Toponymie

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Toponymie
Toponymie - Géographie
ELÉMENTS DE TOPONYMIE
Pour commenter une carte, l’étude de la toponymie sert à dater la mise en place du peuplement et donne
donc des informations pour l’analyse de l’habitat rural et du paysage. On note en France plusieurs « couches »
historiques de noms de lieux.
ORIGINE CELTE
 Noms composés : le deuxième élément, d’ordre topographique, peut être tiré des racines suivantes :
-bona (fondation) : LILLEBONNE ; - briga (mont, château-fort, devient souvent « obre » dans le Midi et « euvre »
dans le Nord) : DENEUVRE, VENDEUVRE, SIDOBRE ; -« briva » (pont) : CHABRIS ; - « dunum » (colline,
l’aboutissement phonétique est « un » ou « on ») : VERDUN ; « durum » (maison, village, a donné « oire » dans
le Midi, « erre » ou « eurre » dans leNord) : ISSOIRE, TONNERRE ; « ialo » (clairière, a donné « eil » ou « euil ») :
NANTEUIL ; « rate » (forteresse, a donné « tré » ou « tra ») : CARPENTRAS ; -« ritum » (gué) : BÉDARRIDES.
 Suffixes caractéristiques : ils sont mal connus, on peut cependant citer : -« inios » : LEMENE ;
-« acte » : BIBRACTE ; - « avus » : GENÈVE ; -« enna » : ARDENNES.
 Noms simples : parfois le deuxième élément des noms composés est employé seul, c’est ainsi que
« briga » a donné BROYES, « briva » BRIVES, « durum » DUN. On peut citer en plus –« der » (forêt) : MONTIERSEN-DER ; -« condate » (confluent) : CONDES ; -« dubron » (ruisseau) : DOUVRES ; -« nanto » (vallée) : NANS (dans
le Chablais, le mot « nant » désigne encore les cours d’eau) ; -« voberna » (ruisseau plus ou moins caché) :
VAIVRE.
ORIGINE GALLO-ROMAINE
La plupart du temps les noms de lieux sont formés par le nom du propriétaire suivi de certains suffixes dont
voici les principaux.
 Suffixe acum : très fréquent et d’origine gallo-romaine, ce suffixe est devenu le plus souvent « ac » ou
« at » dans le Midi : AURILLAC ; « y » dans le Centre, le Nord et le Nord-Ouest : AUBIGNY ; « ey » dans l’Est :
BLANCEY ; « ieu » en franco-provençal : SAVIGNIEUX, AMBÉRIEU.
 Suffixe anum : formation proprement latine, se trouve donc surtout dans l’ancienne Provincia ; ce suffixe
a donné « an » : AUBIGNAN ; « ane » : MARIGNANE ; « iens » : VALENCIENNES ; « in » : PORCIN.
 Suffixes secondaires : - « anicus » qui aboutit à « argues » : CAMARGUES, « anges » ou « inges » : « inus », qui aboutit à « in » ou « ines » : BOUVINES.
 Apellatifs caractéristiques, tirés de noms communs : - « confluentes » (confluent) : CONFLANS ;
- « pontem » (pont) ; PONTOISE ; - « summus » (source) : SOMME ; - « fagus » (hêtre) : LA FAYE, LE FAY, FAIX… ; « cassanea » (chêne) : CASSAGNES ; - « castrum, castellum » (camp) : CASTRES ; - « fossa » (canal) : FOS.
ORIGINE GERMANIQUE (HAUT MOYEN-ÂGE, DU Ve AU Xe SIÈCLE
 Suffixe « ing » : ajouté au nom du propriétaire, ce suffixe a donné « ange » en Lorraine (MORHANGE),
« ingue » en Flandre (BONNINGUE), « ans » ou « ens » en Franche-Comté (BATHANS).
 Appelatifs caractéristiques tirés de noms communs : « fara » (famille) : LA FÈRE ; « thal »
(vallée) : BAERENTHAL ; « bath » (ruisseau) : REBAIS ; « ham » (courbure) : LE HAM ; « thun » (ferme) :
ALINETHUN (particulièrement fréquent dans le Boulonnais) ; « budh » (abri), devient « beuf » : CRIQUEBEUF ;
« flet » (crique), devient « fleur » : HONFLEUR ; « haugr » (tertre), devient « hogue » : LA HOGUE ; « lundr »
(petit bois, lande), devient « lon » : BOUQUELON ; « mara » (mare) : CAMBREMER, ROUMARE ; « thorp » (village) :
LE TORPT ; « tept » (pièce de terre) : CRIQUETOT.
 Formations germano-romanes : le nom du propriétaire est suivi des suffixes suivants : « curtis » qui
a donné « court » : BAUDRICOURT ; « villa », qui a donné « ville » : ROMAINVILLE ; « villars », qui a donné
« villiers » : RAMBERVILLIERS ; « Mansionile », qui a donné « mesnil » ou « magny » : AUBERMESNIL ; « mansus »,
qui a donné « mas » ou « meix » : BERTRAMEIX ; « pons », qui a donné « pont » : RADEPONT ; « sartum », qui a
donné « sart » (défrichement) : LAMBERSART ; « mons », qui a donné « mont » : BEAUMONT ; « vallis », qui a
donné « val » : BONNEVAL.
 Formations romaines de cette époque : « mézières » (masures) : MÉZIÈRES ; « bains » : BAGNEUX.
ORIGINE FÉODALE (BAS MOYEN-ÂGE, DU XIe AU XVe SIÈCLE)
 Quatre caractéristiques générales : - généralisation de l’article ; - le déterminant est placé après le
déterminé tandis qu’il était placé avant à la période précédente (ex : Neufchâteau devient Châteauneuf). Ce
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critère est cependant d’un usage délicat car il représente le triomphe de la construction latine sur la construction
germanique et cette transformation apparaît à des périodes différentes ; le Midi l’a adopté beaucoup plus vite
que le Nord ; -apparition de toponymes formés d’un nom et d’un adjectif ; - la relative rareté des
anthroponymes, remplacés par des toponymes qui ont une valeur topographique ou qui rappellent le règne
végétal, les différentes formes d’habitations, le travail de l’homme, les caractères de la féodalité.
 Les noms à valeur topographique généralement associés à une épithète : - « Mons »
(mont) : MONTAIGU ; - « podium » (puy, peuch, pech) : PUILAURENS ; - « vallis » (vals, vaux) : VALBONNE ;
- « champ » : CHAMPAGNE ; - « pierre » PIERRELATTE ; - « roche » (roque) : ROQUEBRUNE ; - « fond » (fond, font) :
FONTEVRAULT ; - « pons » (pont) : PONT-SUR-YONNE.
 Noms rappelant le règne végétal ou parfois le règne animal : - noms d’arbres o d’arbustes
divers, souvent précédés de l’article (LE CHESNE, BRUYÈRES) ; - noms de plantes ou d’animaux avec un suffixe
(plus fréquents), les suffixes employés sont : « étum », « ay », « oy », « et », « aie », « aye » (AULNAY), « arius »,
« ières » (ROSIÈRES).
 Noms rappelant l’habitation : - on emploie encore le nom du propriétaire, mais le suffixe employé est
généralement « ière » ou « erie », parfois « ais » (XIIIe siècle), d’autre part, on le fait souvent précéder de
l’article (LA BARBINIÈRE), parfois enfin, il n’y a pas de suffixe (Les Bernards) ; - les mots « curtis, villa, mansus,
mansionile » sont toujours employés, mais contrairement à l’époque précédente, ils précédent maintenant le
nom de la personne et parfois ils sont déterminés par une épithète (VILLEVIELLE).
 Noms rappelant le travail de l’Homme : - « carrières » : CARRIÈRES-SOUS-POISSY ; - « forges » :
FORGES-LES-EAUX ; - « moulins » : MOULINS ; - « ferrières » (exploitation de minerai de fer) : FERRIÈRES-ENBRAY ; - « chauffour » (four à chaux) ; - « martinet » ; - « charbonnière » (fabrication de charbon pour la
métallurgie).
 Noms rappelant la féodalité : - « rocca » (château-fort, roche) : LA ROCHE-GIRON ; - « castellum,
castel » (château) : CASTELJOUX ; - « ferté, garde » (tour) ; - « alleux, cité, bourg, sauveté, franche ».
L’ÉPOQUE MODERNE (DU XVe SIÈCLE À NOS JOURS)
 Persistance, jusqu’au XVIIIe siècle, du nom du propriétaire suivi de « ière » ou « erie » (surtout pour les
fermes isolées).
 A partir du XVIIIe siècle, utilisation de noms impersonnels rappelant : - des victoires militaires (MAGENTA),
- des noms de mépris donnés par les paysans hostiles aux créations de fermes isolées (LA FOLIE, LA BELLE IDÉE),
- des noms de terroirs (LES JONCS, LES HAUTS).
LES NOMS D’ORIGINE RELIGIEUSE (CHRÉTIENNE)
Ils ne renseignent que de façon imprécise sur la date du peuplement puisqu’ils s’échelonnent du V e au XVIe
siècle et même, mais rarement, plus tard. Ils peuvent cependant rendre service lors du commentaire de la carte
en prouvant l’origine religieuse de la fondation considérée. Ils fournissent parfois un élément supplémentaire
d’explication. Leur usage est rendu souvent délicat par les rebaptêmes (certaines communautés, à la suite d’un
vœu, ont abandonné le nom ancien pour prendre celui d’un saint). Parfois les deux noms, l’ancien et nouveau,
sont accolés : SAINT-LÉONARD DE NOBLAT, mais ce n’est pas toujours le cas. Seule la méthode statistique permet
de réduire ces difficultés, en s’appuyant sur des cas relativement fréquents et non sur des exceptions
dangereuses. Les principales formations sont les suivantes : - « celle » (ermitage) : LA CELLE ; - « baz »
(basilica) : BAZOCHES ; - « église » : EGLISOLLES ; - « moutiers » (monastère) ; - « don, dan » (dominus) :
DAMPIERRE ; noms de saints très nombreux ; - « oroux » (oratorium) : LE LEROUX ; - « capelle » (chapelle) : LA
CHAPELLE ; - « maladrerie » (hôpital) ; noms de lieux saint, noms avec « Dieu ».
LA TOPONYMIE DES RÉGIONS NON-ROMANES
 Flandres et Alsace : toponymie de caractères essentiellement germanique. - « Berg » (montagne) ; « Brunno » (source) ; - « Burg » (forteresse) ; - « Dorf » (village) ; « Heim » (maison, village) ; en Flandre
« Heim » = « Ingheim » ; - « Hof » (ferme) ; - -« Kirch » (église), « kerque » en Flandre ; -« seli » (maison),
« seele » : broxeele (Bruxelles).
 Bretagne : - « plu » (peuple, territoire, paroisse) ; - « lok » (lieu sacré, oratoire, ermitage) ; - « len » (lieu
consacré, église, monastère) ; - « ker, caer » (ville, village en breton moderne, maison) ; - « men » (pierre) ; « Burg » (forteresse) ; -« méné » (montagne) ; - « pen » (tête) ; - « ros » (butte, tertre) ; - « bren » (colline) ; « koat » (bois) ; - « kemper » (confluent) ; - « poul » (mare).
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