêt personnel les
voix dont il dispose lors d’une assemblée générale en vertu de procurations ou de
pouvoirs en blanc.
Sanctions : jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et une amende de 375 000 € au maximum.
Remarque : toute personne ayant subi un préjudice personnel suite à un tel délit peut
demander des dommages-intérêts. Il peut s’agir de la société, d’un ou de plusieurs associés,
de tiers… selon le cas.
IV. ACTIONS EN CAS D’ABUS DE MAJORITE OU DE MINORITE
A. L’associé majoritaire ou le bloc majoritaire abuse de sa position dans la société si
une décision est prise contre l’intérêt social, dans le but de favoriser les membres de la
majorité au détriment de ceux de la minorité. En effet, le pouvoir de décision appartenant
à la majorité lui est conféré afin de réaliser l’objet social et non dans son intérêt personnel.
L’abus de majorité sera établi par exemple en cas de rémunérations exagérées accordées
aux dirigeants par rapport au chiffre d’affaires empêchant toute réalisation de bénéfices, en
cas de décision de prise en charge du passif d’une filiale pour éviter au gérant majoritaire
d’être condamné au comblement du passif…
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Le ou les associés minoritaires rapportant la preuve de l’abus de majorité et ayant de ce fait
subi un préjudice, pourront demander en justice l’annulation de l’acte incriminé et des
dommages-intérêts contre le ou les associés majoritaires.
B. L’associé minoritaire, le bloc minoritaire ou l’associé égalitaire peut bloquer
l’adoption d’une décision qui serait conforme à l’intérêt social mais contraire à leur intérêt
propre et abuser ainsi de leur droit de vote.
Le fait pour les minoritaires de s’opposer à une augmentation de capital « qui était
légalement requise et nécessaire à la survie de la société » constitue un abus de minorité.
De même un associé égalitaire qui sans aucun motif raisonnable s’oppose
systématiquement aux résolutions proposées par son coassocié gérant abuse de sa position.
Le ou les associés victimes de tels abus peuvent en prouvant que l’opération en question
est indispensable à la bonne marche de la société demander en justice des dommagesintérêts contre l’associé minoritaire ou égalitaire. Les juges ont parfois nommé un
mandataire ad hoc ayant pour mission de représenter les minoritaires défaillants lors d’une
nouvelle assemblée générale et de voter en leur nom dans le sens des décisions conformes
à l’intérêt social mais ne portant pas atteinte à l’intérêt légitime des minoritaires.
V. DEMANDE DE DISSOLUTION DE LA SOCIETE
L’article 1844-7, 5° du Code Civil prévoit « la dissolution anticipée prononcée par le tribunal
à la demande d’un associé pour justes motifs, notamment en cas d’inexécution de ses
obligations par un associé ou de mésentente entre associés paralysant le fonctionnement
de la société ».
La demande devra être présentée au Tribunal de Commerce (Chambre commerciale du
Tribunal de Grande Instance en Alsace-Moselle) par un associé. Mais la jurisprudence refuse
le droit d’agir à l’associé qui est à l’origine de la mésentente ou qui cherche uniquement par
cette demande à faire pression sur ses coassociés.
Ont été considérés comme des justes motifs de dissolution le fait pour un associé majoritaire
de réduire l’activité sociale à des relations commerciales avec deux autres sociétés dans
son intérêt personnel, le fait pour un associé de violer ses engagements en s’appropriant
différentes sommes ou en travaillant pour un concurrent, le fait qu’une grave mésentente
entre associés paralyse le fonctionnement de la société et empêche une décision
d’augmentation de capital à hauteur du minimum légal…
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