20120905_declaration du BF

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20120905_declaration du BF
Alors que la crise économique et la dette publique appellent à des réductions
sans précédent dans le budget, des voix s’élèvent pour tirer le signal d’alarme
afin que la Défense ne soit pas une fois encore, la variable d’ajustement au
service d’économies dogmatiques. La réforme lancée en 2008 a supprimé plus
de 35 000 emplois civils et militaires et réduit les capacités de nos armées. La
CFDT qui demande l’organisation d’Etats Généraux de la Défense en parallèle
à la redéfinition du livre blanc, propose de « sanctuariser » le budget défense et
de poser un moratoire sur la réforme en amont des futures orientations.
DECLARATION
DU BUREAU FEDERAL
CFDT DEFENSE
DÉFENSE NATIONALE :
EVITER LE PIRE !
STOPPER L’HEMORRAGIE
Face à la course aux armements qui fait rage en Asie et ailleurs, dans un monde toujours instable, les coupes budgétaires, la réduction des effectifs ainsi que la pénurie de matériel pourraient affecter les moyens de la France nécessaires
aux missions qui lui sont confiées.
Quel rôle l’armée française devra-t-elle jouer sur la scène
internationale ?
C’est à cette question qu’il faut répondre avant que d’aborder les questions budgétaires.
Les précédentes campagnes (Côte d’Ivoire, Libye) masquent
selon un rapport parlementaire la fragilité et la désorganisation de l’Armée française qui est au bord de la rupture.
Tour à tour, les chefs d’Etat-Major Terre, Air et Marine ont
emboîté cet été le pas de l’amiral Guillaud, chef d’Etat Major
des armées, afin de donner la réalité de terrain aux parlementaires du Sénat et de l’Assemblée Nationale.
Il est temps de mettre un terme aux bilans flatteurs, puisque
selon un spécialiste, « jusqu’ici, tout va bien, mais on sent
que la chute approche ».
L’heure est grave, donc, parce que la crise impose de faire
des économies.
Si le Président François Hollande s’est efforcé de rassurer
l’état-major en indiquant que l’armée ne serait pas une variable d’ajustement, il en est autrement dans les projets, en
amont du livre blanc et de la future Loi de Programmation
Militaire (LPM).
En trente ans, la part du PIB consacrée à la défense a été
divisée par deux. Au cours de la même période, l’armée n’a
cessé de se réorganiser, à marche forcée et au prix d’une
belle pagaille.
Le 11 juillet dernier, le général Bertrand Ract-Madoux, chef
d’état-major de l’armée de terre, confiait à la presse : « Nous
agissons sous contrainte budgétaire depuis des années,
mais là nous arrivons à un plancher ».
MATERIELS VIEILLISSANTS ET FONTE DES
EFFECTIFS
Dans les casernes, loin des défilés militaires, la réalité est
toute autre : la plupart des soldats sont plus jeunes que les
véhicules qu’ils pilotent. « Nos ravitailleurs ont cinquante
ans, nos tanks, bientôt quarante », souligne un sous-officier
de l’armée de terre.
L’armée de terre dispose aujourd’hui de 7 000 poids lourds,
contre 11 000 il y a dix ans, de 254 chars (contre 400), de 135
canons (contre 250) et de 330 hélicoptères (contre 600).
Dans la Marine, 19 bâtiments ont été retirés du service actif
au cours des trois dernières années, et seuls 4 ont été remplacés. « La disponibilité du matériel est insuffisante », affirme la Cour des comptes dans un rapport publié en juillet.
Le maintien en condition opérationnelle des bâtiments, des
avions et hélicoptères embarqués, leur taux de disponibilité
insuffisant, et le nécessaire renouvellement de la flotte, sont
au coeur des préoccupations.
Un comble face aux enjeux géostratégiques connus d’un
monde qui se « maritimise ».
La France ne dispose en outre que d’un seul porte-avions, le
Charles-de-Gaulle, qui a été « surutilisé » ces deux dernières
années sur les fronts afghan et libyen, pendant que la Chine
et l’Inde s’arment sans compter.
Les effectifs quant à eux, fondent à vue d’oeil. En 2015, au
terme de la réduction en cours, l’armée ne comptera plus
que 225 000 hommes, dont 100 000 pour l’armée de terre.
Soit l’équivalent des personnels réunis de la mairie de Paris
et de la RATP. Ou des troupes de Louis XIV, au XVIIe siècle...
« Le contrat de projection de 30 000 hommes fixé par le
Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale n’est pas
atteignable », admet l’amiral Guillaud.
Le chef d’état-major réclame donc « des budgets cohérents
avec le rang que la France souhaite conserver en matière de
défense ».
FÉDÉRATION CFDT DES ÉTABLISSEMENTS ET ARSENAUX DE L’ÉTAT
Retrouvez-nous sur : www.cfdt-feae.com
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DECLARATION
DU BUREAU FEDERAL CFDT DEFENSE
Le budget chinois de la Défense devrait passer de 120 milliards d’euros à 250 milliards d’euros d’ici 2015.
La Russie a annoncé une augmentation énorme de son budget défense en 2015.
Les États-Unis consacrent plus du double du budget total européen (450 milliards d’euros).
Le CESE invite le Conseil et la Commission à prendre des mesures et mettre à jour la politique étrangère, de sécurité et de
défense et à travailler sur un concept de défense européen…
ET LES PERSONNELS CIVILS DE LA DEFENSE ?
Pour les personnels civils confrontés aux fermetures d’unités et d’établissement, la lettre de cadrage qui préconise de
poursuivre la réforme et de diviser par deux les mesures
catégorielles, comme dans les autres ministères, fait quasiment dans la provocation face aux efforts, voire aux sacrifices consentis depuis 2009 quand dans le même temps, les
effectifs des officiers militaires sont maintenus et leur solde
augmentée.
DES REFLEXIONS A LA VA-VITE
Un nouveau Livre blanc doit être rédigé d’ici à la fin de l’année
à la demande de François Hollande. Il devra redéfinir une nouvelle stratégie de défense, qui elle-même devra tenir compte
de la crise économique, des révolutions dans le monde arabe,
de la nouvelle stratégie américaine et d’autres enjeux à
l’échelle mondiale.
D’autres courriers du ministre enfoncent le clou. Ainsi le
courrier de Jean-Yves Le Drian qui demande au CGA Roudière, de rendre ses conclusions fin septembre avec un objectif de réduction de 20% des effectifs de l’administration
centrale, démontre que la politique du chiffre, sans se préoccuper des missions, continue d’être à l’œuvre.
De la même manière, l’administration qui met la pression
sur les personnels restructurés afin qu’ils renoncent à l’accompagnement social et optent pour une mutation pour «
convenances personnelles » est tout simplement scandaleux. La réforme est arrivée au bout de son incohérence, il
est temps d’arrêter.
Avec le retrait de ses troupes d’Irak et d’Afghanistan, Washington se tourne de plus en plus vers le Pacifique, ce qui oblige
les Européens à repenser leur rôle dans leur zone d’influence
notamment en Afrique, s’agissant de la France.
Mais les observateurs doutent que le nouveau livre blanc réponde aux besoins des militaires. « Tout est fait à la va-vite »,
note l’un d’eux.
L’EUROPE A LA TRAINE ?
A QUAND UN DEBAT PUBLIC ?
Alors que les budgets de la défense de l’Union Européenne
sont réduits, les dépenses de défense de la Chine, l’Inde, le
Brésil, la Russie et d’autres pays sont en forte hausse.
Si l’Europe veut maintenir une sécurité et une défense solides, les États membres doivent coordonner leurs budgets,
éviter les chevauchements et renforcer les programmes de
recherche conjoints. C’est le message que le Comité Economique et Social Européen (CESE) a souligné, dans l’avis qu’il
a adopté le 11 Juillet dernier.
« Nous devons réussir une politique de défense commune,
un programme de recherche commun et une industrie de défense commune » a souligné le rapporteur Joost van Iersel.
« Ce qu’il faudrait, c’est un vrai débat public sur le sujet, ajoute
Étienne de Durand (Institut français des relations internationales - Ifri). Il s’agit de savoir si les Français, comme d’autres
Européens, estiment pouvoir sortir de l’Histoire et acceptent
de perdre leur autonomie stratégique, donc une part fondamentale de leur souveraineté. »
Dans son rapport, la Cour des comptes indique que les dépenses militaires mondiales ont augmenté de 50 % depuis dix
ans. Pendant que le monde s’arme, l’Europe désarme et ne
consacre plus que 1,6 % de son PIB à ses dépenses de défense
(contre 5 % pour les États- Unis).
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L’heure est donc aux grand choix. Choix industriels et choix stratégiques, qui impacteront la
capacité de notre outil défense et le quotidien des personnels civils et militaires. La CFDT, qui
défend l’emploi, le pouvoir d’achat et les conditions de travail des personnels civils, appelle avec
d’autres à un changement radical dans l’approche qui concerne les réflexions du domaine défense. Domaine régalien par définition, la défense et l’armée appartiennent à la Nation. Un grand
débat public doit initier les perspectives relatives à la part du budget national consacré à la défense de demain. Le volet européen devient incontournable face aux enjeux internationaux et au
nouveau contexte géostratégique. « Si on ne fait rien, c’en est fini de notre armée », s’alarme un
spécialiste, qui rappelle « qu’il y a désormais plus de canons aux Invalides et au musée militaire
de Paris, que dans l’armée d’active ». Tout un symbole !
Paris, le 5 septembre 2012
FÉDÉRATION CFDT DES ÉTABLISSEMENTS ET ARSENAUX DE L’ÉTAT
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