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ARTICLE ORIGINAL
Journal Africain d’Imagerie Médicale 2011; (3), 6: 300-307
ECHOGRAPHIE SUSPUBIENNE DANS LES DOULEURS PELVIENNES
CHEZ LA FEMME A LOME.
(A PROPOS DE 231 CAS )
L. K. Agoda-Koussema (1), A. B. Adama-Hondegla (2), T. Anoukoum (3),
K. Folligan (4), Davi D. (1), K. Awobanou (1), K. G. N’dakena (1)
(1)- Services de radiologie CHU de Lomé,
(2)- Service de gynécologie-obstétrique du CHU Tokoin de Lomé,
(3)- Service d’urologie du CHU Tokoin de Lomé
(4)- Service d’histo-embryologie du CHU Tokoin,
Lomé, TOGO
RESUME :
But : Montrer le rôle diagnostique de l’échographie suspubienne dans les douleurs pelviennes
chez la femme..
Patientes et Méthode : Etude prospective de 24 mois (juin 2004 à mai 2006). Des
échographies suspubiennes ont été réalisées chez des patientes pour douleurs pelviennes
dans le service de radiologie du CHU Tokoin de Lomé pour rechercher les lésions
responsables.
Résultats : 231 patientes ont été concernés par cette étude. L’âge des patientes a varié de 10
à 65 ans. Les résultats étaient pathologiques dans 48% des cas (n=110). Les lésions purement
ovariennes et utérines étaient retrouvées respectivement dans 36,36% des cas (n=40) et
32,73% des cas (n=36). Le kyste ovarien simple (17,27%, n=19) et le gros ovaire
micropolykystique (07,27%, n=8) ont dominé la pathologie ovarienne. La pathologie utérine était
dominée par le gros utérus polymyomateux (21%, n=23). Les autres lésions (collection
liquidienne du Douglas, hydrosalpinx, appendicite aiguë et grossesse extra-utérine non rompue)
ont représenté 23,64% (n=26).
Conclusion : L’échographie suspubienne est d’un apport fiable dans le diagnostic des lésions
responsables de douleurs pelviennes chez la femme.
Mots-clés : Echographie suspubienne – Douleurs – Femme – Pathologie pelvienne.
TIRE A PART ADRESSE A :
Dr Lama Kegdigoma AGODA-KOUSSEMA
Service de Radiologie
CHU Tokoin de Lomé
05 BP 68 Lomé 05
Lomé -Togo
E-mail : [email protected]
J Afr Imag Méd 2011; (3), 6: 300-307
LK Agoda-Koussema et al
SUMMARY:
Aim: To assess the role of suprapubic ultrasonography in the diagnosis of female pelvic
pains.
Patients and Method : It was a prospective study during a 24 months period (june 2004 to may
2006). Patients presenting with pelvic pains underwent suprapubic sonography in the
Department of radiology of Tokoin’s Teaching Hospital of Lome.
Results : 231 patients were concerned by this survey. The age of the patients varied from 10 to
65 years. The results were pathological in 48% of the cases (n=110). Ovarian and uterine
lesions were diagnosed respectively in 36,36% of the cases (n=40) and 32,73% of the cases
(n=36). Simple ovarian cyst (17,27%, n=19) and enlarged micropolycystic ovary (07,27%, n=8)
dominated the ovarian pathology. Uterine pathology was dominated by the large and multiple
myoma (21%, n=23). The other lesions (fluid collection of the Douglas pouch, hydrosalpinx,
acute appendicitis and unruptured extrauterine pregnancy) represented 23,64% (n=26).
Conclusion: The suprapubic sonographic mode is a reliable tool in the diagnosis of female
pelvic pain in our milieu.
Key words : Suprapubic ultrasound scan - Pains - Woman – Pelvic pathology.
INTRODUCTION :
fréquent de consultation, parfois dans un
Les algies pelviennes sont une des causes les
contexte d’urgence, justifiant la réalisation
plus courantes de consultation externe en
d’une échographie qui permet de redresser
gynécologie [1]. La douleur pelvienne peut
l’orientation clinique initiale et d’améliorer
révéler de très nombreuses affections de la
la fiabilité du diagnostic.
sphère génitale, des systèmes digestif et
Nous avons mené la présente étude dans le
urinaire mais aussi ostéoarticulaire. En
but d’évaluer l’apport diagnostique de
outre,
l’échographie dans les douleurs pelviennes
les
pelvialgies
de
la
femme
constituent fréquemment l’expression de
conflits
psychosomatiques
indispensable,
l’exploration
pour
d’une
[2].
mener
douleur
Il
à
chez la femme togolaise à Lomé.
est
bien
PATIENTES ET METHODE :
pelvienne,
Nous avons mené une étude prospective qui
d’utiliser à bon escient les ressources des
a consisté à réaliser une échographie sus
examens cliniques et des explorations
pubienne à des patientes âgées de 10 à 65
complémentaires adaptées à chaque cas [3].
ans reçues dans le service de radiologie du
En Afrique et plus particulièrement au Togo,
CHU Tokoin de Lomé pendant une période
les douleurs pelviennes constituent un motif
de 24 mois (juin 2004 à mai 2006) pour des
J Afr Imag Méd 2011; (3), 6: 300-307
douleurs pelviennes. Pour chaque patiente,
vomissements représentaient respectivement
nous avons analysé l’identité, le type de
24 et 4 cas. Les échographies pelviennes
douleur et les signes cliniques associés.
étaient pathologiques dans 110 cas (48%) et
L’échographie sus pubienne réalisée vessie
normales
pleine recherchait les anomalies identifiables
normaux) dans 121 cas (52%).
afin
principales
Les lésions ovariennes et utérines étaient
pathologies. Les échographies avaient été
retrouvées respectivement dans 40 cas
réalisées à l’aide d’un appareil de marque
(36,36%) et 36 cas (32,73%) (tab. I). Le
Aloka Echo CAMERA SSD-650 CL muni
kyste ovarien simple (fig. 1) 19 cas soit
des sondes de 3,5 MHz, 5 MHz et 7,5 MHz.
(17,27%)
L’absence de Doppler pour l’exploration
polykystique 8 cas soit (07,27%) avait
vasculaire des lésions a été notre handicap.
dominé la pathologie ovarienne (tab. II). Le
L’analyse statistique des résultats a été
kyste
effectuée par le logiciel Epi Info, version
l’hémorragie intra-kystique étaient les moins
5.0 ; et le test H de Kruskall-Wallis, pour un
représentés (3 cas soit 05,66% dans chaque
intervalle de confiance de 95%.
cas).
de
répertorier
les
(utérus,
et
ovarien
le
ovaires
gros
complexe
et
ovaire
(fig.
annexes
micro
2)
et
La pathologie utérine était dominée par le
RESULTATS :
gros utérus polymyomateux (fig. 3) 23 cas
231 patientes ont été concernées par notre
(21%) (tab. III). Les lésions associées ont
étude.
l’examen
représenté 26 cas (23,64%). Il s’agissait
échographique du pelvis féminin dans les
essentiellement de la collection liquidienne
douleurs était de 15,27%. L’âge des
dans le Douglas (20 cas soit 18,18%) ;
patientes variait de 10 à 65 ans avec une
l’hydrosalpinx
moyenne d’âge de 37 ans et 6 mois. Au total
l’appendicite aiguë (2 cas soit 1,82%) et la
153 patientes (67,53%) ont réalisé l’examen
grossesse extra utérine non rompue (fig. 4)
pour douleur pelvienne aiguë ; 67 (29%)
(2 cas soit 1,82%). Elles ont été retrouvées
pour douleur chronique et chez 7 patientes
chez les patientes âgées entre 20 et 40 ans
(3,46%) la douleur n’a pas été précisée.
(tab. IV).
La
fréquence
de
Comme signes associés, la fièvre et les
J Afr Imag Méd 2011; (3), 6: 300-307
(2
cas
soit
1,82%),
LK Agoda-Koussema et al
TABLEAU I : Topographie des lésions
Ovaires
Utérus
Douglas
Utérus + Ovaires
Fosse iliaque droite
Ovaires + Douglas
Total
Nombre
Pourcentage (%)
36
32,73
40
36,36
15
13,64
08
07,27
06
05,45
05
04,55
110
100
TABLEAU II : Répartition des lésions ovariennes
Kyste ovarien simple
Nombre
Pourcentage (%)
08
15,09
19
Gros ovaire micropolykystique
Gros ovaire macrokystique
07
Gros ovaire homogène
Myomes calcifiés
Polype intra cavitaire
Total
05,66
53
TABLEAU III : Répartition des lésions utérines
Hypertrophie de l’endomètre
05,66
03
Total
Myomes intra-muraux
11,32
03
Hémorragie intra-kystique
Myomes sous-muqueux
13,21
06
Kyste ovarien complexe
Myomes sous-séreux
13,21
07
Gros ovaire hétérogène
Gros utérus polymyomateux
35,85
100
Nombre
23
Pourcentage (%)
05
05
04
04
02
01
44
J Afr Imag Méd 2011; (3), 6: 300-307
52,27
11,36
11,36
09,09
09,09
04,55
02,28
100
LK Agoda-Koussema et al
Tableau IV : Répartition des cas pathologiques selon l’âge
[10 - 15[
Effectif
Cas pathologique
13
05
08
[15 - 20[
[20 - 25[
31
[25 - 30[
43
[30 - 35[
52
[35 - 40[
29
[40 - 45[
22
[45 - 50[
12
[50 - 55[
09
[55 - 60[
[60 - 65]
Total
06
06
231
%
04
50,00
15
48,39
38,46
23
53,49
29
55,77
09
31,03
10
45,45
07
58,33
03
33,33
02
33,33
03
50,00
110
47,62
Fig.2 : Kyste complexe ovarien
Fig. I : Kyste ovarien simple
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LK Agoda-Koussema et al
Fig.4 : Grossesse extra utérine non
rompue
Fig. 3 : Utérus myomateux
DISCUSSION :
Notre étude a concerné 231 échographies du
Les douleurs pelviennes, quelles soient aiguës
pelvis féminin dans les douleurs, soit un taux
ou chroniques, constituent un des plus
de 15, 27% sur les échographies pelviennes et
fréquents
4,50% sur toutes les échographies. Les
gynécologique [7]. Parfois dans un contexte
tranches d’âge de 25-30 ans (18,61%, n=43)
d’urgence, la réalisation d’une échographie
et de 30-35 ans (22,52%, n=52) ont été les
permet de redresser l’orientation clinique
plus affectées. Ce résultat est similaire à celui
initiale dans la moitié des cas et d’améliorer la
de JOHN qui a estimé que les douleurs
fiabilité du diagnostic [8].
pelviennes sont à l’origine d’une consultation
Dans notre série, 48% (n=110) des examens
externe sur dix en gynécologie. De plus, elles
étaient pathologiques contre 52% (n=121)
constituent l’indication dans 15 à 40% des
normaux. Les douleurs pelviennes sont
laparoscopies et dans 12% des hystérectomies
causées
[1]. Selon HAHN et coll., les douleurs
gynécologique et non gynécologique allant
pelviennes ont une prévalence de 15% dans
d’une simple rupture d’un kyste folliculaire à
une population féminine de 18 à 50 ans [4].
des conditions d’urgence chirurgicale telles
Ces douleurs constituent un problème grave
qu’une
de santé publique et ont des inconvénients
appendicite aigue [9].
psychosociaux et économiques [5, 6].
Les étiologies des douleurs pelviennes sont
motifs
par
de
diverses
grossesse
consultation
lésions
extra-utérine
d’origine
ou
une
divisées en pathologies gynécologiques et non
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LK Agoda-Koussema et al
gynécologiques qui elles-mêmes subdivisées
étape de l’examen échographique, suivie de
en pathologies gastro-intestinales ou urinaires
l’échographie
selon KUPESIC [10].
possible. Le principal avantage de la voie
Mis à part l’examen clinique et les tests du
abdominale est d’offrir une vue panoramique
laboratoire, l’examen échographique à lui seul
de la cavité pelvienne, permettant d’éliminer
a une sensibilité de 90% et une spécificité de
une pathologie utérine ou ovarienne à
95% à condition que la technique de la
développement abdominal [11]. La pathologie
compression soit utilisée [10]. Dans notre
utérine
série, les lésions ovariennes (36,36%, n=40)
(35,45%).
suivies de celles de l’utérus (32,73%, n=36) et
classiquement chez 20 à 30% des femmes de
le comblement du cul-de-sac de Douglas
plus de 30 ans avec une prédominance chez
(13,64%, n=15) étaient les plus représentés.
les patientes de race noire. En fait, ces
La pathologie ovarienne était dominée par les
tumeurs paraissent beaucoup plus fréquentes,
kystes ovariens simples (17,27%, n=19), de
retrouvées dans 75% des cas des pièces
gros ovaires microkystiques (07,27%, n=8) et
d’hystérectomie lorsqu’elles sont recherchées
de gros ovaires macrokystiques (06,36%,
spécifiquement
n=7). Le kyste ovarien complexe (02,73%
Sur une série prospective comprenant 120
n=3) et l’hémorragie intra-kystique (02,73%,
hystérectomies consécutives effectuées
n=3) étaient rares dans notre série. Nous
l’hôpital Tenon, quel que soit le motif de
avions aussi noté que ces lésions étaient plus
l’hystérectomie, des myomes ont été notés 77
fréquentes dans la tranche d’âge de 20 à 40
fois sur 120 (65%), isolés ou associés à
ans.
d’autres pathologies pelviennes [12].
La pathologie plurifolliculaire était
est
endovaginale
dominée
Les
par
myomes
par
si
elle
les
sont
est
myomes
notés
l’anatomopathologiste.
à
représentée par le syndrome des ovaires
La topographie des myomes est fondamentale
polymicrokystiques (07,27%), et les ovaires
en clinique car elle conditionne souvent la
polymacrokystiques
symptomatologie des patientes et le type de
(06,36%).
Leur
diagnostic s’appuie sur la clinique, la biologie
thérapeutique proposé [12].
et l’imagerie en particulier l’échographie.
L’approche abdominale demeure la première
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LK Agoda-Koussema et al
CONCLUSION :
L’échographie sus pubienne est un examen
thérapeutiques adaptées. Malgré quelques
paraclinique utile dans le diagnostic des
insuffisances, cette technique d’imagerie a
douleurs pelviennes chez la femme. Elle
encore sa place dans le diagnostic des
permet la plupart du temps de retrouver la
douleurs
pelviennes
chez
la
femme.
lésion responsable et de prendre des décisions
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