recours en annulation - Emmanuel Jacques USA
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recours en annulation - Emmanuel Jacques USA
A Madame le Président et Messieurs les Conseillers composant le Tribunal Administratif de Saint Barthélemy RECOURS EN ANNULATION A la requête de : Monsieur Emmanuel JACQUES, Né le 10 janvier 1968 à Neuilly sur Seine, avocat, Demeurant sis à Saint Barthélemy 97133, Lurin Tel : 05 90 29 71 10 Fax : 05 90 29 31 81 Adresse postale : BP 656 Gustavia, 97099 Saint Barthélemy Contre : La délibération du Conseil Territorial de Saint Barthélemy n°2009018, en date du 27 février 2009 et transmise au Représentant de l’Etat le 11 mars 2009, par laquelle la Collectivité Territoriale de Saint Barthélemy a décidé d’acquérir à l’amiable et à titre onéreux des propriétés cadastrées AK 513,514 et 557 sises à Public – Saint Barthélemy d’une superficie de 3 023 m2 moyennant un prix de 5,5 millions d’euros. 1 PLAISE AU TRIBUNAL ADMINISTRATIF Par délibération n°2009‐018 en date du 27 février 2009, le Conseil Territorial de Saint Barthélemy a décidé de l’acquisition à l’amiable et à titre onéreux, de différentes parcelles qui forment une propriété appartenant à la SCI GAILLAC demeurant à Saint Barthélemy. Cette délibération sera annulée car elle est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation. LES FAITS La Société civile immobilière GAILLAC, immatriculée le 23 mai 2003, est devenue propriétaire, en décembre 2003, de trois parcelles cadastrées AK 513, AK 514 et AK 597, sises à Public ‐ 97133 SAINT BARTHELEMY. Ces terrains, qui constituent un ensemble de 3 023 m2, ont été acquis ensemble pour la somme de 915 000 €. Pièce n° 1 : Extrait Kbis de SCI GAILLAC Pièce n° 2 : Relevé de propriété et extrait de plan cadastral informatisé Par délibération du 30 septembre 2008, le Conseil territorial de la Collectivité d’Outre‐mer de Saint Barthélemy a projeté de faire l’acquisition amiable à titre onéreux desdites parcelles pour la somme de 5 500 000 €. Il a donc sollicité, en application des articles L. 1311‐9 à 1311‐12, « l’avis de l’autorité compétente de l’Etat », à savoir celui de France Domaine, pour estimer la valeur du bien. Pièce n° 3 : Délibération du Conseil territorial de la collectivité de Saint Barthélemy, n°2008‐047CT, du 30 septembre 2008 et affichée le 10 octobre 2008. Ce projet d’acquisition au prix de 5 500 000 € a suscité un vif émoi au sein de la population de Saint Barthélemy, dont le journal local s’est fait l’écho dans ses éditions des 8 et 22 octobre 2008. Pièce n°4 : « La note est salée selon Benoît Chauvin », in Journal de Saint Barthélemy, édition du 8 octobre 2008. Pièce n°5 : « Un prix spécial pour la Collectivité », in Journal de Saint Barthélemy, édition du 22 octobre 2008. Le Service France Domaine (Direction générale des Finances publiques ‐ Trésorerie Générale de Guadeloupe) a par un courrier du 30 janvier 2009, évalué ledit bien à un prix moyen de 2 570 500 € soit près de trois millions d’euros de moins: 2 « Ce terrain supporte actuellement une centrale à béton, un bâtiment en R+1 à usage de dépôt et de bureaux, une construction « ouverte » à usage de dépôt et enfin une aire de stockage de granulats et de sable. Il est constructible et situé au cœur de l’unique zone d’activités artisanales et industrielles de l’île comme la centrale EDF, des dépôts de carburants et le centre d’élimination des déchets de la Collectivité. Son usage est donc réservé à une activité exclusivement industrielle. L’étude des bilans des trois dernières années de la société « les bétons contrôlés » fait apparaître une baisse sensible de la rentabilité, puisqu’au 31 décembre 2007, le résultat est une perte de 47 970 €, les Fonds Propres sont négatifs, ce qui nécessite une recapitalisation, de plus les immobilisations corporelles (terrain, construction et installations techniques) figurent au bilan pour 432 571 € dont 300 000 € de terrain, ce qui valorise les constructions et installations techniques à 133 000 €. Le poste « locations immobilières » s’élève lui à 180 000 € par an. Ces éléments ne sont donnés que pour permettre une appréciation plus exacte de la valeur du bien. Si la Collectivité se porte acquéreur, il faudra également tenir compte du démantèlement et de la dépollution du site (aucun devis de ce type n’accompagne le dossier). Ce terrain a été vendu en décembre 2003 pour 915 000 € (centrale à béton déjà installée). Compte tenu des caractéristiques du terrain et des termes de comparaison, la valeur du mètre carré peut être évalué entre 800 € et 900 € le m2, soit : ‐ 3023 m2 x 800 € = 2 418 400 € arrondis à 2 420 000 € ‐ 3023 m2 x 900 € = 2 720 700 € arrondis à 2 721 000 € Cette évaluation correspond à la valeur actuelle à la date de l’avis. Dans le cas où la cession ne serait pas réalisée dans un délai de deux ans, une nouvelle estimation serait nécessaire. » Pièce n° 6 : Avis de France Domaine (Direction générale des Finances publiques ‐ Trésorerie générale de Guadeloupe) du 30 janvier 2009 pour évaluation des terrains cadastrés section AK n°513, 514 et 597, sis à public – Saint Barthélemy. Le prix moyen proposé par France Domaine de 2 570 500 €, équivaut à 850 € le m2. Par délibération du 27 février 2009, le Conseil territorial a passé outre l’avis donné par France Domaine. Il a décidé de procéder à l’acquisition du bien pour un montant 5 500 000 €, soit 1 820 € le m2 (1819, 38 €). 3 Pièce n° 7 : Délibération du Conseil territorial de la collectivité de Saint Barthélemy, n°2009‐018, du 27 février 2009, et sans date d’affichage. Le prix offert par la Collectivité de Saint Barthélemy est supérieur au double de la valorisation effectuée par France Domaine. La Collectivité l’explique seulement en indiquant : ‐ « que l’avis émis par le Service France Domaine est en inadéquation avec le marché immobilier particulier de Saint Barthélemy », ‐ « qu’il est de l’intérêt de la Collectivité de Saint Barthélemy d’acquérir cette propriété en raison notamment de sa topographie totalement plane garantissant une utilisation optimale, de sa situation extrêmement privilégiée au sein de l’unique zone d’activités artisanales et industrielles de Saint Barthélemy, de l’extrême rareté dans ladite zone de propriété de ce type, de sa contiguïté avec la propriété appartenant à EDF avec laquelle une convention de mise à disposition au moins partielle sera conclue afin d’atteindre les objectifs fixés dans la délibération n°2008047 du Conseil Territorial en date du 30 septembre 2008 relatifs à l’autonomie énergique (sic) de Saint Barthélemy et en vue de l’installation prochaine des usines de production électrique. » DISCUSSION I – Sur la recevabilité du recours tenant au requérant Monsieur Emmanuel JACQUES est résident fiscal de la Collectivité de Saint Barthélemy où il exerce le métier d’avocat et où il réside avec sa famille. Il contribue donc aux impôts et taxes locales : au titre de la contribution forfaitaire annuelle des entreprises (articles 7 à 12 du Code des contributions de la Collectivité de Saint Barthélemy), des droits et taxes sur les véhicules terrestre à moteur (art. 110 à 112 dudit code), de la taxe sur le carburant (art. 120), sur l’électricité (art. 121 et 122), les droits de quai, la taxe d’élimination des déchets (art. 139 à 142), les droits d’enregistrement les les plus‐values soit de la totalité des contributions territoriales existantes, eu égard à son état. Pièce n° 8 : Carte d’électeur et passeport de Monsieur Emmanuel JACQUES La délibération attaquée est génératrice d’une dépense extraordinaire pour la collectivité de Saint Barthélemy dont Monsieur Emmanuel JACQUES est contribuable. 4 En effet la somme de 5,5 millions d’euros représente pour la Collectivité Territoriale de Saint Barthélemy qui ne comprend que 8600 âmes environ, une somme de 640 euros par personne soit près de 2.000 € par foyer ! Cela correspond aussi, selon Monsieur Maxime Dessouches, membre du Conseil Territorial, à « une somme équivalente à la perception de la vignette et de la contribution forfaitaire des entreprises » pour une année. Pièce n° 9 : « Conseil territorial : les autres délibérations (acquisition) », in Journal de Saint Barthélemy, édition du 4 mars 2009, p. 4. Les fonds publics d’une collectivité territoriale sont le bien commun des citoyens qui la composent. Le Conseil d’Etat a ainsi jugé (CE 29 mars 1901, Casanova : Lebon 333 ; DP 1902.3.33 ; S. 1901.3.73 note Hauriou) que : « Considérant que la délibération attaquée a pour objet l'inscription d'une dépense au budget de la commune d'Olmeto ; que les requérants contribuables dans cette commune, ont intérêt en cette qualité, à faire déclarer cette délibération nulle de droit et qu'ils sont ainsi parties intéressées. » Aussi Monsieur Emmanuel JACQUES dispose d’un intérêt à agir pour déférer devant la juridiction administrative la décision d’acquisition à titre onéreux d’un bien, faite par la collectivité dont il est contribuable. II – Sur les moyens : l’erreur manifeste d’appréciation La Collectivité de Saint Barthélemy a décidé de faire l’acquisition d’un bien à un prix démesurément élevé eu égard à l’évaluation donnée par France Domaine (A). La décision de passer outre l’avis de France Domaine est insuffisamment motivée pour justifier une acquisition dans de telles conditions (B). Elle est viciée par un bilan négatif (C). A) De la surévaluation du prix du bien à acquérir La collectivité a accepté le prix fixé par la venderesse soit : 5,5 millions d’euros, (1820 € le m2), largement au‐dessus de celui de France Domaine. En effet, les services du domaines ont évalué ledit terrain au prix moyen de 2 570 500 €, soit environ 850 € le m2. Le prix négocié de gré à gré correspond à plus du double (214%) de l’estimation fournie par France Domaine. 5 Un tel écart ne peut que surprendre. En effet, comme le rappelle France Domaine dans son avis, le bien avait été vendu en décembre 2003 pour 915 000 € à son actuel propriétaire. Or entre décembre 2003 et le 27 février 2009, les parcelles dont s’agit n’ont pas été valorisées par quelques aménagements. Au contraire il semble qu’elles aient été dépréciées par l’existence d’activités polluant davantage le site qui rendent sa décontamination très onéreuse. Ainsi selon le Conseil Territorial, il serait légitime d’estimer que le marché immobilier artisanal et industriel soit dans les zones les moins privilégiées de l’île aurait augmenté de plus de 501,09% en 4 ans et 9 mois ! Et d’utiliser ainsi les fonds publics. France Domaine note par ailleurs que la location annuelle du terrain rapporte 180 000 € par an. Or en ce qui concerne l’immobilier d’entreprise, les biens sont évalués dans les usages à 10 fois leur rendement annuel. En l’espèce le bien est donc estimable à 1 800 000€. Au contraire de ce qu’affirme la Collectivité, l’estimation de France Domaine est donc très indulgente : elle ne tient pas compte de la valeur de rendement du bien, du coût des travaux de destruction des bâtiments existants et du coût de la dépollution du site. Ces coûts viendraient en déduction de l’estimation proposée. L’avis a été rendu alors que la Collectivité n’a pas renseigné France Domaine à ce sujet. Le prix de 5,5 millions est donc exorbitant de manière incontestable. B) De l’insuffisance des motifs Les articles L 1311‐9 à L 1311‐10 du Code général des Collectivités territoriales, visés par la délibération de la Collectivité de Saint Barthélemy et l’article 11 du décret n°2006‐1792 du 23 décembre 2006 relatif au transfert des compétences de la direction générale des impôts à la direction générale de la comptabilité publique en matière domaniale, obligent la collectivité à consulter préalablement à toute acquisition à l’amiable, l’administration des domaines. La collectivité de Saint Barthélemy a effectivement demandé l’avis de France domaine mais a décidé de passer outre. 6 Or si la collectivité décidait de ne pas suivre l’avis émis par France Domaine et d’acquérir le bien au prix extraordinaire ci‐dessus exposé, elle devait « justifier cette décision, au regard, notamment, de l’intérêt public local représenté par cette acquisition. » C’est en effet ce qui ressort de la réponse du Ministère de l’intérieur et de l’aménagement du territoire à une question relative aux acquisitions d’immeubles par les collectivités territoriales : « Les dispositions, issues de l'article 23 de la loi n° 20011168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier prévoient que les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements délibèrent sur les décisions relatives aux acquisitions à l'amiable de biens immobiliers, au vu de l'avis du directeur des services fiscaux. Cet avis est réputé donné à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la saisine de cette autorité. Cet avis ne lie pas la collectivité territoriale. L'organe délibérant peut décider de procéder à l'acquisition d'un bien en retenant un prix différent de celui évalué par les services fiscaux de l'Etat. Toutefois, le préfet, dans le cadre de l'exercice de son contrôle de légalité des actes, sera amené à vérifier que l'estimation retenue par la commune n'est pas disproportionnée par rapport à la valeur vénale du bien. En effet, le montant de l'acquisition du bien doit être déterminé en fonction, d'une part, de sa valeur foncière et, d'autre part, de l'intérêt public local que revêt son acquisition pour la collectivité. Lorsqu'une commune souhaite acquérir un bien dont la valeur est supérieure au prix estimé par les services fiscaux de l'Etat, elle se trouve dans l'obligation de justifier cette décision, au regard, notamment, de l'intérêt public local représenté par cette acquisition. Si la commune n'est pas en mesure de justifier sa décision, celleci pourra être considérée comme entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, et censurée comme telle par le juge administratif. Ainsi, dans un jugement du 6 mai 1998 « Ferrand », le tribunal administratif de Grenoble a estimé que le conseil municipal s'était trompé dans l'appréciation des faits qui avaient motivé sa décision d'acquérir des terrains pour un montant dix fois supérieur à l'estimation réalisée par les services fiscaux. Le juge administratif a donc annulé la délibération du conseil municipal relative à l'acquisition de ces terrains, au motif que cet achat était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Enfin, il convient de noter que, depuis le 1er juillet 2006, les dispositions relatives à la consultation des services fiscaux pour les opérations d'acquisition à l'amiable sont codifiées au sein des articles L. 13119 et suivants du code général des collectivités territoriales. » Pièce n° 10 : Réponse du Ministère de l’intérieur et de l’aménagement du territoire à une question posée par le Sénateur Jean Louis Masson relative aux acquisitions d’immeubles par les collectivités territoriales et publiée dans le JO du Sénat du 01/03/2007, p.470. Ainsi la délibération du 27 février 2009 par laquelle le Conseil territorial a décidé l’acquisition de la propriété litigieuse devait expliquer dans ses motifs, le caractère exorbitant du prix payé eu égard l’intérêt public local. Or, il n’en est rien. Le Conseil territorial pour motiver la surévaluation du terrain à acquérir se borne à relever : ‐ « que l’avis émis par le Service France Domaine est en inadéquation avec le marché immobilier particulier de Saint Barthélemy », 7 ‐ « qu’il est de l’intérêt de la Collectivité de Saint Barthélemy d’acquérir cette propriété en raison notamment de sa topographie totalement plane garantissant une utilisation optimale, de sa situation extrêmement privilégiée au sein de l’unique zone d’activités artisanales et industrielles de Saint Barthélemy, de l’extrême rareté dans ladite zone de propriété de ce type, de sa contiguïté avec la propriété appartenant à EDF avec laquelle une convention de mise à disposition au moins partielle sera conclue afin d’atteindre les objectifs fixés dans la délibération n°2008047 du Conseil Territorial en date du 30 septembre 2008 relatifs à l’autonomie énergique (sic) de Saint Barthélemy et en vue de l’installation prochaine des usines de production électrique. » 1) le motif tiré de l’inadéquation de l’avis émis avec le « marché particulier de Saint Barthélemy » Selon le Conseil Territorial, l’avis de France Domaine est en inadéquation avec le marché immobilier particulier de Saint Barthélemy. Pourtant France Domaine est un service de la direction générale des finances publiques, rattaché directement à son directeur général et a pour mission la gestion et l’évaluation des biens, mobiliers et immobiliers, appartenant au domaine public ou privé des personnes publique. Dans ce cadre, France Domaine détermine la valeur vénale des biens immobiliers, à savoir le « prix le plus probable auquel ces derniers pourraient se vendre dans un lieu et à un moment déterminé ». Cette évaluation se fait « en fonction des mutations les plus récentes intervenues dans un même secteur géographique sur des biens similaires. Les évaluateurs disposent dans ce cadre de l’ensemble des cessions publiées, c’est à dire réellement intervenues. Cette base de données leur permet d’approcher au mieux l’état réel du marché. » Pièce n° 11 : Réponse du Ministère du Budget et de la Réforme de l’Etat dans le JO AN du 20/06/2006 Ainsi France Domaine apprécie de manière experte et objective le marché immobilier de Saint Barthélemy. En conséquence, c’est afficher un grand mépris pour les services de l’Etat que de motiver une décision, en insinuant que les agents de l’Etat sont incompétents à saisir « le marché immobilier particulier de Saint Barthélemy ». Cette affirmation infondée ne peut aucunement motiver la décision de passer outre l’avis de France Domaine. 8 2) le motif tiré de la mise à disposition du terrain à EDF L’île de Saint Barthélemy est alimentée en énergie par une centrale thermique au fioul très polluante, d’une puissance totale de 22,3 MW. C’est la raison pour laquelle, la centrale thermique actuelle ne sera plus aux normes en 2010 et devra être rénovée ou remplacée par des moyens de production d’électricité différents. Le moment est donc venu pour le Conseil Territorial de Saint Barthélemy de définir une politique énergétique conforme à l’intérêt public. A l’évidence, celle‐ci doit intégrer les énergies renouvelables à disposition. Dans le soucis d’établir une structure d’attente, il avait été question en 2007 de se servir temporairement de nouveaux groupes électrogènes fonctionnant au fioul pour remplacer les turbines à rénover et faire face à la consommation d’énergie que les spécialistes pensaient voir croître de manière exponentielle. En effet, les élus de Saint Barthélemy ont refusé l solution préconisée par EDF consistant à démonter la centrale actuelle et à desservir Saint Barthélemy depuis la centrale de production de Saint Martin. C’est donc dans cette optique que le Conseil territorial motivait sa décision en prétendant vouloir laisser les parcelles litigieuses après acquisition à la disposition de EDF, afin de subvenir aux besoins énergétiques de l’île de Saint Barthélemy pendant la phase de rénovation de la centrale dont l’existence est contestée. Il semble ainsi opter définitivement compte tenu des montants qu’il entend engager, pour une production totalement basée sur le fioul. Cependant : ‐ La propriété litigieuse n’est pas la seule propre à satisfaire les besoins initialement exprimés par EDF ‐ La consommation d’énergie tend à décroître ‐ Des solutions moins coûteuses et fondées sur les énergies renouvelables existent et rendent inutile l’extension ou le maintien des capacités actuelles de production de la centrale au fioul. 9 a) La propriété litigieuse n’est pas la seule capable de satisfaire les prétendus besoins d’EDF La délibération n’expose pas les choix énergétiques opérés ni les besoins à satisfaire. Néanmoins Monsieur Benoît Chauvin, conseiller territorial de la Collectivité de Saint Barthélemy, qui s’est opposé au projet, précise que les terrains acquis serviraient à héberger des groupes électrogènes fonctionnant au fioul. Aussi le terrain ayant cette fonction ne doit pas être nécessairement contigu à la centrale EDF. En effet un raccordement au réseau de distribution est possible partout où les câbles EDF se trouvent. Pièce n° 9 : « Conseil territorial : les autres délibérations (acquisition) », in Journal de Saint Barthélemy, édition du 4 mars 2009, p. 4. Or, par une délibération du Conseil exécutif n°20009‐089 CE en date du 11 mars 2009, la Collectivité de Saint Barthélemy a refusé de préempter un terrain situé dans la zone industrielle de Public au voisinage de la centrale d’une superficie de 2000m2, qu’elle aurait pu acquérir à un prix bien moins élevé, tout en répondant à la nécessité prétendument invoquée. Pièce n° 2 : Relevé de propriété et extrait de plan cadastral informatisé Pièce n° 12 : Délibération du Conseil exécutif de la Collectivité de Saint Barthélemy, n°2009‐089, du 5 mars 2009 et affichée le 11 mars 2009. D’autres terrains plats peuvent être mis à disposition d’EDF en tant que de besoin, non seulement à Public mais également à Saint Jean Carénage ou dans la zone des Mangliers. Aussi, le caractère disproportionné du prix ne peut être justifié par le caractère prétendument unique desdites parcelles que le Conseil souhaite acquérir. b) La consommation d’énergie tend à décroître La décision mentionne l’existence future d’une convention de mise à disposition des terrains acquis à EDF, mais la nécessité d’offrir un terrain à EDF pour augmenter ses capacités n’est pas prouvée. En effet, d’une part EDF ne semble plus avoir besoin d’étendre sa surface d’exploitation et d’autre part, la consommation d’énergie sur l’île est en diminution. Ainsi, Monsieur Benoît Chauvin, Conseiller territorial mais aussi Président de l’association Saint Barth Environnement, a affirmé « qu’après avoir rencontré le directeur EDF Guadeloupe il ne lui semblait pas que l’électricien ait un besoin urgent du terrain. Il en voulait pour preuve la consommation électrique en diminution qui n’imposerait plus d’avoir un 10 terrain où installer les groupes électrogènes qui prêtent aujourd’hui main forte aux installations en cas de pic de consommation. » Pièce n° 9 : « Conseil territorial : les autres délibérations (acquisition) », in Journal de Saint Barthélemy, édition du 4 mars 2009, p. 4. En effet depuis le troisième trimestre 2007, la consommation électrique baisse. Certes le Bilan prévisionnel d’EDF établi en 2007 dont les données sont aujourd’hui révolues, attestait de problèmes énergétiques à venir. Ce rapport identifiait à l’époque deux solutions pour remédier aux prévisions de hausse de la consommation énergétique : « 2.2.2 Projets identifiés • Projet d’interconnexion « Iles du Nord » entre SaintBarthélemy, SaintMartin, Sint Marteen et Anguilla. Ce projet, réalisable dans des délais relativement courts, rencontre une forte opposition locale à SaintBarthélemy. (Notons que la Collectivité ne démontre pas que ce projet est moins à même de remplir l’intérêt public local recherché que l’acquisition de ladite parcelle.) • Aucun autre projet n’est connu à ce jour. Faute de place sur la centrale actuelle et en l’absence de terrains alternatifs, EDF n’est pas en mesure de procéder au renouvellement de ses moteurs. » Les projections d’EDF établies en 2007 faisaient état d’une hausse progressive de la consommation électrique et d’un besoin accru de puissance (MW). Scénario Puissance (MW) 2007 2008 2009 2010 19.1 20.1 21.1 22.1 2011 23.0 2012 23.9 2013 24.9 Pièce n°13 : Bilan prévisionnel pluriannuel Guadeloupe de la Direction des Systèmes Energétiques Insulaires d’EDF de juin 2007 Cependant, l’actualisation du bilan prévisionnel d’EDF établie à la mi 2008, a fait état d’une baisse significative de la consommation électrique et des besoins en Puissances (MW). « Compte tenu de la politique de développement de l’île et les mesures de sobriété énergétique décidées par la collectivité territoriale et EDF, et au vu de la puissance de pointe observée en 2007, les hypothèses de croissance (en puissance) du Bilan prévisionnel sont revues à la baisse comme suit : Scénario Puissance (MW) 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 18,1 18,6 19,2 19,7 20,3 20,9 21,5 11 Pièce n° 14 : Actualisation du Bilan Prévisionnel de l’équilibre offre demande en Corse et dans les DOM à l’horizon 2013. Actualisation du bilan 2007 réalisée à mi 2008. Un nouveau rapport publié en 2009 et repris par la presse locale, fait état non plus seulement d’une baisse de la croissance, mais bel et bien d’une diminution de la consommation. « Pour la toute première fois depuis 1985 (année de l’installation de la centrale électrique) EDF a enregistré une diminution de la consommation électrique sur l’île, tout au longe de l’année 2008. L’amorce du ralentissement de la consommation électrique était sensible dès le dernier trimestre 2007, avec moins de 1% en octobre et moins 1 % en décembre. Mais les fêtes de fin d’année avaient battu tous les records, en faisant monter la pointe (le pic) de consommation à 18,10 mégawatts (MW). (Chiffre repris pour l’année, dans l’actualisation du Bilan prévisionnel réalisé en 2008.) Pour le passage à l’année 2009, cette fameuse point s’est arrêtée à 16,40 MW, dans la soirée du 31 décembre 2008, alors que 17,90 MW avaient été fournis le même soir, il y a un an. Les chiffres enregistrés en continu par la centrale EDF tout au long de l’année mettent en évidence une baisse régulière et stable de la consommation : 1% (en juillet et août), 3% (en janvier, février et septembre), 4% (en juin), 5% (en mars, octobre, novembre et décembre), 7% (en avril), et même10% (en mai). » Pièce n° 15 : « La consommation électrique en récession » in Journal de Saint Barth du 7 janvier, p. 1‐2. Ces évaluations révélées par Monsieur Pascal Rother, chef d’exploitation de la centrale EDF, prévoient désormais une chute de la consommation de l’île s’expliquant, entre autre, par le recours à des moyens de production d’énergies alternatives au niveau individuel, notamment l’installation de chauffeeaux solaires. Aussi le tableau des pics de consommation est désormais le suivant : Puissance (MW) 2007 2008 18,1 16,4 Le pic de consommation de 2008 n’a été que de 16,4 MW, alors qu’il était évalué dans l’actualisation du Bilan Prévisionnel réalisée à mi 2008 à 18,6MW, et que la puissance totale de la centrale thermique est de 22,3 MW. La centrale thermique pourra être rénovée sans extension de sa surface car l’utilisation simultanée de toutes ses turbines n’est plus nécessaire. Aussi la nécessité de l’acquisition de la propriété litigieuse n’existe plus. A tout le moins, elle ne présente aucun caractère d’urgence. Il n’est donc pas étonnant que le directeur d’EDF Guadeloupe ne soit pas particulièrement pressé qu’on lui mette à disposition lesdites parcelles. 12 La collectivité territoriale n’a d’ailleurs fait état d’aucun rapport d’EDF demandant la mise à disposition de la propriété litigieuse. D’autre part, la loi du 9 août 2004 a transformé EDF anciennement EPIC en société anonyme. Le marché de l’électricité est désormais libre : toutes les formes de production et tous les opérateurs sont en concurrence. La puissance publique ne saurait en privilégier aucun. Dès lors il n’appartient pas à la Collectivité d’acheter un bien de gré à gré pour le mettre à la disposition de EDF. C’est d’abord à EDF, fournisseur privé d’électricité, d’acquérir les biens nécessaires à son activité. En cas de difficulté, la collectivité peut intervenir par le biais de son droit de préemption ou de son droit d’expropriation comme il est dit ci‐après. c) L’insuffisance des motifs est aggravée par l’erreur consistant à rendre irréversible, le choix du tout fioul pour Saint Barthélemy qui est contraire à l’intérêt public local Il est indéniable que les nouveaux investissements de la Collectivité ne doivent pas servir l’antique politique de production d’énergie par le fioul, mais promouvoir une énergie durable et propre. En effet la production d’électricité par le fioul est une activité extrêmement polluante, qui nuit à l’image de Saint Barthélemy dont l’unique ressource est le tourisme. Le choix du fioul comme source principale voire unique d’énergie électrique, contrevient aux nouvelles dynamiques lancées par le Grenelle de l’environnement et contribue négativement aux engagement de la France. A ce titre, le Secrétaire d’Etat à l’Outre‐mer a estimé qu’il était important de faire de la Martinique et de Guadeloupe « des lieux d’innovation et d’exemple en matière de développement durable », et a ensuite à plusieurs reprises exhorté la Collectivité de Saint Barthélemy à devenir « pionnière en la matière. » Pièce n° 16 : « Le Secrétaire d’Etat à l’Outremer en visite à Saint Barth », in Journal de Saint Barthélemy, édition du 25 mars 2009, p. 1‐2. 13 Les possibilités de promouvoir les énergies renouvelables sur l’île sont en effet multiples : ‐ la géothermie de technologie islandaise L’île de la Dominique et les îles Vierges américaines ont opté pour l’utilisation de la technologie géothermique islandaise, qui est un système fiable puisque 99,9% de l’électricité islandaise est fournie par les centrales géothermiques. Les entreprises islandaises sont expertes dans le percement des roches volcaniques. L’Islande est en effet une terre volcanique. Saint Barthélemy se trouvant sur une plaque volcanique, pourrait aussi avoir recours à cette énergie à l’instar des îles voisines des caraïbes. Pièce n°17 : « Iceland in Caribbean géothermal project », in International Nordic News ‐ l’énergie solaire photovoltaïque individuelle et collective Saint Barthélemy dispose de 357 jours d’ensoleillement par an, permettant d’envisager à grande échelle l’implantation de moyens de production individuels ou collectifs d’énergie. L’énergie produite par des installations privées est automatiquement rachettée par EDF. La société Solarinox, leader mondial en énergie photovoltaïque, a décidé d’investir à Saint Barthélemy et est entrée en négociation pour l’implantation au lieudit Chauvette de 33 000 m2 de panneaux solaires, fixés à 60 cm du sol et s’intégrant parfaitement dans le paysage. Ces panneaux solaires seront invisibles. La capacité de production qui sera mise en œuvre sera de 2,3 MW, soit ¼ des besoin de production électrique en basse saison. D’autre part, les particuliers peuvent être encouragés à se doter de chauffe‐eaux solaires individuels diminuant ainsi leur besoin de consommation électrique de 20 à 25%. Combien de chauffe‐eaux solaires pourraient être subventionnés avec l’enveloppe budgétaire de 5,5 millions d’euros (augmentée des travaux de dépollution) que la Collectivité Territoriale prétend offrir à la SCI GAILLAC ? Ainsi, le projet de mise à disposition de terrains pour augmenter les capacités de la centrale thermique, n’a pas lieu d’être. 14 Il n’y a aucune nécessité de se doter dans l’immédiat d’une telle réserve foncière car la collectivité de Saint Barthélemy peut à tout moment l’acquérir, par préemption ou par expropriation. En effet, si après recherches, débats et développement des énergies renouvelables ou autres projets, il s’avérait néanmoins que l’extension de la centrale thermique est encore nécessaire, la Collectivité pourrait a tout moment devenir propriétaire des parcelles litigieuse au prix de l’expropriation, en usant de son droit de préemption et de son droit d’expropriation dont elle a déjà fait usage. Le prix payé serait assurément très en deçà de ce que la Collectivité est prêt aujourd’hui à débourser. En décidant de favoriser le moyen de production d’énergie le plus polluant par l’engagement de fonds publics d’un montant exorbitant pour couvrir des besoins non démontrés et non encore existants, la Collectivité Territoriale de Saint Barthélemy a commis une erreur manifeste d’aprréciation. *** Au terme du présent recours, il est démontré : ‐ que la Collectivité Territoriale de saint Barthélemy a souhaité par la délibération déférée devant le Tribunal de Céans, devenir acquéreur d’un bien pour plus du double de sa valeur, ‐ que cette délibération ne comporte aucun motif capable de justifier le prix exorbitant de cette acquisition constituée de terrains pollués qu’il faudra décontaminer, ‐ que la Collectivité n’a pas besoin à ce jour de réaliser cette acquisition, ‐ que l’usage à tout moment de son droit de préemption ou de son droit d’expropriation permettrait à la dite Collectivité d’acquérir les biens dont s’agit à une valeur moindre conforme à l’intérêt public local. Dès lors le Conseil territorial a commis une erreur manifeste d’appréciation en adoptant la délibération n°2009018, en date du 27 février 2009. Il convient de la censurer. 15 PAR CES MOTIFS ET TOUS AUTRES À PRODUIRE, DEDUIRE OU SUPPLEER, AU BESOIN D’OFFICE L’exposant conclut qu’il plaise au Tribunal Administratif de Saint Barthélemy de : ‐ ‐ ANNULER la délibération du Conseil Territorial de Saint Barthélemy n°2009 018 en date du 27 février 2009 et transmis au Représentant de l’Etat le 11 mars 2009, CONDAMNER la Collectivité de Saint Barthélemy à payer à Monsieur Emmanuel JACQUES la somme de 3 000 € au titre de l’article L.761‐1 du Code de justice administrative. SOUS TOUTES RESERVES 16 BORDERAUX DES PIECES COMMUNIQUEES Pièce n° 1 : Extrait Kbis de SCI GAILLAC Pièce n° 2 : Relevé de propriété et extrait de plan cadastral informatisé Pièce n° 3 : Délibération du Conseil territorial de la collectivité de Saint Barthélemy, n°2008‐047CT, du 30 septembre 2008 et affichée le 10 octobre 2008. Pièce n° 4 : « La note est salée selon Benoît Chauvin », in Journal de Saint Barthélemy, édition du 8 octobre 2008. Pièce n° 5 : « Un prix spécial pour la Collectivité », in Journal de Saint Barthélemy, édition du 22 octobre 2008. Pièce n° 6 : Avis de France Domaine (Direction générale des Finances publiques ‐ Trésorerie générale de Guadeloupe) du 30 janvier 2009 pour évaluation des terrains cadastrés section AK n°513, 514 et 597, sis à public – Saint Barthélemy. Pièce n° 7 : Délibération du Conseil territorial de la collectivité de Saint Barthélemy, n°2009‐018, du 27 février 2009, et sans date d’affichage. Pièce n° 8 : Carte d’électeur et passeport de Monsieur Emmanuel JACQUES. Pièce n° 9 : « Conseil territorial : les autres délibérations (acquisition) », in Journal de Saint Barthélemy, édition du 4 mars 2009, p. 4. Pièce n° 10 : Réponse du Ministère de l’intérieur et de l’aménagement du territoire à une question posée par le Sénateur Jean Louis Masson relative aux acquisitions d’immeubles par les collectivités territoriales et publiée dans le JO du Sénat du 01/03/2007, p.470. Pièce n° 11 : Réponse du Ministère du Budget et de la Réforme de l’Etat dans le JO AN du 20 juin 2006 Pièce n° 12 : Délibération du Conseil exécutif de la Collectivité de Saint Barthélemy, n°2009‐ 089, du 5 mars 2009 et affichée le 11 mars 2009. Pièce n° 13 : Bilan prévisionnel pluriannuel Guadeloupe de la Direction des Systèmes Energétiques Insulaires d’EDF de juin 2007 Pièce n° 14 : Actualisation du Bilan Prévisionnel de l’équilibre offre demande en Corse et dans les DOM à l’horizon 2013. Actualisation du bilan 2007 réalisée à mi 2008. Pièce n° 15 : « La consommation électrique en récession » in Journal de Saint Barth du 7 janvier, p. 1‐2. 17 Pièce n° 16 : « Le Secrétaire d’Etat à l’Outremer en visite à Saint Barth », in Journal de Saint Barthélemy, édition du 25 mars 2009, p. 1‐2. Pièce n°17 : « Iceland in Caribbean géothermal project », in International Nordic News Pièce n°18 : Deux photos du site Sous toutes réserves 18