Surtout pas de panique! (1re partie)
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Surtout pas de panique! (1re partie)
Wissenschaft · Science La CMPS informe sur les poux de tête: prévalence, caractéristiques, transmission et diagnostic Surtout pas de panique! (1re partie) C h r i s t i n a R u o b F u c h s , M a r i a nne Beutler Qui ne connaît pas ces parents honteux qui viennent se renseigner sur un traitement efficace contre les poux de tête de leur enfant? Les infestations de poux de tête semblent en nette augmentation ces dernières années. Une des explications avancées est la résistance croissante vis-à-vis des pédiculicides chimiques. Après une analyse détaillée de la littérature sur le sujet, le présent article rappelle tout ce qu’il faut savoir pour que le traitement ait une c hance de réussir: la vie et la stratégie de survie du pou sur son hôte, la prévalence, la transmission et le diagnostic. Un second article présentera un traitement prometteur des poux de tête et abordera le problème de la résistance accrue aux pédiculicides. Les poux, ces désagréables parasites, existent depuis la séparation de l’évolution de l’homme et du singe, il y a 5,5 millions d’années [3]. On associe, à tort, ces pharmaJournal 17 | 8.2007 minuscules parasites à un manque d’hygiène si bien que les infestations du cuir chevelu sont souvent tues ou insuffisamment traitées. En raison de la forte contagiosité, cela peut entraîner de véritables épidémies de poux dans les garderies d’enfants et les écoles. Même si les poux de tête ne transmettent pas de maladies sous nos latitudes, un traitement rapide et efficace de l’infection reste néanmoins essentiel. Comment les poux de tête se transmettent-ils? Les poux de tête sont présents dans le monde entier et semblent en nette augmentation ces dernières années [1,6]. La prévalence des poux de tête chez les enfants d’âge préscolaire et scolaire varie en Europe entre 0,9% et 20% [8]. Les infestations par les poux de tête surviennent par vague. Dans un pays, dans une région voire dans la même école, la prévalence peut varier d’un facteur 70 [6]. Il n’existe pas à ce jour d’étude sur la prévalence des poux sur l’ensemble de Wissenschaft · Science la Suisse. Le service de médecine scolaire de la ville male de 1 cm du cuir chevelu à angle droit par rapde Zurich examine chaque année entre 12 000 et port aux cheveux. Ils sont de forme ovale, mesurent 15 000 enfants. Ces cinq dernières années, environ environ 0,8 mm de diamètre et sont de couleur mar10% des enfants examinés étaient infestés de poux ron foncé. L’œuf est entouré d’une enveloppe de chaque année. On n’a toutefois pas constaté d’aug- chitine fermée par un couvercle appelée lente, qui lui mentation de ce phénomène pendant cette période. confère une grande résistance contre les influences Alors que la fréquence de l’infestation par des poux de l’environnement et les insecticides. Le couvercle connaît des variations annuelles, avec un maximum contient des orifices respiratoires ou aéropyles qui l’été [6], les causes de ces variations saisonnières alimentent l’œuf en oxygène (Fig. 2). Les jeunes lenrestent inconnues [8]. tes, également appelées larves ou nymphes, éclosent On trouve des poux de tête en premier lieu sur au bout de sept à dix jours. Elles sucent le sang mais les enfants âgés de 3 à 12 ans, en raison des contacts ne peuvent pas encore coloniser leur hôte dans la corporels étroits de ces enfants avec leurs camarades. mesure où leurs pinces ne sont pas arrivées à matuMais les parents et les professeurs des enfants infes- rité. En huit à neuf jours, pendant lesquels elles se tés peuvent être contaminés à leur tour [5]. Les filles développent en lentes adultes, les nymphes muent à sont plus souvent atteintes que les garçons, sans trois reprises. Leur capacité à se débarrasser de leur doute parce qu’elles ont entre elles des contacts plus ectosquelette protecteur les rend relativement résisrapprochés que les garçons. En revanche, la texture et tantes vis-à-vis des pédiculicides [5]. Les enveloppes la longueur des cheveux n’ont aucune influence sur de chitine (lentes) vides, désormais de couleur blanla fréquence de l’infection. che, adhèrent alors au cheveu mais ne présentent plus aucun danger (Fig. 3). En fonction des condiComment vit le pou de tête? tions de vie, les adultes mâles vivent environ 15 jours et les adultes femelles de 30 à 40 jours [4,6,7]. Les poux de tête (Pediculus humanus capitis) se développent uniquement sur la tête. Ils s’attachent aux Transmission cheveux et se déplacent à l’aide de leurs six pattes munies de griffes (Fig. 1). C’est pourquoi il ne suffit Les poux trouvent dans le cuir chevelu un environnepas de se laver les cheveux pour s’en débarrasser et ment idéal et ne l’abandonnent pas volontiers. La que l’ectoparasite ne se laisse pas éliminer par un transmission se fait généralement par un contact dipeigne normal. Les poux de tête ne savent ni voler ni rect qui permet aux parasites de passer d’une chevesauter, mais se déplacent relativement vite en ram- lure à une autre. Il arrive aussi que les poux soient pant à raison de 20 cm par minute. Le pou se pro- transmis indirectement par des objets ayant été en cure l’oxygène nécessaire à sa survie par les sept contact avec le cuir chevelu que l’on se passe d’une orifices respiratoires placés sur les côtés du corps, qui personne à l’autre (p. ex. peignes, brosses, casques de aboutissent à une trachée. Lorsque ces trachées se moto, bonnets) alors que les poux trouvés dans les bouchent, le pou étouffe. Par son dard, le pou prélève meubles rembourrés ou les coussins sont vieux, madu sang toutes les deux à trois heures. La piqûre lades ou morts et donc non infectieux. Il convient de passe tout d’abord inaperçue en raison de l’effet noter que les animaux domestiques ne transmettent anesthésiant, anticoagulant et vasodilatateur de la pas les poux de tête [4]! sécrétion de la glande salivaire déversée dans la piqûre par la ponction de sang. Cette sécrétion a éga- Symptômes et complications lement chez l’homme un effet potentiellement allergénique. Sans son repas de sang, le pou de tête perd Lors d’une primo-infection, les allergènes apportés rapidement sa capacité de reproduction et meurt en par la salive de pou peuvent, après une phase de fonction de la température ambiante en quelques sensibilisation de quatre à six semaines, provoquer heures, au plus au bout de deux à trois jours. Il sé- des papules rouges de 2 à 3 mm de grosseur et très journe de préférence à l’arrière de la tête, sur la nu- prurigineuses. En cas de nouvelle infestation, le pruque et derrière les oreilles, où règnent des conditions rit apparaîtra déjà au bout de 24 à 48 heures en raison idéales avec des températures entre 28 et 32 °C et de l’allergisation. Les démangeaisons déclenchées une humidité de l’air de 70%. Les poux de tête aban- par le prurit entraînent des lésions cutanées qui fordonnent rarement la région du cuir chevelu [1,4,5,6] ment une porte d’entrée pour les staphylocoques et pour migrer vers les poils de la barbe, les aisselles ou les streptocoques. Non traitées, ces surinfections les sourcils [7]. bactériennes peuvent entraîner avec le temps une inflammation locale des ganglions lymphatiques et De l’œuf au pou adulte les écorchures et le grattage, un eczéma chronique (eczéma du pou) qui devra être traité séparément Au cours de leur vie, deux à trois jours après la fécon- [4,6,8]. dation, les femelles pondent de trois à dix œufs par jour. Les œufs se collent à l’aide d’une sécrétion Les signes d’une pédiculose: adhésive insoluble dans l’eau à une distance maxi- R Prurit après la sensibilisation pharmaJournal 17 | 8.2007 Fig. 1: Poux adulte de sexe féminin et masculin Fig. 2: Oeuf du poux de tête avec couverte intact Fig. 3: Lentes dans les cheveux Fig. 4: A gauche, une larve (ou nymphe); à droite, un pou adulte Wissenschaft · Science R Poux, larves, œufs R Eventuellement des infections secondaires, comme un eczéma du pou dû au grattage Diagnostic Le diagnostic ne peut être posé avec certitude qu’en présence de larves et de poux vivants ou d’œufs viables. Les lentes (enveloppes de chitine vides) ne sont pas un indicateur d’infestation de poux vivants ou en phase de développement. Les localisations préférées sont derrière les oreilles ainsi que sur les tempes et la z nuque. Comment différencier les poux, les larves, les œufs et les lentes? Poux: Trouver un pou vivant n’est pas chose facile. Dans la plupart des cas, il y en a moins d’une dizaine dont la majeure partie sont au stade de larve et donc extrêmement petits. Leur excellent camouflage et leur mode de locomotion rapide sont des facteurs additionnels qui empêchent leur identification [5,9]. Les poux adultes mesurent de 2 à 3,5 mm et sont difficiles à voir à l’œil nu. En fonction du temps qui s’est écoulé depuis leur dernier repas de sang, les poux sont de couleur grise à brun-rouge. Mais ils peuvent aussi adapter la couleur de leur carapace de chitine à leur environnement et sont de ce fait souvent plus foncés chez les personnes aux cheveux sombres et à la peau fortement pigmentée que chez les personnes au teint et aux cheveux clairs (Fig. 1). Les larves (ou nymphes) mesurent moins de 2 mm et ressemblent à un minuscule pou. On les trouve près de la racine des cheveux (Fig. 4). Les oeufs sont entourés d’une enveloppe de chitine, de forme ovale, mesurent 0,8 mm environ (de la taille d’un grain de sable) et de couleur marron foncé (Fig. 2). On les trouve à 1 cm au plus du cuir chevelu. Les œufs se distinguent des pellicules du fait qu’ils sont fortement attachés au cheveu [4]. Les lentes sont les enveloppes de chitine blanchâtres transparentes qui restent après l’éclosion des larves. Dans le langage populaire, les œufs sont souvent désignés à tort de lentes. Les lentes se trouvent à plus de 1 cm de distance du cuir chevelu (Fig. 3). Cet article a été rédigé sur mandat de la CMPS par: Dr Christina Ruob Fuchs, Zurich, et Dr Marianne Beutler, Egg. Nous remercions le Dr méd. Peter Vogelsanger, médecin scolaire de la ville de Zurich, pour la relecture du manuscrit. Adresse de correspondance: Commission des médicaments des pharmaciens suisses (CMPS) Case postale 5247 3001 Berne Littérature: voir texte allemand pharmaJournal 17 | 8.2007