Planète Paix n°506 - EX-OTAGE EN IRAK : Giuliana Sgrena
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Planète Paix n°506 - EX-OTAGE EN IRAK : Giuliana Sgrena
Planète Paix n°506 – EX-OTAGE EN IRAK : Giuliana Sgrena témoigne contre la guerre Mondialiser la Paix EX-OTAGE EN IRAK : Giuliana Sgrena témoigne contre la guerre Giuliana Sgrena, envoyée spéciale du quotidien italien Il Manifesto en Irak, a été libérée le 4 mars 2005 après avoir passé un mois aux mains d’un groupe armé. Le convoi qui la ramenait à l’aéroport de Bagdad a été pris pour cible par des tirs américains. La journaliste a été blessée à l’épaule et un agent des services intervention. secrets a été tué pendant cette Très affectée par ces évènements et par une détention très dure, Giuliana Sgrena, qui est aussi depuis toujours une militante de la paix, a choisi la 6 e rencontre des peules de l’ONU à Pérouse (Italie) pour faire sa première apparition dans un évènement politique. Planète Paix : Votre libération a été pour nous tous en France un grand moment de joie, malgré les circonstances dramatiques qui l’ont entourée. Mais nous avons eu peu l’occasion d’avoir des nouvelles de votre santé, comment allez-vous six mois après votre retour? Giuliana Sgrena : Vous pouvez dire aux amis français que je les remercie et que cela va mieux, mais j’ai encore du mal à reprendre le travail. C’est la première fois que je participe aux travaux d’une assemblée aussi importante depuis mon enlèvement. J’ai encore du mal à être dans une foule, mais ici, ce n’est pas pareil, c’est une foule d’amis. Je voudrais tous vous remercier pour ce que vous avez fait pour obtenir ma libération, c’est à vous en particulier que je dois d’être libre aujourd’hui et d’avoir gardé l’espoir pendant ma détention, quand je voyais des portraits de moi dans les manifestations. J’ai toujours considéré que mon travail de journaliste était situé à mi-chemin entre mon engagement militant et mon engagement professionnel. C’est dans cet esprit que j’ai essayé de comprendre la guerre en Irak, et de faire partager cette connaissance du terrain que mon métier me permettait d’avoir et j’ai aussi accompagné des délégation, comme le 15 février 2003, où j’étais à Bagdad avec une délégation de pacifistes. J’ai vu partout que la guerre provoque une dégénérescence de la société. Cette dégradation a été bien plus rapide et violente en Irak qu’en d’autres endroits où il a toujours été possible de travailler. J’avais conscience qu’il devenait de plus en plus dangereux d’y rester et j’avais envisagé la possibilité d’être prise en otage, mais mon engagement contre l’occupation me semblait une forme de sécurité. Quand j’ai été kidnappée, j’ai dit aux membres de ce groupe armé que j’avais toujours été du côté de ceux qui voulais libérer l’Irak, et que c’était ce que j’écrivais tous les jours dans mon journal. Mais ils m’ont dit :« Dès que tu as mis le pied en Irak, tu es entrée dans la guerre. » Moi, une journaliste pacifiste, j’étais devenue une arme de guerre, ça a été une expérience terrible, je l’ai vécu comme un échec. D’abord, c’était un échec professionnel, nous voulions être témoin des élections, mais personne ne voulait de témoins, ni les Américains, ni ceux qui prétendent vouloir libérer l’Irak. J’ai toujours essayé d’être la voix de ceux qui n’en avaient pas. Mais en Irak, il n’y a plus d’espace pour cela. C’est terrible car les gens souffrent beaucoup, la vie est intenable. Comment peut-on parler de démocratisation s’il n’y a pas de liberté d’information ? J’ai souvent dit que je n’ai pas éprouvé de joie à ma libération parce qu’elle a causé la mort d’un homme, et je ne peux pas l’oublier. Mais en assistant à cette conférence je rencontre toutes ses personnes qui viennent de zones de guerres, qui sont les témoins quotidiens de drames bien pires, et qui luttent pour la paix, cela me donne du courage pour continuer. En savoir plus : Reporters sans frontières www.rsf.org A ce jour, 68 journalistes ont été tués en Irak depuis le début de la guerre en mars 2003, et 19 depuis le début de l’année 2005. Reporters sans frontières rappelle que lors de la guerre du Viêt-nam, entre 1955 et 1975, 63 journalistes avaient trouvé la mort. Deux journalistes sont toujours portés disparus en Irak : Frédéric Nérac, de la chaîne américaine ITV News, depuis le 22 mars 2003, et Isam Hadi Muhsin Al-Shumary, cameraman de la chaîne allemande Suedostmedia depuis le 15 août 2004.